218 Les employés, les ouvriers et le garde magasin des subsistances militaires de Chantilly, département de l’Oise, offrent sur l’autel de la patrie chacun le prix d’une journée de leur travail, montant à la somme de soixante douze livres, pour venir au secours des femmes et des enfans des malheureuses victimes de l’explosion de la poudrerie de Grenelle. Ducroin, reçu le 17 fructidor (64). 40 Rapport sur la liquidation des offices de payeurs des rentes du clergé présenté par le comité des Finances (65). Le ci-devant clergé de France avoit confié à trois payeurs le soin d’acquitter les rentes sur ses subventions. Ces trois préposés étoient pourvus en titre d’office : ils ne jouissoient d’aucun traitement : toute leur rétribution consistoit dans l’intérêt de leur finance; mais ils trouvoient l’indemnité ou le salaire de leur travail dans la conservation, pendant 20 années, des débets ou parties de rentes non réclamées. Ces restes formoient un objet assez conséquent, ils étoient évalués à une somme de 150 000 livres pour chaque office. Ces fonds ne se trouvoient pas effectivement dans les caisses des payeurs. Le cas de mutation arrivant, le vendeur et l’acquéreur de l’office s’en faisoient réciproquement raison, de manière que le vendeur, au lieu de recevoir de son successeur 360 000 livres, parceque’il lui imposoit l’obligation de payer les sommes non réclamées. Le pourvu trouvoit un avantage dans cette opération, parce qu’il jouissoit des intérêts de 360 000 livres, quoiqu’il n’en eût déboursé que 210 000 livres. Il est vrai qu’il étoit exposé à payer inopinément tous les restes dans le cas qu’ils fussent réclamés. L’on assure qu’en 1788 et 1789, il a été payé près de 20 000 livres de plus qu’on n’avoit reçu pour le service. Les lois de l’Assemblée constituante qui abolirent le clergé, qui déclarèrent sa dette nationale, suppriment aussi les payeurs. Un décret du 16 novembre 1790 leur ordonna de verser au trésor public les sommes non retirées. Ils réclamèrent contre cette détermination : ils firent valoir leur position particulière, la nature de leurs offices, dont le titre les constituoit dépositaires des restes, et il intervint un nouveau décret le 2 juin 1791 qui ordonna, 1°. que la liquidation de ces offices seroit faite sur le pied de l’évaluation; 2°. que jusques-à l’arrêté définitif de leurs comptes, les payeurs pourront retenir, à titre de compensation avec tout ou partie de leur finance, le montant des parties non réclamées, ou débets dont ils sont dépositaires; et que les intérêts de leur finance demeureront, à compter du jour qu’ils auront eu cours, compensés avec les intérêts des dits débets; 3°. qu’au moyen de ces retenues et compensa-(64) C 318, pl. 1293, p. 26. (65) C318, pl. 1282, p. 37, rapport et projet de décret imprimés, 6 pages. fions, le trésor public sera chargé du paiement de ces anciens débets aux parties qui en seront créancières à mesure qu’elles se présenteront. Les payeurs espéroient que ce décret servirait de règle à leur liquidation; ils ont été trompés dans leur attente. Un décret du 27 germinal a liquidé leur finance à 360 000 livres; ce décret est pur et simple : s’il portoit son entière exécution, les payeurs auront bien, chacun de ceux qui se sont pourvus en liquidation, une inscription sur le grand livre de 360 000 livres; mais ils seront tenus de porter au trésor public le montant des débets ou parties non réclamées, avec les intérêts depuis le premier janvier 1791. Les payeurs du ci-devant clergé demandent à la Convention nationale la réformation de cette liquidation; ils articulent quatre griefs contre le décret du 27 germinal. Ils se plaignent 1°. de ce qu’il n’a pas maintenu la compensation sur laquelle ils comptaient d’après la loi du 24 juin 1791. 2°. de ce qu’il ne prononce pas non plus sur la compensation des intérêts; 3°. de ce qu’on fait cesser les intérêts à compter du jour du décret du 27 germinal, tandis qu’ils courraient encore, si le directeur de la liquidation qui connoissait leur réclamation au comité des Finances, avoit suspendu son rapport à celui de liquidation; 4°. enfin, les payeurs observent que le décret de leur liquidation doit être réformé, attendu que leur remboursement doit être diminué de la reconnoissance de liquidation provisoire qu’ils ont obtenue, et remise en paiement des biens nationaux. Le comité des Finances a pensé que la compensation réclamée sur le capital ne pouvoit avoir lieu; qu’elle devoit être effectuée sur les intérêts seulement, que la réclamation des intérêts qui auront couru depuis le 17 germinal n’étoit pas fondée, et que l’omission de l’énonciation de la liquidation provisoire n’étoit pas un vice dans le décret, attendu que le directeur général de la liquidation la fera entrer en compte lorsqu’il délivrera le certificat de propriété, et que telle est la marche suivie en pareil cas. La question principale porte sur la compensation des débets ou parties non réclamées, avec tout ou partie de sa finance. Pour la faire admettre, les payeurs du clergé argumentent du décret du 16 novembre 1790, qui les obligeoit à porter leurs débets au trésor public, et la disposition contraire de celui du 24 juin 1791 qui les admet à la compensation : ils disent que la chose est jugée, de l’exécution qu’a eu ce décret du 24 juin, et par le paiement qui a été fait à la trésorerie nationale, des sommes dues aux parties prenantes et par la manière dont le bureau de comptabilité l’a pris en considération dans l’examen des comptes, enfin par l’exécution qu’il a eue même vis-à-vis d’eux-mêmes lorsqu’ils n’ont reçu que les intérêts de l’excédent de leur finance sur le montant des débets. On oppose à ces moyens, d’abord que l’opération du grand livre a changé absolument l’état des choses. La nation a remboursé tout le montant des parties non réclamées. Si les payeurs du clergé avoient été maintenus provisoirement pendant trois ans, comme les payeurs SÉANCE DU 17 FRUCTIDOR AN II (3 SEPTEMBRE 1794) - N“ 37-39 219 de la ville, ils auroient eu à faire la dépense de tous les restes, ils n’auroient pu réclamer aucune indemnité. On dit ensuite que le décret du 24 juin 1791 ne promet la compensation que jusqu’à l’arrêté définitif des comptes, et que s’il l’établissoit d’ailleurs de la manière la plus expresse, elle ne pourroit pas être invoquée aujourd’hui, tout n’étant pas consommé, attendu qu’alors elle étoit implicitement promise à tous les comptables, puisque leur remboursement en assignats étoit assuré; ce mode de remboursement ayant été changé vis-à-vis des autres débiteurs envers la République, ce seroit établir un privilège d’admettre la compensation demandée. Les choses sont entières; à l’égard du capital, elles sont consommées; à l’égard des intérêts, la compensation doit être admise à cet égard; elle se fera par le directeur de la liquidation; le décret du 27 germinal ne décide pas le contraire, c’est l’affaire de calcul; le décret n’est pas dans le cas d’être réformé; dès lors il doit sortir à l’effet, et être exécuté à compter du jour de sa date. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Finances, décrète • ARTICLE PREMIER. Les ci-devant payeurs des rentes dites de l’ancien clergé, seront tenus, nonobstant l’article III du décret du 24 juin 1791, de payer, soit en assignats, soit avec leurs inscriptions sur le grand livre, aux conditions réglées pour les autres comptables, le montant des débets ou parties non réclamées dont ils sont dépositaires. II. La compensation ne sera établie que sur les intérêts des débets et de la finance, jusqu’à due concurrence, sur les certificats du bureau de la comptabilité. III. Le décret du 17 germinal sur la liquidation de leurs offices sera exécuté, à compter du jour de sa date, d’après les dispositions ci-dessus, et calcul fait des reconnaissances provisoires de liquidation délivrées aux parties intéressées (66). 41 RAMEL : Citoyens représentants, les comités des Finances, de Salut public et de Sûreté générale, viennent vous proposer le mode de liquidation de ce qui est dû à la République par la ci-devant Compagnie des Indes. On sait que cette association fut substituée à l’ancienne par un arrêt du conseil du 14 avril 1785. Ses fonds furent faits par des actionnaires; le gouvernement lui accorda gratuitement, pour tout le temps de la durée de son privilège, la jouissance, dans le port de Lorient et dans les divers établissements au delà du cap de Bonne-Espérance, des bâtiments, ateliers, ma-(66) P.-V., XLV, 26-27. Décret n° 10 696. Rapporteur : Ramel. J. Perlet, n° 712; J. Fr., n° 709; J. S.-Culottes, n° 567; M. U., XLIII, 290; J. Mont., n° 127. gasins, loges et comptoirs préalablement réparés aux frais de l’Etat, et entretenus par lui de toutes les grosses réparations, pour être rendus, après la durée du privilège, dans l’état constaté au moment de la remise. La nouvelle Compagnie des Indes suivit le cours de ses opérations, conformément aux lois relatives à son établissement, jusqu’au 5 avril 1790. Un décret de l’Assemblée constituante ayant rendu, à cette époque, le commerce au-delà du cap de Bonne-Espérance libre à tous les Français, les actionnaires réunis se donnèrent des statuts et des règlements particuliers. Ils délibérèrent la continuation pour neuf années de leur commerce en commandite; ils en confièrent l’administration à sept directeurs et à neuf syndics. En se perpétuant ainsi par le fait, quoique supprimée par le droit, la Compagnie des Indes conserva la jouissance de tout ce qui lui avait été concédé par le gouvernement. Les fonds dont cette association continuait à disposer provenaient de ses quarante mille actions de 1 000 L chacune. Ces actions étaient encore en circulation, et servaient d’aliment à l’agiotage, lorsque l’Assemblée législative, par sa loi du 27 août 1792, assujettit tous les effets au porteur au visa, au timbre, à un droit d’enregistrement de 15 sous pour 100 L sur chaque mutation, et au prélèvement du quart des bénéfices, à titre de contribution. Alarmée de ces dispositions, la nouvelle Compagnie des Indes retira ses actions, et inscrivit les particuliers qui en étaient les porteurs sur un registre qui fut appelé le livre des transports. Cette opération fut dénoncée, avec l’existence de la Compagnie, le 17 vendémiaire. La Convention nationale rendit alors le décret qui a été rétabli dans le procès-verbal de la séance du 29 germinal. Cette loi supprime véritablement la Compagnie des Indes; elle lui défend d’expédier aucun vaisseau; ellç décide que l’établissement du livre des transferts n’est qu’un déguisement des anciennes actions, et elle ordonne aux percepteurs du droit d’enregistrement de poursuivre le payement du triple droit sur toutes les mutations effectuées. La Convention nationale décréta en même temps que les marchandises et les vaisseaux de la Compagnie, qui pourraient être utiles à la République, seraient pris pour son compte, et que les établissements concédés gratuitement seraient remis au ministre de la Marine. Enfin, il fut ordonné que les scellés ne seraient levés que lorsque le mode de liquidation aurait été décrété. C’est ce mode que vos comités réunis viennent proposer. La loi du 26 germinal ne parle que du triple droit auquel le non-enregistrement des mutations a donné lieu, et de la remise des établissements de la Compagnie; il est dû de plus à la République le droit du timbre, auquel on s’est soustrait par le livre des transferts, le cinquième des bénéfices qui aurait dû être versé à titre de contribution, le loyer des établissements occupés par la nouvelle association depuis la suppression du privilège. Le trésor public doit répéter de plus tout ce qui est échu par le droit