509 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |18 août 1791.] [Assemblée nationale.] de se livrer et de placer une portion de ses fonds conformément à ses intérêts et aux principes de la liberté, base heureuse de notre Constitution. C’est en conformité de ces principes que j’ai l’honneur de vous proposer le projet de décret suivant, au nom de votre comité de commerce et d’agriculture : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait, au nom de son comité d’agriculture et de commerce, de la demande des sieurs Grignet, Gerdret et Jars, de rétablir à leurs frais : ,1° la navigation sur la rivière de Juine, dite d’Étampes, depuis cette ville jusqu'à son embouchure dans la rivière d’Essonnes. « 2° La navigation, sur la rivière d’Essonnes, depuis la jonction dans la Seine à Corbeil, jusqu’à sa sourceau-des us de Pithiviers, en passant par Essounes, la Ferté-Aleps et Malesherbes, et un flottage sur le ruisseau le Remard, dans la partie de son cours, à travers la forêt d’Orléans, pour en faciliter l’exploitation du bois. « 3° D’établir une nouvelle navigation depuis Pithiviers, en traversant partie de la forêt d’Orléans jusqu’à la Loire. « Ouï le rapport du vœu des directoires des départements de Paris, de Seine-rt-Oise, du Loiret, des directoires de district d’Etampes, de Corbeil, de Pithiviers, des municipalités de Paris, Gorbeil, Pithiviers, Malesherbes, Baulne, Boigne-ville, Gironville, Bonnevault, Messe, Vaire, Buu-tigni, Guinneville, la Ferté-Alais et Essonnes. « Ouï le rapport du sieur Dransy, ingénieur nommé par arrêté du conseil du 15 avril 1789, pour examiner la possibilité et le détail de construction : « Ouï le rapport de l’administration centrale des ponts et chaussées : « Décrèie ce qui suit : « Art. 1er. Les sieurs Grignet, Gerdret, Jars et Cie, sont autorisés d’ouvrir, construire et rétablir à leurs Irais, conformément aux plans et devis fournis par le sieur Dransy , ingénieur, qui resteront annexés au présent décret, et sous la conduite de cet ingénieur : « 1° La navigation sur la rivière de Juine, dite d’Etami es, depuis cette ville jusqu’à son embouchure dans la rivière d’Essonnes. « 2° La navigation sur la rivière d’Essonnes, depuis sa jonction dans la Seine, à Corbeil, jusqu’à sa source au-dessus de Pithiviers, en passait par Essonnes, la Ferté-Alais et Malesherbes, et un floitage sur le ruisseau le Remard, dans la partie de son cours, à travers la forêt d’Orléans, puur en faciliter l’exploitation du bois. « 3° D’établir une nouvelle navigation depuis Pithiviers, en traversant la partie de la forêt d’Orléans ju qu’à la Loiie. « Ari.2. Les rivières auront au moins 36 pieds de large à leur superticie et 5 pieds de hauteur d’eau ; il leur sera donné une plus grande hauteur et largeur dans ies lieux où elle sera jugée utile; elles seront redressées partout où il sera établi des anses de retraite dans les lieux convenables pour la plus grande facilité de la navigation . « Toutes les branches qui subdivisent ces rivières, et sur lesquelles il n’y a pas d’usines ou moulins, seront remues au corps de rivière principal, et leur embouchure sera fermée solidement avec des palplauches et currois devant et derrière. Art. 3. Les sieurs Grignet, Gerdret, Jars et Cie établiront des ponts en pierre partout où cette navigation traversera les grandes routes, en se concertant à cet effet avec l’ingénieur du district ou du departement-, des chemins de halage de 18 pieds ne large, un cont e-fossé pour le dessèchement des terra ns, qui aura 6 pieds de large, et dont la profondeur sera toujours de niveau au-dessous de l’usine inférieure ; le franc-bord opposé aura 12 pieds de large, et on y établira un contre-fossé servant au dessèchement de cette partie. On ajoutera aux chemins de halage, francs-bords et contre-fossés, les talus nécessaires pour le soutien et la solidité des terres. « Il sera établi à chaque retenue d’eau une écluse le plus près possible de l’usine ; et à chaque endroit où il se trouvera un chemin charretier, il sera établi sur l’écluse un pont mouvant en bois. « Art. 4. Ils acquerront les propriétés nécessaires à cette entreprise, savoir les terrains nécessaires à rélargissement de la rivière, ceux pour le chemin de hallage, les talus, les francs-bords, les contre-fossés, suivant les dimensions données à l’article ci-dessus, les terrains nécessaires aux anses de retraite dans les campagnes, de 600 toises en 600 toises; ceux nécessaires aux remblais des terres où besoin sera; enfin, ils seront aussi autorisés à faire acquisition dans les villes des terrains qu’ils jugeront nécessaires à l’établissement d’un port où passera le canal; l’estimation en sera faite par des experts nommés de gré à gré, ou par lu directoire des districts; et s’il arrivait quelques difficultés à cette occasion, elles seront terminées par les directoires des départements. Le propriétaire d’uu héritage divisé par le canal, pourra, lors du contrat de vente, obliger ies sieurs Grignet, Gerdret et Jars d’acquérir les parties restantes ou portion d’icelles, pourvu toutefois qu’elles n’excèdent pas celles acquises pour ledit canal et ses dépendances. Si la partie r stante d’un héritage se trouvait cependant réduite à un demi-arpent, ou au-dessous, les entrepreneurs seront obligés à les acquérir, s’ils eu sont requis par les propriétaires. « Art. 5. Ils ne pourront se mettre en possession d’aucunes propriétés qu’après le payement réel et effectif de ce qu’ils devront acquitter; si on refuse de recevoir le payement, ou en cas de difficultés, la consignation de la somme à payer sera faite dans le dépôt public que le directoire du département ordonnera, et sera considérée comme pavement, api ès qu’elle aura été notifiée; alors toutes les oppositions et autres empêchements à la prise de possession seront de nul effet. « Art. 6. Après la quinzaine du payement ou de la consigeation dûment notifiée, les entrepreneurs seront autorisés à se mettre en possession des bois, pâtis, prairies, terres à champs, emblavées ou non, qui se trouvent dans l’emplacement dudit canal et de ses dépendances. « Art. 7. Les hypothèques dont les biens qu’ils acquerront pour la construction du canal et de ses dépendances, pourraient être chargés, seront purgées en la forme ordinaire ; mais il ne leur sera expédié chaque mois qu’une seule lettre de ratification par le tribunal, pour tous les biens dont les hypothèques auront été purgées pendant ce mois. « Art. 8. Il seront autorisés à détourner les eaux pour l’approfondissement de la rivière; mai-s, s’il y a quelques mouli us qui soient en chômage par cette raison, le meunier sera indemnisé par chaque journée de 24 heures de moitié en sus du prix de son bail, compensé par chaque journée, demi-journée, quart de journée et heure, s’il l’exige. 810 (Assemblée balio&ale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES • (18 août 179i. « Art. 9. Ce canal sera traité à l’égard des impositions comme le seront les autres établissements de ce genre. « Art. 10. Pour indemniser les entrepreneurs des frais du fossé de dessèchement, indépendant de la navigation, et dont le seul but est le dessèchement des prairies et la salubrité de l'air des pays voisins, ils seront autorisés à construire, sur les côtés du canal et à la chute des écluses, des usines, moulins et autres établissements, sans que cela puisse, sous aucun prétexte, nuire ou préjudicier à la navigation, à l’agriculture et aux autres établissements déjà construits. « Il sera établi, à chaque prise d’eau dans le canal, des repaires indicatifs de l’eau nécessaire à la navigation, et les entrepreneurs ne pourront disposer que de celles surabondantes. « Art. 11. Les propriétés d’usines et de moulins déjà existants seront inviolablement respectées; on ne pourra toucher à aucune, à raison des opérations nécessaires à la navigation, avant d’avoir constaté, par-devant la municipalité du lieu, la hauteur de l’eau à la vanne-ouvrière; et celle du coursier, la hauteur de l'eau dans le coursier; et il en sera dressé un procès-verbal pour constater que les propriétés des anciennes usines n’auront point été diminuées ; on y fera mention de l’avantage qu’elles auront pu recevoir, afin qu’il ne soit plus rien changé par la suite pour relèvement des eaux. « Art. 12. Daus les longs intervalles d’une usine à l'autre, lorsqu’il se rencontrera une pente trop considérable pour que le sol de l’usine inférieure puisse la supporter, on sera obligé de construire une écluse, sans rien changer aux chutes tant de l’iisine supérieure que de l’inférieure, il sera permis aux entrepreneurs d’y construire de nouvelles usines, qui leur appartiendront en toute propriété; cependant, avant la construction, soit des écluses, soit des usines, il sera dressé un procès-verbal de la situation des lieux, pour qu’ils soient conservés dans toute leur intégrité. « Art. 13. Les entrepreneurs de la navigation auront le droit d’établir sur ce canal, des coches, diligences, galiotes et batelets, pour le transport des voyageurs, dans la quantité qui sera jugée convenable pour l’utilité du service public : et tous mariniers et conducteurs pourront, concurremment avec les entrepreneurs, charger et conduire les personnes et toute espèce de marchandises, moyennant les droits du canal qui seront fixés par le tarif. « Art. 14. Les entrepreneurs seront tenus de faire poser à leurs frais le long du canal, à partir de la jonction à la Loire à Orléans, jusqu à la Seine, des bornes indicatrices de la quantité de lieues, divisées en demi-lieue, en quart du lieue, et numérotées. « Art. 15. Les entrepreneurs auront la faculté de prendre le mois le plus convenable dans l’année, pour le curage du canal, seulement depuis Orléans jusqu’à Ecrennes, le surplus de cette navigation n’en étant pas susceptible. « Ils auront en outre la liberté de détourner toutes les eaux qui seraient nuisibles au canal, et d’y amener toutes celles qui pourraient lui être nécessaires, surtout dans la partie de la forêt d’Oriéans. « Art. 16. En considération de l’entreprise, de son importance et des grandes dépemes qu’elle occasionne, les entrepreneurs jouiront, pendai t 50 ans (dans lesquels le terme fixé pour l’achèvement du canal n’est point compris), du droit de péage qui sera décrété, et après ce temps, ce canal et ses dépendances appartiendront à la nation; mais les sieurs Grignet, Gerdret et Jars conserveront la propriété absolue : « 1° Des magasins qu’ils auront construits, maisons, auberges, moulins et généralement de tous les établissements qu’ils auront faits, tant sur le bord du canal et des rivières, que sur les terrains qu’ils auront acquis. « 2° Des francs-bords et contre-fossés dudit canal et des rivières, à la charge de souffrir, sans indemnité, le dépôt des vases provenant du eure-ment du canal et des rivières, ainsi que des matériaux nécessaires aux réparations, sans qu’ils puissent s’opposer à ce qu’il soit fait des quais pour l’utilité des communautés riveraines. « Il sera fait défense à toutes personnes de les troubler, tantians la confection des ouvrages nécessaires à ladite entreprise, que dans la perception des droits qui leur seront accordés, d’y app >rter empêch ment ni retard, sous peine d’être poursuivies suivant la rigueur des lois, et de tous dépens, dommages et intérêts. « Il sera, en outre, ordonné que nonobstant tous procès et différends qui pourraient être intentés aux entrepreneurs, pour raison de ladite entreprise, empêchement ou opposition quelconque (en attendant le prononcé), ils seront autorisés à poursuivre leur travail jusqu’à perfection de la navigation qui ne pourra être différée, le moindre retard pouvant entraîner des inconvénients d’une très grande importance. « Art. 17. Les entrepreneurs mettront, daus 3 mois à compter du jour de la sanction du présent décret, les travaux en activité, et ils ne pourront néanmoins les commencer sans avoir justifié, par des soumissions souscrites par des capitalistes reconnus solvables auprès des départements de Seine-ec-Oise et du Loiret, la sûreté de la totalité des fonds; à défaut, ils seront déchus à cette époque du bénéfice du présent décret. « Art. 18. Les sieurs Grignet, Gerdret et Jars seront tenus de recevoir les fonds qui leur seront remis par le sieur Dubois, avocat au parlement de Paris, et le sieur Romaioviile, jusqu’à la concurrence de 300,000 livres chacun, dans laquelle somme lesdits sieurs Dubois et Romainville pourront donner pour comptant le montant des dépenses qu’eux ou les personnes qu’ils représentent ont faites relativement à leur projet de navigation des rivières d’Essonnes et d’Etampes, lesquelles dépenses seront instituées par quittances et états en bonne forme. A défaut par lesdits sieurs Dubois et Romainville de remettre ces fonds dans 3 mois à compter de la sanction du présent décret, ils seront également déchus de tous droits et prétentions. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. Goupilleau. Je prie M. lé rapporteur de vouloir bien donner, lecture de l’avis des ponts et chaussées. M. Millet de Murean, rapporteur. J’ai l’honneur de vous observer dans mon rapport que la navigation dont il est question consiste en deux parties très distinctes. Le rapport des ponts et chaussées, en demandant des renseignements, ne peut avoir lieu que sur la petite partie de ce canal, qui doit joindre ces rivières à la Seine, à Gorbeil. Voici cet avis :