[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. | fn�ëmbre 1793 *23 ment déterminés cependant de tenir la mer et de ne rentrer qu’à la réception de l’ordre qu’en apportera indubitablement notre député, si tou¬ tefois le mauvais temps ou d’autres circonstances que nous ne pouvons prévoir ne viennent nous y contraindre avant cette époque. « Nous protestons que le seul intérêt public nous a portés à faire cette démarche; que ce n’est ni la crainte de l’ennemi, avec lequel nous avons toujours manifesté le plus grand désir de nous mesurer, ni l’envie, comme quelques malveil¬ lants pourraient l’interpréter, de revoir une terre que nous n’avons pas pour ainsi dire perdu de vue. « L’amour de la patrie, le bien général, sont les seuls motifs qui nous ont guidés. « Nos cœurs, véritablement républicains, ne connaissent d’autre gloire que celle de mourir pour la défense de la République une et indivi¬ sible. « Fait et arrêté en conseil, le 15 septembre 1793, l’an II de la République. « Signé : Camus, député du Trajan; Roussel, député du vaisseau l’ Audacieux; Vollet, sergent ; Dubalen, député du vaisseau l’A¬ quilon; Verneuil, député du vaisseau le Juste; Favreaux, député de l’Auguste; Martin, député du vaisseau la Convention; Jean Quilbœuf, député du vaisseau le Su¬ perbe; Jean Blondelle, député du Ter¬ rible; Prévost, grenadier, député du vais¬ seau le Northumberland; Antoine Cha-BRiaque-Con OR, député de la Côte-d’Or; Étienne Coupel-Dufresne, député du Nep¬ tune; Grilles-Nicolas Durand; député du Téméraire; Jourdan, député du Tigre, Julien Hervierre, député de l’Engageante; Sauvie, député du Jean-Bart ; Antoine Cha-briaque, député du Suffren ; Pierre Ber¬ nard, député du vaisseau la Révolution; Mouzières, député de la frégate la Galathée ; Bernardet; Enas; J. Dufourcq, députés du vaisseau la Bretagne, et Pierre-Thomas Pouchin. « Les généraux, capitaines et officiers présents à la lecture de l’adresse des députés des équi¬ pages s’empressent de prononcer avec eux le serment de soutenir de tout leur pouvoir l’unité et l’indivisibilité de la République, et de mourir à leur poste pour sa gloire et sa prospérité. « Signé : le contre-amiral Lelarge. « Je soussigné ce paragraphe, « Pierre Landais, contre-amiral. Je soussigné ce paragraphe, « Morard de Galles; Joyeuse; Terras - son; Allemand; Charles Flotte; Tiphai-gne; Coetnempren-les-Dourmant; Bou¬ vet; Henry; Obet; Le vigne; J. -F. Dorré; Thévenard fils; d’AuGiERRE; Ri-chery; Duplessis-Grenedan; Tranquel-leon; Y. Bertrand Keroguan; Thomas Venstabel; Kimel, aide-major de la ma¬ rine ; Lebourg fils; Lapallysse; F. Ba¬ zin; Bescond, lieutenant; Kan on ; Bois-Sauveur; Langlois; Mongrai; Ménagé; Henri; Tiphaine; Labretêche; Y. Co-quil; Bon Lamest; Yames; Alero; Js. Fleury; Lecaen; Letorsec; Debec; Vi¬ gnot ; Henri Morel; Allusse; Ferantin ; Gisquet; Serbatut; Juineur; Gaudin; Prisset; Gillet; Nosten; D. Corroder; L. Pigeon; Rassé, chef d'administration de l'armée ; Bonnefous. # Belation de la conduite tenue par les chefs du vaisseau la Côte-d’Or, ainsi que celle de l'é¬ quipage, depuis son départ de Brest jusqu'à ce jour. Nous partîmes de Brest le 4 du mois de sep¬ tembre, et nous mouillâmes dans la baie de Qui-beron, lieu dans lequel était l’escadre le 7 du¬ dit mois. Jusque-là nous ne désirions rien autre chose que de nous mesurer avec l’ennemi; mais quelle fut notre surprise quand nous reçûmes la nouvelle de la trahison de Toulon ! Tout l’é¬ quipage alors fut on ne peut plus affecté, et la consternation fut à son comble. Des mou¬ vements convulsifs et d’indignation se faisaient sentir de toutes parts; il n’en était pas de même du lieutenant et du commis aux revues, qui té¬ moignèrent une joie des plus parfaites à l’ar¬ rivée de cette nouvelle. Cependant, après avoir réfléchi, nous nous dîmes tous les uns aux au-- très que cette nouvelle pouvait être fausse; mais elle ne s’est que trop malheureusement confir¬ mée; et d’après la confirmation, les craintes, les méfiances et les soupçons se sont manifestés de toutes parts. Les matelots, le surlendemain, se sont assemblés sur le pont à dix heures du matin. Après avoir vu 7 à 8 vaisseaux de l’escadre hisser leurs huniers, ils se sont mis à hisser les nôtres. On en a instruit de suite le général, qui voyant leur démarche, sans employer les voies de douceur ou de conciliation, se mit à crier de suite : « Le détachement, aux armes ! » Par cet acte véhément, il pouvait occasionner les plus grands maux, et risquait un massacre parmi l’équipage, pour satisfaire sa brutale colère. La troupe, qui était endormie, à ce cri se réveille tout en sursaut, et accourt à la voix de son chef. Le détachement étant sous les armes, on tire 50 hommes, et on leur fait charger; alors on fit déposer les armes dans la chambre du conseil, et on y mit un factionnaire : dans cet inter¬ valle, 3 matelots furent mis aux fers, pour avoir levé la voix plus haut que les autres. L’équipage a rentré de suite dans l’ordre. La conduite au détachement fut blâmée de toute l’escadre. On nous avait substitué au nom de la Gôte-d'Qr celui de la Ferme (vaisseau qui s’est émigré). Un se¬ cond maître canonnier de notre bord fut voir un de nos camarades à bord de l'Auguste. Quand on sut que c’était un canot de la Vôte-d'Or, on ne voulut point le laisser accoster, et on le me¬ naça même de le f... par le sabord s’il y mon¬ tait. Instruit de la chose, le lendemain nous ÿ allâmes en députation, pour dépersuader nos camarades des mauvais soupçons qu’ils avaient sur notre compte. Cela fait, nous revînmes à bord. Le même jour on fit assembler tout l’é¬ quipage sur le gaillard d’arrière, et on leur dit qu’ils aient à nommer entre eux un député pour se rendre au conseil qui se tiendra à bord du commandant général de l’escadre. Ce même con¬ seil s’est tenu trois jours avant de délibérer (et dans cet intervalle, aucune embarcation ne pou¬ vait accoster le bord, excepté celles dans les¬ quelles il y avait des officiers). Le troisième jour, il a été délibéré qu’il partirait 3 députés, dont l’un irait à Paris, et les deux autres à Lorient 424 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j �novembre 1?93 1 pour y trouver les commissaires de la Conven¬ tion, et s’ils ne s’y trouvaient pas, d’aller à Brest, lieu dans lesquels ils se seraient vraisem¬ blablement tr<*uvés. Le citoyen Conor, député de la Côte-d'Or, fut un de ceux nommés pour Lorient ou Brest. Ce même député partit sans nous communiquer ses pouvoirs, et nous avons resté sept jours sans recevoir de ses nouvelles. Dans cet Intervalle, un sergent, nommé Anedy, reçut une lettre de Brest, dans laquelle on lui témoignait beaucoup d’inquiétudes sur notre es¬ cadre, et que nous avions des principaux chefs de notre corps destitués de leurs fonctions res¬ pectives, et mandés à la barre de la Convention. Jugez, d’après cela, quelle fut notre façon de penser ! La méfiance envers nos chefs, et les jus¬ tes soupçons que nous devions avoir, s’accrois¬ sent à chaque instant du jour, ayant toujours devant les yeux la trahison des généraux com¬ mandant l’escadre de Toulon, et celle des traî¬ tres toulonnais, que tous républicains fidèles à leur serment doivent avoir en horreur. Nous avons alors manifesté notre opinion pour rentrer à Brest avant même la rentrée de nos députés, voyant tous les dangers de tenir la mer avec une escadre dont les principaux chefs étaient de cette caste qui avait, par ses atroces perfidies, exposé la patrie aux plus éminents dangers : peut-être nous fait-on un crime de nous être communiqué nos opinions, et de nous être assemblés paisiblement; mais n’est-il pas per¬ mis à tout citoyen de s’assembler, ainsi qu’il appert ci-après des droits imprescriptibles de l’homme, de l’Acte constitutionnel? Art. 6. Le droit de manifester sa pensée et ses opinions, soit par la voie de la presse, soit dé bouté autre manière, le droit de s’assembler paisiblement, le libre exercice des cultes, ne peu¬ vent être interdits. La nécessité d’énoncer ses droits suppose ou - la présence ou le souvenir récent du despotisme. Départ de la rade de Quiberon. Nous mîmes à la voile de Quiberon le 20 sep¬ tembre : le même jour, dans l’après-dîner, vers les quatre heures, une frégate ayant pour si¬ gnal le pavillon carré à son mât de misaine, et un autre à la corne d’artimon, est entrée dans l’escadre et a gouverné sur le commandant. Quand elle fut à peu près à portée de s’y faire entendre, elle amena son pavillon du mât de mi¬ saine et le hissa à son grand mât. Nous apprîmes par les signaux que c’étaient les députés de la Convention : nous fûmes tous contents de voir parmi nous des représentants du peuple. Nous nous attendions à recevoir de bonnes nouvelles, ou des ordres émanés de la Convention. Le len¬ demain, 21 dudit mois, nous mouillâmes à Belle-Isle, et toute la journée se passa sans nous com¬ muniquer la moindre chose : de nouvelles crain¬ tes se sont manifestées; elles étaient l’effet na¬ turel des violentes inquiétudes que nos chefs nous avaient inspirées, et nous appréhendions que cette annonce d’un commissaire de la Con¬ vention ne fût une feinte qu’ils essayaient pour pouvoir nous trahir avec plus de succès. Alors, par un mouvement spontané, nous nous sommes trouvés tous rassemblés sur le gaillard d’arrière, et là nous nous communiquâmes nos opinions, et elles se trouvèrent toutes les mêmes pour notre rentrée à Brest. D’ailleurs, si ce mouve¬ ment était illégal, ne se trouverait-il pas jus¬ tifié par notre alarmante position? Nous avions tout à craindre : notre union devait nous sau¬ ver; notre courage et notre patriotisme, forte¬ ment prononcés, pouvaient seuls intimider ceux qui projetaient des trahisons; et, je le demande à tout républicain, si l’armée de Toulon, par un mouvement semblable, eût combattu et dé¬ joué les projets de ses chefs, si alors on ne l’eût pas déclarée sauveur de la patrie? Qu’on éloigne donc de nos armées les nobles qui conspirent avec persévérance, qui ne se sont fait connaître que pour notre malheur commun ; qu’on les proscrive de la terre de la liberté ; qu’ils portent dans d’autres contrées leurs sys¬ tèmes perfides, leurs prétentions orgueilleuses ; alors l’armée combattra avec sécurité, l’ordre se maintiendra sans effort, et la patrie sera sau¬ vée. Signé : J. -B. -J. Beaussard, caporal à bord du vaisseau la Côte-d’Or. Déclaration du citoyen Lebesgue. Liberté, égalité. Je certifie qu’ayant été requis par les repré¬ sentants du peuple de me transporter à Brest près d’eux, et après avoir pris connaissance du procès-verbal de la troisième section de la ville de Brest, qui porte que le citoyen Lebesgue, ca¬ pitaine du commerce de la rivière de Nantes, avait dit au citoyen Letartoué, enseigne non entretenu, qu’il était surpris de voir le citoyen Duplessis-Grénédan employé sur les vaisseaux delà République ; que lui, ayant été fait prison¬ nier par les rebelles lors de la révolte qui éclata à la Roche-Bernard, avait reconnu ledit Duples¬ sis-Grénédan, qui lui avait paru faire les fonc¬ tions de commandant en second, et qu’il avait pour chef le nommé Desy, lieutenant de vaisseau, provenant du Duguay-Trouin; qu’il croyait même que le passeport qui lui avait été délivré par les chefs des rebelles, avait été signé par ledit Duplessis, mais il s’aperçut qu’il l’avait laissé à Nantes. Interrogé moi-même devant les représentants du peuple, je déclare qu’ayant été poursuivi par les rebelles le 20 ou 21 mars, j’a¬ vais eu le bonheur de m’échapper; mais que plusieurs personnes, et notamment le nommé Quiberon, matelot de la paroisse d’Ambon, dis¬ trict de Vannes, maintenant embarqué sur le corsaire le Beysser, m’avaient assuré que le sieur D uplessis - Gr éné dan était parmi les rebelles. Et je déclare de plus que je n’ai jamais eu de passe¬ port des chefs de cette armée. A Brest, le 21e jour du 1er mois de l’an II de la République française une et indivisible. Signé : Lebesgue, Déclaration du citoyen Herbert. Liberté, égalité. Ayant été appelé par les représentants du peuple près les côtes de Brest et Lorient, et après avoir pris connaissance du procès-verbal de la troisième section de cette ville, je déclare que Laroche-Sauveur étant tombée au pouvoir des rebelles le 15 mars, je fus obligé de prendre la fuite; je rentrai dans notre ville le 18 du même mois; j’y ai vu, le 19, pendant tout le jour, le nommé Duplessis -Grénédan; que le 20