SÉANCE DU 10 FLORÉAL AN II (29 AVRIL 1794) - N° 5 475 friche depuis plus de 15 ans, ont été rendus à la culture; elle exprime sa douleur de ce que le receveur des domaines nationaux de Saint-Cloud prétend que, pour cette année, les cultivateurs qui ont défriché ces terres doivent être soumis à une redevance, et elle demande qu’il soit décrété que les cultivateurs qui auront défriché de pareils terrains jouiront, sans rien payer à la République, de la première récolte qui suivra le défrichement, si ce défrichement a été fait dans l’année. Cette commune annonce, par une autre adresse, qu’elle vient de déposer sur l’autel de la patrie quelques restes de colifichets sacrés, dignes monuments du fanatisme (1). FILLASSEER, orateur de la députation : Citoyens représentants, par votre décret du 8 frimaire dernier vous avez restitué à la commune de Clamart-le-Vignoble, la portion de son ancien territoire situé dans le ci-devant parc de Meudon, et aussitôt près de deux cents arpents, qui étaient restés en friche depuis plus de quinze ans, ont été rendus à la culture. Tous les pauvres sans-culottes de notre commune ont mis la main à l’œuvre, en bénissant la Convention nationale, et plus de soixante pères de famille, presque tous sans propriétés foncières, se flattaient de trouver dans une première récolte une partie de leurs avances et le fruit de leurs travaux. Aujourd’hui ils se verront ruinés si votre humanité ne se hâte de venir à leur secours en arrêtant les demandes qui leur sont faites par les receveurs des domaines nationaux. Celui de Saint-Cloud prétend que pour cette année on doit soumettre les cultivateurs qui ont défriché ces terres à une redevance, et sans s’inquiéter si ces cultivateurs ont plus consulté leur zèle que leurs moyens, sans prévoir si la récolte répondra à des apparences souvent trompeuses, il exige que la municipalité procède à une répartition de redevances, dans le cas où elle aurait négligé ce préalable qui aurait arrêté tous les bras. En effet, citoyens, comment de pauvres créanciers de la terre oseront lui confier leurs sueurs pour la rappeler à la fécondité après de longues années d’inculture, s’ils ne trouvent point dans la franchise de la première récolte les premiers arrérages de leurs fonds ? Les agriculteurs savent que de tout temps ceux qui ont défriché ont joui au moins de la première année, et presque généralement des deux suivantes, sans rien payer. Si le receveur de Saint-Cloud a droit de nous excepter de cette règle de justice, la plupart de nous se verront forcés de lui abandonner les moissons futures ou s’exposer aux suites fâcheuses de l’insolvabilité. Citoyens représentants, vous avez appelé les pauvres au bénéfice de la propriété; complétez votre bienfait. Ordonnez enfin l’exécution de votre décret du 15 brumaire dernier, par lequel vous chargiez votre comité d’aliénation de vous présenter le lendemain son rapport sur le mode de louer ou d’amodier les terres vagues et en friche qui se (1) P.V., XXXVI, 214 et 233. Bin, 14 flor. (2e suppl‘) ; J. Fr., n° 583; J. Sablier, n° 1288. rencontrent dans les ci-devant parcs de la liste civile aux pauvres cultivateurs des communes où ces terrains sont situés. Décrétez en même temps que les cultivateurs qui auront défriché de pareils terrains jouiront, sans rien payer à la République, de la première récolte qui suivra le défrichement, si ce défrichement a été fait dans l’année (1). Il poursuit : la commune de Clamart-le-Vi-gnoble vient de déposer sur l’autel de la Patrie quelques restes des colifichets sacrés, monu-mens du fanatisme de nos pères. N’ayant point été inventoriés sur l’état des effets de notre ci-devant fabrique, ils n’ont pu être compris dans notre première offrande à la fin de brumaire dernier. Ils servaient à masquer les vermoulures d’une vieille madone de bois, d’autant plus fêlée qu’elle était plus ridicule sous cet étrange attirail de coquetterie. Nous l’avons rendue républicaine. Elle a quitté ses bijoux et ses couronnes fleurdelisées, et son trône ne sera plus occupé désormais que par la vérité et par la Raison. Représentans, la révolution des idées était plus difficile encore que celle du gouvernement, vous l’avez faite, et la régénération des esprits est le plus grand de vos bienfaits (2) . [Etat des dons faits à la Conv. du 1er au 10 flor.] Une couronne fleurdelisée en argent. 2 cœurs en argent, 2 chapelets dont les perles sont en argent, au bout desquels pendent 2 croix et St-Esprit. 2 petites croix en or et leur cœurs aussi en or. 1 paire de boucles d’oreilles et 2 cœurs montés en pierre blanche. 1 croix en pierre couleur incarnat et 2 boucles d’oreilles aussi en pierre de même couleur. Un cordon en façon de galon broché en or au bout duquel pendent 2 petits agnus en argent. 3 autres cordons en galon d’argent, un autre cordon aussi en argent au bout duquel est attaché un St-Esprit aussi en argent. 1 bourse en velours cramoisi brodée en or servant aux quêtes pour la paroisse. 1 boîte aux huiles pour les baptêmes qui n’a point été inventoriée, aussi en argent. 1 cuillère à café en argent. 3 virolles de la balaine du bedeau et la fleur de lis en argent. 2 robes en soie grise servant à ladite Vierge et l’enfant Jésus. 1 autre en satin blanc relevé de rose et galon en or [illisible] de ladite Vierge. 2 autres en blanc garnies en or faux. 1 autre en satin broché. Le président répond à la députation et l’invite aux honneurs de la séance (3) . Mention honorable et renvoi aux comités des domaines, d’aliénation et d’agriculture (4). (1) Mon., XX, 343. (2) C 301, pl. 1081, p. 3, datée 10 flor. II et signée Gogué (maire), Fillassier, Champy, Guaveline; état, p. 4. (3) Mon., XX, 343. (4) P.V., XXXVI, 214. SÉANCE DU 10 FLORÉAL AN II (29 AVRIL 1794) - N° 5 475 friche depuis plus de 15 ans, ont été rendus à la culture; elle exprime sa douleur de ce que le receveur des domaines nationaux de Saint-Cloud prétend que, pour cette année, les cultivateurs qui ont défriché ces terres doivent être soumis à une redevance, et elle demande qu’il soit décrété que les cultivateurs qui auront défriché de pareils terrains jouiront, sans rien payer à la République, de la première récolte qui suivra le défrichement, si ce défrichement a été fait dans l’année. Cette commune annonce, par une autre adresse, qu’elle vient de déposer sur l’autel de la patrie quelques restes de colifichets sacrés, dignes monuments du fanatisme (1). FILLASSEER, orateur de la députation : Citoyens représentants, par votre décret du 8 frimaire dernier vous avez restitué à la commune de Clamart-le-Vignoble, la portion de son ancien territoire situé dans le ci-devant parc de Meudon, et aussitôt près de deux cents arpents, qui étaient restés en friche depuis plus de quinze ans, ont été rendus à la culture. Tous les pauvres sans-culottes de notre commune ont mis la main à l’œuvre, en bénissant la Convention nationale, et plus de soixante pères de famille, presque tous sans propriétés foncières, se flattaient de trouver dans une première récolte une partie de leurs avances et le fruit de leurs travaux. Aujourd’hui ils se verront ruinés si votre humanité ne se hâte de venir à leur secours en arrêtant les demandes qui leur sont faites par les receveurs des domaines nationaux. Celui de Saint-Cloud prétend que pour cette année on doit soumettre les cultivateurs qui ont défriché ces terres à une redevance, et sans s’inquiéter si ces cultivateurs ont plus consulté leur zèle que leurs moyens, sans prévoir si la récolte répondra à des apparences souvent trompeuses, il exige que la municipalité procède à une répartition de redevances, dans le cas où elle aurait négligé ce préalable qui aurait arrêté tous les bras. En effet, citoyens, comment de pauvres créanciers de la terre oseront lui confier leurs sueurs pour la rappeler à la fécondité après de longues années d’inculture, s’ils ne trouvent point dans la franchise de la première récolte les premiers arrérages de leurs fonds ? Les agriculteurs savent que de tout temps ceux qui ont défriché ont joui au moins de la première année, et presque généralement des deux suivantes, sans rien payer. Si le receveur de Saint-Cloud a droit de nous excepter de cette règle de justice, la plupart de nous se verront forcés de lui abandonner les moissons futures ou s’exposer aux suites fâcheuses de l’insolvabilité. Citoyens représentants, vous avez appelé les pauvres au bénéfice de la propriété; complétez votre bienfait. Ordonnez enfin l’exécution de votre décret du 15 brumaire dernier, par lequel vous chargiez votre comité d’aliénation de vous présenter le lendemain son rapport sur le mode de louer ou d’amodier les terres vagues et en friche qui se (1) P.V., XXXVI, 214 et 233. Bin, 14 flor. (2e suppl‘) ; J. Fr., n° 583; J. Sablier, n° 1288. rencontrent dans les ci-devant parcs de la liste civile aux pauvres cultivateurs des communes où ces terrains sont situés. Décrétez en même temps que les cultivateurs qui auront défriché de pareils terrains jouiront, sans rien payer à la République, de la première récolte qui suivra le défrichement, si ce défrichement a été fait dans l’année (1). Il poursuit : la commune de Clamart-le-Vi-gnoble vient de déposer sur l’autel de la Patrie quelques restes des colifichets sacrés, monu-mens du fanatisme de nos pères. N’ayant point été inventoriés sur l’état des effets de notre ci-devant fabrique, ils n’ont pu être compris dans notre première offrande à la fin de brumaire dernier. Ils servaient à masquer les vermoulures d’une vieille madone de bois, d’autant plus fêlée qu’elle était plus ridicule sous cet étrange attirail de coquetterie. Nous l’avons rendue républicaine. Elle a quitté ses bijoux et ses couronnes fleurdelisées, et son trône ne sera plus occupé désormais que par la vérité et par la Raison. Représentans, la révolution des idées était plus difficile encore que celle du gouvernement, vous l’avez faite, et la régénération des esprits est le plus grand de vos bienfaits (2) . [Etat des dons faits à la Conv. du 1er au 10 flor.] Une couronne fleurdelisée en argent. 2 cœurs en argent, 2 chapelets dont les perles sont en argent, au bout desquels pendent 2 croix et St-Esprit. 2 petites croix en or et leur cœurs aussi en or. 1 paire de boucles d’oreilles et 2 cœurs montés en pierre blanche. 1 croix en pierre couleur incarnat et 2 boucles d’oreilles aussi en pierre de même couleur. Un cordon en façon de galon broché en or au bout duquel pendent 2 petits agnus en argent. 3 autres cordons en galon d’argent, un autre cordon aussi en argent au bout duquel est attaché un St-Esprit aussi en argent. 1 bourse en velours cramoisi brodée en or servant aux quêtes pour la paroisse. 1 boîte aux huiles pour les baptêmes qui n’a point été inventoriée, aussi en argent. 1 cuillère à café en argent. 3 virolles de la balaine du bedeau et la fleur de lis en argent. 2 robes en soie grise servant à ladite Vierge et l’enfant Jésus. 1 autre en satin blanc relevé de rose et galon en or [illisible] de ladite Vierge. 2 autres en blanc garnies en or faux. 1 autre en satin broché. Le président répond à la députation et l’invite aux honneurs de la séance (3) . Mention honorable et renvoi aux comités des domaines, d’aliénation et d’agriculture (4). (1) Mon., XX, 343. (2) C 301, pl. 1081, p. 3, datée 10 flor. II et signée Gogué (maire), Fillassier, Champy, Guaveline; état, p. 4. (3) Mon., XX, 343. (4) P.V., XXXVI, 214.