330 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE On demande que l'annonce faite par Mon-mayou soit insérée au Bulletin. L’Assemblée l’ordonne (98). Un membre du comité de Sûreté générale [MONMAYOU] annonce que le bruit s’étant répandu hier qu’un représentant du peuple avoit été assassiné près Ville-juif, le comité s’étoit empressé de vérifier le fait; qu’il y a eu effectivement des négo-cians de Lyon assassinés et qu’on est à la recherche des auteurs. Un membre dénonce la négligence avec laquelle on surveille les voyageurs et l’inobservation de la loi sur la visite des passeports. Renvoyé aux comités de Salut public et de Sûreté générale (99). 28 La Convention nationale, après avoir entendu son comité des Secours publics sur la pétition de la citoyenne Marie-Louise Thiery, veuve du citoyen Jean-Baptiste Bacquet, gendarme de la trente-deuxième division, mort d’une maladie occasionnée par les fatigues de la guerre, après avoir servi la patrie pendant vingt-sept ans; la veuve Bacquet étant elle même attaquée d’une maladie très dangereuse et se trouvant dans la détresse, décrète que sur le vu du présent décret, la Trésorerie nationale paiera à la citoyenne Marie-Louise Thiery, veuve du citoyen Jean-Baptiste Bacquet, gendarme de la trente-deuxième division la somme de 300 L de secours provisoire, renvoie sa pétition et les pièces jointes pour déterminer la pension à laquelle elle a droit (100). 29 La section de l’Arsenal [Paris] est admise à la barre. Elle exprime ses inquiétudes et l’embarras où elle est de satisfaire aux promesses qu’elle fit de prendre soin des épouses, enfans, pères et mères de ses concitoyens qui s’offrirent pour aller combattre les tyrans, notamment à la Vendée. Elle demande 1° un secours provisoire, 2° d’être autorisée à réclamer près le bureau des domaines nationaux du département (98) Moniteur, XXII, 521, les insertions entre crochets viennent des Débats n° 785, 808 ; Bull., 27 brum. ; J. Mont., n° 33. J. Paris, n° 58, mention. (99) P.-V., XLIX, 246. Rapporteur Taillefer selon C* II, 21. (100) P.-V., XLIX, 246-247. la portion relative des contributions foncières des terreins qui leur sont dévolus par la révolution, ainsi que l’arriéré des contributions, 3° d’être autorisée à contraindre les refusans sur quelques sections qu’ils demeurent aujourd’hui. Renvoyé aux comités des Finances et des Secours publics (101). 30 ROVÈRE : Représentants du peuple, je viens, au nom de vos comités Militaire et de Sûreté générale, réclamer un acte de justice pour des citoyens probes et vertueux que Robespierre et ses complices avaient signalés comme leurs ennemis, quelques jours avant que leurs têtes néronniennes tombassent sous le glaive vengeur des lois. Tandis que, forts de votre confiance, vous jugiez les hommes par vous-mêmes, que vous croyiez à leur amour pour la liberté parce qu’ils vous en entretenaient sans cesse, des monstres méditaient votre perte et celle de la République entière. Environnés de complices, la crainte les entourait aussi. Saint-Just, l’infâme Saint-Just imagina de désarmer tous les citoyens de Paris qui avaient manifesté de l’attachement à la Convention, qui s’étaient prononcés pour la justice, pour l’humanité, pour la vraie liberté, qui ne peut exister sans les vertus sociales. Un arrêté du comité de Salut public, en date du 4 thermidor (à ce que l’on présume), car vos comités ont inutilement réclamé la minute ou l’extrait, un arrêté dis-je, enjoignait aux comités révolutionnaires de chaque section de désarmer les citoyens de Paris. Cet ordre dictatorial fut exécuté ; les armes furent déposées au comité de Salut public; elles devaient sans doute être distribuées aux complices de Robespierre, de Saint-Just, de Dumas, de Couthon, et de toute cette horde qui a déchiré la nation française par le meurtre, l’assassinat et le cachot. Vous étiez au bord du précipice si votre courage, aidé du génie tout puissant de la liberté, n’avait lancé la foudre sur ces audacieux conspirateurs, qui pour détourner votre attention, venaient sans cesse vous occuper de conspirations factices ou chimériques, tandis que vos têtes étaient déjà inscrites sur le livre de mort de ces tigres altérés de sang et de rapine. Tantôt c’était la faction des alarmistes, le lendemain celle des exagérateurs ; après, celle des pacificateurs; enfin, celle des taciturnes, des observateurs, et la véritable faction des contre-révolutionnaires, de vos assassins, était parmi vous, paraissait journellement à cette tribune, abusant de vos pouvoirs et de ceux que le peuple vous avait confiés. Les citoyens de Paris, consternés de voir à chaque instant leurs voisins, leurs femmes, leurs enfants, conduits aux cachots et à l’écha-(101) P.-V., XLIX, 247. SÉANCE DU 27 BRUMAIRE AN III (17 NOVEMBRE 1794) - Nos 31-32 331 faud, exécutèrent avec obéissance et en silence l’ordre du comité de Salut public pour le désarmement. De nombreuses réclamations, appuyées sur des récépissés ou des procès-verbaux, ont été adressées à votre nouveau comité de Salut public; conformément à la loi du 7 fructidor, il a renvoyé à votre comité Militaire, qui en a référé à celui de Sûreté générale; ils m’ont chargé de vous présenter le projet de décret suivant (102) : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [ROVÈRE au nom de] ses comités Militaire et de Sûreté générale, décrète ce qui suit : Article premier.- Le comité Militaire demeure autorisé à faire restituer aux propriétaires les armes enlevées par ordre du comité de Salut public dans la première décade de thermidor dernier. Art. II.- Les réclamans seront obligés d'établir leur propriété par un récépissé ou un procès-verbal, visé par le comité révolutionnaire de leur arrondissement, qui attestera qu’ils sont bons citoyens. Art. III.- Le comité Militaire, après le délai de deux mois, fera porter dans les arsenaux de la République les armes non réclamées, ou refusées par motif d’incivisme (103). 31 AUDOUIN : La Convention doit toujours donner des exemples éclatants de la sévérité de sa justice, soit qu’elle punisse un coupable ou qu’elle venge un innocent. On nous a distribué aujourd’hui les pièces relatives à Carrier. Le décret porte que la discussion s’ouvrira trois jours après la distribution; je demande que la Convention s’explique, et dise si cette discussion aura lieu décadi ou le 1er frimaire. La Convention fixe la discussion à pri-midi (104). Un membre [AUDOUIN] demande, attendu que la distribution des pièces concernant le représentant du peuple Carrier a eu lieu aujourd’hui, qu’il soit décidé si la discussion aura lieu décadi ou pri-midi; la Convention décrète qu’elle aura lieu primidi premier frimaire (105). (102) Moniteur, XXII, 522-523. Rép., n° 58, résumé du rapport et décret; Débats, n° 785, 808, décret. (103) P.-V., XLIX, 247-248. Moniteur, XXII, 523. J. Paris, n° 58, reproduit l’article premier. Rapporteur Rovère selon C*II, 21. (104) Moniteur, XXII, 521. (105) P.-V., XLIX, 248. Rapporteur Audouin selon C* II, 21. 32 La discussion est reprise sur le rapport du comité d’instruction publique concernant les écoles primaires (106). Chapitre IV (107). Instruction et régime des écoles primaires. LAKANAL rapporteur, lit l’article premier : Article premier : Les élèves ne seront pas admis aux écoles primaires avant l’âge de six ans accomplis. LE RAPPORTEUR : Le comité en proposant de n’admettre les élèves qu’à six ans, a cru que cette marche était conforme à celle de la nature. L’article est adopté. Il lit l’article IL Article II : Dans l’une et l’autre section de chaque école on enseignera aux élèves : 1° A lire et à écrire, et les exemples de lecture rappelleront leurs droits et leurs devoirs; 2° La déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, et la Constitution de la République française ; 3° On donnera des instructions élémentaires sur la morale républicaine; 4° Les éléments de la langue française, soit parlée, soit écrite; 5° Les règles du calcul simple et de l’arpentage ; 6° Des instruction sur les principaux phénomènes et les productions les plus usuelles de la nature ; on fera apprendre le recueil des actions héroïques et les chants de triomphe. LE RAPPORTEUR : Je vais répondre à quelques observations qui ont déjà été faites sur cet article. On a dit qu’il n’était pas possible que les élèves puissent apprendre ni les instituteurs enseigner tans de choses à la fois. Je commence par déclarer que ces objets sont d’une nécessité absolue, car il est évident qu’il faut que les enfants connaissent leurs droits, leurs devoirs, la constitution de leur pays, leur langue, les règles du calcul. Il est évident qu’il faut qu’ils sachent assez de physique pour n’être plus trompés ni effrayés sur les phénomènes de la nature. Ensuite je fais une observation : c’est que toutes ces connaissances seront bientôt dilucidées dans les livres élémentaires qui paraîtront avant deux mois. BARAILON : Je suis d’un avis tout contraire à celui du rapporteur. Je soutiens qu’il n’est pas possible qu’on puisse apprendre ni enseigner dix objets à la fois ; je soutiens qu’il n’est pas possible de trouver un assez grand nombre d’instituteurs versés dans toutes ces connaissances pour les enseigner à la fois à deux ou trois cents (106) P.-V., XLIX, 248. Rapporteur Lakanal selon C*II, 21. Se reporter au débat précédent, Arch. Pari., 26 brumaire, n° 20. (107) Moniteur, XXII, 535-538, à la date du 28 brumaire. Débats,, n° 785, 810.