(Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { brumaire an II 695 MO novembre 1/93 patriotisme et de son adhésion aux progrès de la Révolution; et pour me prouver d’autant plus sa sincérité à cet égard, il déclarait non seu¬ lement adhérer au contenu de mondit arrêté, mais encore vouloir donner une preuve non équivoque de son intention par le mariage qu’il désire contracter avec la citoyenne Marie-Josephette Pechaux, sa gouvernante depuis un an à qui il l’a promis depuis plusieurs mois de la connaissance pour ainsi dire de tout le public, de manière que cette connaissance pouvant suppléer à une publication, il espérait que je voudrais bien l’en dispenser afin qu’avant mon départ, même dès aujourd’hui, à l’exemple de plusieurs de ses confrères ils puissent être unis en mariage. A quoi déférant révolutionnaire-ment, et vu le grand bien qui résultera de cet exemple, j’ai arrêté que ce jourd’hui il serait procédé au même mariage. Qu’à cet effet les parties paraîtront incessamment, et a ledit curé, signé avec moi le registre. Choner, curé de La Briche et Couturier, représentant du peuple. Pour copie conforme à l'original inscrit sur le registre. : P. Raguideau, secrétaire. Ledit jour, seizième du 2e mois, l’an II de la République française une et indivisible, au château de Segret, propriété nationale, devant moi, Jean -Pierre Couturier, représentant du peuple, sont comparus le citoyen Nicolas Cho¬ ner, curé de La Briche, né le onze mars mil sept cent cinquante-quatre, à Etalle, départe¬ ment de la Moselle, né du mariage légitime de feu Henry Choner, de son vivant cultivateur, et de Catherine Despaux, ses père et mère, et la citoyenne Marie-Josephette Peschoux, fille née le cinq septembre mil sept cent soixante-douze à Saint-Julien-sur-Reissouse, départe¬ ment de l’Ain, district de Pont-de-Vaux, du mariage légitime de Yalentin Peschaux, labou¬ reur audit heu et défunte Marie-Claudine Ber-houd, lesquels ont dit qu’en exécution de ma comparution faite aujourd’hui devant moi par le citoyen Nicolas Choner, mari futur, ils com¬ paraissent librement, voulant profiter de ma présence momentanée pour ratifier le vœu que depuis longtemps ils ont formé de s’unir révo-lutionnairement par mariage, espérant que je voudrais bien le consolider. A quoi déférant, je leur ai demandé en quoi consistaient leurs pactions matrimoniales, et sur leur réponse qu’elles consistaient à laisser au survivant les acquêts, conquêts et meubles qui compose¬ ront la communauté au moment du décès de l’un d’eux, à charge d’élever et entretenir les enfants à qui lesdits acquêts et conquêts et meubles appartiendront après le décès du survivant. A l’effet de quoi inventaire sera-fait incontinent après le décès du premier d’entre eux, et quant à ce qui concerne les biens fonds de souche et ligne qui peuvent apparte¬ nir aux futurs conjoints ou qui pourraient leur arriver par succession, leur intention était que le survivant jouisse de l’usufruit desdits biens sa vie durant, et qu’après son décès ils retourneront aux héritiers de la ligne desdits futurs s’il n’y a pas d’enfants descendant d’iceux. Cette paction matrimoniale ainsi convenue et arrêtée, les conjoints se sont donné la main et ont prononcé réciproquement à haute et intelligible voix s’épouser en légitime mariage. Cela fait, moi, représentant du peuple ai déclaré, au nom de la loi que les citoyens Nicolas Choner et Marie-Josephette Peschaux, sont dès ce moment unis par le mariage. Fait et clos au milieu des applaudissements et des cris mille fois répétés de : Vive la Répu¬ blique! Vive la Montagne! Périssent les tyrans! La liberté, l'égalité ou la mort! Que la Conven¬ tion nationale reste à son poste jusqu'à ce qu'elle pourra décréter que la patrie est sauvée! A quoi faire furent présents les citoyens Baron de L’Isle, procureur syndic du district d’Etampes, Charpentier administrateur du département, Gérome, administrateur du district dudit Etampes, Sureau, juge de paix au même lieu, Gerosme l’aîné, citoyen d’Etampes qui, ainsi que d’autres assistants, ont signé avec moi et le citoyen Raguideau, secrétaire. Lecture faite au milieu d’une assemblée immense qui a chanté l'Hymne de la liberté. ( Suivent 16 signatures.) Taillefer, représentant du peuple, écrit de Rodez à la Convention que les mouvements qui ont eu lieu ne se sont pas étendus dans les dépar¬ tements du Gard, de l’Hérault et de l’Ardèche, qu’ils n’ont eu lieu que dans l’Aveyron et la Lozère; que, grâce à la valeur républicaine de l’armée révolutionnaire, ces mouvements ont été sans effet. La Convention décrète que cette partie de l’armée révolutionnaire a bien mérité de la pa¬ trie (1). Suit la lettre du représentant Taillefer (2). Taillefer, représentant du peuple, au Président de la Convention nationale. « Rodez, le 9e jour de la lre décade, du ; ; 2e mois de l’an II de la République française, une et indivisible. « On a exagéré, citoyens collègues, les mou¬ vements contre-révolutionnaires qui ont eu heu dans ce pays, en les étendant aux départe¬ ments du Gard, de l’Hérault et de l’Ardèche. Ce n’était que dans l’Aveyron et la Lozère qu’il s’était formé des rassemblements de fana¬ tiques et contre-révolutionnaires. J’ai la satis¬ faction de vous annoncer aujourd’hui que ces rassemblements sont dissipés, et que si, grâce aux armes répubhcaines, et à la vertu de nos guerriers, la Vendée ne subsiste plus, elle ne sera pas ressuscitée dans l’Aveyron et dans la Lozère; la manière brusque et vigoureuse avec laquelle nous sommes tombés sur les brigands les a dis¬ persés sans coup férir. « Mais comme les racines de contre-révolu¬ tion avaient des ramifications étendues et profondes, nous sommes déterminés à pour-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 118. (2) Archives nationales, carton AF11 89, pla¬ quette 659, pièce 38. Aulard : Recueil des actes êt de la correspondance du comité de Salut public , t. 8, p. 137. 696 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { novembre*"� suivre le cours de nos opérations sans beaucoup de changement, et l’armée révolutionnaire ne quittera ce pays qu’après l’avoir purgé des prê¬ tres, des royalistes, des brigands, des déserteurs qui en couvraient la surface. « Nos détachements battent la campagne, et font chaque jour des prises; en exécution de vos décrets sur Lyon et la Vendée, nous nous proposons de faire détruire les châteaux-forts dont la horde nobiliaire avait hérissé ces rochers. Cette précaution est d’autant plus indispen¬ sable, qu’au moindre soulèvement les fanatiques cherchent à s’en saisir, et qu’il en est plusieurs dont il faudrait faire un siège en forme pour les en débusquer. « Les brigands se sont dispersés par petites bandes, qui s’enfoncent dans des forts, et des taillis couverts, dans des endroits inaccessibles, où des souterrains leur servent de retraite. J’ai cru, pour épargner le sang de nos conci¬ toyens, exposés à tout moment à être assassinés par des mains invisibles au fond de ces embus¬ cades, devoir faire détruire par le feu ces repaires de malfaiteurs; d’autant plus qu’une grande partie de ces taillis sont des communaux appartenant à des communes fanatisées, et qu’on pourrait être sûr, deux jours après le départ des troupes, que les brigands y reviendraient encore se réunir et comploter de nouveau. « On arrête de toutes parts les gens sus¬ pects; des listes de contribution sont dressées pour faire supporter aux inciviques les frais de l’expédition qu’ils ont occasionnée. Je rends compte au comité de Salut public et lui fais passer les arrêtés que j’ai pris à cet égard, et pour assurer la fidélité des comptables et autres préposés à la recette et à l’emploi. « Les départements du Lot et du Cantal ont fourni, aux dépens des aristocrates, des sommes considérables ; je n’en sais pas au juste le montant; mais il doit être fort, vu les diverses sommes des assignats, or, argent, argenterie dont on m’a annoncé le recouvre¬ ment. Ces fonds sont restés, jusqu’ici, à la disposition des receveurs des districts. Le numéraire métallique et l’argenterie doivent être portés à la Trésorerie et à la Monnaie nationales. J’attends vos ordres à cet égard. J’ai eu soin de faire mettre le plomb, le cuivre et le fer, qui étaient encore dans les maisons des émigrés, à la réquisition des préposés aux fabrications d’armes. « Le zèle et le patriotisme de l’armée révo¬ lutionnaire me sembleraient avoir mérité quel¬ ques témoignages de satisfaction de la part de la Convention nationale. Je la prie d’approu¬ ver également les mesures que nous avons cru devoir prendre pour rétablir la tranquillité dans ce pays ; ce témoignage de confiance serait un aiguillon à notre zèle pour frapper de plus fort les ennemis de la liberté et de l’égahté. « Recevez, citoyens collègues, les civiques et fraternelles salutations que je vous adresse. « Le représentant du peuple , « Taillefer. « Par le représentant du peuple : « Marat-Valette. « P. -S. Vous recevrez ci -joints divers ar¬ rêtés concernant l’érection des comités de sur¬ veillance. Celui qui est relatif à la création du comité de Villefranche vous donnera la me¬ sure de ceux qui ont été formés par mon ordre dans le Lot et le Cantal; ils Sont calqués les une d’après les autres; j’ai cru devoir en établir un de central à Rodez : comme l’ulcéré était large, j’ai voulu le couvrir d’un emplâtre qui le tînt tout; d’ailleurs ses fonctions seront très momentanées, et Châteauneuf-Randon, à son arrivée ici, pourra le remanier, s’il le juge plus utile. « Vous trouverez encore ci -joints deux arrêtés que j’ai jugés nécessaires pour prévenir la dila¬ pidation des taxes levées ou à lever sur les inciviques ; vous verrez par leur disposition, que si, d’une part, je suis mauvais marchand pour les aristocrates, j’entends bien d’une autre que la République seule profite de leurs dépouilles; vous concevez qu’il est impossible qu’une armée révolutionnaire ne soit pas plus dispendieuse que des troupes réglées, mais cepen¬ dant, je veux bien efficacement procurer des bonnes sommes dont elle a grand besoin. « J’écris à Châteauneuf à cet égard; je l’invite à accélérer son arrivée dans ce pays, à éclaircir les recouvrements et emplois de fonds, en tenant la main à l’exécution de mes arrêtés ; je lui donne diverses instructions que j’ai prises sur le local et qui lui faciliteront une heureuse réussite. « Je n’ai pas attendu d’autorisation précise pour la destruction de Loupiac, Nasac, Séverac et autres châtels en hic et en hac des ci-devant gentillâtres rouergats. J’ai commandé aussi la démolition des habitations des plus entêtés royalistes et fanatiques, ainsi que celles des prin¬ cipaux promoteurs. Ces! exemples de sévérité, faits avec réserve cependant, ont produit une grande impression et me paraissent le meilleur calmant pour cette frénésie religieuse. Les habi¬ tants des campagnes, craignant sans [cesse devoir opérer sur eux des mesures approchantes, s’empressent de nous dénoncer et amener les coupables. « Je ne puis finir cette dépêche sans vous pré¬ venir que le Cantal et l’Aveyron sont à la faim ; que ce premier département, si intéressant par son patriotisme est à la veille d’une disette totale; que l’Aveyron est dans le même cas; et vous sentez comme une famine serait dange¬ reuse dans un pays toujours prêt à se soulever; je n’ai pas besoin de vous en dire là-dessus davantage. | « Adressez-moi vos dépêches et instructions, si vous avez à m’en faire parvenir, à Cahors, où l’on a soin de me les faire passer partout, car je ne demeure guère en place. Je me plains de ne recevoir ni Feuilletons ni Bulletins, ce qui m’expose ou peut m’exposer à prendre des arrê¬ tés qui se contrarient avec les décrets que la Convention rend 'journellement : cet objet mérite un peu votre attention, et je vous prie de donner des ordres pour qu’ils me parviennent tout le temps que vous croirez que je peux faire ici quelque bien. « Salut et fraternité, « Taillefer. » Arrêté du représentant du peuple Taillefer (1), au nom de la République française, une et indi¬ visible. Nous, représentant du peuple, délégué par (1) Archives nationales, carton AFn 89, pla¬ quette 659, pièce 36. ' ;