206 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { Novembre As” Bourdon (de VOise) demande l’ordre du jour motivé sur l’existence du nouveau code civil. Levasseur. Le code civil est une preuve du progrès des lumières et de la raison. Il s’y trouve cependant encore bien des imperfections qui n’ont pu y être laissées que par des hommes de loi. Je demande que le comité de Salut public présente à la Convention une commission de 6 membres philosophes, et non pas hommes de loi, qui sera chargée de reviser le code civil et d’y faire tous les retranchements nécessaires. Philippeaux. Je rends justice au patriotisme de Levasseur, mais je crois que son patriotisme l’égare. L’assemblée a passé une partie de sa session à composer et à discuter cefc immense tra¬ vail. Bans doute il s’y trouve des imperfections comme dans tous les ouvrages humains. Au surplus, on peut les soumettre à la Convention et lui proposer les changements qui paraîtront justes et nécessaires. Je demande donc l’ordre du jour. Cambon. Il m’a paru que Levasseur, en ren¬ dant justice au code civil, le trouve trop com¬ pliqué. Il faut le réduire en principes élémen¬ taires, en faire une rédaction simple, un ensem¬ ble en raccourci. Sous ce point de vue j’appuie la proposition de Levasseur. Fabre-d’Églantine. J’appuie aussi la propo¬ sition de Levasseur, mais non pas dans le cercle où Cambon veut la circonscrire, car le travail de la Commission proposée deviendrait inutile, ce ne serait qu’une rédaction de mots. Il faut donc après avoir établi le code civil par le ministère d’hommes instruits dans les lois, le pur¬ ger par celui d’hommes philosophes, des préjugés que les hommes de loi auraient pu y laisser malgré eux. Philippeaux. Les membres de la Convention ont discuté le code civil. La République l’attend avec impatience. J’insiste pour l’ordre du jour, et s’il est quelque mesure à prendre, c’est l’envoi le plus prompt de ce code civil. La proposition de Levasseur est décrétée. Le comité de législation [Merlin (de Douai), rapporteur (1)] propose, relativement à l’acte d’accusation dressé contre les citoyens Gelé et Marolle, des dispositions qui sont adoptées ainsi qu’il suit : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de législation, sur la pétition des membres des comités civil et de surveillance de la section du Muséum de Paris, 6 candidats pour la création d’une Commission pour la révision du Code civil, qui n’est fait que par des hommes de loi. Il nous faut un Code civil pour les sans-culottes; c’est pour cela que l’on doit le reviser en entier. Glauzel, Philippeaux et plusieurs autres s’oppo¬ sent à cette proposition. Quoi, disent-ils, vous vou¬ driez détruire un ouvrage qui a coûté tant de temps? Levasseur. Ce code n’est pas conforme à notre Constitution; ainsi, je réitère que l’on mette aux voix ma proposition. Après plusieurs observations, la Convention adopte la proposition de Levasseur. (1) D’après la minute du décret �qüi se trouve aux Archives nationales, carton C 277, dossier 730. relative à l’ordonnance du directeur du juré du tribunal du 2e arrondissement de Paris, du 7e jour de la 3e décade du 1er mois de la présente année, rendue en conséquence de la déclaration du juré, intervenue sur l’acte d’accusation dressé contre les citoyens Gelé et Marolle; « Considérant que le fait d’accaparement im¬ puté aux citoyens Gelé et Marolle, et la saisie qui s’en est ensuivie, sont antérieurs à la publia cation de la loi du 26 juillet 1793, et qu’ainsi l’ordonnance du directeur du juré du tribunal du 2e arrondissement de Paris ne doit, dans son exécution, rencontrer aucun obstacle, surtout de la part des citoyens qui ont consacré, par leur acceptation conforme à celle de tout le peuple français, les principes reconnus et proclamés par l’article 15 de la Déclaration des droits, « Déclare qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur ladite pétition, et décrète que le ministre de la justice sera tenu de donner, dans le jour, les ordres nécessaires pour que l’ordonnance ci-des-sus mentionnée du directeur du juré du tribunal du 2e arrondissement de Paris, soit, sans aucun délai, exécutée selon sa forme et teneur (1). » Le comité de sûreté générale [Voulland, rap¬ porteur (2)] informe la Convention d’une lettre de change qui lui a été remise, de 5,000 livres, tirée sur Pache frères et Cle, banquiers à Paris, en faveur de la citoyenne Lasource. Le décret suivant est rendu : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de sûreté géné¬ rale, décrète que la lettre de change de 5,000 liv., tirée sur Pache frères et Cle, banquiers à Paris, en faveur de la citoyenne Lasource, née de Cam¬ bon, et passée par cette femme confidentiellement à l’ordre du citoyen Perès, député du départe¬ ment de la Haute-Garonne, pour en assurer le payement au nommé Lasource, mort le 10 de ce mois, et dont les biens ont été confisqués au profit de la République, sera passée par le ci¬ toyen Perès à l’ordre du caissier de la trésorerie nationale, qui demeure chargé de s’en faire payer le montant (3). » Compte rendu du Moniteur universel (4). Voulland, au nom du comité de sûreté géné¬ rale. Le nommé Lasource, mort le 10e de ce mois, ci-devant membre de la Convention nationale, avait demandé à sa femme de lui faire parvenir une somme de 5,000 livres. Cette femme se hâta de se procurer cette somme, et d’adresser à un de nos collègues, le citoyen Pérès, une lettre de change de la valeur de 5,000 livres passée à son ordre; elle l’avait prévenu que le montant était destiné pour son mari, à qui elle espérait que notre collègue vou¬ drait bien le faire toucher. Pérès ayant reçu la lettre de change passée à son ordre par la femme Lasource au moment où (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 288. (2) D’après la minute qui se trouve aux Archives nationales, carton C 277, dossier n° 730. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 289. (4) Moniteur universel [n° 45 du 15 brumaire an II (mardi 5 novembre 1793), p. 183, col. 3j. [Contention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « $£ 207 son mari était en jugement au tribunal révo¬ lutionnaire, crut qu’il devait informer votre comité de surveillance, de la résolution où. il était de ne se faire payer la lettre qui lui avait été confiée, qu’ après l’événement des débats du grand procès qui s’instruisait au tribunal révolutionnaire. Lasource a été jugé, il est mort, et ses biens sont tous confisqués et acquis au profit de la République; le montant de la lettre de change, que sa femme voulait lui faire passer, fait partie de son avoir, qui appartient à la République. Dans cette circonstance, votre comité pense et me charge de vous proposer que la lettre de change passée à l’ordre du citoyen Pérès, député de la Haute-Garonne, par la femme Lasource qui l’avait confidentiellement chargé d’en pro-rurer le montant à son mari, sera passée à l’ordre de P agent de la trésorerie nationale, qui demeure chargé de s’en faire payer le prix. Cette proposition est adoptée. Le,citoyen Honoré Joannis, ancien inspecteur de l’École militaire, âgé de 80 ans, offre pour les frais de la guerre une somme de 100 livres, qu’il dépose sur l’autel de la patrie. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). La municipalité de Brisach fait passer à la Convention 12 décorations militaires, qu’elle a recueillies, et une médaille d’or destinée pour les frais de la guerre. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2). Le citoyen Louis Biaise, négociant à Saint-Malo, fait passer à la Convention nationale une lettre de change de 20,000 livres, à vue, sur les citoyens Mallet frères, et Cie, à Paris, pour ladite somme être employée sur le grand-livre de la dette publique. La Convention nationale, sur la proposition d’un de ses membres [Hauss-mann (3)], autorise les commissaires de la tré¬ sorerie nationale de recevoir le montant de cette lettre de change; d’en reconnaître le citoyen Louis Biaise dans l’emprunt volontaire, confor¬ mément à la loi, et de lui en faire parvenir le récépissé; décrète, en outre, la mention civique de cet envoi (4). Compte rendu de V Auditeur national (5). Un citoyen, empressé de venir an secours de la patrie, sans attendre l’exécution de l’emprunt forcé, envoie à la Convention une traite de 20,000 livres sur une maison de banque ■> et payable à vue. Applaudi et renvoyé aux administrateurs de la trésorerie nationale. (1) Procès-verbaux de la Convention , t. 24, p. 290. (2) Ibid. F (3/ D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales. (4) Procès-verbaux de la Convention , t. 24, p. 290. (5) Auditeur national [n°. 408 du 14 brumaire an II (lundi 4 novembre 1793), pv 1], Un membre [Carnot], au nom du comité de Salut public, fait un rapport sur la situation des divers ateliers destinés à la fabrication des armes, particulièrement de ceux qui viennent d’être formés à Paris; il rend compte des appro¬ visionnements et des dispositions qui doivent en assurer le succès. U annonce quels en sont déjà à Paris les résultats importants, quoique à peine deux mois se soient écoulés, depuis que la Con¬ vention y a décrété une fabrication extraordi¬ naire, dont il assure que le produit s’élèvera in¬ cessamment à 1,000 fusils par jour. « Qu’ils tremblent donc, dit-il, ces rois coalisés; si les Parisiens seuls sont entre eux plus que toute la puissance des tyrans réunis, et quel sera leur sort, lorsque toutes lès parties de la République auront transformé leurs ateliers en fabriques d’armes! » La Convention nationale en ordonne l’impres¬ sion (1). Suit le texte du rapport de Oarnot : Rapport sur la manufacture extraordi¬ naire d’armes, établie a Paris ; fait a la Convention nationale, au nom du comité de Salut public, par L. Carnot, l’un DE SES MEMBRES, 13 BRUMAIRE, 2e ANNÉE de la République française une et indi¬ visible. [ Imprimé par ordre de la Convention nationale (2).] Parmi les prodiges, qu’a fait éclore notre révo¬ lution, l’érection presque subite d’une manu¬ facture qui doit produire mille fusils par jour, et à laquelle dans peu rien ne sera comparable en Europe n’est pas un des moindres. Le comité de Salut public doit vous rendre compte des mesures qu’il a prises pour l’exécution de la loi du 23 août, par laquelle il est immédiatement chargé de cette vaste entreprise. Je vais le faire en son nom d’une manière succincte en rejetant dans des notes les détails techniques qui ne pourraient être saisis que difficilement à la sim¬ ple lecture. De nouveaux rapports successifs vous instruiront des progrès de cet établisse¬ ment, dû au génie de la liberté, et dans lequel à son tour la liberté doit trouver un de ses plus fermes appuis. Lorsque la loi du 23 août fut rendue, tout était à créer, ouvriers, matériaux, outils; en vous la proposant, le comité avait moins consulté ses moyens, que son propre désir, que le vœu natio¬ nal, que cet instinct supérieur aux calculs, qui apprend aux hommes que rien n’est impossible à qui veut être libre. Mais cette nullité de ressources et les obstacles physiques qui se sont présentés, tels qu’une sé¬ cheresse, dont il y a eu peu d’exemples depuis plus d’un siècle, qui a presque totalement sus¬ pendu le cours de la navigation et le travail des usines, et dont les effets se sont fait sentir d’une manière plus fâcheuse encore, comme vous le savez, par la difficulté de la mouture et l’arri-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 290. (2) Bibliothèque nationale i 42 pages in-8° Le*8, n° 546; Bibliothèque de la Ghâmbre dés députés j Collection Portiez (de VOise), t. 42, n° 30; Moniteur universel fin0 45 du 15 brumaire an II (5 no-vembre J793), p. 182, col. 2]. v-