712 [Assemblée nationale.] ARCHIVES ] PARLEMENTAIRES. [3 juin 1791.] bération à son véritable point, qu’en adoptant le changement proposé par M. Rabaud, il faut poser ainsi le question : « Conservera-t-on oui ou non Jes travaux forcé-! comme base du Code pénal? » Pour ma part je demanda que l’Assemblée décide qu’il y aura une peine d’un travail forcé. M. Fe> Pelletïer-Saint-Fargeau, rapporteur. La manière dont M. Démeunier vient de poser la question, change absolument toute l’opinion, tout le système de votre comité. Un membre à gauche. Il n’y a pas de mal à cela. M. he Pelletier-Saint -Fargean, rapporteur. Or, si vous voulez changer ce système, il faut au moins le discuter; et si vous adoptez pour sys'ème pénal les travaux forcés, en voici l’inconvénient : qu’un homme condamné ne veuille point travailler, on ne peut l’y forcer qu’à coups de bâtons... (A droite : Oui! oui!.) Alors vous le soumettez à l’arbitraire du conducteur, ce n’est plus la loi qui prononce la peine, c’est le conducteur qui la rend ce qui lui convient. Plusieurs membres. Aux voix! aux voix! M. Brillat-Savarin. Je suis étonné que sur une question aussi intéressante personne ne se soit donné la peine d’examiner ce que le comité vous propose de substituer aux travaux publics. Je trouve que son opinion aura non seulement les inconvénients des galères telles qu’elles existent, mais encore des inconvénients particuliers. Premier inconvénient : la dépense de construction des maisons de force dans 83 départements ; second inconvénient, la corruption, car tout le monde sait que les hommes détenus, dans ce qu’on appelle maison de force, s’inoculent leurs vices. Ensuite voici des inconvénients particuliers à l’opinion du comité : le premier c’est que vous accoutumerez àl’oisiveté les criminels qui seront dans les maisons de force; il y a des criminels qui aimeront mieux vivre de pain et d’eau que de travailler; c’est leur caractère commun. Ces travaux, dit-on, serviront d’exemple : eh bien! Messieurs, de deux choses l’une : ou le peuple qui les ira voir les soulagera par ses largesses, alors la peine cesse avec l’exemple ; ou il ne les soulagera pas, alors le peuple est méchant, parce qu’il s’accoutume à voir souffrir ses semblables, et l’exemple est nul, tandis que les ports vous présentent des travaux qui demandent un très rand nombre de bras, tandis qu’il vous reste es landes immenses à défricher, tandis que vous avez des canaux à ouvrir et des marais à dessécher. Envoyez là vos condamnés, et ils seront utiles à la société; ils deviendront meilleurs car ils contracteront l’habitude du travail. Je demande donc qu’il soit dit que les travaux forcés publics seront conservés. M. Démeunier. Je demande qu’on décrète le principe tel que je l’ai proposé. M. Duport. La question ne me paraît pas très bien posée. Je crois que les motifs du préopinant ne sont pas justes, ou plutôt qu’il oublie les véritables motifs de la question : il s’agit desavoir si la condamnation à des travaux forcés est utile ou non, si elle* présente aux condamnés un moyen d’amélioration. Je ne le crois pas ; car au lieu de faire contracter l’amour du travail, vous inspirez l’horreur du travail. On vous l’a déjà dit et je vous le répète : vous ne pouvez faire travailler les condamnés qu’en les faisant assommer de coups, et qu’en laissant leur sort à l’arbitraire. De là résulte un inconvénient très grave; c’est que vous avilirez, que vous déshonorerez aux yeux de l’homme indigent mais vertueux, le travail, cette tâche vraiment noble et respectable de l’humanité, si vous en prostituez la nécessité à l’expiation du crime et de la scélératesse. Je voudrais donc qu’on adoptât un genre de punition capable de rendre l’homme meilleur au lieu de le faire plus dépravé. {Applaudissements à gauche.) Je demande que l’Assemblée décrète qu’il n’y aura pas de travaux forcés, ou bien que prenant les articles du Gode pénal tels qu’ils lui sont présentés par le comité, elle examine si les peines proposées sont proportionnées aux délits ; cet ajournement de la question jusqu’après l’examen des articles laisserait toujours à l’Assemblée la liberté d’appliquer les travaux forcés aux délits qui seraient jugés les plus graves. M. de FoIIeville. Je demande qu’on mette aux voix la proposition de M. Démeunier, afin qu’au moins nous ne perdions pas le fruit de notre délibération. {Murmures.) M. l