584 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f’ rieur; qu’aussitôt il a été entouré par un grand nombre dont quelques-uns lui ont rappelé qu’il fallait qu’il parte avec eux; que leur avait dit encore qu’ils pouvaient le tuer, et lui ont ré¬ pondu qu’ils ne le tueraient point, mais qu’il partirait et qu’ils l’emmèneraient avec eux; qu’il leur avait dit qu’il ne ferait jamais volontaire¬ ment un seul pas contre son devoir et que s’ils l’emmenaient üs le porteraient ou le traîneraient le long des chemins, ils lui ont répondu qu’il avait des jambes et qu’il faudrait bien qu’il s’en servît et qu’ils ne le quitteraient pas, ce qu’ils ont paru vouloir faire en se rangeant tout autour de lui. Tandis qu’il continuait à leur dire ce que pres¬ crivaient les devoirs d’un bon républicain, de leur représenter l’intérêt qu’il y avait pour la République et pour eux de ne pas abandonner la quantité de papiers assignats qui se trouvaient à la manufacture, ils ont consenti à l’y laisser; qu’alors il a vu arriver au milieu d’une partie d’entre eux le citoyen Quernet (sic), maître delà manufacture, qui avait pris médecine et qu’ils étaient allés chercher dans son lit, et avec lui le commissaire national qui a remis en pleurant son portefeuille à lui représentant. Et qu’ensuite ils sont partis, qu’il n’est resté à la manufacture que les femmes qui continuent leur travail, un vieillard, un des gouverneurs des machines et un enfant de treize ans ou quatorze ans; que son premier soin a été de faire fermer les étendoirs où est tout le papier fabriqué à l’exception de celui que les femmes travaillent et de celui qui a été fabriqué ce matin qui est encore dans les laines et qu’il a laissé à la garde du gouverneur des machines, n’ayant aucun moyen d’en agir au¬ trement; qu’il ne peut dans ce moment envoyer un courrier extraordinaire à la Convention parce qu’il n’a personne dont il puisse disposer, qu’il en enverra un aussitôt qu’ü en aura le pouvoir; et, de même qu’une sentinelle ne doit jamais uitter son poste quelque chose qui arrive, il est ans la ferme résolution de pas abandonner le sien. Fait, clos et arrêté les jour, mois et an que dessus. Morisson, commissaire à la papeterie du Marais. On menace de couper les cheveux et la tête des patriotes jacobins; ils sont en fuite et dans la consternation. Les troubles, d’après les rap¬ ports que je reçois, paraissent devoir continuer. Mon collègue et les autorités constituées m’a¬ vaient envoyé des exprès pour m’enlever et pour me rendre à Coulommiers; j’ai cru devoir partir à 5 heures du soir pour avoir des secours plus prompts. Le commissaire national, le propriétaire de la manufacture et une partie des ouvriers sont de retour. * Godefroy, représentant du peuple, au citoyen Président de la Convention nationale et à ses collègues (1). « Coulommiers, 26 frimaire, une heure après minuit, an II de la République, une et indivisible, « Citoyens mes collègues, « J’ai rendu compte au comité de Salut public (1) Archives nationales, carton AFn 141, pla¬ quette 1118, pièce 43. de la nécessité où j’ai été de me transporter de Courtalin à Coulommiers pour prendre des mesures de sûreté afin d’arrêter dans sa source une insurrection qui a éclaté en plusieurs en¬ droits. « J’entre dans de nouveaux détails par la lettre ci-jointe que je demande d’être remise sur-le-champ à ce comité afin qu’il puisse statuer de suite sur son contenu. Je ne dis rien de ces mesures qui doivent être secrètes. On ne peut trop louer le zèle des autorités constituées de Coulommiers. « Salut et fraternité. « Godefroy.» Godefroy, représentant du peuple, à ses collègues Président et membres de la Convention natio¬ nale (1). « Coulommiers, 26 frimaire an II de la République, une et indivisible. « Citoyens mes collègues, « Je m’empresse de vous faire part que de grandes mesures, que nous avons prises à temps avec mon collègue Morisson, ont sauvé le département de Seine -et -Marne de la guerre civile dont il allait être le théâtre. « Partout les rebelles se soumettent et con¬ viennent du piège dans lequel on les a entraînés. Grand nombre de coupables sont arrêtés, ainsi je crois pouvoir assurer qu’avec les secours demandés au comité de Salut public toutes les choses rentreront dans l’ordre. « Ces succès sont dus aussi à la vigilance et au patriotisme des autorités constituées de Cou¬ lommiers, à la garde nationale de Meaux et à celle de plusieurs communes environnantes, notamment celle de Quincy, qui nous ont par¬ faitement secondés. « Un seul jour a fait lever plus de 30,000 hom¬ mes rebelles, la fermeté, le courage et la per¬ suasion leur en ont imposé. « La majeure partie est rentrée dans le devoir et le reste sera, je l’espère, bientôt soumis. Je demande qu’en récompense du zèle de plusieurs districts, savoir ceux de Lagny, Meaux, Cou¬ lommiers, La Ferté-sous-Jouarre et leurs gardes nationales, de même que celles de Coulommiers et Quincy qui tous ont offert de marcher contre les rebelles, vous décrétiez qu’ils ont bien mérité de la patrie. « Je pense que vous ne ferez pas de difficulté quand vous saurez que tous à l’envi ont amené force subsistances et qu’ils en offrent encore tous les jours. J’ajouterai de plus que les ser¬ vices militaire et administratif se sont faits ici avec la plus grande exactitude. Je m’en suis as¬ suré en allant visiter les, postes avec le citoyen maire, excellent patriote. Enfin j’ai vu avec (1) Archives nationales, carton C 283, dossier 801. Mercure universel [28 frimaire an II (mardi 18 dé¬ cembre 1793), p. 443, col. 2], second supplément au Bulletin de la Convention de la séance du 28 frimaire an II (mercredi 18 décembre 1793); Journal des Dé¬ bats et des Décrets (frimaire an II, n° 455, p. 382). [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. fnraaâre an 1� 585 plaisir que, quel que soit le nombre des ennemis de la liberté, celui de ses amis le surpasse encore. « Salut et fraternité. « Godefroy. « Vive la République. « Je dois dire de Dubouchet qu’il a aussi rendu beaucoup de services à ce département en épu¬ rant les administrations. » Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets (1). Barère est à la tribune. Le comité, dit -il, vous a entretenus des troubles qui commençaient à se manifester dans le département du Cher, dans la Nièvre, à Coulommiers et près Courtalin. A l’égard du Cher et de la Nièvre, je viens vous proposer d’envoyer deux commissaires. Barère les nomme, la Convention les adopte. Quant à Coulommiers et à Courtalin, dit-il, je viens vous annoncer que tout y est tranquille. Voici les preuyes. Barère fait lecture de plusieurs lettres à ce sujet. Voici la dernière. ( Suit la lettre de Godefroy, datée de Coulommiers 26 frimaire, que nous avons insérée ci-dessus d'après l'original qui existe aux Archives natio¬ nales.) . Barère annonce ensuite que Laplanche a écrit au comité de Salut public (2) qu’il allait se ren¬ dre à Dreux pour se mettre à la tête de la colonne du Nord. Thirion, ajoute Barère, nous a écrit aussi que jamais son intention n’avait été de ( I ) Journal des Débals el des Décrets (frimaire an II n° 455, p. 380). D’autre part le Journal de Perlel [n° 452 du 28 fri¬ maire an II, p. 138] donne l’extrait suivant d’une lettre de Laplanche datée du 26 frimaire : « Conformément aux ordres du comité de Salut public, je suis arrivé ici, à 9 heures du soir, pour me rendre à Dreux, et diriger la marche des 10,000 hom¬ mes venus du Nord. Mais je crois devoir prévenir la Convention de ce que j’ai fait en masse à Caen. J’ai renouvelé, organisé les départements, district, muni¬ cipalité et généralement tous les fonctionnaires pu¬ blics. Comme j’ai choisi les officiers municipaux dans la classe indigente des sans-culottes, j’ai cru pouvoir leur promettre, en votre nom, une indemnité an¬ nuelle de 1,200 livres. Une vingtaine de fédéralistes déterminés vont bientôt être envoyés au tribunal révolutionnaire. « Renvoi au comité de Salut public. » (2) Voici la lettre de Laplanche dont l’original existe aux Archives nationales, carton AF11 171, pla¬ quette 1400, pièce n° 37. Le représentant du peuple dans le département du Cal¬ vados, aux représentants composant le comité de Salut public de la Convention nationale. « Caen, le 23 frimaire, l’an II de la République une et indivisible. « Citoyens collègues, « Je venais de vous expédier l’arrêté du conseil de guerre pris en conséquence de la lettre que vous m’avez adressée par un courrier extraordinaire, et que j’ai reçue ce matin à onze heures, lorsque votre second courrier est arrivé à trois heures et de-s’opposer aux vues du comité de Salut public et qu’il a ordonné la marche des troupes. Il revient. Barère termine par la lecture d’un projet d’adresse de la Convention aux habitants des départements méridionaux et à l’armée de la République sous les murs de Toulon. Elle est adoptée. (Voy. ci-dessus cette adresse, page 580 ) ; 2° et par une lettre de l’officier commandant en chef l’armée du Rhin. Elle contient les dé¬ tails d’une affaire dans laquelle le bataillon de l’Indre a emporté à la baïonnette deux redoutes à l’ennemi et s’est emparé de deux drapeaux. Cette lettre rappelle le trait de générosité de ce bataillon consigné dans une séance précédente. Barère annonce que le comité n’a point reçu de nouvelles de l’armée du Nord. Un secrétaire fait lecture d’une adresse du conseil général de la commune de l’Aigle (Laigle), département de l’Orne, dans laquelle ce conseil se plaint du procureur général syndic du dépar¬ tement de la Manche, qui, par malveillance, a diffamé leur département de l’Orne, que cette diffamation a eu lieu dans le sein même de la Convention; tandis qu’au premier cri d’alarme que les rebelles cherchaient à envahir leur ter¬ ritoire, chaque citoyen a offert son bras à la patrie, et a déployé l’énergie du républicanisme, et tandis aussi qu’à la voix du représentant du peuple les canonniers et les citoyens de la pre¬ mière réquisition se sont mis en marche, précé¬ dés de leurs farines, bestiaux et fourrages, et qu’en très peu de temps, plus de 20,000 hommes du département de l’Orne ont fait face aux re¬ belles, qui ont lâchement fui devant eux. Insertion au « Bulletin » (1). Compte rendu du Bulletin de la Convention (2). Le oonseil général de la commune de l’Aigle (Laigle), département de l’Orne, informe la Con¬ vention que lorsque les rebelles ont cherché à envahir leur département, plus de 20,000 hom¬ mes ont fait face à ces brigands, qui ont fui devant eux. Il observe qu’à la voix des repré sentants du peuple, les canonniers, les citoyens de la première réquisition se sont mis en marche, sans calculer leurs besoins et sans inquiétude sur la disette qui les menaçait. mie du soir et m’a apporté l’ordre de me rendre sans délai à Evreux et de suite à Dreux. Je vais m’y con¬ former sur-le-champ quoique affaibli par la fatigue et la continuité de mes travaux révolutionnaires. Je prie le comité d’être bien persuadé de tout le zèle que j’apporterai bien dignement à cette nouvelle marque de son estime et de sa confiance. C’est la plus douce récompense de mon patriotisme. « Salut et fraternité. « Le représentant du peuple, Laplanche. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 281. (2) Second supplément au Bulletin de la Convention de la séance du 28 frimaire an II (mercredi 18 dé¬ cembre 1793).