SÉANCE DU 9 THERMIDOR AN II (SOIR) (27 JUILLET 1794) - N"s 33-36 577 « IV. - Dans aucun cas, l’indemnité pour les officiers ne pourra excéder la gratification de campagne accordée à leur grade par la loi du 5 mai 1793. « V. - Les sous-officiers et soldats recevront en nature le remplacement des effets de petit équipement qui leur auront été pris; et dans le cas où les magasins de la République ne pourroient pas les leur fournir sur-le-champ, la neuvième commission leur en fera payer le prix d’après les traités que l’administration des équipemens aura faits avec les divers fournisseurs. « VI. - Les militaires dont les équipages auront été pris antérieurement au premier frimaire ne recevront aucune indemnité, à moins que leur réclamation n’ait été faite et adressée à la neuvième commission avant le premier floréal. « VII. - Ceux qui ont éprouvé des pertes depuis le premier frimaire jusqu’au premier prairial, feront, sous peine de déchéance, leurs réclamations avant le premier fructidor. « VIII. - A l’avenir, les militaires blessés, malades ou retenus dans une place assiégée, qui ne pourront remplir, dans le délai fixé par l’article II, les formalités exigées par ce même article, auront droit à l’indemnité, en justifiant à la neuvième commission de leurs maladies, blessures ou autres obstacles légitimes, dans le mois pour tout délai, à dater du jour de leur guérison ou de la cessation de leur absence forcée. « IX. - Aucun militaire ne pourra profiter des dispositions de l’article précédent, s’il n’a fait constater ou sa maladie, ou ses blessures, ou son absence forcée, selon les formes exigées par la loi du premier floréal, relative aux militaires remplacés » (l). 33 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyennes Marie-Anne Leduc, femme Valentin, âgée de 74 ans, Marie-Marguerite -Françoise Hebert, femme Quesnel, âgée de 50 ans, et Marie Meunier, toutes trois domiciliées à Fécamp, département de la Seine-Inférieure, lesquelles, après un mois six jours de détention, ont été acquittées et mises en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 5 thermidor présent mois, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacune desdites citoyennes Leduc, Hebert et Meunier, la somme de 150 liv., à titre de secours et indemnité, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). (l) P.V., XLII, 216-218. Minute de la main de Poultier. Décret n° 10 114. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). (2) P.V., XLII, 218. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 113. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). 34 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Nicolas-Auguste Fiot, Jean-Baptiste Colon, et Jacques Ricard, faits prisonniers à l’Isle de Tabago, traduits ensuite à celle de la Barbade, où ils ont resté 11 mois dans les fers, et débarqués après l’échange à Port-Malo, dans le courant de floréal; prenant en considération les maux qu’ils ont soufferts et les pertes qu’ils ont éprouvées, décrète : « Art. I. - Les citoyens Fiot, Colon et Ricard, jouiront des mêmes secours accordés, par le décret du 18 prairial dernier, aux autres citoyens réfugiés de l’Isle de Tabago. « IL - En conséquence, la trésorerie nationale paiera, sur la présentation du présent décret, à chacun desdits citoyens Fiot, Colon et Ricard, la somme de 400 liv., à titre de secours. « III. - Indépendamment de cette somme, ils participeront également aux secours décrétés en faveur des réfugiés des communes envahies par l’ennemi, à compter du jour de leur débarquement. « IV. - Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (l). 35 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Jean-Baptiste Mozère, âgé de 46 ans, père de famille, chargé de quatre enfans en bas âge, cultivateur au Barboux, département du Doubs, lequel, après 3 mois de détention, a été acquitté et mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris du 2 thermidor présent mois, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera au citoyen Mozère la somme de 300 liv., à titre de secours et indemnité, et pour l’aider à retourner dans son domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). 36 BEZARD, au nom du comité de législation : Représentants du peuple, je ne viens pas vous deman-cer un décret d’absolution pour un homme reconnu (l) P.V., XLII, 219. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 124. Reproduit dans Bln, 14 therm (suppl1). (2) P.V., XLII, 219. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 108. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). 37 SÉANCE DU 9 THERMIDOR AN II (SOIR) (27 JUILLET 1794) - N"s 33-36 577 « IV. - Dans aucun cas, l’indemnité pour les officiers ne pourra excéder la gratification de campagne accordée à leur grade par la loi du 5 mai 1793. « V. - Les sous-officiers et soldats recevront en nature le remplacement des effets de petit équipement qui leur auront été pris; et dans le cas où les magasins de la République ne pourroient pas les leur fournir sur-le-champ, la neuvième commission leur en fera payer le prix d’après les traités que l’administration des équipemens aura faits avec les divers fournisseurs. « VI. - Les militaires dont les équipages auront été pris antérieurement au premier frimaire ne recevront aucune indemnité, à moins que leur réclamation n’ait été faite et adressée à la neuvième commission avant le premier floréal. « VII. - Ceux qui ont éprouvé des pertes depuis le premier frimaire jusqu’au premier prairial, feront, sous peine de déchéance, leurs réclamations avant le premier fructidor. « VIII. - A l’avenir, les militaires blessés, malades ou retenus dans une place assiégée, qui ne pourront remplir, dans le délai fixé par l’article II, les formalités exigées par ce même article, auront droit à l’indemnité, en justifiant à la neuvième commission de leurs maladies, blessures ou autres obstacles légitimes, dans le mois pour tout délai, à dater du jour de leur guérison ou de la cessation de leur absence forcée. « IX. - Aucun militaire ne pourra profiter des dispositions de l’article précédent, s’il n’a fait constater ou sa maladie, ou ses blessures, ou son absence forcée, selon les formes exigées par la loi du premier floréal, relative aux militaires remplacés » (l). 33 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyennes Marie-Anne Leduc, femme Valentin, âgée de 74 ans, Marie-Marguerite -Françoise Hebert, femme Quesnel, âgée de 50 ans, et Marie Meunier, toutes trois domiciliées à Fécamp, département de la Seine-Inférieure, lesquelles, après un mois six jours de détention, ont été acquittées et mises en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 5 thermidor présent mois, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacune desdites citoyennes Leduc, Hebert et Meunier, la somme de 150 liv., à titre de secours et indemnité, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). (l) P.V., XLII, 216-218. Minute de la main de Poultier. Décret n° 10 114. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). (2) P.V., XLII, 218. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 113. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). 34 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Nicolas-Auguste Fiot, Jean-Baptiste Colon, et Jacques Ricard, faits prisonniers à l’Isle de Tabago, traduits ensuite à celle de la Barbade, où ils ont resté 11 mois dans les fers, et débarqués après l’échange à Port-Malo, dans le courant de floréal; prenant en considération les maux qu’ils ont soufferts et les pertes qu’ils ont éprouvées, décrète : « Art. I. - Les citoyens Fiot, Colon et Ricard, jouiront des mêmes secours accordés, par le décret du 18 prairial dernier, aux autres citoyens réfugiés de l’Isle de Tabago. « IL - En conséquence, la trésorerie nationale paiera, sur la présentation du présent décret, à chacun desdits citoyens Fiot, Colon et Ricard, la somme de 400 liv., à titre de secours. « III. - Indépendamment de cette somme, ils participeront également aux secours décrétés en faveur des réfugiés des communes envahies par l’ennemi, à compter du jour de leur débarquement. « IV. - Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance » (l). 35 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Jean-Baptiste Mozère, âgé de 46 ans, père de famille, chargé de quatre enfans en bas âge, cultivateur au Barboux, département du Doubs, lequel, après 3 mois de détention, a été acquitté et mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris du 2 thermidor présent mois, « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera au citoyen Mozère la somme de 300 liv., à titre de secours et indemnité, et pour l’aider à retourner dans son domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé » (2). 36 BEZARD, au nom du comité de législation : Représentants du peuple, je ne viens pas vous deman-cer un décret d’absolution pour un homme reconnu (l) P.V., XLII, 219. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 124. Reproduit dans Bln, 14 therm (suppl1). (2) P.V., XLII, 219. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 108. Reproduit dans Bm, 14 therm. (suppl1). 37 578 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE innocent; mais je vous propose d’annuler deux jugements qui prononcent la peine de mort; l’un est du tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, l’autre de celui de cassation; ils sont évidemment rendus contre les dispositions des lois. Le comité de législation n’a pas eu à examiner si François Giquet, qui a été condamné, est coupable ou non; mais il étoit important pour le maintien des principes, sans lesquels régnerait dans les tribunaux l’arbitraire le plus funeste et le plus absolu, il était important, dis-je, d’examiner les motifs du tribunal de cassation : car ce tribunal serait bien dangereux et bien puissant s’il avait le droit d’admettre ou de rejeter des demandes sans se soumettre aux lois que vous lui avez posées. L’objet dont j’ai à vous entretenir est grave sous ce point de vue ; voici les faits : François Giquet, concierge de la maison de détention de Pontoise, a été traduit au tribunal criminel du département de Seine-et-Oise comme prévenu d’avoir contribué à l’évasion d’un prisonnier nommé Folio. L’acte d’accusation porte trois délits : le premier relatif à l’évasion de Folio; le deuxième est qualifié de concussion; le troisième d’avoir détourné une somme dont Giquet était dépositaire par l’effet d’une confiance nécessaire. Le jury de jugement n’a passé aucune déclaration sur les deux derniers délits. Les juges ont appliqué la peine de mort. (Je dois dire ici que l’épouse du condamné a couru à la poursuite du prisonnier échappé, et qu’elle est parvenue à le faire réintégrer dans les prisons de Pontoise.) Giquet s’est pourvu en cassation; il y était bien fondé, car la loi du 1er brumaire, sur les ouvertures de cassation en matière criminelle, commande au tribunal de cassation d’annuler lorsque les jurés ont omis de prononcer sur quelques-uns des délits portés dans un acte d’accusation. Ici le jury de jugement a omis de prononcer sur deux délits, et cependant le tribunal de cassation a rejeté. Il faut que je vous rende compte de ses motifs; car fort heureusement vous l’avez assujetti à motiver ses jugements, soit qu’il admette, soit qu’il rejette. « Attendu est-il dit au jugement, que le seul moyen proposé par Giquet pour la cassation est, en d’autres termes, une demande en révision de la procédure, à l’effet d’être jugé de nouveau et d’obtenir par là la réparation d’une erreur de fait dans la déclaration ds jurés de jugement; « Attendu que le tribunal de cassation n’est autorisé par aucune loi à annuler la déclaration des jurés sous prétexte d’erreur, ni à ordonner dans ce cas une révision qui, dans l’espèce, a eu lieu dans les termes de la loi du 11 septembre 1791, puisque le tribunal criminel a ordonné et fait procéder à un nouvel examen, d’où est résultée une deuxième déclaration de jurés de jugement, à laquelle ont [concouru les trois jurés adjoints, conformément à l’article XXVII du titre VIII ; « Attendu au surplus (j’appelle ici votre attention) qu’il n’existe dans la procédure d’autre irrégularité qu’en ce que le jury de jugement n’a passé aucune déclaration sur deux autres délits, l’un qualifié de concussion, l’autre d’avoir détourné une somme dont Giquet était dépositaire par l’effet d’une confiance nécessaire, énoncés dans l’acte d’accusation ; le tout comme le prescrivait, à peine de nullité, la loi du 1er brumaire, qui exigeait sous la même peine de recourir à des jurés spéciaux d’accusation et de jugement, relativement à l’instruction des délits de concussion ; « Attendu que l’accusateur public n’a point réclamé à cet égard devant le tribunal criminel, et ne s’est pas non plus pourvu en cassation, en telle sorte que l’annulation de la procédure n’est point provoquée à raison de la contravention dont la répression ne tendrait qu’à aggraver le sort du condamné, et à le remettre en jugement sur les deux autres chefs d’accusation; « Attendu enfin que, par le seul effet de la loi du 13 brumaire, Giquet a obtenu la commutation de la peine, d’après le fait de la réintégration de l’évadé dans la maison d’arrêt, sans qu’il y ait lieu de rien prononcer par rapport à ce... le tribunal rejette, etc. etc. » Il y a de la part du tribunal mépris et ignorance des lois. Il y a mépris, puisque dans ses motifs il reconnaît deux nullités qu’à la vérité il qualifie de simple irrégularité. Ces deux nullités prononcées par la loi du 1er brumaire résultent : la première, de ce que le jury de jugement a omis de prononcer sur deux délits portés en l’acte d’accusation ; la deuxième, de ce qu’il aurait fallu recourir à des jurés spéciaux relativement à l’instruction des délits de concussion. Pourquoi le tribunal de cassation, après avoir reconnu les faits et cité la loi, ne l’exécute-t-il pas ? Parce que, dit-il, l’accusateur public n’a point réclamé et ne s’est pas pourvu en cassation, et attendu que la répression de ces contraventions ne tendrait qu’à aggraver le sort du condamné. Ces deux considérations peuvent-elles toucher la Convention nationale ? Quoi ! parce que l’accusateur public près un tribunal criminel n’a pas fait son devoir; parce qu’il n’a pas réclamé pour l’entière exécution de la loi, le tribunal de cassation doit machinalement la violer, lui qui est le tribunal unique dans toute l’étendue de la république qui soit chargé du maintien des principes et des lois ! Ensuite il dit que la répression de ces contraventions ne peut qu’aggraver le sort des condamnés. Et que lui importe, à ce tribunal, s’il y a des contraventions ? Est-il des considérations qui puisse déterminer des juges à tolérer, légaliser des contraventions ? Il est impossible que l’édifice de votre législation puisse subsister si les hommes qui doivent veiller à sa conservation en détruisent les bases. Ici les principes sont tout, ils doivent être rigoureusement maintenus. J’ai dit aussi qu’il y avait ignorance des lois de la part du tribunal de cassation dans l’espèce qui nous occupe. Voici comment : il prétend que, par le seul effet de la loi du 13 brumaire, Giquet a obtenu la commutation de sa peine par la réintégration de l’évadé dans les prisons. Cela est faux; je vais vous lire la loi. Comme vous voyez, il n’y a pas, dans la loi du 13 brumaire, commutation de peine dans le cas où le prisonnier est réintégré. Mais voyons le décret du 17 ventôse; il commue effectivement la peine; mais ce n’est pas lorsque le concierge est complice de l’évasion. 578 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE innocent; mais je vous propose d’annuler deux jugements qui prononcent la peine de mort; l’un est du tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, l’autre de celui de cassation; ils sont évidemment rendus contre les dispositions des lois. Le comité de législation n’a pas eu à examiner si François Giquet, qui a été condamné, est coupable ou non; mais il étoit important pour le maintien des principes, sans lesquels régnerait dans les tribunaux l’arbitraire le plus funeste et le plus absolu, il était important, dis-je, d’examiner les motifs du tribunal de cassation : car ce tribunal serait bien dangereux et bien puissant s’il avait le droit d’admettre ou de rejeter des demandes sans se soumettre aux lois que vous lui avez posées. L’objet dont j’ai à vous entretenir est grave sous ce point de vue ; voici les faits : François Giquet, concierge de la maison de détention de Pontoise, a été traduit au tribunal criminel du département de Seine-et-Oise comme prévenu d’avoir contribué à l’évasion d’un prisonnier nommé Folio. L’acte d’accusation porte trois délits : le premier relatif à l’évasion de Folio; le deuxième est qualifié de concussion; le troisième d’avoir détourné une somme dont Giquet était dépositaire par l’effet d’une confiance nécessaire. Le jury de jugement n’a passé aucune déclaration sur les deux derniers délits. Les juges ont appliqué la peine de mort. (Je dois dire ici que l’épouse du condamné a couru à la poursuite du prisonnier échappé, et qu’elle est parvenue à le faire réintégrer dans les prisons de Pontoise.) Giquet s’est pourvu en cassation; il y était bien fondé, car la loi du 1er brumaire, sur les ouvertures de cassation en matière criminelle, commande au tribunal de cassation d’annuler lorsque les jurés ont omis de prononcer sur quelques-uns des délits portés dans un acte d’accusation. Ici le jury de jugement a omis de prononcer sur deux délits, et cependant le tribunal de cassation a rejeté. Il faut que je vous rende compte de ses motifs; car fort heureusement vous l’avez assujetti à motiver ses jugements, soit qu’il admette, soit qu’il rejette. « Attendu est-il dit au jugement, que le seul moyen proposé par Giquet pour la cassation est, en d’autres termes, une demande en révision de la procédure, à l’effet d’être jugé de nouveau et d’obtenir par là la réparation d’une erreur de fait dans la déclaration ds jurés de jugement; « Attendu que le tribunal de cassation n’est autorisé par aucune loi à annuler la déclaration des jurés sous prétexte d’erreur, ni à ordonner dans ce cas une révision qui, dans l’espèce, a eu lieu dans les termes de la loi du 11 septembre 1791, puisque le tribunal criminel a ordonné et fait procéder à un nouvel examen, d’où est résultée une deuxième déclaration de jurés de jugement, à laquelle ont [concouru les trois jurés adjoints, conformément à l’article XXVII du titre VIII ; « Attendu au surplus (j’appelle ici votre attention) qu’il n’existe dans la procédure d’autre irrégularité qu’en ce que le jury de jugement n’a passé aucune déclaration sur deux autres délits, l’un qualifié de concussion, l’autre d’avoir détourné une somme dont Giquet était dépositaire par l’effet d’une confiance nécessaire, énoncés dans l’acte d’accusation ; le tout comme le prescrivait, à peine de nullité, la loi du 1er brumaire, qui exigeait sous la même peine de recourir à des jurés spéciaux d’accusation et de jugement, relativement à l’instruction des délits de concussion ; « Attendu que l’accusateur public n’a point réclamé à cet égard devant le tribunal criminel, et ne s’est pas non plus pourvu en cassation, en telle sorte que l’annulation de la procédure n’est point provoquée à raison de la contravention dont la répression ne tendrait qu’à aggraver le sort du condamné, et à le remettre en jugement sur les deux autres chefs d’accusation; « Attendu enfin que, par le seul effet de la loi du 13 brumaire, Giquet a obtenu la commutation de la peine, d’après le fait de la réintégration de l’évadé dans la maison d’arrêt, sans qu’il y ait lieu de rien prononcer par rapport à ce... le tribunal rejette, etc. etc. » Il y a de la part du tribunal mépris et ignorance des lois. Il y a mépris, puisque dans ses motifs il reconnaît deux nullités qu’à la vérité il qualifie de simple irrégularité. Ces deux nullités prononcées par la loi du 1er brumaire résultent : la première, de ce que le jury de jugement a omis de prononcer sur deux délits portés en l’acte d’accusation ; la deuxième, de ce qu’il aurait fallu recourir à des jurés spéciaux relativement à l’instruction des délits de concussion. Pourquoi le tribunal de cassation, après avoir reconnu les faits et cité la loi, ne l’exécute-t-il pas ? Parce que, dit-il, l’accusateur public n’a point réclamé et ne s’est pas pourvu en cassation, et attendu que la répression de ces contraventions ne tendrait qu’à aggraver le sort du condamné. Ces deux considérations peuvent-elles toucher la Convention nationale ? Quoi ! parce que l’accusateur public près un tribunal criminel n’a pas fait son devoir; parce qu’il n’a pas réclamé pour l’entière exécution de la loi, le tribunal de cassation doit machinalement la violer, lui qui est le tribunal unique dans toute l’étendue de la république qui soit chargé du maintien des principes et des lois ! Ensuite il dit que la répression de ces contraventions ne peut qu’aggraver le sort des condamnés. Et que lui importe, à ce tribunal, s’il y a des contraventions ? Est-il des considérations qui puisse déterminer des juges à tolérer, légaliser des contraventions ? Il est impossible que l’édifice de votre législation puisse subsister si les hommes qui doivent veiller à sa conservation en détruisent les bases. Ici les principes sont tout, ils doivent être rigoureusement maintenus. J’ai dit aussi qu’il y avait ignorance des lois de la part du tribunal de cassation dans l’espèce qui nous occupe. Voici comment : il prétend que, par le seul effet de la loi du 13 brumaire, Giquet a obtenu la commutation de sa peine par la réintégration de l’évadé dans les prisons. Cela est faux; je vais vous lire la loi. Comme vous voyez, il n’y a pas, dans la loi du 13 brumaire, commutation de peine dans le cas où le prisonnier est réintégré. Mais voyons le décret du 17 ventôse; il commue effectivement la peine; mais ce n’est pas lorsque le concierge est complice de l’évasion. SÉANCE DU 9 THERMIDOR AN II (SOIR) (27 .JUILLET 1794) - Nos 37-39 579 Enfin, quand l’annulation du jugement rendu contre Giquet ne pourrait qu’aggraver son sort, qu’importe au tribunal ? Doit-il connaître les personnes ? Il ne doit voir que la loi. Citoyens, vous ne devez pas souffrir que des jugements évidemment nuis, rendus contre la volonté bien claire de la loi, soient exécutés. Cependant Giquet peut être conduit à l’échafaud d’un moment à l’autre. Il est important pour le maintien des principes, qui sont sous la sauvegarde de la justice que vous adoptiez le projet de décret que je vous soumets. Le comité pense aussi que son insertion au Bulletin est nécessaire pour rappeler aux tribunaux criminels, aux accusateurs publics et aux membres du tribunal de cassation, que les lois ne leur sont confiées que pour qu’ils les respectent et en maintiennent rigoureusement l’exécution. Voici le projet de décret [adopté] (l) : « La Convention, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son comité de législation sur la pétition de l’épouse de Giquet, concierge de la maison de détention de Pontoise, qui réclame contre un jugement du département de Seine-et-Oise, qui a condamné son mari à la peine de mort, et dont la demande en cassation a été rejetée par jugement du 24 messidor; « Considérant qu’il résulte des motifs du tribunal de cassation, que son jugement est rendu contre le vœu manifeste de la loi du premier brumaire dernier, puisque François Giquet est accusé de trois délits, et que les jurés ont omis de prononcer sur deux, ce qui donne ouverture à cassation, suivant le N° 3 de l’article 2 de la loi susdatée qui s’exprime ainsi : « Il y a nullité lorsque les jurés ont prononcé sur d’autres délits que ceux portés dans l’acte d’accusation, ou qu’ils ont omis de prononcer sur quelques-uns de ceux qui y sont énoncés : « Décrète que le jugement du tribunal de cassation du 24 messidor, celui du tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, qui condamne Giquet à la peine de mort, sont annuités, ainsi que tés déclarations des jurés qui ont précédé 1e jugement. « Renvoie Giquet devant le tribunal criminel du département de l’Oise, pour être de nouveau mis en jugement sur tés délits mentionnés en l’acte d’accusation dont il s’agit. « Le présent décret ne sera point imprimé ; il sera inséré au bulletin de correspondance, et envoyé sans délai à l’accusateur public du tribunal Criminel du département de Seine-et-oise, et au tribunal de cassation » (2). 37 « La Convention nationale, après avoir entendu 1e rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Paul Leblanc, (1) Mon., XXI, 348. (2) P.V., XLII, 220. Minute de la main de Bezard. Décret n° 10 115. Reproduit dans Bm, 13 therm (2e suppl1) ; Mess. Soir, n° 707. Voir Arch. pari, t. XCI, séance du 28 prair. n° 47. âgé de 60 ans, et Jean-Louis Leblanc, son fils, tous deux cordonniers et pères de famille, domiciliés à Meru, département de l’Oise, lesquels, après environ 3 mois de détention, ont été acquittés et mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 5 thermidor présent mois; « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacun desdits citoyens Paul et Jean-Louis Leblanc la somme de 300 liv. à titre de secours et indemnité, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé »(l). 38 « La Convention nationale, sur la proposition d’un membre, décrète qu’au vu du présent décret il sera payé au citoyen Larénière, capitaine au 2e bataillon de Lot-et-Garonne, qui a perdu une jambe d’un coup de canon en combattant contre tés satellites des despotes, la somme de 1,000 liv., à titre de secours provisoire; renvoie au comité de liquidation pour fixer la pension à laquelle ledit citoyen Larénière à droit. « Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de la Convention nationale » (2). 39 « La convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours sur la pétition de la société populaire de Burges-les-Bains, district de Cérilly, département de l’Ailier, en faveur de la veuve et des enfans du citoyen Lecamus, agent national près ladite commune, qui, en revenant de rendre compte à l’administration du district du succès de la fabrication du charbon destiné à faire de la poudre dont il étoit chargé, a été renversé par son cheval et est mort sur-le-champ, décrète : « Art. I. - Il sera mis, par la trésorerie nationale, une somme de 6001., à la disposition de la municipalité de Burges-les-Bains, pour être remise sans délai à la veuve et aux enfans du citoyen Lecamus, à titre de secours provisoire. « II. - Le comité de liquidation, auquel la pétition sera renvoyée, demeure chargé de régler la pension, s’il y a lieu. « III. - Le présent décret ne sera inséré qu’au bulletin de correspondance » (3). (l) P.V., XLII, 221. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 121. Reproduit dans Bin, 17 therm (suppl1). (2) P.V., XLII, 221. Minute anonyme. Décret n° 10 158, en date du 10 therm. II. J. Sablier, n° 1463. (3) P.V., XLII, 221. Minute de la main de Collombel. Décret n° 10 118. Reproduit dans Bm, 13 therm. (2e suppl1); Débats, n° 675; J. Sablier, n° 1463. SÉANCE DU 9 THERMIDOR AN II (SOIR) (27 .JUILLET 1794) - Nos 37-39 579 Enfin, quand l’annulation du jugement rendu contre Giquet ne pourrait qu’aggraver son sort, qu’importe au tribunal ? Doit-il connaître les personnes ? Il ne doit voir que la loi. Citoyens, vous ne devez pas souffrir que des jugements évidemment nuis, rendus contre la volonté bien claire de la loi, soient exécutés. Cependant Giquet peut être conduit à l’échafaud d’un moment à l’autre. Il est important pour le maintien des principes, qui sont sous la sauvegarde de la justice que vous adoptiez le projet de décret que je vous soumets. Le comité pense aussi que son insertion au Bulletin est nécessaire pour rappeler aux tribunaux criminels, aux accusateurs publics et aux membres du tribunal de cassation, que les lois ne leur sont confiées que pour qu’ils les respectent et en maintiennent rigoureusement l’exécution. Voici le projet de décret [adopté] (l) : « La Convention, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son comité de législation sur la pétition de l’épouse de Giquet, concierge de la maison de détention de Pontoise, qui réclame contre un jugement du département de Seine-et-Oise, qui a condamné son mari à la peine de mort, et dont la demande en cassation a été rejetée par jugement du 24 messidor; « Considérant qu’il résulte des motifs du tribunal de cassation, que son jugement est rendu contre le vœu manifeste de la loi du premier brumaire dernier, puisque François Giquet est accusé de trois délits, et que les jurés ont omis de prononcer sur deux, ce qui donne ouverture à cassation, suivant le N° 3 de l’article 2 de la loi susdatée qui s’exprime ainsi : « Il y a nullité lorsque les jurés ont prononcé sur d’autres délits que ceux portés dans l’acte d’accusation, ou qu’ils ont omis de prononcer sur quelques-uns de ceux qui y sont énoncés : « Décrète que le jugement du tribunal de cassation du 24 messidor, celui du tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, qui condamne Giquet à la peine de mort, sont annuités, ainsi que tés déclarations des jurés qui ont précédé 1e jugement. « Renvoie Giquet devant le tribunal criminel du département de l’Oise, pour être de nouveau mis en jugement sur tés délits mentionnés en l’acte d’accusation dont il s’agit. « Le présent décret ne sera point imprimé ; il sera inséré au bulletin de correspondance, et envoyé sans délai à l’accusateur public du tribunal Criminel du département de Seine-et-oise, et au tribunal de cassation » (2). 37 « La Convention nationale, après avoir entendu 1e rapport de son comité des secours publics sur la pétition des citoyens Paul Leblanc, (1) Mon., XXI, 348. (2) P.V., XLII, 220. Minute de la main de Bezard. Décret n° 10 115. Reproduit dans Bm, 13 therm (2e suppl1) ; Mess. Soir, n° 707. Voir Arch. pari, t. XCI, séance du 28 prair. n° 47. âgé de 60 ans, et Jean-Louis Leblanc, son fils, tous deux cordonniers et pères de famille, domiciliés à Meru, département de l’Oise, lesquels, après environ 3 mois de détention, ont été acquittés et mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 5 thermidor présent mois; « Décrète que, sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera à chacun desdits citoyens Paul et Jean-Louis Leblanc la somme de 300 liv. à titre de secours et indemnité, et pour les aider à retourner dans leur domicile. « Le présent décret ne sera pas imprimé »(l). 38 « La Convention nationale, sur la proposition d’un membre, décrète qu’au vu du présent décret il sera payé au citoyen Larénière, capitaine au 2e bataillon de Lot-et-Garonne, qui a perdu une jambe d’un coup de canon en combattant contre tés satellites des despotes, la somme de 1,000 liv., à titre de secours provisoire; renvoie au comité de liquidation pour fixer la pension à laquelle ledit citoyen Larénière à droit. « Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de la Convention nationale » (2). 39 « La convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours sur la pétition de la société populaire de Burges-les-Bains, district de Cérilly, département de l’Ailier, en faveur de la veuve et des enfans du citoyen Lecamus, agent national près ladite commune, qui, en revenant de rendre compte à l’administration du district du succès de la fabrication du charbon destiné à faire de la poudre dont il étoit chargé, a été renversé par son cheval et est mort sur-le-champ, décrète : « Art. I. - Il sera mis, par la trésorerie nationale, une somme de 6001., à la disposition de la municipalité de Burges-les-Bains, pour être remise sans délai à la veuve et aux enfans du citoyen Lecamus, à titre de secours provisoire. « II. - Le comité de liquidation, auquel la pétition sera renvoyée, demeure chargé de régler la pension, s’il y a lieu. « III. - Le présent décret ne sera inséré qu’au bulletin de correspondance » (3). (l) P.V., XLII, 221. Minute de la main de Briez. Décret n° 10 121. Reproduit dans Bin, 17 therm (suppl1). (2) P.V., XLII, 221. Minute anonyme. Décret n° 10 158, en date du 10 therm. II. J. Sablier, n° 1463. (3) P.V., XLII, 221. Minute de la main de Collombel. Décret n° 10 118. Reproduit dans Bm, 13 therm. (2e suppl1); Débats, n° 675; J. Sablier, n° 1463.