SÉANCE DU 14 THERMIDOR AN 11 (D' AOÛT 1794) - N° 14 37 falloit-il de plus à l’exposant ? N’étoit-ce pas là un titre, et un titre bien bon, bien authentique ? La Compagnie pouvait-elle se refuser à lui compter une somme dont il lui avait été compté à elle-même, à moins de vouloir retenir une somme qui ne lui appartenait pas ? Telle étoit la question avant la suppression de la Compagnie, et telle elle est encore au-jourdhuy; cet événement n’a pu rien changer aux droits de l’exposant; La Nation, en devenant aux droits et aux obligations de la Compagnie, est devenue sa débitrice, comme l’était la Compagnie. On a cherché à embrouiller cette affaire si simple en y faisant intervenir un prétendu fils d’alican savaye; mais c’est le comble de l’effronterie et du ridicule que d’avoir mis un pareil personnage en scène (1). on lui a fait réclamer le montant du billet de 40.000 roupies, comme si c’avait été une créance de son père; et c’était au contraire sa propre dette, c’était à lui que les 40.000 roupies avoient été comptées; c’étoit à lui que le prêt en avait été fait pour le compte de la Compagnie. Depuis quand donc un débiteur peut-il se faire de sa propre dette un titre de créance, et au lieu de rendre la somme qu’il a empruntée, se la faire compter une seconde fois ? c’est pourtant là ce qui résulte du jugement du tribunal du 4e arrondissement, qui authorise ce prétendu fils D’alican savaye à poursuivre la liquidation des 40.000 roupies, qu’il l’authorisât à poursuivre le payement de ce qui pouvait être dû par l’ancienne Compagnie des indes à la succession de son père, à la bonne heure, cela étoit juste, mais il est évident qu’il ne peut jamais avoir droit aux 40.000 roupies. Au reste, les loix du Mogol, s’il étoit possible de les invoquer ici, loin de prononcer la nullité du billet dont il s’agit, en assureroient au contraire la validité, il est écrit en françois comme il devoit l’être, puisque c’étoit un français qui l’écrivoit; il est scellé de la chappe d’alikan savaye, ainsi que cela se pratique dans le pays (2); en un mot, il est parfaittement conforme aux dispositions du Coran que l’on suit dans l’Empire du Mogol. Quant au transport, que l’on dit n’être pas signé, ce n’est qu’une misérable chicane, parce qu’on sait qu’il étoit d’usage dans l’Inde de faire faire ses reconnois-sances au nom de ses domestiques; c’est une confusion des loix françaises et de celles du pays, de l’ordonnance de 1673 qui exige qu’un transport soit signé, et du Coran qui ne l’exige pas. s’il ne l’a pas été dans l’espèce, c’est que Joannis Macartiche, comme tous les gens de ce pays, ne savait pas signer; Mais il n’en était pas besoin, il suffisait de la simple remise du billet : on ne connoît pas dans l’inde d’autre mode de translation de propriété de cette nature. D’après ces explications, l’exposant se flatte que les représentans du Peuple, prenant en considération, et l’injustice extrême dont il est victime, et la violation des loix qui a consommé cette injustice, et l’extrême besoin où il se (1) En note : ce sont les Monneron qui en sont les acteurs. (2) En note : Locus régit actum. trouve d’une créance aussi légitime, s’empressera d’anéantir tout ce qui a été fait, et de le rétablir dans tous ses droits. BERLIOZ ( chargé de pouvoir). Renvoyé au comité de législation (1). 14 [Le Cn Raguideau, notaire public au départ 1 de Paris, à la Conv.; s.l.n.d.} (2). Citoyens Représentans Je demande mon rétablissement dans les fonctions de notaire public au département de Paris; voici les faits et les motifs de ma demande. Une loi du 1°' novembre 1792 (v.s.), m’a prescrit, pour que je pusse continuer mes fonctions, de rapporter un certificat de civisme vérifié et approuvé par les directoires de district et de département, j’ai rempli ces formalités. Une autre loi a, depuis, exigé que mon certificat de civisme fut visé par le Comité révolutionnaire de la section dans laquelle je me trouve, j’ai en conséquence remis mon certificat de civisme au comité, et j’en ai porté le récépissé au département conformément à son arrêté du... Cet arrêté portoit que les notaires qui, au 20 pluviôse dernier, n’auroient pas fourni leur visa seroient destitués. A cette époque du 20 pluviôse, le Comité de la section n’avoit encore accordé de visa à aucun notaire de la section, quoi qu’il y en eût un grand nombre; depuis il n’en a même accordé qu’un, et c’est le mien. Je dis que le Comité n’en a accordé aucun avant l’époque fatale, parce que ce fait est important, en ce qu’il indique que ce Comité de l’une des sections les plus populeuses de Paris, et, par conséquent, extrêmement occupé, croyoit devoir donner la préférence sur les affaires des notaires à celles d’un intérêt plus général. Je n’avois donc point de visa au 20 pluviôse, et quoique j’eusse été plusieurs fois au Comité, je n’avois pu parvenir a luy parler en assemblée. Je venois de perdre par un décret du 7 du même mois plus de 300 000 liv. sur la liquidation de mon cidevant office de notaire. Père de famille et sans fortune, j’étois dans toute l’agitation d’un homme qui ne sçavoit comment satisfaire à ses engagemens vis à vis d’une foule de bons citoyens qui avoient sacrifié leur bourse à son établissement. Pour comble de malheur, ma femme, malade depuis longtems, étoit à toute extrémité, cette circonstance-là surtout influa sur le choix du parti que j’avois à prendre. Le département m’accorda 24 heures, je retournai 2 fois au Comité, il étoit rempli de monde et je ne pus aborder, j’allois donc être destitué faute de visa. je lus la loi sur les gens suspects; ma conscience (1) Mention marginale datée du 14 therrn. II et signée BAR. (2) D III 378. doss. intitulé Liasse retrouvée dans D III 379. 38 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE me disoit que je ne l’étois pas, mais je crus voir dans la loy qu’un fonctionnaire public destitué étoit dans le cas de l’arrestation, cela arrivant, je vis clairement que c’étoit pour ma femme le coup mortel, je donnai donc ma démission, une lettre que j’y joignis expliqua une partie de ces motifs, et ma démission, quoique forcée, fut acceptée. Depuis le Comité m’a rendu justice : il m’a accordé mon visa. Ma démission fut forcée; les faits que je viens de rapporter et, de plus, ma lettre au département, et le récit que je fis dans le temps à plusieurs membres du département qui y siègent encore aujourd’huy, le prouvent. Indépendament de ce motif, mon âge (je n’ai que 35 ans) les pertes que j’ai éprouvées, mon patriotisme et les témoignages que la section m’en donne depuis 5 ans, ne parlent-ils pas en ma faveur ? Enfin il reste encore environ 30 places vacantes, et les sujets du concours, au nombre de 22, sont Remplis; ma place reste avec environ 29 ou 30 autres, l’intérêt public lui-même vient donc au secours de ma demande. Raguideau J’observe que je n’ai pour vivre, et faire vivre ma femme et ma famille et pour payer le déficit que le décret du 7 Pluviôse m’a occasionné, que l’espoir de reprendre les fonctions auxquelles 12 années de cléricature et d’un travail laborieux m’avoient conduit. Renvoyé au comité de législation (1). (1) Mention marginale datée du 14 therm. II et signée A. Dumont. Sur une copie, jointe à cette pétition, on lit, à la suite du texte ci-dessus, le Nota suivant : « l’original de cette pétition a été renvoyé au Comité de l’Egislation dans la Seconde du 14 Thermidor. Le Cen. Bar est nomé rapporteur » et, en marge : « Le comité arrête qu’il sera proposé à la Convention Nale de réintégrer le Citoyen raguideau ». 15 [L’Agent national près le District de Chauny, département de l’Aisne, informe la Convention nationale qu’il vient de faire arrêter à Bléran-court le nommé d’Aubigny, adjoint au ministre de la guerre, ainsi que son secrétaire, et a fait mettre les scellés sur leurs papiers. Il proteste que ses concitoyens ne reconnoissent qu’elle; qu’ils sont prêts à mourir plutôt que de souffrir qu’il lui soit porté la moindre atteinte, et qu’ils veulent la République ou la mort(l)]. 16 [Un secrétaire fait lecture d’un décret d’hier, qui ordonne la mention honorable et l’insertion au bulletin de la bravoure et de l’intrépidité du citoyen Mathis. Ce citoyen avoit reçu les ordres dans la nuit du 9 au 10 de rassembler sa légion, afin de défendre la représentation nationale. Il entre dans la cour du maire, et est bientôt entouré par des monstres qui lui portent 21 coups de sabre. Il fut ensuite jeté dans une prison, où il resta jusqu’à 5 heures du matin sans secours. Renvoyé aux comités de salut public et de sûreté générale (2)]. (1) B1", 25 therm. (2e suppf); J. Paris, n° 579. Rêp., n° 238. J. Fr., n° 688; Audit, nat-, n° 689. (2) Ann. patr., n° DLXXVIII.