[13 décembre 1190.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. d’abord avec force auprès du Dey sur la restitution des navires; que le Dey prit de l’humeur, et qu’il fallut se désister pour pouvoir négocier. Les armateurs ont rempli toutes les obligations imposées pour naviguer librement. Leurs navires ont été enlevés au mépris du droit des gens. Ils demandent justice, protection ou indemnité. Le gouvernement s’y refuse. C’est donc à la nation à s’en charger� par suite des principes contenus dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Le gouvernement repousse leur demande, affaiblit leurs droits, excuse sa faiblesse, rejette son injustice sur les circonstances, oppose enfin à fous les principes consacrés par l’Assemblée un système subversif de toute société. Les représentants de la nation ne peuvent pas balancer entre ces deux autorités. C’e-t donc à la source où MM. de Bacque et Ghapeilon ont puisé leur défense, c’est dans le droit sacré des principes éternels, immuables de tous les temps, de tous les lieux, que j’ai dû chercher la solution des questions suivantes : 1° Le citoyen, injustement dépouillé par une puissance étrangère, a-t-il le droit de réclamer de la nation justice et protection? 2° Quelle est la mesure de la protection que la société doit aux citoyens? 3° La nation peut-elle imposer à uu petit nombre d’individus des sacrifices qui ont pour objet l’intérêt commun? 4° En tin, la nation n’est-etle pas responsable envers les particuliers du fait de ses agents? Je lis dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen (Ar t. 2) : Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’humme : ces droits sont ia liberté, la propriété, la sûreté, la résistance a l’oppression. (Art. 12) La garantie des droits de l’immme et du citoyen nécessite une force publique; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous. (Art. 16) Toute société dans laquelle ia garantie des droits n’est pas assurée n’a point de Constitution. (Art. 17) Les propriétés étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. 11 est évident, d’après ces textes, que tout individu doit trouver dans l'association, dont U est membre, la conservation de sa liberté, de sa propriété : toutes les fuis qu’elles sont injustement attaquées, le citoyen a un droit incontestable à la protection de la société emière. La mesure de cette protection n'a d’autres bornes que les moyens de ia société: ces moyeu s sont ia force publique, établie pour la garantie des droits du citoyen. Celte force e�t instituée pour l’avantage de tous; elle n'a d’autre objet que de garantir à tous et à chacun en particulier, liberté, sûreté, propriété ; elle doit donc être employée à protéger ie citoyen contre la violence ; elle ne peut être refusée à quiconque la réclame pour venger une injuste oppression. Toute société dans laquelle la garantie des droits rTest pas assurée n’a point de Constitution; sans Constitution point de liberté, point de sûreté, point de propriété : l’arbitraire remplace la loi ; c’est le terme du despotisme oriental. Entin la conservation des droits imprescriptibles de l’homme étant le but unique de toute 433 association politique, les propriétés doivent être inviolables, comme la sûreté, la liberté. Nul ne peut donc en être privé pour l’intérêt public, que sous la condition d’un juste dédommagement. Les trois premières questions sont résolues par les principes avoués et consacrés par l’Assemblée. La quatrième m’a paru si simple que je n’ai pas cru devoir ajouter à l’observation présentée par MM. Ghauellon et Tronchaud. Tous les principes de justice, ont-ils dit, se sont toujours réunis pour soumettre à la réparation l’auteur d’un dommage. Le gouvernement est responsable de l’erreur de ses agents, sauf leur responsabilité personnelle envers la nation; mais le citoyen ne peut jamais reconnaître d’intermédiaire entre la nation et lui, parce que les agents de la nation ne sont et ne peuvent être que ses représentants dans la portion d’autorité ou d’administration qu’elle leur a confiée. Si MM. Chapellon et Tronchaud ont prouvé que la perte qu’ils ont essuyée n’est que le fait d’un agent du gouvernement, la nation est donc responsable ; elle est tenue à indemnité. Voix nombreuses : Concluez 1 Lisez votre décret! D'autres voix : L’ordre du jour ! M. Herwin. D’après ces obervations, vos comités n’ont pu hésiter à conclure que les réclamations de MM. de Bacque et Chapellon, injustement dépouillés par une paissance étrangère, sont fondées, que ia nation leur doit une protection efficace, et ils vous proposent le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, a ivs avoir entendu. le rapport de ses comités diplomatique, d’agriculture et de commerce, réunis; « Considérant que le but de toute association politique est la conservation des droits du citoyen, et qu’une juste indemnité est due à celui dont l’intérêt particulier a été sacrifié à des considérations d’utilité générale ; « Décrète : 1° qu’il y a lieu à indemnité envers MM. de Bacque frères, Chapellon et Tronchaud ; « 2° Que les chambres de commerce de Marseille et de Dunkerque évalueront chacune, pour l’armateur do son port, cette indemnité, d’après les comptes et pièces justificatives qui leur seront remis par leurs armateurs respectifs; « 3° Que ces chambres de commerce enverront leur arbitrage au comité de liquidation après le rapport duquel l’Assemblée nationale assignera le payement des sommes accordées sur la caisse de l’extraordinaire ». Quelques voix proposent ia question préalable. M. d’André. LesacrificedesdroitsdeMM.de Bacque et Chapellon a valu à la nation le renouvellement du traité obtenu par M. de Senneville. La nation entière a donc profité. Donc it est dû une indemnité. Voilà, en deux mots toute l’affaire. Je demande que le projet de décret soit adopté. M. Chabroud. Je crois que l’intention de l’Assemblée est de renvoyer purement et simplement au pouvoir exécutif pour procéder à la fixation de l’indemnité, car it n’est pas douteux qu’elle ne soit due, M. d’André. Le gouvernement a déjà refusé