404 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 jnin 1790.] que la disposition des forces militaires qui pourront y être employées, et la faculté de requérir les troupes réglées et les gardes nationales, seront remises entre leurs mains, la municipalité de Nîmes demeurant privée de cette partie de ses fonctions, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné. » M. le Président lève la séance à 4 heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE PELLETIER. Séance du mardi 22 juin 1790, au matin (1). La séance est ouverte à 9 heures du matin. M. de Delley, secrétaire , donne lecture du procès-verhai de la séance d’hier. M. Bouche. Je demande que l’article 14 du titre III du décret sur l’organisation du clergé qui porte qu’il sera donné 800 livres de pension à un vicaire, soit renvoyé au comité pour y être rédigé d’une façon claire, précise et qui ne prête pas à l’arbitraire. En effet, cet article, dans sa teneur actuelle, peut mettre dans un temps fort court, peut-être dans 12 ou 15 ans, plus de dix mille pensions de 800 livres à la charge de l’État. Il suffira pour cela, d’un peu de complaisance de la part de MM. les médecins qui délivreront des certificats de maladie et d’un peu de fainéantise de la part de MM. les vicaires qui ne tarderont pas à recouvrer une santé parfaite. M. Frétean. J’appuie d’autant plus les réflexions de M. Bouche que le comité des pensions a été unanimement d’avis de vous proposer de n’accorder aucune pension qu’après 10 ans de services et, dans ce cas, de ne donner aux pensionnaires que le quart de leur traitement. M. Martînean, rapporteur. Vous avez décrété l’article 14 et cet article doit être maintenu sans modification. En effet, la confiance qui est due aux municipalités et aux administrations de département et de district, chargées de l’exécution de l’article, repousse toutes les appréhensions. Quant à la faiuéantise, elle ne se suppose pas dans un corps qui a toujours fait preuve de zèle et de dévouement. M. le Président consulte l’Assemblée qui adopte le procès-verbal sans changement. M. Martineau, rapporteur du comité ecclésiastique. Dans la séance d’hier, vous avez adopté l’article 5 du titre IV du projet de décret sur la constitution civile du clergé, sous la condition d’une nouvelle rédaction. Pour déférer aux ordres de l’Assemblée, et pour rendre plus intelligibles les dispositions que renferme l’article décrété, votre comité a été obligé de le diviser en trois articles dont je vais vous donner lecture. « Art. 5. Les évêques, les curés et les vicaires (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. ne pourront accepter de charges, d’emplois ou de commissions, qui les obligeraient de s’éloigner de leurs diocèses ou de leurs paroisses, ou qui les enlèveraient aux fonctions de leur ministère ; et ceux qui en sont actuellement pourvus, seront tenus de faire leur option dans le délai de trois mois, à compter de la notification qui leur sera faite du présent décret par le procureur général syndic de leur département; sinon, et après l’expiration de ce délai, leur office sera réputé vacant, et il leur sera donné un successeur en la forme ci-dessus prescrite. « Art. 6. Les évêques, les curés et vicaires pourront, comme citoyens actifs, assister aux assemblées primaires et électorales, y être nommés électeurs, députés aux législatures, élus membres du conseil général de la commune, et du conseil des administrations des districts et des départements ; mais leurs fonctions sont déclarées incompatibles avec celles de maire et autres officiers municipaux, et des membres des directoires de district et de département ; et s’ils étaient nommés, iis seraient tenus de faire leur option. « Art. 7. L’incompatibilité mentionnée dans l’article 6 n’aura effet que pour l’avenir; et si aucuns évêques, curés ou vicaires ont été appelés, par le vœu de leurs concitoyens, aux offices de maire et autres officiers municipaux, ou d’administrateurs de district et de département, iis pourront continuer d’en exercer les fonctions. ». M. le Président met aux voix les trois articles destinés à remplacer l’article 5. Ils sont décrétés. M. Barrère de Flenzac fait hommage au nom de M. Ghariot, citoyen de Paris, d’un buste de Jean-Jacques Rousseau et d’un exemplaire du contrat social. L’Assemblée accepte cet hommage et arrête que la lettre écrite par M. Ghariot à M. Barrère de Vieuzac sera insérée dans son procès-verbal. Elle est ainsi conçue : Paris , le 21 juin 1790. « Monsieur, « J’ai applaudi, comme tous les amis de la liberté, à l’hommage rendu au milieu de l’Assemblée nationale à Franklin et à Washington, par l’offrande de leurs bustes, faite par un artiste célèbre. Je porterai mon hommage aux augustes représentants de la nation, en leur offrant le buste du citoyen de Genève, si vous voulez bien le faire agréer à l’Assemblée nationale. Je dépose à côté du buste de Rousseau un ouvrage dont elle applique tous les jours les principes au bonheur de la France et bientôt du genre humain : c’est en présence des auteurs de la Constitution que le contrat social doit être posé sur l’autel de la patrie. « J’ai l’honneur d’être avec un très profond respect, « Monsieur, « Votre trè3 humble et très obéissant « serviteur. « Signé : Chariot, huissier, commissaire - « priseur . » M. Gossin, rapporteur du comité de consti* tution , présente deux décrets qui sont adoptés sans réclamation en ces termes ; [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 juin 1790.] IQK PREMIER DÉCRET. « L’Assemblée nationale confirme la délibération du corps électoral de Maine-et-Loire, et décrète que la ville d’Angers demeurera définitivement le siège de son administration. » DEUXIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale confirme la délibération du corps électoral du département de la Haute-Marne, et décrète que la ville de Chaumont demeurera définitivement le siège de son administration. » M. de Montagut-Barrau, député de Com-minges et Nébouzan, demande, par une lettre adressée à M. le Président, un congé pour cause de maladie attestée par deux certificats de médecins. Le congé est accordé. M. Thibault, curé de Souppes. Je demande que tous les députés absents soient privés de leurs appointements. M. Gérard, laboureur breton. Je suis de quatre-vingts lieues ; si je m’en vais, je demande de n’être pas payé et il doit en être de même pour tous les autres députés. Il est indigne de payer des hommes qui vont dans les provinces quand ils devraient être ici. M. de Boufflers. Je demande que les absents reçoivent leur traitement puisqu’ils ne sont partis que sur l’autorisation de l’Assemblée, sauf à statuer pour l'avenir. M. Bobespierre. Je demande l’ordre du jour sur la proposition. (Après deux épreuves, l’Assemblée décide qu’il y a lieu à délibérer.) M. de Murinais. Je demande le renvoi au comité chargé du règlement de police de l’Assemblée. M. Gérard, laboureur. Les provinces n’attendent pas que nous allions nous promener. On va se promener pour cabaler contre la Constitution; voyez si nous voulons les payer pour ce beau service. ( Applaudissements prolongés). M. Lavenne. J’insiste pour que la proposition qui vous est faite n’ait aucun effet rétroactif, si elle est adoptée. M. le Président met aux voix la question principale qui est décrétée en ces termes : « L’Assemblée nationale a décrété et décrète que tous ses membres qui, jusqu’à ce jour, se sont absentés, et qui, à l’avenir, feront des absences, sont et seront privés de leur indemnité, et cela, pendant tout le temps de leur absence. » M. le Président annonce qu’il vient de recevoir une lettre du corps représentatif du comté Venaissin , à laquelle est jointe une adresse pour l’Assemblée nationale. On demande la lecture des pièces (1). (1) Ces pièces n’ont pas été insérées au Moniteur; nous les reproduisons d’après le journal Le Point-du-Jour, tome II, page 169. Cette lecture a lieu. « Monsieur le Président, « L’Assemblée représentative du comté Venaissin a désiré de rendre ud hommage immédiat à l’Assemblée nationale de France; elle a voté en conséquence, dans une de ses séances, l’adresse que j’ai l’honneur de vous faire parvenir, et qu’elle vous prie de vouloir bieu lui présenter. « A l’instant même où elle s’occupait d’exprimer son respect et sa reconnaissance pour votre auguste Assemblée et qu’elle s’abandonnait à la joie de penser que son tribut serait favorablement accueilli, une douleur amère et venue tout à coup l’arracher à ces sentiments délicieux. La ville d’Avignon est livrée en ce moment à toutes les horreurs des divisions. Les nouvelles qui se succèdent sont toutes alarmantes et les dernières nous assurent que le peuple s’est malheureusement porté à des exécutions sanglantes. Cette ville n’est point représentée ici, puisqu’elle forme seule un état séparé du vôtre; mais elle vous est unie par tous les autres liens, et l’Assemblée va s’occuper des moyens d’interposer sa médiation, pour y rétablir le calme. « Je suis, Monsieur le Président, votre très humble, etc. « de GÉRende, président. » Plusieurs membres demandent l’ordre du jour, et que l’adresse ne soit pas lue. M. d’André. Vous avez ordonné la lecture; maintenant vous ne pouvez pas revenir, car cette pièce est un écrit de souverain à souverain. L’adresse est lue. Elle est ainsi conçue : A l'Assemblée nationale. « Messieurs, « C’est par l’organe de ses députés librement élus, et constitués depuis peu de jours en Assemblée représentative, que le comté Venaissin vient porter à l’auguste Assemblée nationale de France ce tribut unanime. « Nous remplissons, Messieurs, un des vœux les plus ardents de nos commettants, en nous empressant de vous féliciter du succès glorieux de vos travaux, et de vous exprimer d’une manière solennelle le respect profond et la vive reconnaissance d’un peuple que son heureuse position fait participer à la prospérité d’un empire que vous avez régénéré. Entourés de la France, liés aux Français par des rapports intimes et journaliers, parlant la même langue, ayant les mêmes mœurs, les mêmes opinions, ne faisant, pour ainsi dire, qu’un même peuple avec eux, il est nécessaire que nous soyons gouvernés par les mêmes lois. « Cette nécessité, qui existera toujours pour un peuple que sa position rend essentiellement dépendant d’un autre, a toujours été sentie par notre administration. Elle avait déjà réclamé des réformes, sollicitées par le besoin sans cesse renaissant de cette conformité, et dans des temps même où les souverains pontifes nous comblaient de bienfaits, nous avions mêlé des plaintes aux bénédictions que notre reconnaissance leur prodiguait. « Mais ces changements pouvaient-ils opérer notre bonheur, dans un temps où il n’existait encore aucune limite fixe entre les pouvoirs cons-