[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mai 1791.] 917 renversée parla consécration d’un principe vrai, mais dont les conséquences 8ont incalculables; par la consécration d’un droit certain, mais funeste, lorsque le cercle qui doit en régler l’exercice n’a pas été tracé d’avance; et je conclus à regret contre la réélection telle qu’elle vous est présentée par l’article que nous discutons aujourd’hui. Signé : Stanislas de Clermont-Tonnerre. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ. Séance du jeudi 19 mai 1791 au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. le Président donne connaissance à l’Assemblée d’un procès-verbal du directoire du département de la Corrèze contenant le détail de troubles arrivés dans la ville de Tulle. (L’Assemblée ordonne le renvoi de ce procès-verbal au comité des recherches.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, qui est adopté. M. Prngnon, au nom du comité d'emplacement. Messieurs, l’Assemblée a adopté dans sa béa ce d’hier, sur la proposiiion du comité d’emplacement, un décret qui autorise h s administrateurs du uépartement de l’Abier à acquérir une maison pour l’evêque de ce département (2). Votre comité vous propose aujourd’hui une mu-dificatiOQ à ce décret ; elle consisterait à ajouter à la fin du texte déjà adopté ces mots : « à la condition que le prix d’acquisition totale ne sera que de 25 à 30,000 livres environ. ( Marques d'assentiment.) Le décret serait donc conçu dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du département de l’Ailier à acquérir la maison appartenant aux héritiers du sieur Ghermont, pour y loger l’évêque, ainsi que l’emplacement attenant à ladite maison, lequel appartient à la municipalité, au prix qui sera couveuu entre elle et le directoire du département, lequel sera, avec celui de ladite maison, payé par le receveur du district, des deniers nationaux, à la condition que le prix de l’acquisition totale ne sera que de 25 à 30,000 livres environ. » (Ce décret, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.) M. Defermon, au nom du comité , des contributions publiques . Messieurs, votre comité des contributions, sur la proposition duquel vous avez rendu le décret relatif à l’organisatiou de la régie des droits d’enregistrement, timbre, hypothèques et des domaines nationaux corporels et incorporels, vous propose une modification à l’article 5] de ce décret, article que vous avez adopté daDS la séance d’hier (3). (1) Celte séance est incomplète au Moniteur. (2) Voy. ci-dessus séance du 18 mai 1791, page 189. (3) Voy. ci-dessus séance du 18 mai 1791, page 189. Cette modification consiste à ajouter, aux dispositions déjà renfermées dans l’article, que l’accusateur public et les commissaires du roi près lès tribunaux de district fussent chargés de veiller à son exécution, et de dénoncer au ministre de la justice et à celui des contributions publiques toutes les contraventions qui pourraient être commises contre ces dispositions. L’article serait donc ainsi conçu : Art. 51. « Ne pourront pareillement aucuns corps administratifs, ni tribunaux, accorder de remises ou modérations de droits ou perceptions indirectes et amendes, à peine de nullité des jugements; et seront, l’accusateur public et les commissaires du roi, près les tribunaux, chargés de veiller à son exécution et de dénoncer, au ministre de la justice et à celui des contributions publiques, toutes les contraventions qui pourraient être commises contre ces dispositions. » (Get article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séauce de mardi au soir, qui est adopté. M. le Président fait donner lecture à l’Assemblée d’une lettre du ministre de la justice, ainsi conçue : « Monsieur le Président, « La loi 'lu 24 août dernier détermine les conditions nécessaires pour remplir les fonctions du ministère public; celle du 5 novembre suivant charge les tribunaux de district de juger si celui à qû le roi a confié ces fonctions réunit les conditions exigées; mais nulle loi ne présente le moyeu de poursuivre l’infirmation d’un jugement qui aurait illégalement admis ou rejeté la personne nommée par Sa Majesté. « Cependant il existe dans ce moment plusieurs jugements de cette espèce. Dans tel tribunal, soit indulgence ou erreur, les irrégularités évidentes que présentaient les titres d’un commissaire du roi ont échappé aux yeux des juges; et, contre le vœu de la loi, il a été admis. Un autre tribunal S’est obstiné à refuser l’admission d’un juge, dont les titres deux fois examinés par le comité de Gonsiituiion, je ne parierai pas de l’examen scrupuleux que j’en aurai fait moi-même, ont deux fois été déclarés valables. « G’est ainsi, Monsieur le Président, que les lois ont été violées. « Le commissaire du roi, qu’un jugement dépouille d’une place que lui assurait la régularité de ses titres, se pourvoira-t-il eu cassation? Mais ce jugement n’est rendu qu’en première instance ; aura-t-il recours à l’appel? Qui fera-t-il intimer sur cet appel ? Intimera-t-il le tribunal entier qui a rendu le jugement dont il se plaint? « Le second cas est plus embarrassant encore : quelle personne sera chargée de poursuivre l’infirmation du jugement qui aura illégalement admis un commissaire du roi, que la défectuosité de ses titres rendait inadmissible? « Il est enfin une troisième espèce dont la solution ne présente pas moins de difficultés, c’est celle dans laquelle se trouve le commissaire du roi près le tribunal du district de Lille, et dans laquelle peuvent se trouver tous les commissaires du roi, près les tribunaux composés de 6 juges : 3 ont jugé ses titres insuffisants et 3 le3 ont jugés valables. « J’ai pensé, Monsieur le Président, qu’il était ©48 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mai 1791.] de mon devoir d’attirer l’attention du Corps législatif sur des points importants que la législation n’a lias encore réglés. Il croira nécessaire sans doute d’ajouter à notre constitution judiciaire quelques dispositions nouvelles propres à maintenir l’exécution la plus entière. « Il est aussi un autre objet qui appelle l’attention de l’Assemblée nationale : c’est la nécessité de là résidence des commissaire s du roi près les tribunaux. li en est beaucoup qui, dans ce moment actuel où l’intérêt public exige leur présence, ne craignent pas de quitter, sans congé, le tribunal pour aller dans leur patrie vaquer à leurs affaires personnelles, ou venir dans cette capitale pour raison et sous prétexte d’affaires et peut-être même pour y poursuivre quelques places plus à leur convenance. 11 en est même quelques-uns qui, nommés depuis six mois, ne se sont pas encore rendus à leurs fonctions. « Je ne dirai pas combien cet oubli de leurs devoirs, cette insouciance sont nuisibles à l’administration de la justice, dont l’extrême activité suffit à peine à la multiplicité d< s affaires qui se présentent. Quel zèle peut apporter à ces importantes fonctions un gradué, commis momentanément à leurs exercices? Mais, que faire? Là loi n’a remis, à cet égard, nul moyen coercitif entre les mains de Sa Majesté, et les remontrances n’ont pas été toujours suivies avec succès. Mais il me suffit, Monsieur le Président, d’avoir dénoncé le mal à l’Assemblée nationale ; dans sa sagesse, elle en trouvera facilement le remède. « Une autre question se présente sur laquelle je crois devoir consulter l'Assemblée nationale. « Après avoir comparé les titres de plusieurs concurrents à une place de commissaire du roi vacante sur la démission du premier pourvu qui ne s’est pas même fait recevoir, j’ai proposé au roi le sujet qui m’a paru le plus digue, et Sa Majesté l’a choisi. J’ignorais alors qu’il fût membre d’un directoire; instruit depuis cette circonstance, et avant l’envoi de la commission, j’ai pensé que cette nomination était contraire à l’article 7 de la loi du 11 septembre 1790, et sur cette observation, Sa Majesté m’a donné l’ordre d’expédier une commission en faveur du sujet qui lui a paru réunir le plus de titres après celui qui avait d’abord fixé sou attention. « Cependant en examinant de nouveau le texte de la loi, j’ai vu qu’il présentait une difficulté assez sérieuse, et qui demandait une interprétation. Cet article porte : « Les administrateurs qui « acceptent d’être membres du directoire, les pro-« cureurs généraux syndics et les procureurs-« syndics, ne pourront point à la prochaine élec-« tion être nommés aux places de juges, même «en donnant leur démission (et c’est le cas où se « trouve le premier nommé) : ils ne pourront de « même être nommés dans la première nomina-« tion des commissaires du roi. » « J’ai cru et suis encore porté à croire que la première nomination dont il s’agit dans l’article, s’entend de celle qui a eu son effet par l’acceptation des commissaires du roi employés dans cette première nomination ; et qu’ainsi, dans l’espèce où le premier nommé n’a pas accepté la nomination, dans l’esprit de la loi la nomination à fairedoit être considérée comme la première. Mais comme cette opinion est une véritable interprétation de la loi, et qu’elle porterait un préjudice réel à celui que le roi avait regardé comme le plus digne, j’ai pensé qu’il était démon devoir de prévenir l’Assemblée de fixer positivement le sens de l’article 7 de la loi du 11 septembre et de suspendre en attendant l’envoi de l’une ou de l’autre commission. « Signé : DUPORT. » (L’Assemblée décrète le renvoi de cette lettre et de l’explication demandée au comité de Constitution pour en faire le rapport lundi matin, elle charge en même temps ce comité de faire porter ce rapport sur la difficulté qui regarde les suppléants.) Un membre du comité de vérification propose d’accorder à M. Queru-Lacoste, curé de Rennes, dont la paroisse a été supprimée, un congé de 3 semaines pour se faire installer dans sa nouvelle paroisse. (Ce congé est accordé.) M. le Président donne connaissance à l’Assemblée d’une lettre des ci-devant procureurs au parlement de Provence , contenant une réclamation sur la fixation de la valeur de leurs offices supprimés. (Cette lettre est renvoyée au comité de judica-ture.) M. Dauchy, au nom du comité des contributions publiques. Messieurs, vous avez chargé votre comité des contributions publiques de vous présenter ses vues sur les moyens d'accélérer la rentrée des impôts de 1790 et même des années antérieures qui sont extrêmement en retard. Voici le projet de décret qu’il a l’honneur de vous présenter sur cet objet et relativement à des mesures d’ordre et de coercition nécessaires pour l’exécution de vos décrets : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les commissaires du roi à la trésorerie nationale se feront adresser, dès à présent et mois par mois, par chacun des receveurs particuliers des impositions de toutes les ci-devant provinces sans aucune exception, un état signé et certifié d’eux, de la situation de leur recouvrement, au premier de chaque mois, sur chacun des exercices courants. Sur ces états particuliers, les commissaires du roi à la trésorerie nationale feront former pareillement, mois par mois, un état général de situation des recouvrements pour toutes les recettes générales des finances ou trésoreries générales des pays d’Eiats. « Art. 2. Aussitôt l’établissement des contributions directes de 1791, les commissaires de la trésorerie nationale suivront les mêmes dispositions vis-à-vis des receveurs de districts, et formeront pareillement, mois par mois, l’état général de la situation des recouvrements dans chacun des 83 départements. « Art. 3. La loi du 22 juillet 1790 sera exécutée, tant par les receveurs particuliers des impositions, pour l’exercice 1790 et exercices antérieurs, que par les receveurs de districts pour l’exercice 1791 et exercices suivants ; et en conséquence, ees receveurs seronttenus de remettre mois par mois, aux directoires de districts, le double certifié par eux des états de situation qu’ils auront adressés aux commissaires de la trésorerie nationale. Enfin, sur la copie de ces états particuliers, à lui adressée, par chaque directoire de département, on formera un état général qu’il adressera aussi mois par mois, avec ses observations, au ministre des contributions publiques. « Art. 4. Les directoires des districts viseront les contraintes qui leur seront présentées par les receveurs particuliers; et ,ce, dans le délai de