[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 novembre 1789.] Languedoc, qui adhère à la délibération de la ville de Nîmes, par laquelle celle-ci se soumet à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et promet de s’opposer à toute assemblée de province. Acte de la même commune, par lequel elle a maintenu les décrets de l’Assemblée nationale, concernant la continuation du payement de la dîme jusqu’à son remplacement. Il a été fait lecture d’une lettre d’une société de jeunes personnes de l’un et de l’autre sexe, de la ville de Lyon, par laquelle elles offrent à l’Assemblée, pour être jointe aux dons patriotiques, une cassette contenant quelque bijoux et effets d’or et d’argent. Cette offre a été accueillie avec applaudissement par l’Assemblée. M. Regnaud de Saint-Jean d’Àngély. Je propose de renvoyer aux séances du soir toutes les affaires étrangères à l’organisation des municipalités, de ne pas interrompre la séance à deux heures pour s’occuper de questions particulières et d’avancer de la sorte le travail de la constitution nationale. M. le comte de Tracy. Les questions particulières sont souvent d’une très-grande importance et réclament des solutions immédiates; avant de passer à leur examen, l’Assemblée ne s’occupe que de la lecture du procès-verbal, des adresses et de l’acceptation des dons patriotiques, dans son ordre du jour du matin, le travail de la constitution occupe donc presque toute la durée de la séance. M. Gaultier de Riauzat combat la motion de M. Regnaud et demande la question préalable. M. le Président consulte l’Assemblée qui décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur la motion. L’ordre du jour est repris sur le projet d’organisation des municipalités. L’Assemblée adopte l’article suivant : ART. 11. Ceux qui dès le premier scrutin réuniront la pluralité absolue, c’est-à-dire la moitié des suffrages, et un en sus, seront définitivement élus ; si au premier tour du scrutin il n’y a pas un nombre suffisant de citoyens élus à la pluralité absolue des voix, on procédera au deuxième scrutin et ceux qui réuniront la pluralité absolue seront membres du corps municipal ; enfin si le nombre nécessaire n’est pas rempli par les deux premiers scrutins, on en fera un troisième et dernier, et à celui-ci, il suffira, pour être élu, d’obtenir la pluralité relative des suffrages. L’article 12 du rapport du comité a ensuite été lu, mis aux voix et décrété dans la forme qui suit : art. 12. Les maires ne seront jamais élus qu’à la pluralité absolue des voix; si le premier scrutin ne donne pas cette pluralité, il sera procédé à un second; si celui-ci ne la donne point encore, il sera procédé à un troisième, dans lequel le choix ne pourra plus se faire qu’entre les deux citoyens qui auront réuni le plus de voix au scrutin précédent; en cas d’égalité de suffrages entre eux, le plus âgé sera préféré. M. Target, au nom du comité, propose en-259 suite d’introduire un nouvel article qui prendrait le n° 13 et qui éloignerait d’un numéro les autres articles du projet imprimé. art. 13. Chaque assemblée nommera, à la pluralité relative des suffrages, trois scrutateurs, qui seront chargés d’ouvrir les scrutins, de les dépouiller, de compter les voix et de proclamer les résultats. Les trois scrutateurs seront nommés par un seul scrutin recueilli et dépouillé par les trois plus anciens d’âge. M. Long. Je propose par amendement que les trois scrutateurs ne pourront ouvrir le scrutin qu’en présence du secrétaire. L’amendement est rejeté et l’article 13 adopté, art. 14. Chaque section particulière de l’assemblée générale de la ville pourra envoyer à la maison commune, un commissaire pour assister au recensement des scrutins. art. 15. Toutes les assemblées particulières seront indiquées pour le même jour et à la même heure. art. 16. Les citoyens qui, par l’événement du scrutin, seront nommés membres de l’administration municipale, seront proclamés par les officiers municipaux en exercice. Le comité de constitution présente l’article 17 en ces termes : « Les conditions d’éligibilité pour les administrations municipales sont les mêmes que pour les administrations de département ou de district. » M. Lanjninals. Dans la discussion relative aux départements et aux districts, j’ai présenté un amendement pour que plusieurs membres de la même famille ne pussent faire partie des conseils; cet amendement a été rejeté, mais je crois que les raisons qui ont déterminé l’Assemblée ne sont pas les mêmes en ce qui conserve les municipalités et je propose de dire : « Cependant le père et le fils, le beau-père et le gendre, les frères et beaux-frères ne pourront se trouver, en même temps, membres d’une assemblée municipale. » M. le vicomte de îifoaiües. J’appuie l’amendement comme étant de nature à éviter que certaines familles ne s’emparent exclusivement des administrations municipales. M. Deschamps. Je propose d’ajouter à J a prohibition l’oncle et le neveu, ainsi que les cousins germains. M. Target. J’observe qu’il y a de très-petites municipalités où, si les prohibitions proposées étaient appliquées, il serait fort difficile, même presque impossible, de trouver des sujets pour entrer aux assemblées municipales. M. le Président met aux voix les amende- [26 novembre 1789. J 260 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ments qui sont admis sauf le sous-amendement concernant la prohibition de l’oncle et du neveu. En conséquence, l’article est décrété, sauf rédaction, dans la forme suivante : art. 17. Les conditions d’éligibilité pour les administrations municipales seront les mêmes que pour les administrations de département et de district; et néanmoins, le père et le fils, le beau-père et le gendre, les frères et beaux-frères, l’oncle et le neveu, par le sang ou l’alliance, ne pourront être, en même temps, membres du même corps municipales. La rédaction du comité pour l’article 18 porte : « Les membres des corps municipaux des villes, bourgs, paroisses ou communautés, seront au nombre de trois y compris le maire, lorsque la population sera au-dessous de 1,000 habitants; « De 6 , y compris le maire , de 1,000 à 3,000 habitants; « De 12, de 10,000 à 25,000; « De 15, de 25,000 à 50,000 ‘ « De 18, de 50,000 à 100,000; « De 21, au-dessus de 100,000; « A l’exception de la ville de Paris, qui, à cause de son immense population, sera gouvernée par un règlement particulier. » Un grand nombre de membres font l’observation générale que le nombre des officiers municipaux n’est pas assez considérable en proportion de la population ; qu’il peut être utile de borner l’agence de chaque administration à un petit nombre de membres, pour accélérer l’exécution; mais qu’il n’en doit pas être ainsi du conseil, dont la surveillance sur toutes les opérations de l’agence doit être confiée au plus grand nombre possible de véritables intéressés. M. Defermon dit que puisque le comité, dans les articles postérieurs, divise la municipalité en un conseil et en un bureau, il en résulte que l’un et l’autre seront trop peu nombreux dans les municipalités composées de trois membres seulement. M. Eianjuinais propose, pour finir toute discussion, de doubler tous les nombres indiqués dans l’article du comité. M. Rewbeli observe qu’il n’existait aucune ancienne municipalité qui ne fût composée de plus de trois membres ; qu’il serait infiniment dangereux d’adopter le plan du comité, parce que les habitants des campagnes surtout ne pourraient voir qu’avec peine leurs intérêts concentrés dans un cercle d’administration plus étroit qu’il ne l’est aujourd’hui. Il demande qu’on forme les municipalités de 6 membres sur 500 habitants, 9 sur 1,000, 12 sur 2,000, etc., ainsi de suite jusqu’à 100,000, et qu’on ajoute 3 membres par chaque 50,000 au-dessus de ce nombre de 100,000. M. Ramel-Mogaret met sous les yeux de l’Assemblée les formes de municipalités existant dans sa province (Languedoc) ; il demande que l'on conserve le régime des consuls, et il présente un projet de proportion dans les principes de ce régime. M. Mougins de Roquefort, député de Draguignan, représente que si l’on réunit sur le maire et ses deux adjoints les fonctions municipales de tout un village, c’est absolument créer une aristocratie municipale; il ajoute qu’il faut distinguer les municipalités des directoires ; qu’il faut établir des directoires dans toutes les communautés, et les composer d’un nombre démembres proportionné à la population, et régler que rien ne se fera sans l’approbation de ce conseil. M. de llontlosier se récrie sur l’exception proposée pour la ville de Paris : Elle est, dit-il, ou de faveur ou de nécessité. Si elle est de nécessité, son immense population ne peut pas lui donner des droits à une exception : car, en se soumettant à la proportion générale, elle obtiendra, sous ce rapport, tout ce qui lui est dû. La municipalité de Paris n’aura rien de plus à faire que les municipalités de Lyon et de Bordeaux ; d’où il suit qu’elle doit être établie sur les mêmes bases que toute autre. MM. Target et Demeunier observent qu’il n’était point dans l’intention du comité de constitution de soustraire la ville de Paris à l’application des principes généraux d’administration municipale; qu’il ne s’agit point de privilèges, de prérogatives, ni de faveur; mais que l’étendue de cette ville et la police qu’elle a à exercer sur 800,000 habitants nécessitent un règlement particulier. M. Target dit que la ville de Lyon, qui a une population de 170,000 habitants, nva cependant que 18 officiers municipaux; que, ce nombre étant depuis de longues années reconnu lui suffire, cette raison a porté le comité à ne faire aucune exception pour les autres villes. M. Démeunier. Je crois devoir expliquer les motifs de la proportion que le comité a adoptée : il a réduit à 3 les membres des municipalités dont les habitants sont au dessous de 1,000, afin d’avoir un nombre dont le tiers se fît sans fraction : son intention avait été d’abord de le porter à 6, mais il a considéré que ces municipalités auraient peu d’affaires, et que les officiers municipaux ne recevant pas d’émoluments, il se trouverait dans les villages peu de personnes en état de sacrifier leur temps aux devoirs de ces places. Le comité a projeté de vous proposer de subordonner les municipalités aux assemblées des districts, lesquelles vérifieraient les comptes qui seraient imprimés pour les villes au-dessus de 4,000 habitants; au-dessous de ce nombre, les comptes seraient déposés au greffe de la municipalité, où tous les habitants pourraient en prendre communication sans se déplacer. Je finis par représenter à M. de Montlosier que le revenu de la ville de Paris, qui est de 4 à 5 millions, consiste en octrois pour la majeure partie : qu’elle a à régir des établissements publics, et une police immense à exercer; qu’il lui faut de nécessité un règlement particulier, mais ordonné par l’Assemblée, et d’après les principes qu’elle a consacrés. M. llalouet et quelques autres membres demandent que le nombre des membres de l’administration municipale ne soit pas réduit au-dessous de 6, et que, dans les cas extraordinaires, la commune soit convoquée en assemblée générale. Après tous ces débats, il est décidé, conformément au changement proposé par le comité de constitution : 1° qu’au lieu de 3 membres,