135 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 août 1791.] Messieurs, cette espèce de difficulté dans la rédaction avait déterminé vos comités à suspendre jusqu'au moment où l’on aurait pu voir la Charte nationale soumise à ladélibération del’Assemblée. Cependant si l’on veut prononcer aujourd’hui le séquestre, il n’y a point l’ombre du doute. Mais, si l’Assemblée veut déclarer que les autres peines sont encourues, il faut qu’elle ouvre là-dessus sa délibération, parce qu’il y a des limitations et des difficultés sur la rédaction du décret relativement aux complices et adhérents qu’il faut détacher de la condamnation d’aujourd’hui pour les renvoyer à Orléans, si vous n’y renvoyez pas même M. de Condé. Remettez donc à demain, chargez vos comités de rédiger le projet de décret* si vous voulez, mais ne vous engagez pas à adopter un libellé qui peut avoir des suites aussi fâcheuses. (L’Assemblée, consultée, renvoie aux comités de constitution militaire, de jurisprudence, des re-cherches et diplomatique réunis, avec recommandation d’en faire leur rapport au premier jour, les divers es observations et demandes concernan t : 1° les mesures à prendre pour l’exécution du décret du 13 juin 1791 relatif à M. de Condé; 2°lts traitements éprouvés par M. Du veyrier, dans la mission dont il a été chargé pour le lui notifier.) M. Belzais-Courmenü, au nom du comité des monnaies. Messieurs, vous avez adjoint 6 nouveaux membres à votre comité des monnaies et les lumières qu’ils y ont apportées nous ont été d’un grand secours. Le 26 mai dernier, vous avez décrété que le métal des cloches serait fondu et employé à la fabrication d’une même monnaie. Plusieurs motifs vous ont déterminé à rendre ce décret; vous avez pensé tout d’abord que c’était un moyen de faire promptement une grande émission et par conséquent de venir promptement au secours de la chose publique. L’expérience qui vient toujours trop tard nous a fait apercevoir que ce mode de fabrication n’était pas sans inconvénients et que le plan qui nous avait paru très bon à première vue était défectueux dans certaines de ses parties. On a reconnu que la monnaie faite avec le métal des cloches était cassante, qu’elle était de plus susceptible d’être contrefaite par tout le monde, parce que rien n’est plus aisé à faire que le coulage de la monnaie; on s’est aussi aperçu qu’il était très facile d’avilir la matière et de l’imiter avec une combinaison de différents métaux très peu coûteux. Votre comité a pensé qu’il serait possible d’éviter tous ces inconvénients en alliant une certaine quantité de métal d’un prix plus élevé à la matière des cloches qui pourrait par ce moyen surporter le balancier. Plusieurs expériences ont été faites, mais une seule a produit des résultats satisfaisants; elle consiste à joindre une certaine quantité de matière des cloches à une partie égale de cuivre pur. 11 résulte de cet alliage un métal qui supportera parfaitement le balancier, le laminoir, et qui vou3 produira une monnaie abondante, impossible à contrefaire, et qui le disputera à toutes les monnaies de cuivre actuellement existants en Europe. Avant de vous lire le projet de décret que je suis chargé de vous soumettre, je dois faire part à l’Assemblée de l’acte de civisme et de générosité accompli par M. Duvivier. Gomme la place de graveur général des monnaies se donne au concours, M. Duvivier qui occupait autrefois cette place ne l’a point obtenue; aussitôt qu’il ên a été instruit et qu’il a appris que la confection de poinçons et de matrices pouvait apporter du retard dans la fabrication de la monnaie, il s’est empressé de faire hommage de son poinçon et de sa matrice afin d’éviter toute lenteur préjudiciable au bien public et il n’a pas hésité à faire lui-même l’éloge du graveur que le concours lui avait substitué et à se concerter avec lui sur les moyens d’exécution des opérations nouvelles : cette conduite est digne des plus grands éloges. ( Vifs applaudissements ). M. Delà vigne. C’est à moi que M. Duvivier s’est adressé pour me prier d’annoncer au Comité l’offre qu’il faisait ; je demande non seulement que mention honorable de sa conduite soit insérée dans le procès-verbal, mais encore que l’Assemblée lui témoigne sa satisfaction par l’organe de M. le Président. ( Vifs applaudissements.) (L’Assemblée charge M. le Président d’écrire une lettre à M. Duvivier pour lui transmettre le témoignage de la satisfaction que son dévouement à la chose publique lui a inspirée.) M. Belzaig-Courmenil, rapporteur , Voici, Messieurs, le projet de décret que vous présente votre comité des monnaies : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des monnaies, tant sur les moyens d’exécution de son décret du 26 mai, sur l’emploi en monnaie du métal des cloches, que sur le résultat des expériences faites sür le départ de cette matière, décrète ce qui suit s Art. 1er. « La fabrication d’une menue monnaie avec le métal des cloches aura lieu, Bans délai, dans tous les hôtels des monnaies du royaume. Art. 2. « Le métal des cloches sera allié à une portion égale de cuivre pur, et les flaons qui en proviendront seront frappés. Art. 3. « Gètte monnaie sera divisée eü pièces de 2 sols à la taille de 10 au marc; eü pièces d’un sol, à celle de 20 au marc ; et en pièces de demi-sol, à celle de 40 au marc. Art, 4. * Les poinçons et matrices pour la fabrication des pièces d’un sol pourront être fournis par le sieur Duvivier, suivant ses offres, et il sera tenu compte à cet artiste de sês fournitures, au prix qui sera fixé par l’administration des monnaies, Art, 5, « Les directoires des départements tiendront à la disposition du ministre des contributions publiques les cloches des églises supprimées dans leur arrondissement. Art. 6. « Le ministre des contributions prendra les mesures convenables poür procurer incessamment aux divers hôtels des monnaies le cuivre nécessaire, soit par le départ d’une partie du métal des cloches, soit en truitâfit avec les manufactures; et il rendra compte chaque semaine à l’Assemblée nationale de l’état de la fabrication. [3 août 1791.) 136 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES, « Le présent décret sera imprimé et envoyé dans tous les départements. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Belzais-Courmenil. Je dois maintenant, Messieurs, vous faire en mon nom personnel une proposition. Je crois, et l’expérience nous l’a prouvé, que si nous avions les petits assignats de 6 livres et même de 6 1. 10 s. nous aurions dans un instant les plus grandes facilités pour les fractions des divers payements. C’est là un objet qui mérite une attention toute particulière, soit par lui-même, soit par les conséquences qui peuvent en résulter. J’en demande le renvoi aux comités des assignats et des finances. M. lietellier. Les assignats de 100 sous suffisent à tous les besoins; faire de nouvelles propositions c’est risquer d’affaiblir le crédit; en conséquence, je demande qu’on passe à l’ordre du our. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély .) Il est not dre qa’en ce moment la majeure partie des marchands en détail se refusent à vendre faute de moyens pour compléter les fractions, et ce projet me paraît y remédier. La base du crédit de ces nouveaux assignats sera la même, et la quotité n'en sera pas augmentée; ainsi nul risque que la confiance soit altérée. J’insiste donc pour que cette proposition soit renvoyée au comité. M. Belzais-Coarmenil. Voici mon projet de décret : « L’Assemblée nationale charge ses comités des assignats et des finances, réunis, de lui présenter dans 3 jours leurs vues sur les avantages et les inconvénients qu’il y aurait à émettre une certaine quantité d’assignats de 6 livres et de 6 1. 10 s., soit en remplacement de partie des assignats de 5 livres qui restent à fabriquer, soit par substitution à des assignats de plus grande valeur. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. de Cernon, au nom du comité des finances. Messieurs, je viens vous rapporter le décret que vous nous avez renvoyé hier mati n sur la distribution de la petite monnaie dans les qua tre-vingt - trois départe men ts. (11 donne lecture de ce projet de décret.) Plusieurs membres présentent des observations sur les dispositions de ce projet de décret relatives à la correspondance des directoires des départements avec les officiers des hôtels des monnaies. Ils craignent que les retards causés {iar cette correspondance n’amènent quelque enteur dans l’émission proposée. M. de Cernon, rapporteur, répond qu’on peut distinguer dans cette correspondance la partie de la surveillance ou de l’administration de celle de l’exécution : l’une doit appartenir aux départements et l’autre peut être confiée aux districts. M. Andrieu. Je demande un article tendant à faire parvenir au chef-lieu de chaque canton la petite monnaie de cuivre. M. Ganltier-BIanzat. Je demanderais que le décret s’expliquât relativement aux fonds qui sont reçus aux départements, ensuite je proposerai de faire de ce décret une suite à celui que nous venons de rendre. M. Chabrond. Je crois que la mesure proposée par le comité est inadmissible et impossible dans l’exécution. Je comprends bien comment tout ce qui est d’administration regarde le département, et je n’y vois pas d’inconvénient; mais, à ce moment, où il s'agit de changer des assignats contre de la monnaie, je vois deux difficultés : 1° les administrateurs de département n’ont point de caisse pour déposer, ou puiser les assignats pour faire ces échanges; 2° de plus, ils n’ont pas de caisse pour recevoir la monnaie. D’après cela, je crois, Monsieur le Président, ue la bonne manière de faire l’opération, c’est e donner aux adminisirateurs de département le soin de distribuer, entre les districts, et les assignats et la menue monnaie. M. Tronchet. Je vous demande, Messieurs, si tous les hôtels des monnaies sont en activité, et s’il ne serait pas nécessaire d’y faire des réparations pour la fabrication de la petite monnaie. M. Tarbé , ministre des contributions publiques. Messieurs, les 17 hôtels des monnaies ne pourront pas faire de suite de la monnaie d’or et d’argent, mais ils peuvent faire celle que vous avez décrétée. Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix ! (La discussion est fermée). Les divers articles du projet de décret sont ensuite mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité des finances, décrète ce qui suit : Art. 1er. « La distribution de monnaie en espèces de cuivre, et de celle qui proviendra de la fonte des cloches, sera faite par les hôtels des monnaies entre les départements indiqués pour chacune de ces monnaies par l’état annexé au présent décret, et dans les proportions réglées par le même état. Art. 2. « En conséquence, le directeur de chaque hôtel des monnaies sera tenu d’envoyer, à la réception du présent décret, aux directoires des départements avec lesquels il devra correspondre, un boidereau certifie de lui, qui énoncera la somme fabriquée actuellement existante en monnaie de cuivre, dont la distribution pourra être faite sur-le-champ. Art. 3. « Le directeur de chaque hôtel des monnaies continuera d’adresser aux mêmes directoires des départements, le dernier jour de chaque semaine, un état de la fabrication qui aura lieu dans le cours de la même semaine, tant en espèces de cuivre, qu’en métal provenant de la fonte des cloches. Art. 4. « Chaque directoire de département connaîtra, d’après ces bordereaux successifs, et d’après la proportion dans laquelle il devra participer au produit de la fabrication déjà existante, et à