192 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Instruits par l’expérience, nous ne souffrirons pas désormais qu’aucun individu en impose à notre raison. En conséquence nous nous rétracterons formellement aujourd’hui de l’adresse que cette société vous a envoyée le 10 du mois dernier ; car nous n’y avons adhéré que par trop de crédulité, que par le peu de réflexion que nous a laissé la lecture rapide qui nous en a été faite sur-tout par l’effet et la contrainte, par le terrorisme qui travaillait toute les têtes encore à cette époque parmi nous. Ne concevez nulle inquiétude de ces cris usés que l’aristocratie et le modérantisme lèvent dans notre commune, une tête audacieuse menaçante : c’est un thème adopté par ceux qui sont aux abois de ne savoir où dénoncer la Convention pour avoir solemnisé des principes contraires aux leurs, et précieux aux francs amis de la liberté. Nous vous attestons sans crainte d’être démentis que le plus grand danger eut été la continuation des excès que vous venez de réprimer. D’ailleurs vous avez renvoyé l’adresse que nous improuvons à votre comité de Sûreté générale et il nous tarde qu’il ait pris les renseignements nécessaires à cet égard. Nous désirerions même qu’un représentant se montrât au milieu de nous pour acquérir au juste le degré d’espoir public qui y règne, et vous rendre un témoignage certain du caractère des habitants du Pays qui détestent toute autre souveraineté que celle du peuple et n’ont appris à se conduire en révolution qu’avec l’amour et le respect des loix. Législateurs, nous les connaissons au doigt et à l’oeil ces hommes outrés, ces patriotes exclusifs qui rédoutent les récherches de la vérité, en pensant toujours cacher leur turpitude dans la confusion et l’anarchie. Nous les avons vus s’épuiser en contorsion : et pour faire croire, malgré l’évidence, à leur prétendu patriotisme, ils attaquent par voie de suspicion les hommes irréprochables qu’ils savent avoir le courage de les démasquer. Le rideau est tiré, nous sommes maintenant désabusés sur le compte de ces faux opprimés, réellement oppresseurs, et des patriotes hypocrites dominateurs qui n’échapperont pas plus à notre surveillance que les aristocrates et les modérés. Les uns et les autres ne parviendront pas à nous étoudir et nous donner le change sur leurs manoeuvres contre révolutionnaires. Pour oter à la malveillance tout espoir de résurection, conservez le gouvernement révolutionnaire dans toute sa vigueur ; cependant qu’il ne soit dirigé que par vous et non par les désor-ganisateurs du genre humain, qui ne présentent la liberté qu’à travers le sang et les poignards. Ceux qui n’ont été qu’égarés, ou trompés, nous nous contentons de les plaindre; ils peuvent aisément rétrouver leur chemin à la lumière du jour que vous avez ramenée; mais nous demandons que les corrupteurs de la bonne foi publique et les vils instruments du Robespierrisme disparaissent sous le glaive vengeur de leurs atrocités, à fur et à mesure qu’ils seront découverts. Vous en avez les moyens, le peuple est avec vous ; frappez, portez les derniers coups à tous les ennemis du dedans, et le triomphe et la liberté sera complet. Les vrais français n’ont qu’une âme pour sentir et apprécier la pureté de vos intentions. Tous debout pour empêcher qu’aucune voix ne s’élève au dessus de vous, ils vous entourent et leurs corps feront [un] mur pour vous défendre et saisir la main parricide et sacrilège qui attenteroit à vos jours. Nous jurons de n’avoir point d’autre existence que la vôtre, attachés à la représentation nationale, comme le lierre à l’ormeau, elle sera toujours le suprême régulateur de nos actions, le creuset où nos opinions se fondent et s’épurent. Achevez votre ouvrage, Législateurs ; il sera couronné des bénédictions du peuple qui n’attend pas en vain de vous le bonheur que vous lui avez promis. De toutes parts vous devez recevoir les mêmes expressions du dévoûement et vous n’entendrez que le cri unanime et sincère de la reconnaissance ; vive la République, vive à jamais la Convention! Suivent 36 signatures. 13 Les membres du conseil général de la commune de Mayenne, département du même nom, félicitent la Convention sur ses travaux et sur la justice qu’elle a mise à l’ordre du jour. Ils s’écrient, elle n’entra jamais cette justice dans l’ame de ces juges corrompus qui ont immolé, noyé et mitraillé des milliers de victimes dont les mânes crient vengeance et ne peuvent être appaisés que par une justice exemplaire. Mention honorable, insertion au bulletin (32). [Les membres du conseil général permanent et révolutionnaire de la commune de Mayenne à la Convention nationale, le 12 brumaire an III] (33) Liberté, Égalité, Fraternité, unité, indivisibilité de la République ou la mort. Dignes réprésentans d’un peuple libre, Vous les avez énnoncés, ces principes qui germoient dans nos coeurs et qui carractérisent l’homme vertueux; comme vous, nous voulons le reigne de la justice, parce qu’il porte le calme dans l’ame de l’honnête homme et qu’il n’anéantit que les fripons et les conspirateurs ; comme vous, nous détestons les hommes de sang, ces assassins du peuple, pour qui la vertu est un (32) P.-V., XLIX, 147. (33) C 324, pl. 1397, p. 13. Bull., 25 brum., reproduction partielle. SÉANCE DU 24 BRUMAIRE AN III (14 NOVEMBRE 1794) - N° 14 193 suplice et le crime un besoin ; comme vous enfin, nous abhorons le terrorisme, parce qu’il comprime l’esprit du peuple le consterne même, et dénature cruelement l’escence celeste de la liberté. La terreur à l’ordre du jour ne doit être autre chose que la sévérité des loix pour punir les médians et secourir les bons. L’équilibre et l’harmonie du corps social tiennent à l’existance des bonnes lois, puisée dans la nature et décrétée par la sagesse. C’est au temple de Thémis seul que l’on peut espérer reconnaître l’innocence que l’on y voit parroître avec cette candeur touchante qui n’électrise que les coeurs purs, jamais on ne l’aperçoit au tribunal de l’oppression. Elle fut toujours bannie de l’âme de ces juges corrompus et de ces Catilina modernes qui ont immolés, noyés et mittraillés tant de miliers de victimes dont les mânes crient vengeance et qui ne peuvent être appaisées que par une justice exemplaire de leurs boureaux. Nous concevons les plus douces espérances de l’énergie que vous déployés contre les enné-mis de la patrie, nous ne nous attachons point aux personnes, mais aux principes. Nous ne mettrons jamais en balance quelques hommes et la patrie. Vous êtes notre point de raliment, parce que vous êtes nos Réprésentans légitimés, nous ne souffrirons jamais qu’aucune autre autorité ait la coupable audace de rivaliser avec nous, et vous dicter des loix. Nous connaissons le prix de la liberté, nous l’avons conservée chés nous dans toute sa pureté. La race infâme des Chouans qui nous avoisine n’a pas encore osé souiller notre sol de sa présence. Avec nos foibles forces nous avons contenus les mal-veillans et maintenu dans nos foyers la tran-quilité et le feu sublime du patriotisme qui fait chérir la révolution. Oui, citoyens Représentans le peuple de Mayenne a souffert en vous bénissant et les horreurs de la famine et la calomnie des scélérats qui voulaient le perdre en dénaturant ses principes. Mais vous repondites a la confiance qu’il vous témoignait. Vous réalisâtes ses espérances, et grâce a vos soins paternels il vit encore pour vous aimer, pour servir la République et pour aider a terrasser les ennemis du bien public, les fripons et les dominateurs. Les succès de nos frères sur les frontières nous font ressentir une joie innexprimable. Il ne nous reste qu’un désir à former c’est de voir la fin de cette guère interminable, jusqu’à ce jour mal dirigée, contre les chouans et les brigands de la Vendée; c’est alors que tous les Français ne formant plus qu’un peuple de frères et d’amis, jouiront des bienfaits de la liberté et de l’égalité, en gravant dans leurs mémoires l’idée chérie de la Convention nationale. Quintoy, maire, Chevrinais, Jacquier, officiers municipaux, 11 signatures de notables et 9 sans indication de fonction. 14 La société populaire de Caen [Calvados] envoie à la Convention nationale différens arrêtés relatifs au bien public, qui ont été discutés dans son sein, elle invite la Convention d’y avoir égard et assure que c’est le résultat du voeu général. Mention honorable, insertion, par extrait, au bulletin (34). [DU BOIS DU BAIS fait lecture de l’adresse de la société populaire de Caen.] (35) [La société populaire de Caen à la Convention nationale, le 29 vendémiaire an III] (36) Représentans du peuple, Les arrêtés que nous vous adressons contiennent nos principes et nos voeux; les prémiers sont les vôtres, ils sont ceux de tous les vrais amis de la liberté, ils achèveront le bonheur de la République, et la société populaire heureuse de les avoir professés depuis longtems, saura les deffendre jusqu’à la mort ; nos voeux et nos réclamations sont ceux de la justice, les adresser à la Convention nationale c’est être assuré qu’ils seront acceuillis favorablement. Le 29 vendémiaire l’an 3ème de la république française. [Extrait des registres des séances de la société populaire et républicaine de la commune de Caen régénérée depuis le 10 thermidor, séance du 16 vendémiaire an III] (37) Un membre, après avoir parcouru les différentes époques de la Révolution et présenté le tableau de ses beaux jours actuels, a offert à l’examen de l’assemblée et à ses réflexions les questions suivantes. 1°. Quels sont les hommes qui sont réellement les ennemis du peuple, les partisans de la tyrannie et des contre révolutionnaires? 2°. Quels sont les hommes inutiles à la Révolution? 3°. Quels sont enfin ses amis, les soutiens de la liberté, de l’égalité et de la République une et indivisible? Après avoir peint les uns et les autres sous les divers couleurs qui leur sont propres ; après avoir développé leurs différents caractères et les motifs qui les animent dans les grands principes qui dirigent la Convention nationale, et qui sont saisis avec enthousiasme par le peuple pour écraser le crime, faire triompher la vertu et achever la révolution dans l’intérieur, par la félicité publique, quand les ennemis du dehors (34) P.V., XLIX, 147. Moniteur, XXII, 487-498. (35) J. Paris, n° 55. J. Fr., n° 780. (36) C 326, pl. 1417, p. 16. J. Mont., n° 31, résumé; Bull., 25 brum. (suppl.). (37) C 326, pl. 1417, p. 17.