282 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juin 1791.] « Monsieur le Président, « Les premiers jours de mon avènement au ministère de Ja marine, je les ai consacrés principalement à prendre connaissance de ce département, relativement à l’administration de ses fonds et à sa comptabilité. « J’ai observé : 1° que, pendant l’année dernière, une partie des fonds de 1791 a été employée aux dépenses de 1790 et qu’une partie de ceuxlivrés pendant le premier mois de 1790 a été également appliquée aux dépenses de 1788 et 1789; 2° que depuis 1788, époque de la suppression des trésoriers généraux de la marine et des colonies, le ministre n’a, surla caisse deson département, qu’une autorité subordonnée à la volonté du ministre des finances ; 3° que le bureau de l’examen des comptes de la marine a été démembré de ce département et transféré au département des finances en 1788. « Par le mémoire que j’ai l’bonneur de vous adresser, je prouve qu’il est indispensable : 1° de n’appliquer les fonds de 1791 qu’aux dépenses de cet exercice et conformément aux décrets de l’Assemblée nationale des 18 février et 17 avril dernier; 2° de rétablir une caisse à la trésorerie de la marine et des colonies absolument séparée de la trésorie nationale et de la réunir, sous les ordres du ministre de la marine, au bureau de l’examen des comptes. « Je vous prie, Monsieur le Président, de vouloir bien soumettre à l’Assemblée les observations que contient ce mémoire, etje ne doute pas qu’elle ne le trouve susceptible de l’attention qu’elle donne avec tant de constance et d’empressement à tout ce qui intéresse le bon ordre des finances et la prospérité de la nation. « Je suis, etc. .. « Signé : THÉVENARD . » (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre et du mémoire annexé aux comités de la marine et des finances réunis). M. le Président. L’ordre du jour était le rapport de la pétition du tribunal de Saint-Germain; le rapporteur s’étant trouvé indisposé, c’est la suite des ponts et chaussées qui vient à l’ordre du jour. Mais auparavant, M. Morin demande la parole pour présenter un projet de décret au nom des comités de Constitution et des rapports. ( Marques d'assentiment.) M. Morin, au nom des comités de Constitution et des rapports. Messieurs, faut-il maintenir ou annuler l 'élection faite par le département de l'Aude d’un membre du tribunal de cassation et de son suppléant ? Telle est la question qui vous est soumise par le comité des rapports. Cette cause, dans ses détails et dans son ensemble, n’offre rien qui puisse réveiller l’attention. Je me bornerai à vous soumettre un énoncé succinct des faits pour éclairer votre jugement. Les électeurs du département de l’Aude étant assemblés au mois de février pour procéder à la nomination d’un membre du tribual de cassation, et de son suppléant, commencèrent le 17 février par faire celle de l’évêque. Le lendemain, ils déclarèrent qu’une partie d’entre eux était trop pauvre pour payer les frais de leur déplacement, que l’autre partie n’était pas assez riche pour leur en faire l’avance, et qu’ils se retireraient sans procéder à l’élection qui restait à faire, si on ne leur payait pas leurs journées. Le directoire du département, dans une circonstance aussi embarrassante, accorda 5 livres par jour. Le sieur Gervais, juge du tribunal de Castelnaudary, fut nommé au tribunal de cassation et le sieur Albaret fut élu son suppléant. Le sieur Ribel, membre du directoire du département, avait réuni le plus grand nombre de suffrages ; il fut successivement balloté avec le sieur Gervais pour les places au tribunal et avec le sieur Albaret pour la suppléance. Il prouva dès lors, comme il l’a exprimé dans ses requêtes, qu’il ferait tous ses efforts pour faire annuler l’élection des deux sujets qui lui avaient été préférés; voilà le vrai motif de cette affaire. En effet, le 3 mars, au moment où l’assemblée électorale était à peine séparée, le sieur Ribel présenta une requête au directoire du département, pour demander la nullité des élections des sieurs Gervais et Albaret, comme ayant été faites par captation de suffrages et subornation des électeurs. Sa requête fut renvoyée aux 6 directoires de district du département pour en vérifier les faits, et pour donner leur avis. Le directoire rendit une ordonnance conforme. Les sieurs Albaret et Gervais nièrent et repoussèrent dans leur cause les faits allégués par le sieur Ribel. Sur les 6 directoires de district chargés de donner leur avis, après avoir vérifié les faits, ceux de Castelnaudary, Limoux et Quillan, décidèrent qu’il n’y avait pas lieu de casser les élections. Les 3 autres directoires du département, Narbonne, Carcassonne et la Grâce, n’avaient pas encore prononcé, lorsque vous rendîtes le décret du 19 mars, qui réserve au Corps législatif seul, la connaissance de toute les questions relatives aux élections des membres de la cour de cassation. Le sieur Ribel, espérant faire accueillir dans l’Assemblée nationale une base qui avait été repoussée par 3 directoires de district qu’il avait choisis pour juges, vous a adressé des pièces, une adresse, avec des moyens de cassation. Sur les 9 moyens de cassation que M. Ribel a invoqués devant l’Assemblée, il n’y en a que 2 dont nous ayons cru devoir discuter le mérite tant les 7 autres sont minutieux et mauvais. Le comité a vu qu’il n’y avait aucune preuve ni indice des prétendues subornation et suggestion aux électeurs. Quant à l’apposition de la formule du serment à côté du vase de scrutin, elle a été réparée par sa prononciation à haute voix, que le président de l’assemblée en a faite et par l’exactitude avec laquelle les électeurs s’y sont référés en prononçant tous ces mots : je le jure, à mesure qu’ils mettaient leurs billets dans le vase. Le comité de Constitution a déjà décidé pour les municipalités que ces petites irrégularités dans les scrutins ou les autres formes de de l’élection peuvent être regardées comme couvertes, si ceux qui ont fait des protestations ont pris part à l’élection : c’était le cas de M. Ribel. Voici, en conséquence, le projet de décret que vos comités de Constitution et des rapports m’ont chargé de vous présenter : « L’Assemblée nationale, après avoir ouï ses comités de Constitution et des rapports, décrète que l’élection du sieur Gervais à la place de membre du tribunal de cassation, et du sieur Albaret à la place de suppléant, faite par le département de l’Aude, est valable. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Lebrun, au nom du comité des finances. Messieurs, vous avez ajourné à la séance de ce soir plusieurs articles additionnels au décret sur 283 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [16 juin 1791.] les ponts et chaussées, que j’ai eu l’honneur de vous présenter samedi dernier (1). Ce sont ces articles que je vais soumettre à votre délibération. MM. Babey, Lucas et plusieurs autres membres observent que ce projet d’articles n'a été distribué qu’à midi et proposent l’ajournement à samedi prochain. M. Gaullier-Blauzat. Je propose l’ajournement de ce projet jusqu’à mardi, afin qu’on ait le temps de rédiger et d’ajouter aux articles déjà décrétés ceux qui doivent être présentés comme additionnels et dont le comité ne s’est pas occupé; car, avec les additions que proposent le comité des tinances, le décret sera encore incomplet à quelques égards. Je rappellerai, entre autres choses, l’article sur l’intendant ou directeur général des ponts et chaussées que le comité a proposé et que l’Assemblée a ajourné pour être discuté lors de l’organisation du ministère. Et je déclare à cette occasion qu’en réclamant contre celte proposition du comité, je n’ai jamais entendu répandre des idées défavorables sur M. de La Minière, intendant actuel ; je me propose seulement de faire supprimer d’une manière définitive la place d’in-tenaant queM. de La Millière continue d’occuper quoiqu’il soit inconvenant de la conserver dans la nouvelle organisation des ponts et chaussées. Je suis également surpris que le comité ne propose aucun décret pour terminer la composition et les fonctions de l’administration centrale, que l’on a séparée par le fait entièrement de l’assemblée des ponts et chaussées. M. Delavigne. J’appuie l’ajournement; il est nécessaire de rapprocher les nouveaux articles proposés de ceux qui sont déjà décrétés; plusieurs des nouveaux articles paraissent en effet en contradiction avec les premiers. (L’Assemblée, consultée, ajourne à la séance de mardi soir les articles additionnels sur les ponts et chaussées.) La suite de la discussion du projet de décret relatif à la liquidation des finances des greffes et offices domaniaux est reprise (2). M. PIson du Galarnl, au nom des comités des domaines et de judicature. J’ai l’honneur de rappeler à l’Assemblée que, dans une précédente séance, elle a décrété que les engagistes des greffes et autres offices domaniaux seraient remboursés du montant des finances qu’ils auraient versées au Trésor public, sur la représentation des titres et quittances de finances. Il vous reste, Messieurs, à décréter quelques dispositions qui ne sont qu’une conséquence de ce premier article. Les voici : Art. 2. « Les offices collectivement aliénés à des traitants ou adjudicataires généraux seront pareillement liquidés sur le pied de la finance versée au Trésor public, dont le montant sera réparti entre les sous-engagistes, au marc la livre du prix des différentes sous-aliénations. Art. 3. t A défaut, par les sous-engagistes, de justifier (l) Voy. ci-dessus, séance du 11 juin 1791, p. 144. (2) Voy. ci-dessus, séance du 9 juin 1791, p. 95. du prix total des sous-aliénations, le prix des adjudications principales sera réparti entre eux, au marc la livre des sommes pour lesquelles ils se trouveront compris dans les états ou rôles sur lesquels les aliénations ou adjudications principales sont intervenues. Art. 4. •< Les suppléments de finances ou nouvelles finances payées ou remboursées par les engagistes, soit pour attribution ou augmentation de gages, soit pour conservation ou attribution de droits utiles ou émoluments, soit pour réunion d’offices ou pour en empêcher l’établissement, entreront en liquidation. » (Ces différents articles sont successivement mis aux voix et adoptés.) Art. 5. '< Les taxes représentatives de charges ou impositions, et les droits de confirmation de jouissance, de confirmation ou rétablissement d’hérédité, n’entreront point en liquidation, à moins que lesdits droits n’eussent été formellement établis à titre d’augmentation ou supplément de finance. » Un membre propose, par un amendement, que les taxes représentatives de charges ou impositions, les droits de confirmation et autres, mentionnés en cet article, entrent en liquidation. (L’Assemblée rejette cet amendement par la question préalable et adopte l’article 5 sans changement.) Art. 6. « Les taxes payées pour des droits simplement honorifiques n’entreront point en liquidation. Art. 7. « Les sols pour livres accessoires des finances ou suppléments de finances remboursables, n’entreront en liquidation que lorsqu’ils auront été versés au Trésor public, ainsi que les finances principales. Art. 8. « Les finances que les nouveaux acquéreurs ont été chargés de rembourser aux anciens en-gagistes par les actes de revente, seront allouées en conformité des liquidations qui en auront été faites lors ou depuis les reventes, en justifiant du remboursement; et si la liquidation n’en avait pas été faite, lesdites finances seront liquidées conformément au présent décret, sur la représentation des quittances passées aux anciens engagistes. Art. 9. « Les frais de sceau des lettres de ratification prises par les engagistes actuels, et des lettres de commission prises par eux ou leurs commis ou préposés en exercice lors de la suppression des tribunaux auprès desquels les offices étaient exercés, ensemble le droit de marc d’or payé par lesdits engagistes et leurs commis ou préposés, seront liquidés et remboursés; aucuns autres frais ni droits de mutation n’entreront en liquidation. Art. 10. « Les liquidations définitives faites avant l’établissement de la direction générale dans les formes usitées jusqu’alors, auront leur effet,