[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 juillet 1791.] vaises intentions que je rappelle les malheureuses dissensions qui ont eu lieu dans notre armée; mais, puisque vous êtes les médecins, il faut vous découvrir la plaie. Je suppose un régiment quelconque, qui, après avoir lutté longtemps contre l’intluence maligne des chefs antirévolutionnaires, s’est enfin déterminé à la mesure illégale de les renvoyer. Les soldats diront : Nous n’avons pas obéi à de tels chefs, parce qu’ils n’aimaient pas la Révolution. Ce motif est moralement bon ; mais n’aimer pas la Révolution n’est pas un délit; on ne pourra poursuivre ces officiers ; et cependant combien il est dangereux de leur confier le sort de notre armée. Ils rentreront dans leur corps, ils y apporteront les mêmes sentiments qui leur avaient déjà suscité la méfiance de leurs subordonnés ; et les mêmes dissen-ions et les mêmes troubles renaîtront. (Murmures.) Je plaide véritablement la cause des officiers, autant que celle des soldats; car rien n’est plus malheureux pour des officiers que d'être attachés à des corps dont ils n’ont pas la confiance. M. Tronche!. Je propose un amendement à l’article 5, et voici mes motifs; il est conforme à la justice et à l’humanité de procurer aux officiers, contre lesquels on aurait élevé des soupçons mal fondés, le moyen de servir leur patrie, lorsqu’ils en seront jugés dignes, mais il ne faut pas non plus mettre de telles entraves aux dénonciations qu’elles ne puissent pas se produire, qu’un régiment ne puisse pas déposer entre les mains de l’autorité publique les soupçons qu’il aurait pu concevoir contre ses chefs et qu’on ne puisse pas connaître ceux qui sont légitimement suspects. 11 y a un grand défaut dans la rédaction de l’article 5; il y est dit que ceux qui n’auront pas administré des preuves suffisantes pour établir le mérite de leurs dénonciations seront punis comme calomniateurs. 11 faut, cependant, meitre une différence entre les preuves suffisantes pour une dénonciation, et les preuves. nécessaires pour la conviction. En général, l’accusation fausse n’expose à la peine de la calomnie que lorsqu’elle est véritablement calomnieuse, et il faut qu’elle soit jugée telle par le tribunal. Je voudrais en conséquence que l’article qui impose la peine de la calomnie ne fût prononcée que dans le cas où les juges de la cour martiale trouveraient la dénonciation calomnieuse, et je demande qu’aux mots : « qui n’auront pas administré des preuves suffisantes pour établir le mérite de leurs dénonciations » on substitue ceux-ci : « si la dénonciation est jugé calomnieuse ». M. Eiuinery, rapporteur. J’adopte l’amendement de M. Tronchet. M. d’Aremberg de La Marck. Beaucoup d’excellents officiers ont refusé de prêter le serment du 22 juin, par i’ignorance où ils étaient des mesures prises par l’Assemblée nationale, parce qu’on leur faisait envisager comme des mesures définitives des mesures provisoires, nécessitées par les circonstances. Ces hommes pervers, qui ont voulu faire protester les départements contre le décret du 15 juillet, ont cru que le meilleur moyen de venir à bout de leurs desseins criminels était de gagner l’armée. Us ont donc répandu que l’Assemblée nationale voulait changer la forme du gouvernement, que c’était en conséquence de celte intention qu’elle chan-589 geait la formule du serment décrété 8 jours auparavant, et qu’elle a envoyé des commissaires pris dans son sein pour le recevoir. Je demande qu’il soit accordé un délai de 15 jours à tous les officiers qui, ayant d’abord refusé le serment, voudront aujourd’nui le [ rê-ter, et je déclare que la grande majorité de c.s officiers est actuellement à Paris, ayant abandonné leur corps pour des causes légitimes. (Murmures.) Plusieurs membres : La question préalable. M. Chabroud. Il est impossible que si vous laissez aux soldats le droit de dénoncer leurs officiers, vous ne laissiez pas aux officiers le droit de dénoncer leurs soldats. En sorte que je regarde le retranchement du sixième article comme illusoire. Les 3 articles que l’on discute sont absolument inutiles et ne peuvent avoir que des inconvénients. Vous n’avez pas entendu encore, de la part des soldais, d’autres reproches que ceux d’aristocratie. Il est évident que cela tenait à l’agitation d’une grande révolution, mais que tout cela n’est pas délit ; en conséquence je demande la question préalable sur ces articles. On propose d’autre part d’accorder un délai de 15 jours aux soldats qui voudront dénoncer le3 officiers qu’ils ont forcés de quitter leur corps. Mais les procès qui seront la suite de ces dénonciations dureront plus de 15 jours, et votre armée sera dans un désordre extrêmement dangereux. D’ailleurs, ces dénonciations, ne pouvant porter le plus souvent que sur des intentions et des opinions, ne pourront pas faire la matière d’un jugement, et seront par conséquent au moins inutiles. M. Prieur. La discussion que vous venez d'entendre doit vous convaincre que les articles que vous a proposés M. Emmery sont entièrement mauvais, et qu’au lieu de rétablir la paix uans l’armée, ils ne tendent qu’à y je'er un tison de discorde. Croyez-vous qu’il soit dans les principes d’autoriser, de provoquer même la dénonciation des soldats contre les officiers? L’officier réintégré pardonnera-t-il jamais aux soldats qui l’auront dénoncé? Faut-il chercher à semer la d scorde entre des Immunes appelés à partager les mêmes périls ? Je plaide ici la cause de tout le monde, je parle pour les oflic ers comme pour les soldats. Non, Messieurs, il faut qu’il y ait des liaisons intimes entre les hommes qui partagent les mêmes dangers. Je crois donc que ce qu’il y a de plus sage à faire dans cette circonstance, c’est de retirer ces 3 articles et de renvoyer au comité militaire, pour nous présenter un moyen de faire rentrer les officiers dans leurs légiments ou les replacer dans d’autres. M. Woidcl. J’appuie la question préalable sur les 3 articles du comité; leur motif est louable; mais prenez garde à ce que vous allez faire. Vous entretenez par là une discorde éternelle entre les officiers et les solda's, et vous perdez entièrement votre armée. (Murmures. — Applaudisse - ments dans les tribunes.) A quoi serviront les dénonciations? L’expérience a prouvé qu’il n’y avait aucun délit formel de la part des officiers. M. Chabroud. A la place des 3 articles ac*