[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 oetobre 179Q.J 727 Art. 7. « Quinzaine après sle payement ou la consignation dûment notifiée/ le sieur Brullée� est autorisé à se mettre en possession des bois, pâtis, prairies et terres à champ, emblavées ou non, qui se trouveront dans l’emplacement dudit canal et de ses dépendances. A l’égard des bâtiments, clos et marais légumiers, ce délai sera de trois mois. Art. 8. « Les hypothèques dont les biens qu’il acquerra pour la construction de ce canal et de ses dépendances pourraient être chargés , seront purgées en la forme ordinaire; mais il ne lui sera expédié chaque mois qu’une seule lettre de ratification par tribunal, pour tous les biens dont les hypothèques auront été purgées pendant ce mois. Art. .9. • Ce canal sera traité, à l’égard des impositions, comme le seront les autres, établissements de ce genre. » Un membre renouvelle, en particulier sur l’article 10, concernant l’abandon à faire au sieur Brullée des fossés de la Bastille et de l’Arsenal, la demanded’ajournement qui a d’abord été faite sur la généralité du projet. L’Assemblée renvoie cet article à son comité des domaines, et l’ajourne à la séance de jeudi au soir, 21 de ce mois. M. le Président lève la séance à neuf heures et demie, et indique celle de demain matin à l’heure ordinaire. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. MERLIN. Séance du mercredi 20 octobre 1790 (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. M. de Montcalm-Gozon, député de Ville-franche, demande et obtient un congé de six semaines ou deux mois pour affaires très pressantes. M. Dnval d’Eprémesnil obtient un congé de quinze jours. M. Eaboreys, député d’Aubusson, demande la permission de s’absenter pour six semaines à dater des premiers jours de novembre, Cette autorisation lui est accordée. M. le Président. Le comité des finances demande à présenter un décret sur l'interprétation erronée donnée dans le département de la Mayenne aux décrets sur la vente des sels. (1) Getto séance est incomplète au Moniteur. M. Vernier, rapporteur. L’Assemblée, en décrétant la suppression de la gabelle, a ordonné que le sel, qui était alors dans les salorges, serait vendu par la ferme pour le compte de l’Etat; que cette vente serait absolument libre, et qu’en suivant le prix du commerce, il ne pourrait cependant excéder 3 sous la livre dans les pays les plus éloignés des salines. L’esprit tout naturel de ce décret a été mal saisi par le directoire du département de la Mayenne. Cette assemblée administrative n’a pas laissé au commerce de cette denrée la liberté que vous avez voulu lui donner; elle l’a taxée, dans l’étendue de son arrondissement, à un sou la livre. Voici, en conséquence, le décret que votre comité des finances vous propose : « L’Assemblée nationale, instruite par le rapport de son comité des finances, des interprétations erronées que le département de la Mayenne, les districts de Villaine-la-Juhel, Château-Gontier ont données à ses décrets des mois de mars, avril et mai 1790, relatifs à la vente libre du sel, au débit qui devait être fait, par la compagnie des fermes, du sel qui se trouvait dans les greniers, magasins, dépôts, ou qui avait été acheté avant le premier avril, et au compte qui devait en être rendu chaque mois; désirant prévenir les suites de ces fausses interprétations, les abus qui en pourraient résulter, et empêcher que l’erreur ne se propage au préjudice des revenus de l’Etat, déclare : « 1° Que, par l’article du décret du mois de mars, elle n’a eu d’autre objet que d’établir une pleine liberté dans la vente du sel, et de prévenir des renchérissements subits trop considérables; en conséquence, elle ordonne que le sel qui était acheté avant le premier avril, ou qui se trouvait pour lors dans les salorges, greniers et magasins, soit débité librement par la compagnie des fermes pour le compte de la nation, et au prix qu’elle trouvera convenable d’y fixer, pourvu que, dans les lieux les plus éloignés de Ja mer, la vente n’excède pas 3 sols la livre; « 2° Que les précautions ordonnées par l’article 6 du décret du mois de mars, et par l’ar-, ticle 3 de celui de mai, ne tendaient qu’à empêcher de nouveaux achats, et le remplacement de tout autre sel que de celui qui était alors dans les greniers, magasins, salorges, ou dont l’achat antérieur au premier avril se trouverait constaté; en conséquence, elle ordonne qu’il ne soit fait aucun empêchement à ce que le sel dont l’achat était antérieur au premier avril, ne soit transporté dans les salorges, celui des salorges daus les dépôts, magasins et greniers, et sans qu’il puisse être fait aucun obstacle aux approvisionnements successifs des premiers, jusqu’à l’entier épuisement des sels existants dans les salorges: le tout néanmoins en faisant constater par les municipalités les enlèvements et emplacements ; « 3° A l’égard des comptes du prix des ventes qui, aux termes dudit décret, doivent être rendus chaque mois, et du versement des deniers qui doit être fait à la même époque dans le Trésor public, l’Assemblée nationale déclare que ce compte ne doit être rendu qu’à l’administrateur général des finances; que les sommes à provenir du prix desdites ventes ne peuvent être versées ailleurs qu’au Trésor public, ni distraites pour quelques causes que ce puisse être, à moins d’un décret spécial, sauf néanmoins, sur Je tout, la surveillance des districts et départements. « Enjoint l’Assemblée nationale au département de la Mayenne, de Villaine-sur-Juhel,Ghà- 728 lAsaemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 octobre 1790.] teau-Gontier, et tous autres qui pourraient avoir adopté les mêmes erreurs, d’avoir à se conformer exactement aux dispositions tant du présent décret que du précédent. » (Ce projet de décret est adopté.) M. le Président. Le comité des finances demande à proposer un projet de décret sur les mesures à prendre pour opérer à moindres frais la vente du mobilier de M. et Mme Mesle de Saint-Seyran, débiteurs et comptables envers la nation. M. d’AIIarde, rapporteur . M. Mesle, receveur des tailles à Montauban, doit à l’Etat 336,000 livres ; la chambre des comptes a fait saisir ses effets. Des créanciers particuliers ont formé opposition à la saisie; les frais sont immenses. L’Etat a dans la finance de l’office de ce receveur, qui est de 600,000 livres, un gage assuré de sa créance. Les créanciers particuliers de M. Mesle se réunissent pour demander la permission de faire vendre à l’amiable les effets de leur débiteur, à la charge d’en verser les premiers deniers dans le Trésor public. Le comité approuve cette mesure, et propose à l’Assemblée de l’admettre. Un membre observe que cette affaire n’est point de la compétence du Corps législatif. (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) M. Camus prend texte du rapport de M. d’Al-larde pour faire la motion suivante : « L’Assemblée nationale décrète que le comité de liquidation, auquel les états des créances du Trésor public sur divers particuliers ont été remis par le comité des pensions, présentera incessamment à l’Assemblée un projet de décret sur les poursuites à faire contre les débiteurs du Trésor public, et sur la forme de ces poursuites, à l’effet de faire rentrer, le plus promptement possible, dans le Trésor public, les sommes qui lui sont dues. » (Cette motion mise aux voix est décrétée.) M. le Président. L'ordre du jour est la suite de la discits.ion sur l'affaire de Brest et sur le renvoi des ministres. M. d’André. Les quatre comités vous ont présenté un projet de décret qui contient trois dis-Fositions diverses: l’une est relative à l’escadre, autre à la municipalité, et l’autre est générale pour tout le royaume. Je demande qu’elles soient discutées successivement et séparément. M. Malouet. Il n’y a rien de plus dangereux que de prescrire ainsi un mode de discussion sur Y ensemble d’un décret. Il est sans exemple, dans une assemblée délibérante, que lorsqu’un pro-jét de décret est soumis à la délibération, chaque membre n’ait pas le droit d’examiner ce décret sous tous les rapports . M. Regnaud, député de Saint-Jean-d' Angely. Il est évident que la disposition du décret relatif aux ministres est absolument indépendante des autres. En vain, si vous les confondiez, vous flatteriez-vous de parvenir à un résultat. De débats en débats, de question préalable en question Ïiréalable, vous verriez embrouiller la discussion. e demande donc que la proposition de M. d’André soit acceptée. M. Alexandre de liameth. M. d’André a proposé de traiter séparément différentes questions renfermées dans le projet de décret proposé par les quatre comités. D’autres membres ont demandé que toutes les dispositions soient discutées dans leur ensemble, en établissant qu’elles ont toutes un rapport intime entré elles. Je dois dire que, dans vos quatre comités, en s’occupant de l’insurrection de l’escadre de Brest et de la conduite de la municipalité de cette ville; en voyant que cette municipalité, dont le patriotisme est connu, n’avait motivé les actes répréhensibles qu’elle s’était permis, que sur la défiance que lui inspiraient les sentiments et les projets des ministres, vos comités, dis-je, ont cru devoir chercher la cause des désordres qui avaient lieu dans les différentes parties du royaume, et voyant que de toutes parts, dans les colonies, dans les flottes, dans l’armée, partout, la méfiance qu’inspirent les ministres actuels enfante des malheurs et en annonce de plus grands encore ; en voyant le système d’inertie par lequel ils vous renvoient toutes les difficultés, pour embarrasser votre marche, ralentir vos travaux, jeter l’incertitude dans l’âme des citoyens, fomenter et accroître les espérances des mécontents, et vous amener peut-être à le suivre, en vous déconsidérant auprès des puissances étrangères ; Vos comités, dis-je, ont unanimement pensé que, soit incapacité, soit malveillance de la part des ministres, leur existence à la tête du gouvernement mettait la chose publique en danger. Les membres qui les composent, partagés sur la manière de présenter la mesure qui vous a été soumise, sont unanimement convenus qu’elle était indispensable. Ainsi donc, traiter les deux premières parties, relatives soit à l’insurrection de la flotte, soit à la conduite de la municipalité, sans discuter et arrêter celle qui a rapport aux ministres, serait une chose inutile; on vous ferait arrêter des mesures diverses sur les effets, sans vous faire prononcer sur les causes : le mal est dans l’existence des ministres actuels à la tête des affaires. Vous devez le faire connaître au roi et ensuite décider les deux autres parties. Je demande donc que, si l’on sépare les trois dispositions, on commence par celle qui est relative aux ministres. (Cette proposition est mise aux voix et adoptée.) En conséquence, le troisième article relatif au renvoi des ministres est mis en délibération. M. de Bouthillier (1). Messieurs, les comités diplomatique, des colonies, de la marine et militaire réunis, proposent, comme un moyen d’arrêter les troubles de Brest, de déclarer au roi que la nation ne peut avoir confiance dans les ministres qu’il honore de la sienne : membre du comité militaire, je crois qu’il est d’autant plus de mon devoir de manifester mon opinion particulière à ce sujet, qu’absent de la séance, dans laquelle cette motion a été délibérée, je n’ai pu y motiver les principes qui m’auraient prescrits impérieusement de m’y opposer. L’Assemblée nationale a décrété que le pouvoir exécutif suprême appartenait au roi; elle a prononcé la responsabilité des ministres. Sous ce double point de vue, l’arrêté proposé est également inconstitutionnel : demander au roi l’éloignement de ses conseils, ceux qu’il a cru devoir y appeler, c’est empiéter sur ses droits, c’est réunir tous les pouvoirs, c’est enfin violer la Constitution ; que le Corps législatif accuse individuellement, tel ou tel ministre, il en a le droit sans doute en vertu de ses décrets, mais les (1) Ce discours n’a pas été iuséré au Moniteur.