76 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE pour le servir, au milieu des dangers, nous pouvons ajouter une telle exposition de nos sentimens, qu’il ait sans cesse à sa portée de quoi nous juger sur notre profession de foi ! Pour moi persuadé que, s’il est possible de résister à la malveillance, c’est, après en avoir démasqué les plans, en convenant et en s’unissant de principes, je déclare ici ceux que je professe, déterminé à les soutenir de tous mes moyens, et à les sceller de mon sang. DÉCLARATION Je veux le gouvernement révolutionaire jusqu’à la paix. Je veux le système républicain, fondé sur l’égalité des droits et la liberté civile. Je regarde comme contraire à ce système, toute division, toute fédération des parties de la République française; je la veux une et indivisible. L’autorité nationale réside en France dans l’intégralité de la représentation nationale; l’individu ou la collection d’individus qui tente-roient de se l’arroger, ou d’en arrêter l’effet, sont des usurpateurs, et, par le fait, hors de la loi comme des rois. La loi est l’expression de la volonté de la majorité. La représentation nationale a seule le droit d’accuser ses membres; elle ne doit ni les accuser, ni les juger sans les entendre. Tant que le but d’une proposition quelconque est l’égalité et la liberté républicaine, je regarde comme un délit de s’opposer à la diversité des opinions. Tout homme qui cherche à ressusciter des castes dans le corps législatif, en classant des membres d’après leurs erreurs, est coupable et doit être puni. Je veux la punition du crime, la protection de l’innocence, l’indulgence pour la foiblesse et l’erreur; c’est-à-dire, en un mot je veux la justice. J’abjure royauté, dictature, décemvirat, autorité arbitraire, ambition, places, argent; je voue à l’exécration tout ce qui, dirigé vers un intérêt privé quelconque, fût-il celui de la nature, s’écarteroit de l’intérêt général de la société. Je résisterai de toutes mes forces à tout genre d’oppression; je frapperai les oppresseurs, et j’aiderai de tous mes moyens ceux qui se dévoueront pour les détruire. Paix, sûreté, force et bonheur au Peuple français; telle est ma profession de foi et mon bien. Si ces réflexions sont conformes à vos principes; si cette déclaration politique est dans vos âmes, n’eût-elle d’autre résultat que d’avoir été rendue publique à cette tribune, elle peut déjouer bien des pièges et ramener bien des amis. Le temps que je vous ai pris ne sera donc pas perdu. Cependant, peut-être ces observations offertes à la méditation de vos comités de Gouvernement et de Législation, pourront-elles leur suggérer quelques idées heureuses pour tirer de ses entraves le gouvernement révolutionnaire, pour le préserver des écueils que la malveillance lui prépare, pour lui assurer une garantie chez nous, et pour nous faire trouver une garantie en lui; c’est sous ce rapport que je demande que le renvoi leur en soit fait. Souffrez que je finisse par l’expression d’un sentiment dont je suis pénétré : ce qui différencie le fanatisme religieux de l’entousiasme de la liberté, c’est que ce dernier sentiment n’est nourri que par les plus douces affections de l’âme, union, concorde, courage, dévouement; et que l’autre, au contraire, est moins l’amour de son objet que la haine de ses adversaires. A cette grande et mémorable époque, où, à travers les mers, deux nations libres et amies se sont donné la main dans cette enceinte, et ont juré de maintenir leur liberté malgré l’odieuse coalition des tyrans qui veulent la détruire, que le spectacle de la félicité qui est assuré au peuple américain, ne soit donc pas perdu pour le peuple français à qui le régime démocratique en promet une plus grande encore. Rendons à notre caractère et au vrai patriotisme toute la dignité que le trouble des factions leur avoit ôté. Malheur à ceux qui n’existeroient point s’ils n’avoient à haïr ! pour nous, redoublons de vigilance et d’union; que ce soit-là le plus sûr garant des espérances de la Nation, lesquelles ne doivent point être trompées. Les brigands avoient tout organisé pour la discorde et le désespoir : ils crioient vive la République ! et pensoient, meurent les républicains ! Aujourd’hui, que la crainte fasse pâlir les méchans, que la paix rentre dans l’âme des bons citoyens, que chaque jour soit celui de la justice, et n’oublions pas que ceux-là seuls survivront à la révolution, qui déverseront à pleines mains le bonheur sur le PEUPLE. Je demande le renvoi des vues que j’ai présentées, à vos trois comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, et que le primidi de la prochaine décade il vous soit fait un rapport sur les meilleurs moyens d’action du gouvernement révolutionnaire, considéré dans ses relations avec le peuple et avec ses représen-tans (46). 18 Un membre demande, au nom du comité d’instruction publique, la parole pour demain. Décrété (47). GRÉGOIRE : Je suis chargé par le comité d’instruction publique de vous faire un rapport qui prouvera que l’intention de l’aristocratie était de produire la perte des arts et des monumens et de nous ramener à l’esclavage et à l’ignorance. Je demande la parole pour demain à midi, pour dévoiler ces horribles trames. La parole sera accordée demain à Grégoire suivant sa demande (48). (46) Débats, n° 709; résumé dans C. Eg., n° 741; F. de la Républ., n° 422; J. Univ., n° 1739, 1740; J. Perlet, n° 706; J. Fr. n° 704; F. de la Républ., n° 422; Mess. Soir., n° 741; Moniteur, XXI, 620; M. U., XLIII, p. 204; Ann. R.F., n° 271; mention dans J. Paris, n° 607; J.-Culottes, n° 561, 563; J. Mont., n° 122. (47) P. V., XLIV, 210. (48) M.U., XLIII, 204; J. Fr., n° 704; Rép., n° 253.