540 [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 septembre 1790.] . M. Gossin, rapporteur , donne lecture de l’ar-tide 6. M. Mougins de Roquefort. Je demande l’ajournement de cet article en ce qui concerne les offices créés depuis 1771. Mes collègues de députation et moi avons besoin de nous entendre pour communiquer à l’Assemblée nos motifs �'exception. M. Goasin, rapporteur. Je ne m’élève pas contre l’ajournement de la partie contestée, mais rien ne suppose à ce que le restant de l’article soit voté dès aujourd’hui. Cette proposition est adoptée et l’article 6 est décrété ainsi qu’il suit * Art. 6. Les premiers pourvus d’un office et ceux qui en ont levé aux parties casuelles, depuis 1771, seront remboursés sur le pied de la finance effectivement versée dans le Trésor public. » M.. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE JESSÉ. Séance du jeudi 2 septembre 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. • Un de MM. les secrétaires donne lecture de différentes adresses, dont la teneur suit : Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la garde nationale d’Ainay-le-Duc ; elle supplie l’Assemblée de lui procurer des armes. Des sous-officiers et soldats des seconde et quatrième brigades du régiment du corps royal de l'artillerie des colonies, en garnison à Lorient, qui remercient vivement l’Assemblée des bienfaits dont elle a comblé l’armée, et la supplient de conserver ce régiment, ou du moins de le créer huitième régiment d’artillerie de terre. Ils font le plus grand éloge de leurs officiers, qui ne les ont jamais soumis qu’à une discipline sage, dictée par l’humanité, et qui les ont convaincus que le premier des plaisirs est celui de remplir ses devoirs. Des citoyens Rochellais, réunis en société d’amis de la Constitution, qui présentent à l’Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement. De la commune de Dun-le-Roi, qui annonce que tous les citoyens et la troupe de ligne, en garnison dans -cette ville, ont célébré le jour mémorable du 14 juillet, par une fête civique, dans laquelle ils ont prêté avec transport le serment fédératif des Français. Elle fait une soumission de 120,000 livres pour acquérir des biens nationaux. De l’assemblée électorale du département de la Haute-Garonne, qui consacre les premiers moments de son existence à présenter à l’Assemblée nationale l’hommage d’une adhésion absolue à ses décrets, et d’un dévouement sans bornes pour en assurer l’exécution H est donné aussi lecture : D’une adresse présentée par une députation du corps royal des canonniers-matelots du département de Brest, par laquelle ce corps exprime le* vœu de jouir promptement d’une nouvelle organisation, et proteste de sa soumission parfaite: aux décrets de l’Assemblée. Il fait en même temps! plusieurs demandes relatives à l'avancement des; soldats et sous-officiers ; D’une lettre du secrétaire de la section dit Jardin des Plantes à laquelle est jointe copie des procès-verbaux des assemblées de ladite section*,, des 21 et 23 août, tenus relativement à l’explication que M. Gros, euréde Saint-Nicolas du Char4* donnet, a cru devoir donner dans cette section; de ses motifs de rétractation de sa signature apposée au bas de la déclaration des 297 membres, concernant la religion, et des raisons qui l’y ont: déterminé. Un membre offre à l’Assemblée un don patriotique de 3,000 livres ; savoir : au nom du sieur Giément Berneaux, négociant, établi à Varsovie depuis plusieurs années, la somme de 2,400 livres,. et, au nom du sieur Gide, fils, âgé de 22 ans, demeurant avec ledit sieur Clément Berneaux, celle: de 600 livres. L’Assemblée applaudit aux généreux sentiments de ces négociants, et arrête qu’il sera fait dans son procès-verbal une mention honorable de: cette offrande. M. Bureaux de Pusy, membre du comité de Constitution, après être entré dans quelques détails sur la position de M. Gottereau, ingénieur-géographe, employé par le comité de Constitution pour le travail relatif à la division du royaume iors de la formation des départements, sur l’utilité dont cet ingénieur avait été, était encore chaque jour au comité, enfin sur la nécessité de lui assurer un traitement au moins provisoire, propose un projet de décret conçu eu ces termes : « L’Assemblée engage le sieur Gottereau à continuer son service auprès du comité de Constitution, jusqu’à ce qu’il ait été définitivement statué sur l’organisation des archives; et cependant d’ici à cette époque, elle lui assigne 300 livres d’appointements par mois, depuis le moment où il a commencé à être employé par le comité. » M. Camus. Il vous a été fait un rapport concernant l’organisation des Archives (1); je demande que la discussion eu soit fixée à l’une de vos plus prochaines séances. M. Fréteau. Je propose d’allouer à M. Gottereau 300 livres par mois jusqu’à ce jour, à compter de l’époque où il a été employé par le comité de Constitution, et d’ajourner le surplus jusqu’à, l’époque où l’Assemblée s’occupera de l’orgaai-sation des Archives. (Cette proposition est adoptée.) L’Assemblée ajourne ensuite à la séance de samedi soir la discussion du décret concernant les Archives. M. de üoailles. L’affaire de M. de Mirabeau le jeune a été mise la troisième à l’ordre du jour. Get ordre doit être changé, puisque l’ajournement à aujourd’hui a été ordonné par uu décret. Je demande qu’on s’occupe à l’instant de cette, affaire. M. Buval ( ci-devant d’Eprêmesnil). La justice (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (1) Le 29 juin précédent (t. XVI, p. 561 et suiv.). [Assemblée nationale.] et la loyauté de cette Assemblée sont intéressées à ce que votre ordre du jour ne soit pas dérangé. M. l’abbé llaury. J’ai envoyé à M. de Mirabeau l’aîné toutes les pièce que son frère m’a adressées et qui sont nécessaires à l’apologie de celui-ci. M. de Mirabeau l’aîné n’est pas ici en ce moment; l’Assemblée ne voudra pas juger un accusé sans entendre son défenseur. Cependant, si l’on passe à la discussion, que les adversaires de l’accusé parlent, je répondrai. (L’Assemblée convient d’entendrequelques députations avant d’ouvrir cette discussion.) On admet à la barre une députation de Vau-girard, Issyr:Clamart, etc., septième canton du district méridional de Paris, qui présente à l’Assemblée nationale l’acte de fédération de ce canton. Celui qui porte la parole profite de cette circonstance pour renouveler à l’Assemblée i’hommage des respectueux sentiments dont tous les citoyens que représente sa députation, sont pénétrés pour l’Assemblée, et l’assurance de la juste confiance qui les anime. Il représente quelques réclamations sur l’inégalité de la répartition de l’impôt. M. le Président répond en ces termes : « L’Assemblée nationale a entendu votre pétition sur l’égale répartition de l’impôt. Ses travaux prouveront à jamais qu’elle regarde ce principe comme une des principales bases de l’organisation sociale, et qu’il est nécessairement lié à tous ceux qu’elle a consacrés : elle prendra en considération votre demande, si elle est fondée sur eux. Elle vous accorde les honneurs de sa séance. » Une société de suisses résidant à Paris , im-prouve et désavoue hautement la rébellion du régiment de Châteauvieux. Ces excès, dit-elle, doivent être imputés aux instigations et aux manœuvres perfides des ennemis de la liberté, à cet amas d’étrangers, écume de toutes les nations, que l’avarice des chefs a fait admettre dans ce corps... Le régime aristocratique des régiments corps suisses a pu également, dans le moment où l’aristocratie expire, briser les liens de la discipline et de l’obéissance. L’Assemblée, sans avoir cette intention, a consacré ce régime en ordonnant le 18 août qu’il ne serait rien changé à l’organisation des régiments suisses. Nous désirerions que, sans déroger à ce décret, l’Assemblée statuât le renouvellement de nos capitulations. C'est alors que nous serons dignes de la nation dont nous sommes les enfants et de celle qui nous a adoptés; c’est alors que nous serons relevés d’un avilissement auquel nous préférons la mort. Nous nous proposons d’envoyer à tous les régiments suisses une lettre dans laquelle nous les exhortons à l’obéissance, à la modération; nous les conjurons de ne porter jamais que par des voies légales, les plaintes qu’ils auraient à faire contre leurs chefs. {V Assemblée applaudit .) M. le Président répond en ces termes : « L’Assemblée nationale n’est point étonnée de voir les députés d’une société, composée de Suisses de tous les cantons et de tous les Etats, venir lui témoigner leur improbation de la conduite du régiment de Châteauvieux, et de sa rébellion à la loi. Ce devaient être les sentiments de cette nation généreuse et fière, qui sait allier «l’intrépidité dans les combats, à l’amour de la [2 septembre 1790.] ej|| liberté, et à la soumission la plus parfaite à la discipline, et qui, depuis tant de siècles, est l’alliée la plus fidèle du peuple français. Cette nation doit chérir chez ses amis cette liberté qui lui a tant coûté à elle-même, et que l’indiscipline du soldat pouvait étouffer dans son berceau. L’Assemblée nationale est douloureusement affectée que le régiment de Châteauvieux ait attiré sur lui la juste sévérité de la loi; mais cette faute passagère de quelques-uns de vos compatriotes, sera bien moins célèbre dans l’histoire que les sentiments que vous venez lui manifester ; le nom de la nation suisse ne peut être séparé dans ses fastes de l’idée des plus mâles et des plus touchantes vertus. « L’Assemblée vous accorde les honneurs de sa séanee. » (Pendant ce discours, il s’élève quelques clameurs dans les Tuileries. Le bruit s’accroît, et bientôt un grand nombre de voix fait entendre, au milieu de cris tumultueux, ces mots mille fois répétés : Le renvoi des ministres ! La foule très excitée par les événements de Nancy et de 25 à 30,000 personnes menaçant de se porter à tous les excès, on fait venir de nombreux détachements de la garde nationale, on entoure la salle de canons et, peu à peu, on dissipe les rassemblements.) On introduit à la barre M. Palloy, artiste, accompagné de plusieurs de MM. de la garde nationale parisienne ; il fait hommage à l’Assemblée nationale d’une représentation de la Bastille, exécutée dans une des pierres de la démolition de cette prison. M. Palloy prononce un discours, dont la. teneur suit . « Messieurs, lorsque le pouvoir arbitraire accablait le citoyen de toute sa force, et que l’homme, fait pour la liberté, était tout à coup précipité dans les cachots d’une Bastille, nos tyrans n’imaginaient guère que si près d’expier ses forfaits, cette Bastille, frappée par la fureur d’un peuple réduit au désespoir, allait se cacher sous ses ruines, monument de vengeance et de barbarie que le voyageur cherche et ne retrouve plus. Moi-même j’y suis entré l’un des premiers, mes ouvriers y combattaient avec moi, et quand nos citoyens eu eurent retiré les victimes qu’elle recélait, les armes meurtrières qu’elle devait tourner contre nous ; quand, vide d’esclaves, de �satellites, elle n’était plus qu’un monument honorable au courage des citoyens, je craignis qu’en le laissant plus longtemps debout, il ranimât l’espoir des despotes, et n’écoutaat que l’amour de la patrie, j’allai, sans en avoir reçu l’ordre, abattre ces tours. Moi-même je les frappai le premier, j’armai la main des ouvriers : l’assemblée de la commune et le roi lui-même, ont approuvé mon zèle, puisque des architectes ont été nommés pour surveiller cette démolition ; mais ce qui fera mon souvenir le plus cher, quand les années viendront m’atteindre, c’est d’avoir le premier porté le fer destructeur dans les flancs de cette horrible forteresse. « Mais ce n’est pas assez de cacher sous le sol les monuments de la tyrannie : il faut, s’il est possible, en perpétuer la honte; c’est aux arts à la transmettre à la dernière postérité : ils ont trop longtemps servi à flatter la tyrannie chez un peuple libre, ils en éterniseront la haine; c’est ce que j’ai entrepris. « Des pierres mêmes qui formaient les voûtes ARCHIVES PARLEMENTAIRES.