35-2 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 janvier 1791. J et même le 28 octobre, plusieurs jours après sa nomination au tribunal, il signa, en qualité de vice-président, une adresse envoyée par le directoire à l’Assemblée nationale. C’est pour prévenir une détection funeste dans les directoires d’administration, que vous avez décrété que tous ceux qui auraient accepté à.' en être membres ne pourraient être élus juges. M. Rondeau avait accepté; il était donc dans les termes exclusifs du decret ; il était donc inéligible aux places judiciaires. C’est dans cet étal, Messieurs, que la question a été présentée à vos comités de Constitution et des rapports. Deux motifs en font la base : le département dit que M. Rondeau n’était plus membre du directoire à l’époque de la publication du décret; qu’il était rentré dans ses droits; que le décret était sanctionné le 12 septembre, à la vérité, mais inconnu à Saintes, où il n’a été connu que le 27. À celte époque, la loi n’atteint pas M. Rondeau, parce que la loi n’a pas d’effet rétroactif. Gomme vos décrets sont formels, malgré la confirmation du département, je vous propose de décréter ce qui suit : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités de Constitution et des rapports, considérant que des motifs pressants d’utilité publique l’ont déterminée à déclarer inéligibles pour la première élection aux places de juges les membre des corps administratifs qui faisaient partie des directoires, à l’époque du 2 septembre dernier ; « Déclare nulle l’élection du sieur Rondeau à la place de juge du district de Rocbefort, faite le 18 octobre; « Déclare en outre non avenue la délibération du directoire du département de la Charente-Inférieure, en date du 14 décembre, laquelle confirme cette élection ; décrète que les électeurs ou district de Rochefort se rassembleront, à la diligence du procureur syndic, et procéderont à la nomination d’un nouveau juge. » M. Remercier. La personne dont il s’agit est un excellent patiiote et un citoyen très recommandable. M. Rondeau a d’ailleurs donné sa démission le 12 septembre, avant que le décret ait été enregisiré à Saintes, chef-lieu du département; cet enregistrement n’a eu lieu que le 27 septembre. Les électeurs qui ont élu M. Rondeau juge du tribunal, ont dû le regarder comme parfaitement libre par sa démission. Nulle adresse, nulle plainte, nulle réclamation ne s’est élevée contre cette élection que le comité veut faire annuler aujourd’hui. M. Lavie. M. Rondeau ne fait que son devoir ; il montre le zèle le plus ardent dans un pays où le patriotisme a besoin d’être réchauffé. M. Regnaud (de Saint-Jean d'Angèly ). La nomination de M. Rondeau vous fut dénoncée pur M. Augier, l’un de vos collègues. Rigide observateur de la loi, il ne voulut pus qu’une exception en faveur d’un individu ouvrît la porte aux réclamations de tous les lonciionnaiies publics qui avaient, lors de l’élection des juges, donné leur démission pour être éligibles. (Voix nombreuses : Aux voix !) (Le projet de décret est mis aux voix et adopté.) M. de Rroglie, au nom de la commission des rapports. Messieurs, c’est au nom du comité des rapports et de toute la députation d’Alsace, que je suis chargé de vous rappeler sommairement quelques événements qui ont occasionné une fermentation dangereuse dans les départements du Haut et du Ras-Rhin, et de vous proposer des mesures propres à rétablir le calme dans ce pays. Vous n’ignorez pas que dans le département du Ras-Rhin, et surtout à Colmar, il s’est fait des enrôlements pour l’Autriche, et que des émigrations considérables ont eu lieu. Le bruit répandu que ces enrôlements étaient destinésàune contre-révolution, a excite à une grande fermentation. Les chapitres et l’évêque ne cessaient de répandre des écrits incendiaires, tendam à irriter les protestants contre les catholiques, et ces derniers contre les premiers. Vous avez renvoyé plusieurs de ces protestations et lettres pastorales de M. de Rohan au comité des recherches. Il y a quelques mois, une nouvelle effervescence a été excitée dans le département du Bas-Rhin par des protestations du cardinal et du grand chapitre de Strasbourg. Pour préciser les faits, je vais vous faire lecture d’une lettre envoyée au comité des rapports par M. Dietrich, maire de Strasbourg, en date du 16 janvier ..... « J’ai été instruit hier matin, par la cessation des cloches seulement, que les capitulaires de cette ville venaient de cesser leurs fonctions et que, par conséquent, le service divin était interrompu dans plusieurs églises. La voix publique m’a appris que ces ordres avaient été donnés par le procureur-syndic du district; mais le district n’en était pas plus instruit que moi. Sans les soins de la municipalité, cette circonstance aurait pu faire naître bien des troubles qu’eussent infailliblement excités des lettres d’Allemagne qui circulent ici, et qui annonçaient une contre-révolution pour le 15 ou le 16 de ce mois. On faisait aussi circuler, de maison en maison, des livres répandus par le fanatisme, pour exciter le p uple à s’opposer à ja prestation du serment des ecclésiastiques. o otes ces menées produisaient une très grande fermentation. J’ai écrit aussitôt aux curés des differentes paroisses, qui ont continué le service divin dans les églises où il était suspendu. » Voici l’extrait d’une lettre de M. Khngjin, commandant de la place : « Les scènes de Nîmes sont prêtes à se répéter dans cette ville. La fermentation est extrême. Près de 2,000 citoyens se sont assembles pour demander l’exécution dutraitéde Westphalie, et la retractaiion des décrets sur le clergé. Il faut que l’Assemblée envoie des commissaires pour prévenir les désordres, plutôt que de les envoyer après. Nous allons mander le président de l’Assemblée; mais le seul moyen d’apaiser la multitude est d’envoyer des co nmis-satresqui portent des lumières, et soient autorisés à requérir, en cas de besoin, les gardes nationales... Il s’élève une nouvelle difficulté. Le procureur syndic du district se croit inculpé par la municipalité; ces différends entre les administrateurs pourraient produire de funestes effets... Le refus de serment, de la part des curés, pourrait entraîner d’autres inconvénients, par la nécessité où nous sommes d’avoir des prêtres qui sachent les deux langues. Cette circonstance exigerait des mesures particulières pour notre dé-pariement... Aujourd’hui il y a un concours immense au departement; on va signer des pétitions; on fait même signer les femmes et les filles. N’attendez pas un nouveau courrier pour solliciter de l’Assemblée nationale un decret qui ordonne l’envoi de deux commissaires, etc. » C’est d’après ces faits que le comité des rap- [20 janvier 1791.] [Assemblée nationale.] ports m’a chargé de vous présenter le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, relativement aux événements qui se sont succédé, depuis environ un mois, dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, et notamment l’effervescence qui s’est manifestée à Strasbourg, les 3, 15, 16 et 17 de ce mois ; « Décrète que son président se retirera dans le jour par devers le roi, à l’effet de supplier Sa Majesté d’envoyer incessamment trois commissaires dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, lesquels se rendront directement à Strasbourg, à l’effet de procurer, par tous les moyens de prudence et de persuasion, l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale, acceptés et sanctionnés par le roi, de prévenir les peuples contre les erreurs dans lesquelles il paraît que des mal-iuteutioni és cherchent à les entraîner; à maintenir et rétablir, au besoin, la tranquillité publique; à requérir, à cet effet, le secours tant des troupes de ligne que des gardes nationales, même celles d< s départements voisins; à prendre tous les renseignements et éclaircissements qu’ils pourront se procurer, tant sur les mouvements qui ont eu lieu dans la ville de Strasbourg, les 3, 15, 16 et 17 de ce mois, que sur les circonstances qui ont pu les occasionner; enfin, de faire, s’ils le jugent convenable, toutes proclamations qu’ils croiront utiles au maintien, de la tranquillité publique. » M. Regnaud(de Saint-Jean-d'Angely). Je demande que M. le president se retire à l’instant même devers le roi, pour présenter ce décret à la sanction. (Le projet de décret est adopté.) L’ordre du jour est un rapport du comité de la marine sur les fonds de la marine et des colonies. M. de Curt, rapporteur (1). Messieurs, c’était un usage consacre dans le département de la marine d’établir, au mois d’octobre de chaque annee, le projet de dépenses de l’exercice suivant. Le ministre pr ésentait ce projet au Conseil d’Etat, et sur une simple décision du roi, le contrôleur général des finances faisait les fonds accordés, et les délivrait au trésor de la marine, aux époques déterminées par Sa Majesté. Lt s nouvelles lois de l’État ayant substitué à ces formes l’initiative du pouvoir exécutif et le consentement des représentants de la nation, voire comité avait décidé, dans l’ordre de sou travail, de vous proposer une nouvelle fixation des dépenses de la marine pour 1791, sur la proposition formelle du ministre de ce département. Il se flattait alors d’achever, avant le commencement de cet exercice, les grands changements que vous avez confiés à ses méditations et à ses recherches, et de poser, sur la nouvelle constitution de la marine, les bases immuables de l’ordre et de l’économie que vous avez promis à ia nation, et que la nation attend de vous. Malgré le zèle le plus confiant, et l’exactitude la plus suivie, votre comité n’a pu remplir la tâche qu’il s’était imposée. Trop souvent détourné de ses travaux ordinaires par des événements qui exigeaient des mesur s promptes il a donné beaucoup de temps à une foule de décrets de 353 circonstances qui entraînaient de longues discussions. Si vous considérez ensuite les rapports infinis qui lient le département de la marine, la différence des opinions sur la manière de l’organiser dans toutes ses parties, les difficultés qui se mul ti plient à mesure qu’on découvre mieux l'importance de l’ensemble et de tous les détails, vous ne serez pas étonnés, Messieurs, que l’exercice 1791 ait surpris votre comité au milieu des opérations qui doivent amener des économies, et servir d’échelle à toutes les dépenses. Dans une telle circonstance, votre comité a pensé qu’il lui convenait mieux de presser le terme de ses travaux, et d’accorder provisoirement les besoins du mois de janvier, que de combiner un projet de fonds sur des bases incertaines, et dont l’exécution instantanée eût infailliblement gêné la comptabilité. Pour se convaincre de la sagesse et des avantages de ce parti, il suffit d’envisager l’état actuel de marine et les changements prochains qui l’attendent. On a jusqu’à présent distingué, dans ce département, deux sortes de dépenses ordinaires: les unes fixes, les autres variables. Les premières, qui ont été portées pour 1790 à 13,476,158 livres, sont relatives aux individus de toute espèce, employés au service de la marine, et à des objets de diverse nature, dont les détails ont été mis sous vos yeux par le comité des finances. Les secondes, évaluées pour la même année à 16,523,843 livres, concernent les constructions, l’entretien des forces navales et les armements. Bientôt une nouvelle organisation exigera une fixation nouvelle de .dépenses, alors vous réforme' ez sans inconvénient tout ce que vous jugerez inutile, et vous serez d’auiant plus assurés de votre opération, que vous ne laisserez aucun intervalle entre l’ancien et le nouveau régime; ce qui est toujours la preuve d’un bon esprit, ce qui distingue dans tous les temps l’homme qui a des vues de l’homme qui n’a que des idées. En effet, Messieurs, il ne serait guère possible de porter utilement le flambeau de l’économie dans les dépenses de la marine, avant la promulgation des décrets qui doivent changer les institutions actuelles. Cette vérité est démontrée à tous ceux que l’étude et l’expérience ont familiarisés avec les principes d’une bonne administration. Il ne suffit pas d’ordonner que telle dépense sera réduite, il faut examiner si la réduction peut s’accorder avec le régime établi, si elle ne ralentit pas, si même elle ne suspend pas son action : car, Messieurs, les économies en administration dépendent beaucoup moins de ses agents que de son régime. Il n’est pas moins nécessaire, Messieurs, avant de faire aucun plan de dépenses, que vous déter-mini z le nombre de vaisseaux qu’il convient à la France d’entretenir dans ses ports, soit en paix, soit en guerre, l’approvisionnement des arsenaux, le nombre et la force des stations qu’exige la protection due à vos possessions éloignées, à vos côtes et à votre commerce. Ce n’est pas tout, Messieurs, vous avez encore à organiser constitutionnellement le ministère de la marine. Votre comité manque de bases pour assigner des fonds à l’entretien de l’ad * >inist ration supérieure. Il ignore si la marine et les colonies ne seront pas séparées ; ce nVst donc qu’a-près la décision de ces questions importantes, qu’il sera possible à votre comité de vous indiquer le terme de toutes les dépenses. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Le Moniteur ne donne que des extraits de ce rapport. 4“ SÉRIE. T. XXII. 23