82 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE toyens, les pères de famille en sont sortis, et font prendre des arrêtés contre la représentation nationale; ceux-là ne sont point amis de la liberté des opinions, qui veillent sans cesse déshonorer et assassiner la France, qui parlent de vertu pour commettre le crime avec plus d’impunité {On applaudit) (51). [Ceux-là sont les véritables ennemis du peuple, qui ont l’audace de menacer de l’échafaud ceux de leurs concitoyens qui ne pensent pas comme eux ; ceux-là qui, réunis à une bande d’assassins, combinent, arrêtent et rédigent des adresses dont le but est évidemment d’avilir la représentation nationale et d’enchaîner l’action de la loi, de manière que la répubique qui de-vroit présenter le spectacle majestueux d’un grand peuple réuni autour des principes, ne présente plus que le tableau hideux de l’anarchie.] (52) Peut-être sera-t-il nécessaire de ne pas donner un effet rétroactif à cette mesure, qui sera très-salutaire pour l’avenir. Un système s’est établi depuis huit à dix jours : c’est de prolonger les assemblées de sections, afin de s’emparer du local ; alors sept à huit hommes prennent des arrêtés attentatoires au respect des lois et à l’amour de l’ordre (53). [Ces hommes outragent leurs concitoyens, auxquels ils prêtent leurs voeux sanguinaires. Vous voyez que le peuple aime essentiellement la justice et qu’il n’a point d’autre but.] (54) Citoyens, il y a une grande solidarité entre tous les bons citoyens de la nation française. En faisant une Adresse qui contient et rappelle les vrais principes, vous avez donné à la république une grande preuve de vos sentiments. Vous avez prouvé aux nations étrangères qu’elles comptent en vain sur l’activité du crime, et qu’il n’y aura désormais à l’ordre du jour que la justice et la vertu {On applaudit). J’appuie donc la proposition de Merlin ; et, afin que nous ne voyions plus ces tableaux qui nous ont fait verser tant de larmes, afin que le père de famille soit sûr que ses enfants recueilleront les fruits de ses longs sacrifices, afin de prouver que la liberté des opinions ne sera plus comprimée, je demande qu’il soit fait une loi contre ceux qui s’assemblent clandestinement, et qui ont l’audace de prendre des arrêtés qui ne sont que le voeu de quelques individus, et qu’ils viennent présenter comme le voeu de la section. Cette proposition sera envoyée aux trois comités pour présenter une mesure sans délai (55). [Ce discours a été interrompu par de vifs ap-plaudissemens. - Aux voix! aux voix! s’écrie-t-on de toutes parts. Les propositions de Thuriot sont adoptées. - On applaudit .] (56) (51) Moniteur, XXII, 220. (52) Débats, n° 750, 322. (53) Moniteur, XXII, 220. (54) M.U., XLIV, 334. (55) Moniteur, XXII, 220; Ann. Patr., n” 650; Ann. R.F., n“ 21; C. Eg., n° 785; F. de la Républ., n" 21; J. Fr., n° 747; J. Mont., n° 1, 2; J. Paris, n“ 22; J. Perlet, n 749; Mess. Soir, n° 785; M.U., XLIV, 333-334. Voir plus bas n° 30. (56) Débats, n” 750, 322. C [La section Poissonnière à la Convention nationale, le 20 vendémiaire an HT] (57) La section Poissonnière a entendu dans son assemblée générale d’hyer, la lecture de l’adresse de la Convention nationale du 18 de ce mois; après l’avoir applaudi avec enthousiasme, elle a arrêté qu’elle viendroit aujourd’hui en masse, l’en féliciter; ce nouveau flambeau de la vérité va anéantir toutes les factions, et produire dans l’intérieur de la république, cette union si nécessaire, pour consolider le règne de la liberté et de l’égalité; les citoyens de la section Poissonnière ont juré, que toujours leur respect pour les loix sera sans borne, ainsi que leur dévouement pour la Convention nationale, à laquelle ils se rallieront constamment, comme étant le seul centre du pouvoir, et celui de réunion de tous les républicains français. Charvin, président. d [La section de la Fraternité à la Convention nationale ] (58) Représentans du Peuple, La vertu des hommes libres consiste à aimer les loix et la patrie ; « cet amour, dit un auteur célèbre, est singulièrement affecté aux démocraties ; exigeant une préférence continuelle de l’intérêt public au sien propre, il donne toutes les vertus particulières »! mais qui peut alimenter dans le coeur des français le feu de cet amour si pur, sinon la justice et l’humanité? Vous avez été pénétrés de cette vérité fondamentale ; l’ennemie jurée de la liberté, l’arme meurtrière de la tyrannie, la terreur est à jamais bannie de la france. Son sceptre de fer est brisé. En vain l’intrigue dirigée par l’intérêt personnel s’agite et voudroit nous agiter en tous sens pour rappeler au milieu de nous ce monstrueux système. Un peuple éclairé par ses malheurs scait que l’on peut être énergique sans être barbare; il ne reconnoit plus d’autre empire que celui de la raison, de la justice des loix. Voilà nos principes : voilà les principes de tous les vrais républicains. En connoissant leurs droits, ils commissent aussi leurs devoirs; ils savent que la liberté doit être appuyée sur la justice et la raison ; ils savent que l’homme libre est esclave de la loy. (57) C 322, pl. 1353, p. 38. Débats, n” 750, 329; Bull., 21 vend, (suppl. 2); Ann. Patr., n“ 650 ; Ann. R.F., n” 21; C. Eg., n° 785; F. de la Républ., n 21; J. Fr., n 747; J. Mont., n” 1; J. Paris, n' 22 ; Mess. Soir, n" 785. (58) C 322, pl. 1353, p. 23. SÉANCE DU 21 VENDÉMIAIRE AN III (12 OCTOBRE 1794) - N° 17 83 Nous savons plus (et les terroristes ne nous l’apprendront pas) qu’il est des temps difficiles où la loy doit être sévère; mais pour être inflexible, doit-elle cesser d’être juste ; et ne peut-on s’abstenir de confondre une rigueur salutaire avec la sanglante atrocité? La marche d’un peuple en révolution est semblable à celle d’un vaisseau battu par la tempête ; mais vous saurez éviter tous les écueils ; vous saurez amener à bord le vaisseau de la république. C’est à vous seuls, pilotes intrépides, que nous avons confié le gouvernail; vous ne l’abandonnerez pas à des mains inhabiles ttu perfides. Le moment approche, sans doute, où le peuple français jouira des bienfaits de la constitution; mais le gouvernement révolutionnaire seul peut amener et accélérer cet instant heureux. La section de la Fraternité vous en demande la continuation. Périssent les ennemis du peuple qui voudroient y porter atteinte ! Périssent les ambitieux qui conserveroient encore l’intention criminelle et l’espoir téméraire d’élever une puissance rivalle de celle de la représentation nationalle. La Convention ! voilà notre cri, voilà notre point de ralliement. Nous vous réitérons ici le serment que nous avons prété entre vos mains, dans la nuit, à jamais mémorable du neuf au dix thermidor ; nos fortunes, nos vies, tout appartient à la république, sauvez la france, sauvez la liberté. Nos frères des départements se réuniront à nous contre les évangélistes de l’anarchie, du meurtre et du pillage. La masse du peuple est là pour seconder vos efforts ; la jeunesse toujours victorieuse nous venge des ennemis du dehors ; l’âge virile suffira pour écraser ceux du dedans. La cause du peuple toujours juste triomphera et nos derniers neveux béniront vos travaux immortels. Vive la répubique, vive la Convention ! Prouans, président, Dommanget, commissaire à la rédaction. e [La section de Guillaume-Tell à la Convention nationale, du 21 vendémiaire an III] (59) Représentans du Peuple, C’était hier, pour les âmes sensibles, vertueuses et franchement républicaines, une belle journée. Quelles douces émotions elles ont ressenties à la vue des honneurs que la france rendait à l’homme de la nature et de la vérité; à celui qui, le premier réclama les droits imprescriptibles de l’homme et dont il était juste que la mémoire trop souvent outragée par le despotisme et la superstition fut vengée par des hommes raisonnables et libres! Nous, citoyens de la section de Guillaume-Tell, nous nous glorifions de les avoir partagés avec les amis purs de la liberté et de l’égalité, ces émotions vraiment délicieuses. Mais il en était d’autres non moins vives et aussi pures qui nous étaient encore réservées à notre assemblée générale. On y a lu d’abord le rapport de Robert Lindet sur la situation de la République, ensuite votre dernière adresse aux français. Nous ne scaurions vous peindre la satisfaction profondément sentie dont les éclatants témoignages ont fréquemment interrompu ces deux intéressantes lectures. L’admiration et la joie étaient au comble. Nous n’offrions que le spectacle enchanteur d’une nombreuse société de frères applaudissant avec transport, aux ouvrages de leurs meilleurs amis. De toutes parts la joie se trouvait peinte sur les visages. De toutes parts on vous proclamait les bienfaiteurs de la france. De toutes parts l’on éprouvait le besoin de venir vous témoigner de nouveau un entier dévouement et une vive reconnaissance. Représentans du Peuple ! comptez sur les citoyens de la section de Guillaume-Tell. Jamais, non jamais, ils ne cesseront de demeurer étroitement unis à la représentation nationale, seule dépositaire du pouvoir de donner à la france, les loix qui doivent la régir, unique centre de notre gouvernement, respectable point de ralliement de tous ceux qui veulent franchement la liberté, l’égalité, la République une et indivisible. Représentans du Peuple! tenez d’une main ferme les rênes du gouvernement révolutionnaire. Qu’ils soient désespérés, en voyant votre attitude imposante, ces hommes corrompus, assez immoraux pour essayer, peut-être encore, de tendre à la bonne foi du peuple, des pièges qui compromettraient le salut de la République. Que les anarchistes, que les royalistes, que tous les criminels aient à redouter le glaive de la loi ; mais que le franc républician puisse émettre librement sa pensée. Ainsi le veut la justice que vous n’aurez pas mis en vain à l’ordre du jour, qui ne doit effrayer que les méchants et dont le beau règne fera couler aux français vertueux ces jours purs et sereins qu’on ne connait pas lorsque l’on voit planer indistinctement sur toutes les têtes cette atroce terreur qui est bien digne d’être l’arme d’un roi, mais qui ne convient pas à des coeurs vraiment républicains. Représentans du Peuple ! continuez des travaux qui vous mènent à l’immortalité, et nous, d’exterminer et surveiller les intrigants qui sont dans notre sein, fidèles aux engagements que nous avons pris, plus d’une fois, à votre barre et que nous renouvelions en ce moment, nous ne cesserons pas de prouver que ce n’est pas seulement sur nos lèvres que sont ces exclamations qui plaisent à une immense majorité de français : vive la liberté, l’égalité, la République une et indivisible, vive la Convention nationale. (59) C 322, pl. 1353, p. 25. Sanchez, vice-président, Harau, secrétaire.