SÉANCE DU 27 THERMIDOR AN II (14 AOÛT 1794) - Nos 18-19 65 tant d’autres qui osent paraittre devant vous, quoique souillés de vices cachés sous le manteau de l’hipocrisie, nous ne dirons pas que nous ne fussions pas coupables, mais notre délit serait plus grave si on pouvait accuser nos coeurs de complicité avec l’imagination, si souvent l’instrument involontaire des perfides ennemis de la liberté et surtout de l’égalité. Eh comment pourait-on se persuader que nous eussions jamais le funeste désir d’anéantir la République, tandis qu’elle nous replace dans le cercle que la nature avait tracé pour tous, tandis que, par sa puissance bienfaisante, elle nous délivre de tous ces êtres parasites qui se sont joués si souvent de notre misère ? Il est facile d’apprécier les maux qu’ils nous ont faits par les vêtemens qui nous couvrent. Ah, citoyens représentans, venés dans nos chaumières. C’est alors que vos âmes bienfaisantes se lesseront toucher par la misère qui nous presse et nous accable. Plutôt que ces monstres qui abusent de notre facile crédulité, venés y porter la lumière qui, désormais, faira notre seule consolation. Recevés dans ce moment notre proffession de foi, et nous vous prométons qu’arrivés dans le sein de nos familles, nous ne nous occuperons qu’à bénir votre bienfaisance. Citoyens représentans, le comité de sûreté généralle, organe de votre volonté, nous fait jouir, par son arrêté, d’une liberté bien chère à nos coeurs, mais cette jouissance serait imparfaite si, par quelques secours, vous ne secon-diés nos besoins affin de nous rendre dans nos foyers, duquel nous sommes absents depuis 3 mois. Les seuls moyens que nous avons, pour faire 134 lieues, consistent en la somme de 525 livres à diviser entre nous, ce qui est le produit d’une collecte volontaire à laquelle les reclus du Collège de Plessis où nous étions incarcérés ont contribué librement. La pluspart de nous sommes sans chaussures; cependant, accoutumés à nous en passer, notre sollicitude sur les moyens de subsister dans une si longue route est plus grande encore. C’est chez vous, pères des malheureux, que nous venons la déposer. Notre repentir, qui précède nos intentions de n’avoir désormais d’autre sentiment que celui d’un amour sincère pour la patrie, d’une obéissance aveugle pour les lois, suffira sans doute pour nous réconcilier avec votre bienveillance, que vous prodigués aux individus de notre classe. Cette pétition étant convertie en motion par un membre [Reynaud], la Convention natinale rend le décret suivant : La convention nationale, sur la pétition présentée à la barre par des citoyens et citoyennes de la commune de Saint-Hostien, aujourd’hui Mont-Pigier, district du Puy, département de la Haute-Loire, au nombre de 25 ci-après dénommés, détenus pendant 3 mois dans les maisons d’arrêt du Puy, ou du collège du Plessis à Paris, et mis en liberté par arrêté du comité de sûreté générale, du 23 thermidor; savoir : Pierre Perrin, Jean-Pierre Chalanda, André Montagne, Jeanne Chamar, Marie Paralier, Françoise Mazet, Françoise Delaigne, Thérèse Delai-gne, Marie Delot, Marie Guillotat, Jeanne-Marie Champagnac, Anne Aujolvy, Marie Besson, Rose Besson, Elisabeth Durand, Marie Barthelemi, Claire Chambolas, Anne Sabatier, Jeanne-Marie Arnaud, Marie Faux, Marie-Anne Jousserant, Marie Drageau, Françoise Drageau, Rose Morin; accorde à chacun la somme de 300 liv.; et a Françoise Richaud, l’une d’elles se trouvant enceinte, la somme de 400 liv., qui leur seront payées par la trésorerie nationale, à titre de secours, sur le vu du présent décret (1). 20 Des patriotes polonais, réfugiés en France, sont admis à la barre; Ils expriment leur reconnoissance de l’asyle qu’ils ont trouvé dans la République : proscrits dans toute l’Europe, disent-ils, la seule terre de France a été pour nous hospitalière; et ce seul fait prouveroit que partout où est le despotisme, là est le crime; que partout où est la liberté, là se trouve la vertu. Ils félicitent la Convention nationale de ses triomphes sur ses ennemis extérieurs et extérieurs (2). [Les Polonais proscrits par toute l’Europe, à la Convention; Paris, 27 therm. II] (3) Citoyens représentans du peuple français, Renverser toutes les espèces de tyrannie, et celles des opinions et celles des pouvoirs, donner pour appui à une liberté fondée sur les principes de l’égalité la plus parfaite, le gouvernement le plus démocratique qu’il y ait jamais eu sur la terre; préparer par les lumières de la plus haute philosophie ces moeurs simples et ces vérités sublimes qui, seuls, peuvent garantir la sagesse et la durée de la République; contenir ou étouffer toutes les passions au dedans, tandis que la renommée proclame tous les jours les victoires remportées sur les ennemis extérieurs; donner enfin à tous les peuples les immortels exemples des principes, de la magnanimité des intentions et des loix qui doivent (1) P.V., XLIII, 219. Rapport signé Reynaud (de la Haute-Loire). Décret n° 10 403. Reproduit dans Bm , 30 therm. (2e suppl1); Débats, n° 694, 489; J. Sablier, n° 1500; M.U., XLII, 444; C. univ., n°957; J.Fr. , n° 690 (selon cette gazette et quelques autres, les pétitionnaires avaient été traduits au tribunal révolutionnaire pour cause de fanatisme); J. Paris, n° 592; J.Univ., n° 1726; F.S.P., n° 406; Audit, nat., n° 690; Rép., n° 238; J. Mont., n° 107; J. Perlet, n°691 (plusieurs journaux signalent que l’octroi d’une somme plus élevée à la pétitionnaire enceinte a provoqué les plus vifs applaudissements). (2) P.V., XLIII, 219-220. (3) C 316, pl. 1266, p. 80; B‘n, 27 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 495-496; Débats, n° 693, 479-481; M.U., XLII, 455-456; J. Mont., n° 107; J. Sablier, n° 1500; Ann. patr. , n° DXCI; J. Paris, n° 592; J. Perlet, n°691; C.Eg., n° 726; Audit, nat., n° 690; Rép. , n° 238; Ann. R.F., n° 256; J. S. -Culottes, n° 546; J. Fr., n° 690 (les journaux signalent des applaudissements à plusieurs reprises). 5