[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [1er juillet 1789.] 175 MM. Le baron de Pouilly, député de la noblesse de Verdun. Le comte de Barrançon, député de la noblesse de Villers-Cotterets. De Ballidard, député de la noblesse de Vitry-le-Français. Le comte de Failly, idem. De Boisgelin, archevêque d’Aix, député de la sénéchaussée d’Aix. Martinet, prieur de Draon, député de la sénéchaussée d’Anjou. Breuvard, curé de Saint-Pierre de Douai, député du bailliage de Douai. Thomas, curé de Mormant, député du bailliage de Melun. Le comte de Lagalissonnière, député de la sénéchaussée d’Anjou. Le comte de Dieuzie, idem. Le comte de Reuillez, idem. Le duc de Choiseul-Praslin, idem. Le marquis de Vaudreuil, député de la sénéchaussée de Castelnaudary. ! Le baron de Juigné, idem. De Montesson, député de la sénéchaussée du i Maine. Le comte de Tessé, idem. Le marquis de Saint-Maurice, député de la sénéchaussée de Montpellier, Le marquis de Causans, député de la principauté d’Orange. Le comte de Laroque de Mons, député de la sénéchaussée du Périgord. Le duc de Mailly, député du bailliage de Péronne. ASSEMBLÉE NATIONALE. , PRÉSIDENCE DE M. BAILLY. J�éance du mercredi Ier juillet 1789, au matin (1). j A l’ouverture de la séance, plusieurs personnes venues de Paris, se disant députées par un grand nombre de citoyens, se présentent à l’Assemblée alionale, et font remettre une lettre à M. leprési-ent. On fait lecture de cette lettre. L’objet de la députation est de solliciter l’Assemblée nationale d’interposer sa médiation auprès du Roi pour en !>b tenir la grâce de quelques soldats aux gardes rançaises, qui, pour un fait d’insubordination, .mt été mis en prison, et devaient être conduits à Bicêtre. La multitude les a délivrés par la violence. Les citoyens porteurs de celte lettre font demander à être introduits dans l’Assemblée. M. Bailly, président. Messieurs, en recevant Cette lettre, j’ai déjà prévenu préliminairement ceux qui me l’ont remise que l’Assemblée nationale ne pouvait donner aucun ordre sur le différend qui subsiste entre le colonel des gardes françaises et ses soldats. Cependant les circonstances sont pressantes ; le mal est instant ; le salut de la capitale dépend peut-être du parti que vous allez prendre, et je suis d’avis de mettre cette affaire en délibération. | L’Assemblée décide d’abord qu’il n’y a pas lieu Raccorder l’entrée à la députation. Elle met ensuite en délibération la question de savoir s’il sera répondu à la lettre. (1) La séance du ler juillet 1789 est incomplète au Plusieurs membres veulent que l’Assemblée déclare n’y avoir lieu à délibérer. Il s’agit ici, disent-ils, d’une émeute populaire. Ces émeutes sont entièrement du ressort du pouvoir exécutif; et peut-il convenir au pouvoir législatif de prier le pouvoir exécutif de dispenser de l’exécution des lois? M*‘\ Prenons garde , défions-nous du piège qu’on nous tend en voulant que nous nous mêlions d’une affaire si évidemment étrangère à notre mission et au pouvoir essentiel de l’Assemblée ; on cherche à nous compromettre, ou avec le peuple, ou avec le monarque. S’il arrive un événement fâcheux, on nous peindra comme des tribuns d’un peuple que nous cherchons à soulever ; et si cette intervention dissipe cet orage, on nous fera un crime de notre succès. Ainsi, il faut déclarer qu’il n’y a lieu à délibérer. D'autres membres cherchent à intéresser l’Assemblée sur le sort de ces malheureuses victimes du zèle égaré. Ils font un tableau des faits ; et en appuyant sur le danger des circonstances et l’urgence du moment, ils établissent qu’il importe aux intérêts de l’Assemblée, au bien de la nation, qu’on prenne en considération la lettre des Parisiens. M. Champion de Cicé, archevêque de Bordeaux. L’Assemblée serait inexcusable si, dans un moment où elle est animée du bien public, elle ne prenait en considération le fait dénoncé. Ces différentes considérations ne peuvent être examinées que par un comité. M. de Clermonl-Tonnerre. L’impassibilité la plus absolue doit être le caractère essentiel de l’Assemblée. Dans une circonstance aussi pénible, il y a une distinction essentielle à faire entre le pouvoir exécutif et le législatif. Le pouvoir militaire, qui est la sauvegarde de la tranquillité publique, est du ressort du pouvoir exécutif. Ce serait manquer au plus pressant de tous les devoirs que de s’amuser à nommer un comité pour examiner une révolte ouverte. Les troubles populaires ne peuvent être soumis à un pareil examen ; ils sont du ressort du pouvoir exécutif. MM. de Crlllon et le chevalier de Bouf-flers appuient ces observations. On fait une seconde lecture de la lettre ; elle est ainsi conçue : « Monsieur le président, une nouveauté inouïe vient de répandre l’alarme dans la ville de Paris. « Le peuple s’est porté en foule hier aux prisons de l’Abbaye pour arracher des fers deux gardes françaises queM. le duc du Châtelet y avait fait mettre contre toute justice. « Ces deux malheureuses victimes ont été portées en triomphe au Palais-Royal, où le peuple les a prises sous sa sauvegarde; elles y ont passé la nuit. Nous attendons avec respect, Monsieur le président, que l’Assemblée nationale veuille bien s’occuper des moyens nécessaires pour rendre le calme à la capitale et la liberté à nos frères. » Plusieurs autres motions sont présentées. Un secrétaire en fait lecture. Motion de M. Fréteau. « Nos cahiers nous prescrivent quelle est la marche que nous devons suivre dans une affaire aussi importante et dans une circonstance aussi .critique. 4 7g [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ie* juillet 1789.] « Nos-cahiers attribuent le pouvoir exécutif au Roi et nous laissent l’exercice du pouvoir législatif. « Nous devons nous renfermer dans nos mandats; or, de quoi s’agit-il ici? d’un fait de police, d’une discipline militaire qui ne nous concerne pas. Est-ce à nous à nous attribuer la discipline militaire? est-ce à nous à veiller sur la sûreté publique ? Gcs soins importants sont ceux du pouvoir exécutif; c’est au Roi qu’ils appartiennent. » M. Mounier détaille avec éloquence les mêmes principes, et en tire la même conséquence. M. de Clermont-Tonnerre. Laissons gronder autour de nous les orages, soyons impassibles sur nos sièges ; faire de bonnes lois, assurer à nos concitoyens le bonheur qu’ils nous ont confié, tels sont les grands travaux auxquels nous sommes appelés. Plusieurs membres n’ont parlé que pour s’opposer au renvoi à un comité, que pour abandonner les gardes-françaises à la justice ordinaire; personne ne proposait de moyen pour adoucir la rigidité d’un principe, qui, loin de calmer le peuple, l’aurait peut-être excité davantage, lorsque M. Desmeuniers présente cette motion : Motion de M. Desmeuniers. « Je n’ignore pas quelles sont les bornes qui séparent le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ; je sais que le pouvoir législatif seul réside dans nos mains. Mais il est des circonstances où ces deux pouvoirs se rapprochent, se confondent, et c’est certainement dans des circonstances aussi orageuses qu’ils doivent agir de concert et d’intelligence pour ramener la paix et le calme. « Ayant l’honneur d’être député de cette ville, qu’il me soit permis d’y porter plus particulièrement mes regards. Je croirais qu’il convient d’envoyer des députés, non pas au Roi, non pas aux ministres, non pas au colonel des gardes françaises, mais à la capitale, pour calmer, par leur présence et leurs exhortations, des troubles dont le feu peut s’étendre rapidement dans toutes les parties du royaume. » Plusieurs membres de la noblesse parlent ensuite. - M. le prince de Poix prétend qu’il ne faut point prendre connaissance d’une affaire purement militaire, et qui doit être jugée selon les lois militaires. D'autres membres de la noblesse répondent à la motion de M. Desmeuniers, au sujet de la députation qu’il a proposée pour calmer les émeutes de la capitale. Ils prétendent que cette députation ne peut avoir lieu sans l’autorisation du Roi ; que c’est là un acte public qui appartient à l’autorité exécutive. Cette opinion est combattue par des membres des trois ordres. Le Roi, disent-ils, ne peut empêcher que les députés ne se transportent dans la ville de Paris pour y ramener la paix : revêtus de l’opinion publique, ils auront une influence qui ne pourra produire que la concorde. M. le comte de Mirabeau présente un autre moyen de conciliation : il propose d’envoyer à la ville de Paris une adresse dont il fait lecture. Cette adresse contient les sentiments de paix et les exhortations les plus touchantes pour faire cesser les émeutes populaires, qui contrarient l’activité des opérations des Etats généraux, et donnent lieu aux calomnies les plus atroces, en les attribuant aux membres de l’Assemblée nationale, qui fera tous ses efforts auprès du Roi pour obtenir la grâce des malheureuses victimes qui se sont laissées entraîner par l’impulsion du patriotisme. M. Target propose de charger les députés de la ville de Paris d’écrire, au nom de l’Assemblée, à MM. les électeurs de la ville de Paris, pour les inviter à calmer les agitations auxquelles la capitale est livrée. M. Camus propose d’envoyer au Roi une députation de quatre prélats, pour solliciter la clémence de Sa Majesté. On demande à aller aux voix ; M. Chapelier demande la parole. M. Chapelier. Cette Assemblée ne doit pas manifester une indifférence trop sévère dans les circonstances malheureuses où nous nous trouvons. Je distingue, comme tout autre, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ; mais faut-il s’en tenir si strictement à cette distinction, que l’on ne puisse porter des secours aux malheureuses victimes de l’injustice ou du despotisme? C’est dans ce moment que les deux pouvoirs qui se balancent mutuellement doivent se confondre pour prévenir les malheurs publics, suites inévitables d’un incendie qui est prêt à se manifester. C’est dans ce moment qu’il serait dangereux de témoigner une insensibilité cruelle pour ceux qui, dans toute autre circonstance, seraient coupables, mais qui aujourd’hui ne sont que trop excusables. En effet, quelle est l’origine des révoltes qui éclatent dans Paris ? C’est la séance royale, c’est le coup d’autorité porté aux Etats généraux, c’est cette espèce de violation , celte usurpation de l’autorité exécutive sur l’autorité législative, effets funestes, mais toujours inévitables, lorsque l’une de ces deux autorités l’emporte sur l’autre. Je propose l’arrêté suivant : Il sera nommé six députés qui s’accorderont avec les ministres du Roi sur le parti à prendre pour apaiser le plus promptement l’émeute de la capitale. Cet arrêté est couvert d’applaudissements. M. l’évêque de Langres, n’adoptant point cet arrêté, demande la parole. M. de La Luzerne, évêque de Langres. Ce n’est point le moment d’envoyer une députation prise parmi les prélats pour solliciter la bonté dû Roi ; sans doute leur caractère est celui de la re-j ligion et de la charité, mais il ne leur convient point de demander grâce pour des hommes qui sont encore dans un état de sédition ; la question se réduit à celle de savoir si, en allant implore!* la clémence du Roi, ce ne serait point tenter une démarche imprudente, qui ne promettrait que l’impunité. M. Le Franc de Pomplgnan, archevêque de Vienne , est du même avis que M. l’évêque dé Langres. . i Enfin, après bien des débats, on fait le résumé des différentes motions, et l’on va aux voix sur la question de priorité entre les suivantes : J