2 [Assemblée nationale.] ARCHIVES VAÎU M. le Président. Je dois prévenir l’Assem-? blée qu’à partir de demain toutes les tribunes | seront ouvertes aux députés de la province qui arrivent pour la fédération ; vous l’avez ainsi décidé ; mais, il en résulte que MM. les journalistes ne trouveront plus de places et ils demandent qu’on leur en réserve de particulières. (L’Assemblée charge son président et les commissaires de la salle de s’occuper de cette réclamation.) M. le Président. Vous avez ajourné à celte séance un Rapport sur les pensions; j’ai reçu ce matin une lettre relative à ce travail, et qui m’a paru devoir intéresser l’Assemblée. Elle m’est adressée, ainsi que le mémoire qui vous a été distribué, par la belle-fille du maréchal Lowen-dal. Cette lettre contient la réclamation d’une exception semblable à celle que vous avez accordée à M. Lukner. Un de MM. les secrétaires lit cette lettre : « M. le président, l’Assemblée nationale ayant accordé plusieurs exceptions, et particulièrement à M. Lukner, qui nous a battus sans jamais nous servir, j’espère qu’elle ne trouvera pas les enfants du maréchal de Lowendal moins dignes de sa faveur; c’est en espérant cette justice, pour une famille que son désintéressement a plongé dans l’infortune, depuis que le maréchal de Lowendal a tout quitté pour servir et défendre la France, que j’ai remis au comité le mémoire dont j’ai l’honneur de vous adresser un exemplaire. J’y rappelle les titres que le maréchal de Lowendal a laissés à sa famille pour tout héritage ; l’oubli qui paraît en être fait, et l’absence de mon mari, m’en rendant aujourd’hui le seul appui, je croirais manquer au devoir le plus saint, si je ne rompais le silence trop sévère qu’on garde dans l’Assemblée nationale, sur un nom que la victoire et la générosité ont depuis longtemps consacré en France, et dont mes enfants et leur père sont les seuls héritiers. (La justice de la nation serait à l’abri des conséquences qu’elle en pourrait craindre, puisque l’exemple des droits et de l’infortune de cette famille est certainement unique en France.) Ne pourriez-vous pas, Monsieur, être l’interprète de mes justes réclamations et de ma confiance auprès de l’Assemblée nationale? » (Cette lecture reçoit beaucoup d’applaudissements.) M.deliWtmpffen.Ni le roi, ni vous, ne pouvez abandonner les descendants du maréchal de Lowendal. Ce maréchal n’est pas arrivé chez vous comme un aventurier; ifétait au service de la Russie; il y était général en chef, gouverneur d’une grande province, grand-maître de l’artillerie, colonel propriétaire d’un régiment : son nom était déjà célèbre dans toute l’Europe, particulièrement par la conquête de la Finlande. Quand Louis XV l’attira en France, il le mit à la tête d’une armée avec laquelle il prit Gand, Oude-narde, Ostende, Nieuport et son château, l’Ecluse, Sas-de-Gand, Ysandick, Philippine, Maëstricht, etc. , et enfin l’imprenable Berg-op-Zoom, victoires dont l’éclat semble avoir surpassé celui de toutes ses précédentes conquêtes, et quia lié tellement les noms de Berg-op-Zoom et de Lowendal, qu’ils sont devenus inséparables dans la pensée. Ce grand homme quitta tout pour s’attacher à la France, et ne vécut pas assez longtemps Ï-' ‘À' (y juillet 1790.} I pour jouir de ce qu’elle eût fait pour lui; mais il | a laissé trois enfants et plusieurs petits-enfants, C]ue :a toi de rigueur sur les pensions réduirait à la mendicité. Je demande que vous accordiez à chacun des trois enfants deux cent mille francs; c’est le moyen d’acquitter, du moins en partie, ce que la nation doit à la postérité de ce grand homme. Si cette somme pouvait, à la première vue, paraître trop considérable, je vous prierais d’observer qu’elle doit être la seule récompense des services signalés d’un grand homme ; alors elle vous semblerait sans doute bien légère. M. Fréteau. Je serais d’avis que cette réclamation fût renvoyée au comité. En demandant ce renvoi, je suis bien loin de vouloir atténuer dans votre esprit les droits de cette famille à votre reconnaissance. Personne, au contraire, n’est plus que moi pénétré des services de ce grand homme. Par la prise de Berg-op-Zoom, il a sans doute servi la France ; mais il l’a servie plus utilement encore ea nous procurant le traité d’Aix-la-Chapelle. Vous n’ignorez pas que c’est à la prise seule de Maëstricht que nous devons ce traité avantageux; vous n’ignorez pas que le maréchal de Saxe, malgré tous ses talents, traversé comme il l’était par des intrigues de cour, ne s’en serait pas reudu maître sans le maréchal de Lowendal. C’est afin de présenter d’une manière plus éclatante la reconnaissance tardive de la nation pour les services de ce grand homme, que je demande le renvoi aux comités militaire et des pensions, de la lettre adressée àM. le président. (L’Assemblée ordonne le renvoi de la lettre de Mme de Lowendal aux comités des pensions et militaire.) M. de La Rochefoucauld, ayant obtenu la parole, au nom du comité d’aliénation, dit : Messieurs, les travaux du comité d’aliénation avancent et déjà les experts sont sur le point de commencer les estimations. L’usage est qu’au préalable ils prêtent serment devant les tribunaux ; mais comme vous avez éloigné de cette grande opération les formes judiciaires, votre comité a pensé que les corps administratifs doivent recevoir ce serment. Nous vous proposons donc un projet de décret en conséquence. M. Martineau. Ilne s’agit en ce moment que de la ville de Paris. Je propose de faire prêter serment devant les officiers municipaux de cette ville. M. Populus. Nous n’avons nul besoin de faire un décret spécial pour la ville de Paris ; le décret doit être général et s’appliquer à tout le royaume. Je demande, en outre, que le serment des experts soit prêté sans frais par-devant les juges ordinaires. Cet amendement est adopté et le décret est rendu ainsi qu’il suit : c L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait au nom de son comité d’aliénation, a décrété et décrète que le serment des experts qui seront nommés pour l’estimation des biens nationaux, dont la vente a été décrétée, sera prêté sans frais par-devant les juges ordinaires ». M. de Boisse, député du département de Ghône-et-Loire, obtient une prolongation de congé, jusqu’au rétablissement de sa santé.