[Au«mblée Mtkmale.1 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |6 mal 1791.1 633 licle et son renvoi aux comités des finances et des monnaies. (Ce renvoi est décrété.) M. Brfets-Beanmetz. Je propose à l’Assemblée une disposition additionnelle tendant à ordonner aux comités des finances et des monnaies réunies de faire incessamment un rapport sur tous les objets de détails relatifs à la fabrication des petits assignats et de la nouvelle monnaie. La voici : Art. 2 {nouveau). c L’Assemblée nationale ordonne à ses comités des monnaies et des finances, réunis, -de lui faire incessamment un rapport sur les moyens d’exécution relatifs, tant à la fabrication des assignats de 5 livres, qu'à celle de la monnaie qui doit être faite pour être mise en émission au même moment où ils seront distribués.» {Adopté.) M. Dubois, curé de Sainte-Madeleine-de-Troyes , absent par congé, annonce son retour à l’Assemblée. M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de demain matin. Une discussion s’engage sur le point de savoir si le rapport sur les corps ne finances serait ou non renvoyé à l’ordre du soir. La motion est faite q .e ce rapport reste à l’ordre du matin. (L’Assemblee, consultée sur cette motion, décrète que ce rapport restera à l’ordre du matin.) M. le Président lève la séance à trois heures. ANNEXE A LA SÉANCE bE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 6 MAI 1791. Seconde opinion de M. de Montesquiou sur les assignats de 5 livres. Avertissement. L’opinion suivante aurait été lue à l'Assemblée nationale, à la séance du 6 mai, si la discussion eût duré plus longtemps. Le public ne l’eût jamais connue, si le décret rendu ce même jour avait statué définitivement sur les moyens et sur le régime entier de la fabrication et de l’émission des petits assignats; mais au point où en sont les choses, tous ceux qui croient avoir des vues utiles en doivent l’hommage à la chose publique; et ce d voir est encore plus sacré pour les représentants de la nation que pour le reste des citoyens. (Note de M. de Montesquiou.) Messieurs, Il serait bien à désirer que l’on ne fît jamais intervenir les passions ou les préjugés dans les questions que la raison froide et des calculs exacts doivent juger en dernier ressort. Celle qui est soumise à votre discussion se présente, aux meilleurs esprits, sous plusieurs rapports. Tous partent du même point, tous tendent au môme but; et s’ils varient sur les moyens d’y arriver, c’est de cette diversité même que doit jaillir plus certainement la vérité que vous cherchez. Le peuple, nous a-t-on dit, réclame hautement les petits assignats : et cette volonté est, pour nous, la loi suprême. Me préserve le ciel d’en reconnaître jamais d’autre que la volonté générale, seule lui des peuples libres! Mais n’oubliez pas, Messieurs, que vous en êtes les organes, et que c’est au tribunal de la sagesse que doivent se prononcer ses arrêts. Là, les passions sont condamnées au silence; les premiers mouvements sont analysés, réprimés même, si le bonheur public l’exige. A quoi serviraient des législateurs sans force, sans prévoyance, entraînés par le flot qui les environne, et sacrifiant au vain dé-ir de plaire un moment, la noble ambition d’être longtemps utiles? La volonté du peuple est imposante, sans doute, mais il est une loi plus imposante encore, plus sacrée pour nous, plus immédiatement confiée à notre surveillance; et cette loi suprême, la seule à laquelle nous puissions accorder ce titre, c’est le salut du peuple. Je ne répondrai à aucune des déclamations que j’ai entendues dans cette tribune; je réduirai la question actuelle aux termes les plus simples; et rien ne sera plus facile, car nous sommes tous d’accord sur le fait principal. Nous convenons tous qu’il est urgent d’aider la circulation, et de lui rendre les intermédiaires qui lui manquent entre les grosses pièces de notre monnaie territoriale, et celles qui servent aux moindres besoins de la vie. Que ce soit l’assignat qui perde au moment de l’échange, ou que ce soit l’argent qui gagne, c’est une question oiseuse, puisque l’effet sera le même tant que le journalier ne pourra acquitter ses consommations qu’avec de l’argent, et qu’il ne pourra se procurer avec un assignat tout l’argent dont l’assignat représente exactement la valeur. Or, voilà précisément le mal dont on se plaint, et qu’il s’agit de faire cesser. Le but auquel nous tendons est do te d’empêcher que les écus ne continuent de gagner contre les assignats, et notre moyen est de mettre d’autres signes de valeur en concurrence avec les écus dans les marchés. Nous voulons ensuite que le nouveau signe de valeurs qui concourra avec les écus ne perde rien contre la monnaie; et pour cela, nous proposons une immense fabri ration de monnaie de cuivre, afin de rendre facile, en tout temps et partout, l’échange au pair de ces nouvelles fractions d’assignats, contre une monnaie métallique propre aux moindres besoins. Le problème serait donc entièrement résolu, au gré même des plus violents adversaires des assignats, si, dans toutes les parties du royaume, le porteur d’un assignat pouvait, à chaque instant, l’échanger coutre des écus ou contre leur équivalent, et si partout cet équivalent d’écus pouvait être transformé, sans perte, en monnaie de métal. Je crois la proposition clairement énoncée. Examinons maintenant lequel des deux systèmes qui vous ont été présentés remplit le mieux toutes ces données. M. Rabaut vous a proposé de faire fabriquer des assignats de 5 livres au compte de la nation, comme vous avez fait fabriquer les précédents. Je vous ai proposé de confier cette opération, dans toutes les villes principales, à des maisons de commerce ou à des associations de 634 {Assemblée nationale.] ARCBT1TES PARLEMEÎTTAHVES. [6 mai 1791.] citoyens. C’est en cela seulement que consiste la diversité de nos opinions, car tous les deux nous voulons des assignats de 5 livres , et une immense quantité de monnaie de cuivre, fabriquée avec le métal des cloches, ou avec le prix qui en proviendra. Si l’on me prouve que le moyen proposé par M. Rabaut pour mettre les nouveaox assignats en circulation est plus rapide et plus sûr que le mien, je me range aussitôt à cet avis; mais à la proposition d’une fabrication unique, faite comme la dernière par le Trésor public, j’ai objecté qu’une émission suffisante d’a>signats de 5 livres Eerait d’une excessive longueur, et l’on n’a rien répondu à cette objection. J’ai dit que la fabrication en serait fort chère; qu’une circulation rapide les userait fort vite, quelque soin que l’on mît à les perfi ctionner; qn’ainsi l’on ne pourait les émettre sans procurer en même temps les moyens de les renouveler souvent; qu’en conséquence il faudrait établir presque partout des dépôts d’assignats et des depositaires; que l'infidélité possible de tant de mandataires était un grand inconvénient; que l’impossibilité de tenir des comptes réguliers d’entrée et de sortie de cette innombrable quantité de billets en était un autre; et l’on n’a levé aucune de ces difficultés. Je peux dire même que l’on ne m'a opposé aucune théorie. Il en faut une cependant : on ne peut pas adopter un grand système sans s’occuper des moyens d’exécution. Ces difficultés me paraissent insolubles en suivant, comme on vous l’a proposé, la méthode ordinaire et simple de la fabrication et de l’émission directe, telle qu’elle a été pratiquée jusqu’ici. Ces difficultés disparaissent en livrant l’exécution de notre plan à des établissements de confiance, particulièrement surveillés par les corps administratifs; c’est là que se fabriqueraient, sous des formes générales et prescrites, des fractions représentatives des assignats donnés en échange, lesquels demeureraient en quantité suffisante dé osés dans une caisse publique pour la sûreté de ceux qui seraient porteurs des nouveaux billets. D.ms mon système, le quart dos assignats déposés (et ce serait une condition expresse) serait employé à acheter à vos hôtels des Monnaies une somme égale de monnaie de cuivre, dont la fabrication est convenue. Alors les fractions d’assignats seraient constamment échangées à bureau ouvert et au pair contre cette monnaie. Alors le journalier, l’entrepreneur, le manufacturier serait à l’abri de toute perte, et personne n’aurait à craindre l’accaparement des gros sons, la pins incommode, mais, dans la circonstance où nous sommes, la plus utile des monnaies. Dès que les caisses d’échange seraient toujours ouvertes, il est clair qu’on y aurait bien rttrem 'nt recours, et que les échanges de sous contre les fractions d’assignats se feraient entre les citoyens et dans tous les marchés, sans le moindre embarras. C’est ainsi, Messieurs, que la combinaison de deux mesures, dont l’alliance est indispensable, aplanirait toutes les difficultés. Les fractions d’assignats seraient acquises librement, et pourraient toujours l’être; et la certitude de pouvoir toujours, ou reprendre des assignats, ou se procurer de la monnaie, les ferait infiniment rechercher. Je demande à présent si j’ai fait, comme on a voulu me l’objecter, l’absorde proposition d’autoriser les départements à frapper monnaie. Je demande si je mets un crédit particulier à fa place du crédit national, tandis que toute l’opération repose sur le crédit des assignats et sur la facilité des échanges libres. Je demande enfin si, comme on l’a dit eucore, j’ai parlé pour les petits assignats et conclu contre eux, tandis que je n’ai cherché que des moyens d'accélérer la jouissance d’an bien que ses plus ardents apologistes renvoient, sans s’en douter, à des temps éloignés, et exposent à mille difficultés de detail. M. Rabaut, qui n’a pas encore répondu à mes objections, mais qui a été frappé de la lenteur d’une fabrication de petits assignats, et des inconvénients attachés aux nombreux dépôts nécessaires pour leur renouvellement, vous a laissé entrevoir le moyen d’employer des assignats métalliques. Je sois bien sûr qu’il sera bientôt détaché de cette idée. Son bon esprit en sentira (ont le danger. Le grand intérêt qui solliciterait l’introduction furtive de pareils assignats dans le royaume exciterait la plus dangereuse contrebande. Les étrangers ont souvent fait passer en France de la monnaie de billon sous l’appât d’un gain très modique; mais heureusement le mal qu’ils nous faisaient n’était pas grand. L’introduction des assignats de métal, au contraire, serait un fléau destructeur pour la nation ; car, en dernière analyse, il faudrait bien les payer, et la dette publique se trouverait accrue de tout ce que la fraude aorait eu l’art de faire pénétrer dans le royaume. Nos assignats peuvent se contrefaire, il est vrai; mais du moins il est possible de reconnaître les véritables des faux. Ils ont des signes secrets, des signatures connues : ce sont des indications certaines, que jamais des assignats de métal ne pourraient offrir à nos recherches. 11 est donc impossible d’adopter ce système, sans courir les plus grands risques. Rien n’est inimitable en fait d’empreintes et de compositions métalliques; l’incommodité de cette monnaie ne serait compensée par aucun avan-tage. Me demandera-t-on pourquoi je préfère les associations particulières à l’emploi de préposés du gouvernement, même pour l’exécution du plan que je propose? Je crois y avoir répondu d’avance. Je De pense pas qu’il puisse y avoir de surveillance active et constante sans le concours de l’intérêt particulier. Une manutention immense comme celle-là, conduite par les moyens ordinaires, sera mal faite; et la seule négligence, en supposant même qu’elle fût notre unique danger, pourrait avoir les plus Funestes conséquences. D’ailleurs, n’avons-nous pas l’expérience du succès d’établissements semblables? Lyon a de netils assignats libres qui soutiennent ses ateliers. On me répond qu’ils perdent 8 ou 10 0/0 ; cela doit être, ils ont le sort des assignats, parce que la monnaie de cuivre n’y est pas associée. Joignez-y cette monnaie et des échanges à bureau ouvert: les assignats et leurs fractions ue perdront plus rien. Les adversaires de ce système, qui, j’ose l'espérer, cesseront de l’être quand ils m’auront bien entendu, ont cru le discréditer en disant que je proposais des banques, des caisses d’escompte; comme si des rauques, des caisses d’escompte étaient la perte des pays qui savent s’en servir I Quoi! parce que notre ancien gouvernement avait abusé de tout, parce que son despotisme n’avait pas respecté un établissement qni eût pu rendre de grands services à l’Etat, et qu’il en a fait l'instrument et la victime de son gaspillage, oublierons-nous que, depuis un siècle, des banques bien organisées (7 mai 1191.] 635 l Assemblée nationale.] A&GUVKS PAftLEMBIITAlftES. font la prospérité de l'Angleterre? Ua jour, la Franee apprendra ce qu’un gouvernement sage aurait pu faire de cette caisse d’escompte, si injuriée, si calomniée, et qui, malgré l’abus gue les ministres des finances en ont fait, nous offre encore le modèle de la plus parfaite comptabilité. Mais je réponds à cette objection, que je ne propose d’établir ni banque, ni caisse d’escompte. J’invite de bons citoyens, d’honnêtes négociants, à se réunir pour servir leur pays. J’indique les moyens; je soumets leurs entreprises à l’inspection des corps administratifs, des délégués du peuple, pour que de téméraires agioteurs n abusent pas de sa crédulité. Je subdivise une opératiou que je crois impraticable eu masse. Je pose les bases d’un système immense de circulation; et je fais jouir a l’instant même la nation entière d’un bienfait dont toute autre combinaison lui fera longtemps attendre l’elfet. J’ajoute en faveur de mon système une observation que personne n’a faite encore. M. Rabaut propose, ainsi que moi, les moyens d’échanger au pair les petits assignats, j’en crois le succès infaillible. Mais, en suivant son plan, comment celui qui voudra de petits assignats pourra-t-il s’en procurer? L’échange que M. Rabaut propose de faire pour les mettre dans le commerce, étant une fois consommé, y aura-t-il de nouveaux magasins où l’on puisse continuer d’en aller chercher? non, sans doute; une émission faite en vertu d’uo décret, ne peut être excédée. On ne trouvera donc de petits a-signats qu’au marché, comme à présent ou y trouve des écus. Il faudra donc les acheter; et ce que les écus gagnent aujourd’hui sur les assignats, les nouvelles fractions de 5 livres Je gagneront. Ainsi la société n’éprouvera qu’une partie du bien qu’on cherche a lui procurer; et peut-être paraîtra-t-il plus dur de perdre pour obtenir en échange un papier plus commode, que de perdre pour obtenir des écus. Cette considératiou mérite, je crois, qu’on y réfléchisse. Une autre objection moins grave, mais qu’il ne faut pas omeitre, c’est que pour réparer la destruction des petits assignats, pour en avoir partout à offrir à ceux qui n’auraient plus que des lambeaux, il faudra porter la fabrication au double ou au triple des billets qui seront dans le commerce. Alors, l’inconvénient que j’ai fait voir, et qui est attaché à la longueur ae la fabrication, sera double ou triple de ce j’avais dit. Les compagnies particulières parent à tous ces inconvénients. Leur intérêt sera toujours de changer des fractions d’assignats contre des assignats; ainsi l’on n’en manquera jamais. Leur obligation sera de fournir aux autres échanges : ainsi ils ne seront jamais interrompus. Le Corps légis'atif et le gouvernement, debarrassés du soin de diriger cette immense circulation, auront alors tous les motifs de sécurité : alors ils ne pourront craindre aucun abus sur la quantité d’assignats émis, puisque l’émission n’excédera jamais la somme décrétée. Je pourrais peut-être ajouter à ces avantages celui de placer partout l’intérêt particulier en sentinelle contre les falsificateurs. Ces dernières raisons me paraissent péremptoires. Je me résume, et je demande qu’avant tout l’opération de la vente des cloches et de leur transmutation en sous, jusqu’à la somme de 40 millions, soit ordonnée ; que le roi soit prié de la faire exécuter, car je crois que c’est le seul moyen qu'elle le soit; et que toutes les monnaies du royaume y soient employées. Quant aux moyens de former des établissements particuliers, sans négliger aucune précaution de sûreté, dans tous les endroits où il sera possible d’en faire, pour mettre eu circulation des assignats de 5 livres, avec la facilité de les échanger à bureau ouvert contre la nouvelle monnaie de cuivre; je demande que le comité des finances soit chargé d’en concerter le plan avec le comité de constitution, et qu’il le présente sous huitaine à l’ Assemblée nationale. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. REWBELL. Séance du samedi 7 mai 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture des procès-verbaux des séances de jeudi au soir et d’hier, qui sont adoptés. Un membre propose d’ajouter à la tin du pre-mier article du décret concernant le6 petits assi-g nats, et adopté dans la séance d’hier, ces mots : et réciproquement, et de rédiger en conséquence comme suit cet article : Art. 1er. « Il sera procédé à la fabrication d’assignats de 5 livres jusqu’à la concurrence d’une somme de 100 millions, en remplacement de pareille somme d’assignats de 2,000 livres et de 1,000 livres, qui seront supprimés : le9dits assignats ne pourront être mis en émission qu’en vertu d’un nouveau décret, lequel ordonnera en même temps l’ouverture d’un bureau dans chaque district, auquel on pourra échanger à volonté lesdits assignats contre de la monnaie de cuivre et réciproquement » (Cette nouvelle rédaction est décrétée.) M. Rewbell, président , quitte le fauteuil. M. Raband-Saint-ÉtieBiie , ex-président , le remplace. Un membre du comité des finances présente, au nom de ce comité, un projet dedêcret relatif à l'exécution de la loi qui a suspendu la construction du palais de justice commencé à Aix. Une discussion s’engage sur ce projet de décret M. Camus demande le renvoi au comité du cinquième article pour présenter de nouveau ses vues. (Ce renvoi est décrété.) Les autres articles du projet de décret sont mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Le roi sera prié de donner des ordres pour la prompte exécution de la loi du 29 octobre 1790, qui a suspendu la construction du palais (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.