|Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 février 1791.] l’administration de divers départements et communes. M. Gossln, au nom du comité de Constitution. Messieurs, l’administration des Bouches-du-Rhône demande la nomination d’un sixième juge au tribunal de commerce à Marseille. La population de celle ville est immense, les affaires commerciales y sont multipliées à l’inlini; 5 juges ne pourraient suffire à leur expédition, d’autant plus que ces juges auront dans leur compétence les affaires contentieuses du tribunal d’amirauté, qui était composé de 6 juges; les directoires de district et de département appuient la demande de la municipalité. Le comité de Constitution est d’avis que la loi de l’organisation judiciaire qui établit les cas dans lesquels on peut nommer un sixième juge aux tribunaux de district, reçoit à celui dont il s’agit une application très juste et nécessaire. Il existe dans le département du Var, district de Saint-Pau), une commune dont les habitants ne peuvent former une municipalité; ce sont les propriétaires de la commune de Vence qui possèdent presque tout le L rritoire de Malvans; cependant Vence est du district du Var, et Malvans est de celui de Saint-Paul: cette distribution nuit à l’exécution d’une bonne organisation, au bon ordre et à l’exécution de la répartition de l’impôt. Le comité de Constitution vous propose la réunion en une seule de deux municipalités qui se sont formées dans la paroisse d’Issigny; sa population ne s’élève pas au delà de 3,000 âmes; cependant ces deux municipalités emploient 40 personnes en activité, et il en résulte une mésintelligence très nuisible. Voici le projet de décret : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution sur les pétitions des départements des Bouches-du-Rhône, du Lot, du Var, des communes de Brest et d’Issigny, décrète ce (qui suit : « Le tribunal de commerce établi dans la ville de Mai saille, en exécution de là loi de l’organisation judiciaire, aura un sixième juge. « Les membres dont ce tribunal sera formé, pourront se diviser en deux chambres, en conformité des articles 2 et 3 du titre de ladite loi, pour la plus prompte expédition des affaires dont la compétence a été attribuée aux tribunaux de commerce. « Il sera établi des tribunaux de ce genre dans les villes de Brest et Saint-Etienne. « La ville de Gahors aura deux juges de paix. « La commune de Malvans est distraite du district de Saint-Paul, pour être unie à celui de Grasse, et faire partie de la commune de Vence. « Les deux municipalités établies dans la paroisse d’Issigny, département du Calvados, sont supprimées pour n’en former qu’une, à l’organisation de laquelle il sera incessamment procédé. » (Ce décret est adopté.) M. Lebrun, au nom du comité des finances, fait un rapport sur les sommes à fournir pour des travaux utiles dans le port du Havre et propose le projetée décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète qu’il sera fourni, par le Trésor public, une somme de 650,000 livres pour les travaux du Havre, en dix payements de 65,000 livres chacun, dont le pre-505 mier commencera au mois de mars, et ainsi de mois en mois. » (Ce décret est adopté.) M. Lebrun, au nom du comité des finances, demande qu’il soit accordé des indemnités aux citoyens dont les maisons ont été démolies lors de la construction du pont de Roanne, et propose le décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète qu’il sera payé 45,000 livres sur le Tré-or public, pour indemnité des maisons dont la démolition a été ordonnée pour la construction du pont de Roanne, sauf le remplacement de cette somme sur le département de Rhône-et-Loire, s’il y a lieu. » (Ce décret est adopté.) M. Lebrun. Dans le texte de la loi sur les ponts et chaussées imprimé à l’Imprimerie nationale, il s’est glissé une erreur importante. A l’article 10, du titre III, il est dit : « Il sera alloué chaque année 80,000 livres... » Or, le chiffre décrété par l’Assemblée est 8,000 livres : il y a donc lieu de remplacer le chiffre de 80,000 livres par celui de 8,000 livres, qui est le véritable. (L’Assemblée décrète que cette erreur sera corrigée et qu’une nouvelle impression de la loi sera faite.) M. Vernier, au nom du comité des finances , fait un rapport sur les comptes à rendre par les receveurs de district au sujet de la contribution patriotique et donne lecture d’un projet de décret. M. Ramel-Vogaret. Je demande, par amendement, que les dispositions de ce décret soient rendues communes aux receveurs et trésoriers des ci-devant pays d’Etat. M. Vernier, rapporteur. J’adopte l’amendement; voici le projet de décret amendé : « L’Assemblée nationale, ouï le rapportée son comité des finances, considérant l’impossibilité où ont été les directoires de district de faire rendre les comptes de la contribution patriotique, tant aux receveurs particuliers des finances qu’aux collecteurs, dans les 15 premiers jours ne février au (plus tard, ainsi qu’il était prescrit par la loi du 14 novembre, vu que les collecteurs, pour l’exercice de 1791, n’ont point été nommés à ladite époque du 15 février, et la nécessité de faire comprendre dans les comptes des ci-devant receveurs, les dépenses auxquelles ont pu donner lieu les frais de perception, de rédaction et d’expédition des rôles, d’après les bases décrétées par l’Assemblée nationale, les 20 décembre 1790 et 27 janvier 1791, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les ci-devant receveurs particuliers des finances auront, pour rendre leur compte de la contribution patriotique, jusqu’au 1er mai de la présente année 1791, à l’effet par eux d’y comprendre toutes les dépenses qui ont pu ou pourront être acquittes en vertu des décrets des 23 décembre 1790 et 27 janvier 1791. Art. 2. « Pour mettre les receveurs de district à même de continuer la perception de ce qui reste dû de la contribution patriotique pour l’année 1790, et ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 février 1791.) [Assemblée nationale. j pour les termes suivants, les receveurs particuliers des finances seront tenus, aussitôt après la notification du présent décret par le procureur-syndic du directoire de district, chef-lieu de l’arrondissement de leur recette, de' former et remettre au directoire de district, dans les quinze jours qui suivront la notification, et ce, sous peine d’être privés de la remise à eux accordée par le décret du 20 décembre 1790, un état détaillé du montant de la recette pour chacune des municipalités composant leur arrondissement de recette, conformément au modèle qui leur sera fourni par le commissaire du roi au département delà caisse de l’extraordinaire. Art. 3. « Aussitôt après la remise de cet état au directoire du district, il en sera formé autant d’extraiis qu’il existe de districts se partageant l’arrondissement de chaque recette particulière des finances; et ces extraits, dûment certifiés, seront envoyés à chacun des directoires de district qui les concernera, pour être remis au receveur de ce même district. Art. 4. « A défaut de percepteurs nommés pour 1791, les collecteurs de 1790 suivront la perception de la contribution patriotique, et il leur sera tenu compte du denier pour livre sur les sommes effectuées qu’ils auront reçues pour chacun des receveurs entre les mains desquels ils auront versé leurs deniers. Art. 5. « Toutes les sommes reçues sur la contribution patriotique par les ci* devant receveurs particuliers des finances, pour leur ancien arrondissement de recette, et le reliquat qui pourrait se trouver en caisse à l’époque de la reddition de leur comple, seront versées dans la caisse des receveurs de district, à l’effet par ceux-ci d’en remettre le montant à la caisse de l’extraordinaire. « La copie du compte rendu par chaque receveur particulier des finances, sera envoyée, certifiée par le procureur syndic du district, au commis-aire du roi au département de la caisse de l’extraordinaire, à l’effet de constater la recette des ci-devant receveurs généraux des finances, et d’arrêter leur compte ; déclare, de plus, l’Assemblée nationale le présent décret commun aux receveurs et trésoriers des ci-devant pays d’Etal. » (Ce décret est adopté.) M. le Président fait lecture d’une lettre que lui ont adressée les commissaires des dépotés composant l’assemblée générale de Saint-Domingue, lors de leur embarquement sur le vaisseau le Léopard, par laquelle ils demandent une audience à une heure de l’après-midi à la séance de demain. M. lîégouen. J’observerai qu’il est intéressant de différer d’entendre les commissaires de Saint-Domingue, ju-qu’à ce que l’Assemblée ail décrété les instructions sur l’organisation des colonies. Je propose, en conséquence, l’ajournement de l’audience demandée, après que l’Assemblée aura entendu son comité colonial, qui doit lui soumettre incessamment le projet d’instruction sur l’organisation des colonies. (Cet ajournement est décrété). M. le Président. L’Assemblée juge-t-elle à propos de commencer sur-le-champ la discussion du projet de décret du comité de Constitution sur la résidence des fonctionnaires publics (1)? (L’Assemblée consultée décide que la discussion est ouverte.) M. Le Chapelier, rapporteur. Messieurs, je n’ai rien à ajouter aux motifs que j’ai eu l’honneur de vous exposer dans 'mon rapport et qui ont décidé le comité de Constitution à vous proposer le projet de décret sur les devoirs des membres de la famille royale. La discussion peut donc s’ouvrir sur l’ensemble du projet qui vous est soumis; si personne ne se présente pour parler contre, je vais donner lecture du premier article. M. Pétion ( ci-devant de Villeneuve). Messieurs, il faut dans cette discussion s’assujettir à une marche certaine, et ne pas perdre de vue cette réflexion, que la loi qui vous est présentée s’applique au cours ordinaire des choses, et particulièrement au roi et à sa famille. Ici s’offrent deux questions principales : 1° Doit-on placer tous lea membres de la dynastie sous la même ligne? 2° Leurs obligations ne diffèrent-elles en lien de celles des autres citoyens? Selon les uns, les premiers comme les derniers de cette famille sont appelés à gouverner, et il ne faut pas confondre ces membres avec les autres citoyens. Selon d’autres, ce serait un funeste privilège que l’esclavage politique des membres de la dynastie. Assujettis aux volontés de la nation, ils entrevoient des dangers à faire de la famille du roi nue caste particulière. Ce serait fortifier des préjugés dangereux, que d’habituer les degrés décroissant de la famille du roi, à se regarder comme privilégiés dans l’Etat. Je vais me renfermer dans la question de la résidence. Votre comité vous propose d’obliger à la résidence ceux d’entre les membre-de la dynastie qu’il désigne comme suppléants du roi. Pour moi, je ne veux pas de membres de la dynastie revêtus de ce titre par une loi ; le chef seul doit être en évidence. En dernière analyse, la question doit se présenter sous un aspect simple et rigoureux. En principe, aucun membre de la dynastie n’étant en fonctions, tous, excepté le chef, doivent être assujettis à résider dans l’intérieur du royaume ou à n’en sortir que du consentement du Corps législatif, ou bien tous doivent pouvoir s’en absenter sans cette autorisation ; et j’incline pour ce dernier parti. N'oublions jamais que cette loi est pour des temps de paix et de tranquillité ; car dans des temps orageux, dans des temps de crise, lorsque l’Etat est menacé, lorsque le Corps législatif l’a déclaré, déclaration que lui seul peut faire, alors la loi contre les émigrants est en vigueur; chaque citoyen doit rentrer. Si les princes désobéissent à la loi, s’ils ne rentrent pas, la nation les prive des distinctions qu’elle leur a accordées. C’est une peine juste et qui naît de la nature même du délit. Je propose que le roi seul, en sa qualité de fonctionnaire public sans cesse en activité, ne puisse sortir du royaume et que les autres membres de la dynastie, indistinctement, puissent (1) Voyez ci-dessus, séance du 23 février 1791, page 434, le rapport de M. Le Chapelier sur cet objet.