652 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Saint-Quentin.] Demande que dans la ville de Saint-Quentin les frais de guet, gardes et logements de gens de guerre, soient également répartis sur tous les habitants, qui ont un égal intérêt d’être gardés. Demande que dans la ville de Saint-Quentin, la juridiction de la police soit exercée par les officiers municipaux qui ont payé des deniers à l’hôtel de ville, et que la finance de la charge créée à cet effet soit confiée à un magistrat en titre d’office, ou à un procureur fiscal au même titre. Que les administrateurs des hôpitaux soient obligés défaire imprimer tous les ans les comptes de leurs recettes et de leurs dépenses, en spécifiant le nombre des pauvres qu’ils ont assistés, la quantité de secours qu’ils ont reçus et le temps qu’ils ont été à leur charge. CAHIER Des remontrances et doléances de V ordre de la noblesse dubailliage de Saint-Quentin (1), arrêtées dans V assemblée dudit ordre le 10 mars 1789, et remises à M. le comte DE Pardieu, élu député aux prochains Etats généraux. 1° Aucun citoyen ne pourra perdre sa liberté que par sentence légale de ses juges naturels ; sera suppliée Sa Majesté de n’accorder aucunes lettres de cachet à la demande des familles, qu’autant qu’elles auront été jugées et déclarées nécessaires par un comité secret, qui seul pourra en fixer la durée. 2° La garantie et la conservation des propriétés à chaque citoyen. 3° Aucun impôt direct ou indirect ne sera à l’avenir mis ou prorogé que du consentement des Etats généraux, pour tel temps qu’ils jugeront convenable. 4° Aucun acte public, à l’avenir, ne sera réputé loi, s’il n’a été consenti par les Etats généraux et revêtu du sceau de l’autorité royale. 5° Sera réglé et fixé le retour périodique des Etats généraux. 6° Sera établie une commission intermédiaire dans l’intervalle d’une tenue à l’autre des Etats généraux, à la fin de pourvoir aux cas imprévus, de suivre et d’opérer les réformes qui seront déterminées par les Etats généraux. Les membres de ladite commission seront remplacés annuellement par portions déterminées par lesdits Etats géaéraux. 7° Demander qu’il soit établi dans tout le royaume des Etats provinciaux, qui fourniraient le remplacement annuel de la commission intermédiaire. 8° Que le travail des Etats généraux et de la commission intermédiaire sera rendu public par la voie de l’impression. 9° Sera demandée la liberté de la presse, sous la caution des auteurs, libraires et imprimeurs. 10° Ce sera aux députés de chaque ordre représentant la nation aux Etats généraux, à balancer les avantages de voter par tête ou par ordre. 11° Sera demandée la publicité des nouveaux principes constitutifs de la monarchie. JUSTICE. 1° Un nouveau code de lois, civil et criminel. 2° Il serait à désirer qu’il n’y eût dans chaque province qu’une seule et même coutume, de (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat même qu’un seul et même poids, une seule et même mesure. 3° Suppression des évocations et du droit de committimus. 4° Réunion de toutes les justices attributives à la justice royale. 5° Ne seront plus accordés d’arrêts sur requêtes, qu’autant qu’ils auront été communiqués aux parties qu’ils intéressent, et que lesdites parties auraient laissé écouler le délai d’un mois sans y répondre. 6° La suppression delà vénalité des charges de judicature. 7° Il serait à désirer qu’il fût établi dans les villes un conseil gratuit pour les pauvres. 8° Il paraît nécessaire d’établir une loi rigoureuse pour arrêter les fréquentes faillites. 9° La suppression des huissiers-priseurs. 10° Aucune sentence ou arrêt ne pourra être délivré et expédié aux parties intéressées, qu’il n’ait été lu devant la chambre assemblée, pour s’assurer si la rédaction est conforme au prononcé du juge. FINANCES. 1° Sera demandé connaissance de l’état actif et passif des finances, pour pouvoir déterminer l’impôt général. 2° Sa Majesté sera priée de fixer sa dépense et celle de la famille royale. 3° Les ministres seront comptables et responsables de la gestion des fonds de leur département aux Etats généraux ou à la commission intermédiaire. 4° De la réunion en un seul de tous les impôts établis sur les propriétés, tels que les vingtièmes, la taille, l’accessoire de la taille, capitation, etc. 5° Que l’impôt territorial, s’il est jugé nécessaire, soit payé sans distinction par le clergé, la noblesse et le tiers-état, sur toutes propriétés de quelque nature qu’elles soient, dont la répartition serait faite par les Etats provinciaux, et sous eux par les municipalités. 6° Que sur toutes les rentes généralement quelconques, hypothécaires et autres, il devra être fait une retenue par le débiteur, proportionnée à ce que l’impôt sera à la propriété. 7° Que, pour faire contribuer les capitalistes, habitants des villes, et rendre à la culture des bras utiles, il soit mis un impôt sur les chevaux, les cheminées, les fenêtres, et une imposition graduée sur tous les domestiques et gens de maison, 8° Employer tous les moyens possibles de réformer les abus tyranniques dans les aides et la gabelle, si on ne peut abolir ces impôts. Il serait bien à désirer que l’on pût trouver les moyens de rendre la circulation du sel plus libre, et son prix proportionné à l’éloignement seulement du lieu où on le fabrique, et. relativement aux frais de son transport. 9° Sera fait un nouveau tarif pour les droits de contrôle et d’insinuations. 10° Serait aboli le droit de franc-fief. 11° Serait supprimé tout péage, toute banalité, en dédommageant les propriétaires après l’examen de leurs titres. 12° Réduction des intérêts usuraires de la dette nationale. 13° Soumettre le régime de la caisse d’escompte aux Etats généraux, et astreindre l’administration de cet établissement à rendre des comptes publics et annuels. 14° Il serait à désirer qu’il fût pareillement [États gên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Saint-Quentin.] 653 établi des caisses d’escompte dans toutes les villes de commerce où le besoin l’exige, correspondantes avec celle de la capitale, sans néanmoins y être subordonnées. 15° Liberté du commerce des grains de province à province, mais limitée pour l’exportation suivant les circonstances de cherté ou de rareté ; la fixation du setier de Paris, à 30 livres pour les provinces, et à 34 dans les frontières ou ports maritimes ouverts à l’exportation, devant servir de thermomètre au gouvernement pour la suspendre ou la permettre. 16° Seraient reculées les barrières et les douanes aux extrêmes frontières du royaume, et serait libre la circulation des marchandises dans l’intérieur du royaume. 17° L’inféodation ou l’aliénation à perpétuité des domaines de la couronne, pour en être le prix, avec le concours des Etats généraux, employé à la libération des dettes de l’Etat. 18° Suppression totale de toutes les loteries, comme ruineuses et dangereuses à toutes les classes de citoyens. 19° Suppression de la réunion de plusieurs grâces sur une même tête. CLERGÉ. 1° Sera tenu le clergé de payer ses dettes, en prenant les mesures qu’il avisera, sans les faire supporter à la nation. 2° Sera assujetti à toutes les impositions quelconques, ainsi que l’offre la noblesse. 3° La résidence des prélats et bénéficiers à charge d’âmes, dans leurs bénéfices et diocèses. 4° Sera supprimé le casuel, et seraient augmentées graduellement les portions congrues, en raison du nombre des feux de leurs paroisses, et que leur revenu soit fixé en grains. 5° Les possesseurs de bénéfices venant à décéder, que leurs successeurs soient tenus de suivre les baux jusqu’à leur expiration, et que les bénéficiers soient obligés de répartir leur pot-de-vin dans les neuf années de bail. 6° Serait défendu de prononcer des vœux avant l’âge de vingt-cinq ans. 7° Seraient supprimées les annates, bulles et dispenses en cour de Rome, qui diminuent le numéraire national. 8° Qu’il soit créé des chapitres qui seraient indistinctement affectés pour les demoiselles nobles et les bonnes familles du tiers-état, et que dans le nombre de chapitres d’hommes existants, il en soit affecté dans chaque province pour les ecclésiastiques nobles et ceux du tiers-état. 9° Qu’il soit établi dans les campagnes des maisons de charité, pour subvenir aux secours des infirmes. POLICE ET AGRICULTURE. 1° Faciliter les moyens de propager les animaux servant à Y agriculture ; établir différents haras dans les provinces, et dont l’Etat pourrait même profiter; accorder des primes à ceux des cultivateurs qui auraient fait les plus beaux et les plus nombreux élèves, dans toutes les espèces d’animaux utiles au labourage, et non pas les augmenter en raison du nombre qu’ils en ont. 2° Anéantir toutes les entraves que le cultivateur éprouve dans l’importation de ses productions; que les marchés soient libres, qu’il soit maître d’y porter ses grains, et de les remporter s’il ne les vend pas ; que les droits de sterlage et autres droits de marché soient supprimés, et qu’il soit accordé des prix à ceux qui approvisionneront le plus les marchés. 3° La liberté, dans toute l’étendue du royaume, de faire des échanges avec les gens de mainmorte, telle qu’elle a été accordée à la province de Bourgogne par l’édit du mois d’août 1770. 4° Seraient supprimées les charges de bouchers, boulangers dans les villes, et y seraient admis ceux des campagnes les jours de marché. 5° De mettre les communes en valeur autant qu’il sera possible. 6° Le député de la noblesse se prêtera toujours avec empressement à tout ce qui pourra favoriser l’agriculture et le commerce. Il sollicitera l’uniformité de la justice consulaire, création de ses chambres dans les villes d’une population de dix mille âmes, où il n’y en aurait pas ; il sollicitera pareillement la suppression des jurandes et des maîtrises. 7° Qu’il ne soit plus fait sur les rivières, telles qu’elles soient, navigables ou non, aucunes écluses, vantelleries, ni batardeaux qui, en en arrêtant le cours, causent des inondations qui détruisent toutes les récoltes des riverains, et que les moulins qui y sont construits, soient établis de façon à obvier à tous ces dangers, et que l’édit du mois d’août 1669, à cet égard, soit mis en vigueur. Ainsi clos et arrêté unanimement, ce 10 mars au matin 1789, en d’assemblée tenue à cet effet dans une salie du couvent des Cordeliers de ladite ville de Saint-Quentin, et ont signé tous les membres de la noblesse ci-après : Le chevalier de la Noue; Du Royer; G. Paulet; de Brissac de Soxev; le chevalier d’Ollezy; le baron d’Qstrel; de Franssure; le comte de Fiavi-gny; Fizeaux; de Louveval de Gonnelieu; de Sart du Catelet; Le Serrurier fils-, Duplessier de Fontaine; le comte de la Cressonnière, grand bailli d’épée et président; le Serrurier père ; Neret père-, le comte de Laval; le comte de Pardieu, député ; le chevalier de Bertin ; Bouzier d’Etsoüilly ; de Yfd’Omissy; Chauvenet de Bellenglise; Chauvenet de Cauvigny; Macquerel de Pleineselve; de Longlay ; Thomas d’Arneville, secrétaire de Vordre . CAHIER GÉNÉRAL Des doléances, plaintes, remontrances et demandes du tiers-état du bailliage de Saint-Quentin en Ver-mandois,àprésenter à V assemblée des Etats généraux, qui doit se tenir à Versailles le 27 avril prochain, conformément a la lettre de convocation de Sa Majesté , du 24 janvier dernier, rédigé par les vingt-deux commissaires nommés à cet effet, en rassemblée du tiers-état dudit bailliage, tenue en l’église des RR. PP. Cordeliers de la ville de Saint-Quentin, le 6 mars présent mois , sur les cahiers de toutes les communautés composant ledit bailliage (1). CONSTITUTION DE LA NATION FRANÇAISE. Considérant que les ministres du Roi, par le résultat de son conseil du 27 décembre 1788, ont avoué, au nom de Sa Majesté, les droits incontestables de la nation en déclarant : 1° Que la volonté de Sa Majesté est non-seulement de ratifier la promesse qu’elle a faite de ne mettre aucun impôt sans le consentement des Etats généraux de son royaume, mais encore de n'en proroger aucun sans cette condition; (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat.