344 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 septembre 1791. J raient de quelque partie desdites fondations, uniquement à titre de secours, pour subvenir à leurs besoins, continueront d’en jouir personnellement aux termes desdites fondations. Les fondations faites dans les paroisses seront au surplus exécutées en conformité des précédents décrets. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d’Angêly). Il y avait, dans l’ancien ordre de choses, de ces gens infatués de ce qu’ils appelaient la haute noblesse et qui avaient fait des fondations en faveur de cette haute noblesse. Dans ces contrats, il y avait une clause de réversion. Quand vous avez rendu votre décret, ces individus-là sont venus réclamer; et il est évident qu’il n’existait pas de loi contre eux, et que si, suivant ce qui aurait dû être fait, ils avaient réclamé devant les tribunaux contre la nation, la loi était absolument pour eux et on aurait jugé pour eux. Qu’arrive-t-il? Ils ont réclamé devant le Corps législatif et on a porté cela à votre comité. Votre comité ne fait pas le rapport de leurs pétitions particulières; et certes je ne le blâme pas, parce que vous avez des objets d’intérêt général; mais il vous apporte une loi qui met absolument dans l’impossibilité de prononcer en leur faveur. Ainsi, sans vous faire juger leurs titres, on leur répond par une loi qui les condamne sans qu’ils soient entendus. J’appelle à la bonne foi, à la justice de l’Àssemblée.je crois qu’une tel le manière d’opérer n’est ni juste ni équitable de la part de ceux qui ont tout à la fois l’intérêt de la nation à juger et le droit de juger ou du moins qui se l’arrogent. Je dis qu’il n’existe pas de loi et que le projet qu’on vous propose est un acte de la puissance qui dépouille la faiblesse. M. Camus, rapporteur. Le préopinant ne paraît occupé que d’une aîfaire, au lieu que les comités réunis ont pris intérêt à toutes les affaires. Ils ont vu un assez grand nombre de fondations, par exemple, par le parlement de Dijon, une fondation d’un hôtel faite en faveur du doyen du parlement de Dijon, pour par lui l’habiter. Lorsqu’il a été question de mettre à exécution vos décrets sur les biens nationaux, on a voulu faire régir comme biens nationaux son hôtel. Alors les fondateurs sont venus dire : mais nous prétendons que l’on ne touche pas à cet hôtel; et qu’arrive-t-il ? G’est que cet hôtel périt, c’est que les biens de campagne ne peuvent se vendre. Il y a ensuite les fondations faites par M. Cochet de Saint-Vallier, sur lesquelles vous avez déjà prononcé, car vous avez ordonné que par provision ceux qui jouissaient de pensions alimentaires dessus continueraient d’en jouir, et sur le surplus qu’il y aurait un séquestre entre les mains du département de Paris. Il se trouve des parents de M. de Saint-Vallier, qui prétendent que leur auteur a dit, dans son acte de fondation : si la fondation ne s’exécute pas de Ja manière que j’ai réglée, mes parents la prendront. Sur tout cela, nous ne préjugeons rien, car vous n’avez pas fait disparaître les individus nobles qui étaient dans le royaume ; vous avez seulement dit qu’il n’y aurait plus de noblesse ; et nous, nous disons : tout ce qui a été donné dans des vues de bien public se trouve dans la main et à la disposition de la nation. M. Démeunier. Le projet de décret qu’on vous propose est très bon au fond; mais je pense qu’il ne réserve pas d’une manière assez positive le droit de prouver devant les tribunaux que l’acte de fondation dit quelque chose en faveur des particuliers qui réclament. On peut adopter le projet de décret, en réservant aux citoyens le droit de faire valoir devant les tribunaux leurs prétentions. M. Canjuinais. En adoptant l’amendement, nous donnerions aux juges les pouvoirs administratifs. Il faut qu’il y ait une loi qui serve de règle aux juges. M. Camus, rapporteur. Voici, d’après l’amen dement de M. Démeunier, comment je propose de rédiger l’article 3. « L’Assemblée réserve à la législature d’établir les règles d’après lesquelles il sera statué sur les demandes particulières qui pourraient être formées en conséquence des clauses écrites dans les actes de fondation. » ( Marques d'assentiment.) M. Bouche. On vient de nous parler de M. Cochet de Saint-Valiier. Ce particulier donna 100,000 écus à la ci-devant Provence, produisant 15,000 livres de rente, à perpétuité, à condition, esl-il dit dans l’acte, que ces 15,000 livres seront annuellement distribuées en mariages et autres établissement désignés audit acte. Il est dit dans l’acte que, si cette somme pouvait ri’être pas distribuée à l’avenir aux nobles qui y sont désignés, alors ses descendants reprendraient les 100,000 écus. Il est arrivé qu’il n’y a plus aujourd’hui de noblesse. Les héritiers de M. de Saint-Vallier se présentent et demandent les 100,000 écus comme à eux appartenant : on leur répond qu’il n’y a plus qu'un ordre. Il faut, messieurs, une loi précise, qui leur indique comment ils s’y prendront pour attaquer, qui ils attaqueront, et par-devant qui ils se pourvoiront. M. Camus, rapporteur. Et voilà pourquoi je propose de renvoyer à la législature. (La discussion est fermée.) M. Camus, rapporteur. Voici, Messieurs, avec la modification introduite dans l’article 3 par suite de l’amendement de M. Démeunier, la rédaction définitive du projet de décret : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités d’aliénation et des pensions, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les biens dépendant des fondations en faveur d’ordres, de corps et de corporations qui n’existent plus dans la Constitution française, soit que lesdites fondations eussent pour objet lesdits ordres, corps ou corporations en commun, ou les individus qui pourraient en faire partie, considérés comme membres desdits ordres, corps et corporations, font partie des biens nationaux, et sont, comme tels, à la disposition de la nation. Art. 2. « Les biens dépendant desdites fondations seront en conséquence administrés et vendus comme les autres biens nationaux, nonobstant toutes clauses, même de réversion, qui seraient portées aux actes de fondation. 345 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 septembre 1191.] Art. 3. « L’Assemblée réserve à la législature d’établir les règles d’après b squelles il sera statué sur les demandes particulières qui pourraient être formées en conséquence des clauses écrites dans les actes de fondation. Art. 4. <> Et néanmoins les individus qui jouiraient de quelques parties desdites fondations uniquement à titre de secours pour subvenir à leurs besoins, continueront d’en jouir personnellement aux termes desdites fondations. Les fondations faites dans les paroisses seront, au surplus, exécutées en conformité des précédents décrets. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Camus, au nom des commissaires-inspecteurs des bureaux et du comité des pensions. Messieurs, vous avez chargé votre comité des pensions et vos commissaires-inspeûeurs de vous présenter l’état des gratifications à payer aux différents employés de l’Assemblée , à raison de la cessation de leurs travaux, ainsi que de l’assiduité et du zèle dont ils ont fait preuve dans l’exercice de leurs fonctions ; leur nombre nous force malheureusement à modérer beaucoup ces récompenses. Voici à cet égard le projet de décret que nous vous proposons : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses commissaires-inspecteurs des bureaux, et du comité des pensions, réunis, prenant en considération le travail que plusieurs des employés dans ses bureaux ont fait, et voulant récompenser leur assiduité et leur zèle, voulant aussi procurer quelques secours à ceux desdits employés qui ne seraient pas replacés dans le mois qui suivra la clôture de sa session, décrète : Art. 1er. « Il sera dressé par les inspecteurs des bureaux, réunis au comité des pensions, et d’après les notes et avis des différents comités, un état des gratifications qui seront accordées aux secrétaires-commis et employés dont les comités attesteront le travail extraordinaire et l’assiduité; ledit état sera présenté vendredi matin au plus tard. » {Adopté.) Art. 2. « Aucune desdites gratifications ne pourra excéder la somme de 1,000 livres ni être au-dessous de la somme de 100 livres ; elles seront graduées selon la proportion suivante : 1,000 livres, 800 livres, 600 livres, 400 livres, 300 livres, 200 livres, 120 livres et 100 livres ; le total desdites gratifications ne pourra pas excéder la somme de 44,000 livres. » {Adopté.) Art. 3. « Pour prétendre auxdites gratifications, il faudra avoir été employé dans les bureaux de l’Assemblée avant le mois de janvier 1791, et n’avoir obtenu, dans le cours dudit emploi, postérieurement au mois d’octobre 1789, aucune gratification ; il sera fait déduction de celles qui auraient été obtenues postérieurement à ladite époque, sur la gratification qui pourra être accordée en vertu du présent décret. » {Adopté.) Art. 4. » L’état desdites gratifications sera présenté à l’Assemblée pour être décrété par elle ; il sera remis ensuite au ministre de l’intérieur, pour qu’il en fasse faire le payement sur le fonds de 2 millions, destiné par la loi du 22 août aux gratifications, sur la représentation du certificat de l’un des inspecteurs des bureaux, à l’égard des secrétaires-commis qui ne dépendent d’aucun comité; et i our les autres employés, sur un certificat du président et du secrétaire du comité, visé par l’un des inspecteurs des bureaux ; le certificat énoncera que le porteur est réellement employé dans l’Etat, et qu’il a remis fidèlement les objets confiés à sa garde. Le ministre fera vérifier sur les registres de la trésorerie que celui qui se présentera pour recevoir l’une des gratifications accordées par le présent décret, n’en a obtenu aucune postérieurement au 1er octobre 1789. » {Adopté.) Art. 5. « Indépendamment desdites gratifications, il sera accordé à tout secrétaire, commis ou employé dans les bureaux de l’Assemblée nationale, qui ne serait pas placé à la fin du mois d’octobre prochain, un mois de ses appointements sur le même pied sur lequel il les aura touchés dans ce présent mois; à l’effet de quoi, il sera remis au ministre de l’intérieur un état signé des inspecteurs des bureaux de l’Assemblée, contenant le nom et les appointements des secrétaires-commis et employés, et délivré à chacun d’eux un certificat signé des inspecteurs des bureaux, portant qu’ils ont été employés sur les états de l’Assemblée. » {Adopté.) M. Camus, rapporteur , fait lecture de l’article 6 du projet, ainsi conçu : « Il sera payé à chacun des huissiers un mois de leurs appointements par forme de gratification. A l’égard du sieur Guillot, l’Assemblée nationale décrète qu’en reconnaissance des services gratuits qu’il lui a rendus depuis le commencement de ses séances il lui sera remis un exemplaire de son procès-verbal in-octavo. » M. Buzot. Je crois que, dans cette occasion, il est de la dignité de l’Assemblée nationale de donner à ses huissiers un témoignage authentique de satisfaction pour le zèle, l’honnêteté et l’exactitude avec lesquels ils ont rempli leurs devoirs. Nous n’avons eu qu’à nous louer de leurs services, leurs fonctions ont été souvent très pénibles; ils ont montré beaucoup d’activité et ils ont, comme les membres de l’Assemblée nationale, partagé les dangers qui l’ont plus d’une fois menacée. Puisque vous donnez une gratification de 600 à 1,000 livres à des commis qui ont un traitement égal à celui des huissiers, je crois qu’on peutbien en donner autant aux huissiers : ceux-ci, d’ailleurs, sont obligés de se donner un habit décent qui leur occasionne des dépenses. En conséquence, je propose par amendement qu’il soit accordé aux huissiers : 1» un certificat signé du Président constatant la satisfaction de l’Assemblée pour la manière avec laquelle ils ont rempli leurs fonctions auprès du corps constituant; 2° une gratification de 600 livres pour chacun d’eux. {Applaudissements.) Un grand nombre de membres : Aux voix ! aux voixl (L’amendement de M. Buzot est mis aux voix et adopté à l’unanimité.) M. Regnaud {de Saint-Jean-d* Angèly). Je