SÉANCE DU 30 THERMIDOR AN II (17 AOÛT 1794) - N° 36 247 sont assez connues pour que la nation en tire sa juste vengeance. Je réitère la proposition que j’ai déjà faite à la Convention nationnalle tendante à ce qu’il soit établis des maisons de convalécence dans chaque commune où il y a des hôpitaux de troisième et dernière ligne, où le traitemant des maladies doit être terminé; car il est indigne de voir renvoyer nos frères d’armes à leurs bataillons avant qu’ils soient entièrement rétablis : 15 jours au plus suffiront par le moyen que je propose, et sans doute la République ne tient pas tent aux frais qu’au salut de ses fidelles deffenseurs. Je propose aussi qu’il soit nommé par la Convention nationnalle des citoyens inspecteurs, républicains inflexibles et entendus, dévoués entièrement au salut de la République, pour surveiller les administrations des hôpitaux; lesquels seroient tenus d’aviser aux moyens que la circonstance du service leur suggérera. Dans le cas où l’on vous diroit que l’on peut se dispenser d’envoyer des citoyens inspecteurs, puisque dans chaque chef-lieu de départemant il y a un comité de surveillance pour cet effet, j’objecterais à cela que, tant que les intriguans y auront accès, le bien ne se faira jamais. A Perpignan, par example où il y en a un à qui j’ai adressé deux mémoires, par l’organe de son présidant, relatifs aux voitures qui servent à transférer les malades; vu la grande consommation de la paille j’avais présumé que c’était pour lui un puissant moyen de deffance pour se soustraire à les observer. En concéquance, je proposois que l’on substituât à son défaut des feuillages que la mer jette sur ses parages. Cet expédiant étoit d’autant plus aventageux qu’il n’en coûtoit que la peine de l’aller chercher, et certainement l’on en eût trouvé assez pour garnir toutes les voitures de cette armée. Eh bien ils ont fait pis : il ne les ont point écoutés, et les voitures étoient dans le même état lors de mon départ, un mois et demi après que je lui ai fait part de ce projet, l’exécution duquel ne put être éludée sans que la santé de nos braves déffenseurs soit compromise. Dans ce même comité il n’y a que les officiers suppérieurs qui peuvent parler, et les en-sous-ordre, dans qui gît plus constament le mérite, la bonne foy et le désir de bien faire, ils ne peuvent rien. Jugez de l’effet de ces distinctions : l’examen qui devoit se faire d’apprès la promulgation de la loi à l’égard des chirurgiens de tout grade, n’a pas encore eu son effet dans l’armée des Pirénées orrientalles et peut-être aussi dans les autres. Cependant cet une oppération des plus importantes à faire et des plus urgentes. J’ignore la cause de cette négligeance mais je sçai bien par exemple que, quelque motif que l’on puisse alléguer pour excuse, l’on ne pourra jamais me dissuader de soupsonner que cet l’inssoussiance la plus criminelle qui en est la cause. Une oppération non moins concéquante à faire, cet de remplacer les infirmiers par des femmes, exepté dans les hôpitaux où elles seroient exposées à voir les maladies oncteuses, et les avend-postes à la suite des armées où il est indispensable qu’il y ait des hommes, mais de ceux d’entre eux qui seront reconnus dignes d’occuper ces places. Le plus grand nombre sont des malheureux qui ont eu la cruauté de laisser nos frères d’armes périr dans la misère, et leur laissent passer des nuits et des jours entiers sans leur faire prendre les boissons appropriées à leurs maladies. Bien souvant aussi j’ai trouvé de la confusion dans la distribution des remèdes; je ne sçai par example si cet de leur faute ou de celle des apoticaires. Nos pauvres frères d’armes, ne pouvant articuler la parole pour se plaindre, ils succombent forcément à la maladie. N’oubliez pas non plus les bigotes qui, pouf l’amour de dieu, les assassinent plus lestement encore. Les femmes rempliront plutôt le devoir sacré que l’humanité nous impose en pareil cas. Eh quelles sont celles qui se refuseront à secourir leurs frères, leur enfant par un avis invitatif? Aucune, car elles sont très rares celles qui n’en ont pas à la frontière. Au reste, il faudroit être entropophage pour s’y soustraire. Toutes les choses étant mises dans un équilibre parfait, naturel, les calculs incendières de nos ennemis, l’esprit de parti n’aura plus de prise. Alors la patrie n’aura plus le mal au cœur de voir maltraiter ses enfans, et, en remplissant cette tâche honnorable, nous serons sauvéz avec elle. Je crois vous avoir assez dit et j’espère que votre sagesse subviendra à tout, et la République et ses fidelles défenseurs doivent attendre de vous tout le bien, fidelles montagnards, bienfaiteurs de l’humanité. Lavalette ( chirurgien dans les armées de la République). Renvoyé au comité de la guerre (1). J [Frotié père, ex-présid. de la 13e sectn de Versailles, à la Conv.; s.d .] (2) Citoyens législateurs, Voilà 2 ans entière que je suit vexé, opprimé, 2 fois incarcéréz, désarmé, destituée arbitrairement de lieutenans de la garde nationale par l’effet d’une intrigue de quelques habitans de Versaille. Vingt fois depuit cette époque j’ay parut à votre barre pour demandé justice. Vous renvoyâte mais pétition au comité de sûreté général afin qu’il en soit fait un raport. Il n’a pas été fait. J’ay remi au citoyen Moyse Bayle toute les pièce, tans de mais calomniateurs, que ceûx qui justifit de mon innocense et de mon civisme. Rien ne ce décide ni pour ni contre moi. Représantans, cepandans mais calomniateurs ont encore le jour d’hier voulu me perdre, et je ne sçait pas trop si je n’auroient pas été écrassé par une coorte que mais ennemis pro-menoient dans les rues, si jussent été à ma porte, en me taxans d’avoir été de la cabale de l’infâme Robespierre. Je n’ai jamais parlé à ce traître. Hier soir j’ay remie une lettre au citoyen Moyse Bayle où sont ses détaille. (1) Mention marginale du 30 therm. signée Collombel. (2) C 316, pl. 1269, p. 45. 248 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Législateurs, les criminel fuit des tribuneaux pour ce soustraire à la justice des loix, et moi, sûrs de la justice de ma cause, je demande justice à la représentation nationale, c’est à dire qu’elle ordonne que le raport de cette affaire soit faite à la Convention nationale. Représen-tans, je suit un père de famille qui a tous sacriffier ses interrêt particulier pour la cause de la liberté. Les pièces que j’ay remi le prouveront. Un père de famille qui a deux fils volontaire à la deffence de la patrie, attand avec confience cette justice de la représentation nationale. S. et F. Frotié père ( ex-présid . de la 13e sectn de Versaille et lieut 1 de la garde nat.). Nota : Plusieur citoyen de la 13 e section de Versaille, qui étoient prisonnier au Luxembourg, on sortie hier. Il ont été solicité la municipalité de Versaille, qui son leurs amie, à me retirer mon brevet de lieutenans et ma carte de sûreté. Renvoyé au comité de sûreté générale (1). K [Martin, femme Milscent, à la Conv.; Paris, le quintidi therm. II] (2) Citoyens représentans, Le décret du 2 thermidor a ordonné à tous les fonctionnaires publics remplacés ou démis-sionaires depuis le 31 mai 1793 de sortir de Paris sous 3 jours, et de se rendre, dans le délai de 2 décades, au lieu de leur domicile. Le cytoyen Milscent mon époux a été membre du conseil général de la commune de Villemonble, district du Bourg-de-l’Egalité, département de Paris, jusqu’au 4 frimaire dernier, époque à laquelle il donna sa démission parce qu’il quittoit la commune pour aller se fixer à Paris, où se trouvoient alors, comme s’y trouvent encore aujourd’hui, tous ses moyens d’existence. Il y a, conjointement avec moi, un appartement qu’il a loué pour plusieurs années. Il a sa carte de cytoyen, celle de votant dans l’assemblée générale de sa section; il y sera imposé cette année sur le rôle de la contribution mobiliaire. En un mot, il est cytoyen de Paris, il y a son domicile et n’en a point d’autre. Cependant, dans l’incertitude si le décret du 2 thermidor le concernoit et dans la crainte d’encourir la peine rigoureuse prononcée par la loi contre ceux qui refuseroient de s’y soumettre, il a cru qu’il étoit de son intérêt, comme, de son devoir, de lui obéir toujours provisoirement. En conséquence il s’est rendu dans la commune de Villemonble, dont il avoit été notable; mais comme il me semble, cytoyens représentans, que votre intention n’a pas été, en rendant le décret du 2 thermidor, de forcer à sortir de Paris et à s’éloigner du centre de leurs affaires les cytoyens qui y étoient fixés et y avoient leur seul et véritable domicile, je demande que vous vouliez bien permettre à mon époux de revenir à Paris, où il est appellé par ses affaires, à la (1) Mention marginale du 30 therm. signée Collombel. (2) C 316, pl. 1269, p. 46. charge par lui de se retirer par devers tel comité que vous jugerez à propos de désigner pour statuer s’il est compris dans la loi du 2 thermidor. Dans cet instant heureux où l’empressement que vous apportez pour rendre justice à tous les bons cytoyens vous attire les bénédictions de toute la République, j’ose espérer que vous ne me refuserez pas la grâce que je vous demande avec la plus grande instance. Martin, femme Milscent. P. -S. J’observe, cytoyens représentans, que mon époux a besoin d’un certificat qui constate la résidence qu’il a fait à Paris depuis 9 mois, afin que, s’il ne lui étoit pas libre d’y revenir, vous veuilliez bien décréter qu’il poura le faire demander à sa section et le faire signer par un fondé de pouvoir de sa part. Martin, femme Milscent. Renvoyé au comité de sûreté générale (1). L [La femme Bernard, sectn de Bonne-Nouvelle, à la Conv.; Paris, 30 therm. II] (2) Citoyens représentans, Jean Bernard, mon mari, chauderonier, père de famille, domicilié à Paris, section de Bonne-Nouvelle, a été traduit au tribunal criminel du département. Deux assignats de 100 livres, jugés faux, qu’il avoit sur lui, ont été la cause funeste de son malheur. Mon mari pou-voit être aisément trompé. La conduite qu’il a tenu depuis la révolution, l’estime qu’il a mérité et obtenu de la part de ses frères d’armes, qui réclament sa liberté, dévoient éloigner de dessus de lui tous les soubçons. Cepandant le tribunal a prononcé qu’il de-meureroit détenu jusqu’à ce que la Convention nationale eût ordonné son élargissement. Je pourrois peut-être vous observer que ce jugement est arbitraire, qu’aucune loi ne le dictoit, que, puisque mon mari n’étoit pas convaincu, il devoit être rendu tout de suite à la liberté, à ses affaires, à sa famille. Mais je ne me plains pas d’un jugement qui me donne le droit et me met dans l’heureuse nécessité de me présenter devant les augustes législateurs de ma patrie. J’ai remis toutes les pièces qui regardent cette affaire au comité de sûreté générale. J’ai présenté deux pétitions à ce comité, j’y ai déposé l’acte par lequel la compagnie entière à laquelle mon mari étoit attaché sollicite sa liberté. Je la réclame, citoyens représentans, avec tout la confiance que vos vertus m’inspirent. Mon mari est innocent et il est nécessaire aux besoins, à l’existence d’un fils de 4 mois dont les malheurs m’affligent plus encore que les miens. La citoyenne femme Bernard. Renvoyé au comité de sûreté générale (3). (1) Mention marginale du 30 therm. signée Collombel. (2) C 316, pl. 1269, p. 47. (3) Mention marginale du 30 therm. signée Collombel. Autre mention d’une autre main : détenu à la Forsce depuis le 21 septembre.