59d i Assemblée nationale.] ARCHIVEE PARLLMEKTÂiREB. ]20 décembre i7U0.j lion de l'article 7, et les filles, en leur représentation, en seront exclues dans tous les cas. » M.Enjubauït, rapporteur. L’article 10 ayant été antérieurement décrété, je vais relire l’article 11. M. Otaries «le Lauieili. Avant de délibérer pur cet article et sur tes suivants, je crois indispensable de résoudre les trois questions que voici: Première question. Outre la rente apanagère, les apanages actuels auront-ils une indemnité? Seconde. Cette indemnité sera-t-elle égale aux revenus attachés aux apanages actuels, déduction faite de la rente apanagère ? Troisième. Quels revenus entreront dans la composition de ceux des apanages ? M. de Mirabeau. Je demande l’ajournement de cette discussion afin de vous entretenir d’une affaire urgente. (L’ajournement est prononcé.) M. de Mirabeau. Je demande la parole pour vous rendre compte des mesures provisoires que vous avez chargé les députés de la ci-devant province de Provence de vous proposer au sujet des événements arrivés à Aix. M. de Foucault. Je désirerais qu’on nous accordât, au sujet des troubles du département du Lot, la même faveur qu’aux députés de Provence. Dans le Quercy tout e-t en feu; il n’y a ni liberté ni sûreté; trente châteaux ont été brûlés. M. de Mirabeau. C’est simplement sur les mesures provisoires à prendre, dans la situation très critique où les administrateurs du département des Bouches-du-Rhône craignent que tous les moyens ne leur manquent à la fois, que, d’après les ordres de l’Assemblée nationale, nous avons eu à nous concerter. Voici le projet de décret que la députation nous a chargés de vous présenter; si on le croit nécessaire, je donnerai les motifs qui nous ont engages à les lédiger ainsi : « Ouï la lecture des lettres du président du département des Bouches-du-Rhône et de celle des corps administratifs en date du 14 de ce mois, l’Assemblée nationale décrète que le roi sera prié de taire passer à Aix et dans le département des Bouches-du-Rhône un nombre de troupes de ligne suffisant pour rétablir la tranquillité publique, et d’envoyer trois commissaires civils dans ladite ville, pour, jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné, ces commissaires civils être chargés exclusivement de la réquisition de la force publique. » Ce projet de décret a été adopté à Punanimité par la députation, sauf un seul mot, et ce mot a lui-même été agréé à une majorité de quinze contre quatre : c’est le mot exclusivement. J’ai déjà dit que nous sommes loin de préjuger la conduite des administrateurs; mais nous ne pouvons nous dissimuler que, là où il y a eu un grand désordre, les administrateurs sont parties, et que la réquisition de la force publique doit être confiée à d’autres mains. Il faut toujours suivre une marche impartiale dans un pays où les citoyens sont partialisés; il est nécessaire de donner au rétablissement de l’ordre des organes qui ne soient d’aucun parti, qui ne pariageutpas les passions qui ont excité les mouvements qu’il faut apaiser. Quand un chef d’administration, d’accord avec tous les corps administratifs, dit : Tous les moyens m’échappent, il faut que la force publique vienne à son aide. Tels sont les motifs qui nous ont déterminés. Les membres de la députation que le mot exclusivement a choqués ont pensé qu’il était constitutionnel de faire agir de concert les administrateurs et les commissaires du roi. La majorité s’est, au contraire, attachée à ce principe que, où il y a eu de grands désordres, les administrateurs sont parties. M. Démcunicr. Si les commissaires ont des dangers à courir, pourquoi ces dangers ne seraient-ils pas partagés par les corps administratifs? Pourquoi d’ailleurs détruiriez-vous la responsabilité à laquelle ces corps sont soumis? Je vais plus loin; si les corps administratifs ont fait leur devoir, ils doivent concourir à la réquisition de la force publique. Si la députation a connaissance du contraire, si les corps administratifs inspirent de la défiance, j’adopte le projet de décret; mais c’est dans ce seul cas. Que la députation s’explique donc, autrement je pense qu’il doit être amendé. M. l’abbé Maury. Vous vous occupez des moyens pruviso:res; cette malheureuse province serait anéantie si l’ordre n’était pas rétabli avant quelle ait reçu vos secours. Mais si malheureusement il n’est pas en notre pouvoir de prévenir de pareils événements, quand un grand crime a été commis, lorsque la proclamation de la loi martiale n’a pas été faite, et qu’on s’en excuse en disant qu’elle était inutile... M. «le Mirabeau. Les administraîeurs n’ont jamais dit cela. M. l’abbé Maury. La loi martiale n’a pas été proclamée; les prisons ontété forcées, et l’on n’a pas tiré un seul coup de fusil; les vielimes ont été choisies ; le peuple s’est attribué la souveraineté particulière. Dans ce département on a vu, et on a vu surtout dans l’affaire de M. Bournissa, combien on a cherché à le pénétrer d’une opinion qui ne peut tendre qu’à le dépraver. Si un général apprenait qu’un poste est forcé, il enverrait des tr;e ees; rien de plus naturel; mais que le Corps ! gislatif envoie des troupes lorsque Irois citoyens ont été massacrés, n’est-ce pas faire croire que nous comptons pour rien la mort de nos frères ? {On entend des applaudissements et des murmures. — Plusieurs personnes observent qu’il ne s’agit que d’une mesure provisoire, et que l’Assemblée, disposée à sévir, a renvoyé cette affaire au comité des recherches.) Je ne préjugé pas le fond : il tient aux personnes, et rues propositions appartiennent aux principes. L'Assemblée ne peut s’occuper des événements que j’appelle de grands crimes sans déclarer les coupables criminels de lèse-nation au premier chef. Puisque les moyens provisoires sont très lents, puisque vous ne pouvez montrer votre patriotisme que par un décret, puisque vous avez fait souvent des préambules inutiles, je demande un préambule énergique contre ces insurrections, contre ces crimes qui déshonorent la nation. {Il s'élève des murmures.) Je ne sors pas des bornes des moyens provisoire.' ; un mois s’écoulera jusqu’à ce que vous puissiez prendre des mesures définitives pour punir. Il faut cependant que le peuple sache que vous av z été pénétrés d’horreur; une prétention serait une approbation; il faut manifester que vous ne regardez [20 décembre i790,j 597 jAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. plus comme citoyens des individus qui sont descendus de ce rang à celui de bourreau. Dans un moment où plusieurs provinces sont clansl’insur-rection , pourrons-nous balancer à dire à des assassins qu’ils sont des scélérats, qu’ils sont criminels de lèse-nation, que la nation les désavoue, qu’elle gémit de ne pouvoir les livrer à la justice? Les crimes ont élé commis en présence des administrateurs, leur devoir était de périr... (La droite applaudit avec transport; et plusieurs membres crient à la gauche : Applaudissez donc!) M. Girod ( ci-devant de Chévry). Que M. l’abbé Maury s’élève aussi contre les assassins qui ont attaqué les patriotes avec des pistolets et des épées ! M. l’abbé Maury. Je n’imaginais pas qu'un grand intérêt national pût donner lieu en ce moment à une querelle personnelle. Ces formules me sont connues ; je les dédaigne, et je m’attache à la question. Je prie les personnes qui ont des avis à me donner de me les donner en particulier; je suis toujours prêt à les recevoir. (Il sélcve beaucoup de murmures.) Je crois ne heurter l’opinion de personne; j’estime assez les membres ne cette Assemblée pour me croire leur interprète quand j’exprime l’horreur que m’inspirent des crimes qui déshonorent la nalion. Je demande donc que la députation acquitte la dette de l’Assemblée nationale en manifestant cette horreur dans un préambule énergique, en manifestant notre regret de ne pouvoir à l’instant faire punir les assassins. Pourquoi, dans le projet de décret, cette énonciation vague de secours suffisants? Quelles sont les bornes de la suffisance de ces secours dans un pays entièrement en insurrection, dans un pays où le peuple, comme sur un tribunal, dévoue à la potence au gré de sa haine? Soyez persuadés que l’ordre ne se rétablira que par de grands exemples. (La partie gauche applaudit.) J’entends des exemples de justice consommes par la loi (Les applaudissements de la partie gauche redoublent), et non ces exécutions qui seraient des crimes quand bien même lu colère du peuple serait juste. Je demande donc que, sans desemparer, on rende ce décret que nous avons attendu pendant deux jours, et qui me semblait pouvoir être rédigé eu moins de temps. M. de Mirabeau. Les crimes commis à Aix sont trop grands, trop déplorables pour avoir besoin d’être exagérés. Sans doute, c'est un grand crime de verser le sang humain, mais ce n’est pas un crime de lèse-nation. Si je voulais, j’opposerais déclamations à déclamations, j’opposerais des faits attenants à des exagérations, j’indiquerais la filiation de ces événements ; mais l’Assemblée ne s’occupe que des moyens provisoires; elle a assez manifesté l’intention de faire punir les coupables en renvoyant l’examen de cette affaire aux comités des recherches et des rapports. Je ne suis donc monté à la tribune que pour relever un fait qui inculpe les administrateurs ; ils n’ont pas dit que la loi martiale était inutile. Quiconque articule ce fait se souille d’une gratine calomnie. Le défaut de publication de la loi martiale est un délit social; mais si cette publication a été impossible, les administrateurs ne sont pas coupables. Les portes des prisons ont été brisées, c’est un délit social ; mais il nYst pas vrai pour cela que les administrateurs soient coupables. Trois citoyens ont été massacrés, et, au grand danger des administrateurs, ils l’ont été devant eux ; mais pour cela les administrateurs sont-ils coupables? Ou fait aisément une phrase redondante en disant qu’ils devaient périr ; l’ont-ils pu, ces hommes qui avaient la confiance du peuple, lorsque dans ces mouvements excités par des causes qu’on connaîtra, par des agressions déjà connues, il leur a été impossible de rassembler la garde nationale et la force publique ? Ont-ils pu être immolés quand ils le voulaient? Je ne crois pas que, dans une aussi malheureuse circonstance, la chaleur, les mouvements oratoires soient dignes de notre affliction. Etait-elle nécessaire cette éloquence qu’on vous a étalée quand les faits parlaient à votre cœur9 Je ne répondrai donc à tout ce discours qu’en lisant la lettre du président du département. On verra qu’il est plus difficile de jeter de l’odieux sur une conduite irréprochable que de surprendre quelques anplaudissements. Je demande la permission d’ajouter un seul fait. Le président du département jouit de l’estime de son pays, il s’est soumis à la loi. Il est de notoriété publique qu’avant que la loi le soumît ses habitudes et ses manières étaient plus près du méridien aristocratique que du méridien démocratique. Qu’un Provençal me démente. Je vais lire la lettre adressée par le président du département au président de l’Assemblée nationale, en date du 14 décembre (1). Quant à l’épigramme faite à la députation à la fin du discours de M. l’abbé Maury, quoique nous y soyons plus sensibles, je dois dire que l'Assemblée nous ayant chargés, samedi soir, de lui présenter des mesures pr ovisoires, nous n’avons pas mis une heure à lui obéir. Hier nous demandions la parole, mais le cours de la discussion n’a pas permis de nous l’accorder. En présentant notre projet de décret nous n’avons pas voulu jeter de la défaveur sur les administrateurs. Je réponds à M. Démeunier : il nous a paru que cette disposition était nécessaire pour que, dans un pays partialisé, ils conservassent la confiance dont ils avaient besoin. Au reste, la députation adopte tout ce que l’Assemblée jugera convenable. Mais je persiste dans mou principe : quand il y a eu grand désordre, les administrateurs sont parties, et ne peuvent concourir à la réquisition de la force publique. M. Charles de Cameth. Ce n’est pas la première fois que l’Assemblée a observé une tactique assez connue. On égare le peuple pour lui donner des tort>, et pour demander qu’on ordonne des peines contraires à la liberté et à la Constitution. (On applaudit.) On égare les troupes pour faire marcher des soldats contre des soldats. (Les applaudissements recommencent.) Quand je vois l’éloquente sensibilité de M. l’abbé Maury, je m’étonne qu’il ne l’ait pas montrée lorsqu’il a été question de l’assassinat du maire de Varaise, des malheurs de Perpignan. . . M. l’abbé Maury. Je n’étais pas à l’Assemblée. M. Charles Lamctli. Je suis loin d’excuser le peuple lorsque, poussé à bout, il a commis des crimes; mais je ne sais comment les personnes qui trouvent dans leur cœur tant de reproches à lui faire... (II s'élève des murmures.) On accuse le peuple; je le défends. Si on envisage tous ces événements sous leur vrai point de vue, on re-(1) Voyez celle lettre, seauce du 18 décembre au soir . [Assemblée nationale.) 598 connaît que ce sont des affaires de postes où le peuple a toujours l’avantage. On excite le peuple pour le port1 r à des violences, et on l’accuse. On tient des assemblées armées.... A Perpignan il a eu ie courage difficile de pardonner; il a respecté l’inviolabilité de ses représentants, qui s’armaient contre lui dn caractère même dont il les avait revêtus; il a respecté les lois; il a respecté ceux de ses représentants qui étaient devenus ses ennemis : et voilà le peuple qu’on accuse ! 11 était excité, harcelé par les ministres que nous avons attaqués.. . J’invite les ennemis du peuple à faire cesser le deuil dont ils couvrent la patrie. Quant au projet de décret, je ne vois fias pourquoi envoyer tles commissaires : cVst un moyen utile qu’il no faut pas prodiguer. Les administrateurs ne sont pas suspects; la nonne cause triomphe... Je pense qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur e t objet. Je demande en amendement que le président soit chargé d’écrire une lettre de remerciement aux grenadiers du régiment de Lyonnais. M. de lliraheau. Les administrateurs sont dignes de toute la confiance des citoyens et de l’Assemblée nationale ; c’est pour eux" que nous demandons des commissaires. « Tous les moyens nous échappent » ; celui qui dit cela appelle les secours des représentants de la nation. J’ai oublié d’observer qu'il est bien étrange qu’on nous reproche de nous être conformés aux principes en ne déterminant pas le nombre des troupes que l’Assemblée priera le roi d’envoyer dans ie département des Bouches-du-Rhône. Voici le projet de décret : « L’Assemblée nationale, ouï la lecture des cinq lettres du président du département des Bouches-du-Rhône, et des corps administratifs, en date du 14 de ce mois : « Décrète que le roi sera prié de faire passer à Aix, et dans le département, un nombre suffisent de troupes de ligue pour y rétablir la tranquillité, et d’envoyer trois commissaires civile dans ladiie ville, pour, jusqu’à ce qu’au I rement soit ordonné, y être, conjointement avec trois membres, choisis dans chacun des trois corps administratifs par le directoire et le conseil municipal, chargés de la réquisition de la force publique. » (Ce projet de décret est adopté.) M. le Président lève la séance à trois heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ, EX-PRÉSIDENT. Séance du lundi 20 décembre 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. M. d’André, ex-président , en l’absence de M. Pétion, occupe ie fauteuil. Un de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes : Adresse de félicitation, adhésion et dévoue-|20 décembre 1790.] ment des administrateurs du département de la Mayenne. Arrêté des membres du directoire du district de Gex, portant qu’à compter du 1er juin 1790, Je traitement de chaque administrateur du directoire de ce district, porté, par les décrets de l’Assemblée, à 900 livres, demeure réduit et fixé à 600 livres ; que le traitement du procureur-syndic, fixé à 1,600 livres, demeure aussi réduit à 1,066 livres 13 sous. Adresse des officiers municipaux de la ville de Couches, qui, vivement affectés d’une inculpation calomnieuse qui leur a été faite de la part du département de l’Eure, d’avoir non seulement. néglige les moyens de faire percevoir les impôts indirect', mais encore d’avoir favorisé, en quelque sorte, une prétendue insurrection qui exposait les commis àêire massacrés, se justifient pleinement, et supplient l'Assemblée d’interposer son autorité pour qu’ils puissent connaître leurs délateurs. Adresse des officiers municipaux de la ville de Rhedon, qui exposent que l’installation de leurs juges de district a été faite, mais qu’ils n’ont pu voir sans inquiétude qu’ils aient différé de prononcer sur l’admission de M. Jau, maire de la commune, à la place de commissaire du roi, jusqu’après avoir reçu de nouvelles instructions de Sa Majesté. Ils font le plus grand éloge du patriotisme et du zèle éclairé de M. Jau, et sunplient avec instance l’Assemblée de permettre qu’un substitut par intérim puisse remplir les fonctions attachées à la place de commissaire du roi, jusqu’à ce que M. Jau ait acquis le temps d’exercice prescrit par les décrets. Adresse des membres composant le conseil généra! du département de l’Eure, qui, pour détruire les soupçons injurieux que les ennemis du bien public veulent jeter sur le patriotisme des administrateurs des départements, supplient l’Assemblée nationale de fixer le jour où deux députés de choque département se rendront dans la capitale, pour depuser à ses pieds l’hommage d’une adhésion absolue à ses décrets, et d’un dévouement sans bornes pour en assurer l’exécution. M. Mougins de Roquefort présente une adresse des juges du tribunal du district de Salon en Provence, dans laquelle ils déclarent qu’ils ont consacré les premiers moments de leur existence judiciaire à être les interprètes des sentiments des citoyens qui les ont honorés de leur confiance et de la reconnaissance dont ils sont eux-mêmes pénétrés pour les immortels travaux de l’Assemblée. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre de M. Jolivet, secrétaire de légation, et chargé des affaires de France près de M. l’évêque de Liège. Cette lettre, adressée à M. le président, renferme copie du serment civique dudit sieur Jolivet. L’Assemblée en ordonne l’insertion dans le procès-verbal, ainsi qu’il suit : Serment civique. Moi, Nicolas-Michel Jolivet, secrétaire de la légation de France et chargé des affaires de France près Son Altesse Msr le prince-évêque de Liège, je jure d’être fidèle à la nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout mou pouvoir la A R CH 1 VE S PA R LE A Eh TA1R ES. (I) Cette séance est incomplète au Moniteur .