SÉANCE DU 16 THERMIDOR AN II (3 AOÛT 1794) - N;b 35-36 117 Les tirans sont renversés, mais beaucoup de patriotes gémissent dans les fers : les citoyens Cohendet, Francastel, Hubert, Malenson, fonctionnaires publics, Chais, et plusieurs autres habitans de notre section, père[s] de familles, sont, depuis plus de 5 mois, détenus. La section du faubourg Montmartre, qu’un élan de patriotisme et d’humanité porte en masse à votre barre, réclame leur liberté. Après avoir examiné leurs dénonciation et leur conduite, rendés-leur la justice qu’ils ont lieu d’attendre des représentants d’un peuple libre. Les épouse[s], les enfants, et tous les citoyens de la section, pénétrés de reconnoissance, seront toujours prêts à mourir pour la défence de leur libérateur. Restés ferme à votre poste. Poursuivés votre carrière avec le même zèle, et vous serés immortels dans les fastes de l’histoire. Nous, nous serons toujours debout. Toujours nos corps seront prêts à servir de remparts à la représentation nationale, et son azile ne sera jamais violé, tant qu’il existera des hommes libres. Le bandeau de l’erreur est levé. Ceux qui tentaient à ravir la liberté de nos opinions n’existent plus. Le glaive de la loi est tombé sur leurs têtes coupables. La République est sauvée. La nation est vengée. Les fers des patriotes injustement opprimés seront rompus par votre justice. Vive la Convention ! Vive la République ! Ménagé ( présid .), Rollet (secrét. -greffier). GOUPILLEAU (de Fontenay) : En appuyant la proposition qui vous est faite, je demande à y ajouter une observation. Vous ne vous attendiez pas que les événements du 9, événements qui ont sauvé la patrie, deviendraient pour les aristocrates une occasion de comprimer le mouvement révolutionnaire. Leurs parents se sont assemblés dans les sections, et là ont déclamé, non pas contre les membres des comités révolutionnaires qui ont pu s’égarer, et que nous retrouverons bien, mais contre l’institution salutaire de ces comités. Cette fermentation a été au point de faire nommer, dans quelques sections, des commissaires chargés de recevoir les dénonciations contre les comités révolutionnaires. Le comité de sûreté générale se fera un devoir de mettre en liberté tous les citoyens dont le patriotisme et l’innocence lui seront prouvés (1). Mention honorable, insertion au bulletin, et renvoi au comité de sûreté générale. 35 La 9e compagnie de la 29e division de gendarmerie, cantonnée à Chantilly et Sen-lis (2), félicite la Convention nationale sur le grand caractère, la surveillance, l’énergie et (1) Moniteur ( réimpr.), XXI, 364; M.U. , XLII, 267; F.S.P., n“ 395; Débats, n° 682; Ann. pair., n° DLXXX; C. Eg.. n° 715; J. Sablier (du matin), n° 1 477; C. univ., n° 946; J. Perlet, n° 680. Mentionné par J. Mont., n° 96; Mess. Soir, n° 714; J. Fr.. n° 678. (2) Oise. le courage qu’elle a montrés dans les journées des 9 et 10 thermidor. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [Chantilly, 14 therm. II\ (2) Citoyens représentans Votre caranterre (sic) est toujours le même, celui de Français libre; nous vous félicitons de votre surveillance, de votre énergie, et de votre courage, dans les journées du 9 et 10. Les traîtres se sont montrés; ils ont disparus... Oui, ils disparoiteront tous, les partis qui ne sont point celui du peuple entier, celui de la patrie. Nous sommes chagrins de n’avoir put partagé cette fameuse journée, de n’avoir point pu vous démontrer que nous ne connoissons d’autre point de ralliement que la Convention nationale; que nous ne nous laissons point influencer par des hommes à réputation... Croyez, citoyens représentans, que nos cœurs sont entièrement à la patrie; que nous ne voyons et que nous n’aimons qu’elle; que ce sentiment (qui est inné dans l’âme de tous bon Français), ne nous laissera jamais tromper, eh que ce mouvement simpathique de l’amour de la patrie nous tournera toujours vers la représentation nationale, fussions-nous éloignés d’un pôle à l’autre. Vive la liberté, l’égalité ! Vive la République ! Bailly ( brigadier-fourrier ), Pincepré ( maré - chal-des-logis en chef), Francon (maré chai-deslogis), Gallet ( cap1 ), Bruchon (lie ut), Mouton, Goy, Lavoie Pierre (lieut), Renoux, Oudin, Quilard, Courbebaisse, Caron, Baiessiere, Prost (brigadier), Rigny, François jeune, Cle-risse, Garnier, Tricot, George, Berthlen, Francon (brigadier), Laroche, Navier, Bonetré (brigadier), Moiroux, M illot (maréchal-des-lo-gis), Clement, Desprez, Nicolier (brigadier), Jannot, Perard, Boursier, Girard, Cailliéz, Suppin, Delesenne, Dufouy, Jolin, Gervais (brigadier), Evrard, Gervais fils, Le Cointe, Mouquet fils, Cochet, Hamel, Derand, Vernier, Pettico, Delaise, Calandra, Fontaine, Cire, Meziere, Legros (brigadier), Vacheron (maréchal-de s-logis), Bonieace, Dély, Basset, Bry, Nicolas, Charias. 36 La section des Champs-Elysées (3) présente un défenseur équipé, et demande l’élargissement de cinq patriotes détenus; annonce qu’elle a fait arrêter divers agens de Couthon et Robespierre (4). La section des Champs-Elysées vient aussi réclamer la liberté de plusieurs citoyens arrêtés par les suggestions perfides d’un valet de Robespierre, le traître Lubin, ex-substitut de l’agent national de la commune. (1) P. V., XLIII. 11. (2) C 314, pl. 1 259, p. 56. (3) A Paris. (4) P.-V.. XLIII, 11. SÉANCE DU 16 THERMIDOR AN II (3 AOÛT 1794) - N;b 35-36 117 Les tirans sont renversés, mais beaucoup de patriotes gémissent dans les fers : les citoyens Cohendet, Francastel, Hubert, Malenson, fonctionnaires publics, Chais, et plusieurs autres habitans de notre section, père[s] de familles, sont, depuis plus de 5 mois, détenus. La section du faubourg Montmartre, qu’un élan de patriotisme et d’humanité porte en masse à votre barre, réclame leur liberté. Après avoir examiné leurs dénonciation et leur conduite, rendés-leur la justice qu’ils ont lieu d’attendre des représentants d’un peuple libre. Les épouse[s], les enfants, et tous les citoyens de la section, pénétrés de reconnoissance, seront toujours prêts à mourir pour la défence de leur libérateur. Restés ferme à votre poste. Poursuivés votre carrière avec le même zèle, et vous serés immortels dans les fastes de l’histoire. Nous, nous serons toujours debout. Toujours nos corps seront prêts à servir de remparts à la représentation nationale, et son azile ne sera jamais violé, tant qu’il existera des hommes libres. Le bandeau de l’erreur est levé. Ceux qui tentaient à ravir la liberté de nos opinions n’existent plus. Le glaive de la loi est tombé sur leurs têtes coupables. La République est sauvée. La nation est vengée. Les fers des patriotes injustement opprimés seront rompus par votre justice. Vive la Convention ! Vive la République ! Ménagé ( présid .), Rollet (secrét. -greffier). GOUPILLEAU (de Fontenay) : En appuyant la proposition qui vous est faite, je demande à y ajouter une observation. Vous ne vous attendiez pas que les événements du 9, événements qui ont sauvé la patrie, deviendraient pour les aristocrates une occasion de comprimer le mouvement révolutionnaire. Leurs parents se sont assemblés dans les sections, et là ont déclamé, non pas contre les membres des comités révolutionnaires qui ont pu s’égarer, et que nous retrouverons bien, mais contre l’institution salutaire de ces comités. Cette fermentation a été au point de faire nommer, dans quelques sections, des commissaires chargés de recevoir les dénonciations contre les comités révolutionnaires. Le comité de sûreté générale se fera un devoir de mettre en liberté tous les citoyens dont le patriotisme et l’innocence lui seront prouvés (1). Mention honorable, insertion au bulletin, et renvoi au comité de sûreté générale. 35 La 9e compagnie de la 29e division de gendarmerie, cantonnée à Chantilly et Sen-lis (2), félicite la Convention nationale sur le grand caractère, la surveillance, l’énergie et (1) Moniteur ( réimpr.), XXI, 364; M.U. , XLII, 267; F.S.P., n“ 395; Débats, n° 682; Ann. pair., n° DLXXX; C. Eg.. n° 715; J. Sablier (du matin), n° 1 477; C. univ., n° 946; J. Perlet, n° 680. Mentionné par J. Mont., n° 96; Mess. Soir, n° 714; J. Fr.. n° 678. (2) Oise. le courage qu’elle a montrés dans les journées des 9 et 10 thermidor. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [Chantilly, 14 therm. II\ (2) Citoyens représentans Votre caranterre (sic) est toujours le même, celui de Français libre; nous vous félicitons de votre surveillance, de votre énergie, et de votre courage, dans les journées du 9 et 10. Les traîtres se sont montrés; ils ont disparus... Oui, ils disparoiteront tous, les partis qui ne sont point celui du peuple entier, celui de la patrie. Nous sommes chagrins de n’avoir put partagé cette fameuse journée, de n’avoir point pu vous démontrer que nous ne connoissons d’autre point de ralliement que la Convention nationale; que nous ne nous laissons point influencer par des hommes à réputation... Croyez, citoyens représentans, que nos cœurs sont entièrement à la patrie; que nous ne voyons et que nous n’aimons qu’elle; que ce sentiment (qui est inné dans l’âme de tous bon Français), ne nous laissera jamais tromper, eh que ce mouvement simpathique de l’amour de la patrie nous tournera toujours vers la représentation nationale, fussions-nous éloignés d’un pôle à l’autre. Vive la liberté, l’égalité ! Vive la République ! Bailly ( brigadier-fourrier ), Pincepré ( maré - chal-des-logis en chef), Francon (maré chai-deslogis), Gallet ( cap1 ), Bruchon (lie ut), Mouton, Goy, Lavoie Pierre (lieut), Renoux, Oudin, Quilard, Courbebaisse, Caron, Baiessiere, Prost (brigadier), Rigny, François jeune, Cle-risse, Garnier, Tricot, George, Berthlen, Francon (brigadier), Laroche, Navier, Bonetré (brigadier), Moiroux, M illot (maréchal-des-lo-gis), Clement, Desprez, Nicolier (brigadier), Jannot, Perard, Boursier, Girard, Cailliéz, Suppin, Delesenne, Dufouy, Jolin, Gervais (brigadier), Evrard, Gervais fils, Le Cointe, Mouquet fils, Cochet, Hamel, Derand, Vernier, Pettico, Delaise, Calandra, Fontaine, Cire, Meziere, Legros (brigadier), Vacheron (maréchal-de s-logis), Bonieace, Dély, Basset, Bry, Nicolas, Charias. 36 La section des Champs-Elysées (3) présente un défenseur équipé, et demande l’élargissement de cinq patriotes détenus; annonce qu’elle a fait arrêter divers agens de Couthon et Robespierre (4). La section des Champs-Elysées vient aussi réclamer la liberté de plusieurs citoyens arrêtés par les suggestions perfides d’un valet de Robespierre, le traître Lubin, ex-substitut de l’agent national de la commune. (1) P. V., XLIII. 11. (2) C 314, pl. 1 259, p. 56. (3) A Paris. (4) P.-V.. XLIII, 11. 118 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [ Vifs applaudissements ] MERLIN (de Thionville) : Je demande le renvoi au comité de sûreté générale, et je saisis cette occasion pour ajouter à ce qu’a dit mon collègue, que le comité ne cesse d’examiner toutes les affaires de ce genre, pour tenir les aristocrates sous une verge de fer, et rendre la liberté aux patriotes. (On applaudit). (1). Mention honorable, insertion au bulletin, et renvoi au comité de sûreté générale. 37 Un membre [BARÈRE], au nom du comité de salut public, fait un rapport sur l’organisation de la garde nationale parisienne (2). [Applaudissements] BARÈRE : Citoyens, il y a six jours que j’annonçai à la tribune, au nom des deux comités de sûreté générale et de salut public, qu’ils allaient se réunir pour rompre les fers de tous les patriotes opprimés et de tous les bons citoyens que l’abus de l’autorité ou des passions particulières avaient entassés dans les maisons d’arrêt. A cette époque, un orage politique, survenu dans le sein de l’Assemblée, a tourné tous les regards et consumé notre temps et nos efforts pour nous délivrer d’une trop longue tyrannie. Aujourd’hui que la justice est vraiment à l’ordre du jour par le fait, et non par les maximes; aujourd’hui que vous voulez lui donner une application bienfaisante, et autant pour la patrie que pour le citoyen, nous nous occupons de cet objet important, qui tient de si près à la liberté civile et politique. Déjà les réclamations les plus évidentes, les demandes les plus urgentes ont été entendues, et plusieurs citoyens profitent du bienfait de cette heureuse révolution. Je suis chargé de vous annoncer que les deux comités se réunissent constamment dans l’objet de faire cesser la détention des patriotes, des bons citoyens, de ceux que de vraies passions personnelles, et non l’intérêt de la république, ont fait arrêter; de ceux que des haines particulières et des vengeances hideuses ont poursuivis à la place des lois. Nous allons ramener à exécution le décret des suspects, en proscrivant toutes les extensions odieuses et injustes, impunément pratiquées par des intrigues, par des moyens contre-révolutionnaires et des mesures impolitiques; nous allons enfin suivre les intentions de la Convention nationale, en conciliant la morale et la politique, en exécutant les lois révolutionnaires avec justice, et sans (1) Moniteur ( réimpr.), XXI, 364; J. Perlet, n° 680 (d’après cette gazette, la section aurait réclamé « le juge de paix Lameinière, Julien et quelques autres »); Débats , n° 682; J. Sablier (du matin), n° 1 477; M.U. , XLII, 267; J. S. -Culottes, n° 536; Ann. patr., n° DLXXX; C. Eg., n° 715; F.S.P., n° 395; J. Fr., n° 678; C. univ., n° 946. (2) P.-V., XLIII, 11. Décret n° 10 220. Rapporteur: Bo. oublier que cette équité nationale ne cesse pas d’être justice, quoiqu’elle soit placée entre le salut de la patrie et les crimes de ses ardents ennemis. Cette disposition de travail de vos comités aura sans doute votre approbation au moment où vous allez rédiger avec plus de précision les lois du tribunal révolutionnaire, des lois terribles, mais positives, mais claires; distinctes avec raison, et terribles avec justice. Aucun membre de la Convention ne veut sans doute faire grâce ni transiger avec l’aristocratie vindicative et rebelle; [Non, non, s’écrie-t-on ] mais nous désirons tous que les crimes de lèse-patrie, que les délits contre-révolutionnaires soient punis; si quelques citoyens coupables ou vraiment suspects à la République inspirent de l’intérêt ou de la pitié, si des familles malheureuses excitent les sentiments généreux de l’homme, que le citoyen se souvienne qu’il est aussi une patrie qui demande à ne pas être déchirée, et qu’il est une famille générale qui doit inspirer un grand intérêt; que le législateur n’oublie pas qu’il est chargé de faire et d’achever une révolution; qu’il ne perde pas de vue que le modérantisme est aux aguets à la porte de cette assemblée, et que le spectre horrible de l’aristocratie peut reparaître pour chercher à effrayer la liberté. Que les ennemis reconnus de la République n’espèrent pas des succès; cette révolution est tout entière pour la liberté; on ne renverse pas un tyran nouveau pour soutenir les amis de l’ancienne tyrannie. [Applaudissements], Ce ne sont pas les institutions révolutionnaires qui sont erronées, ou vindicatives, ou coupables; ce sont les individus, ce sont les instruments dont il faut surveiller les opérations et les mouvements; les bons patriotes parlent avec une sagesse éclairée contre les abus de pouvoir; mais les aristocrates parlent avec une chaleur furieuse contre les institutions. Les patriotes veulent faire cesser les injustices, mais les contre-révolutionnaires veulent briser les instruments du pouvoir national. Accordez à l’aristocratie la destruction d’une institution républicaine, demain ils demanderont la suppression du mot République; vous êtes forts, vous êtes sages; le peuple vous doit son salut dans cette dernière crise; ne perdez pas de vue le peuple et sa reconnaissance pour avoir frappé ses ennemis. [Applaudissements ] Je passe à un objet urgent pour la force publique de Paris et pour l’organisation de la 17e division militaire. Vous avez sagement décrété que le commandement de la force publique de Paris serait séparé de la 17e division militaire; nous venons vous proposer trois officiers pour la commander; nous avons pensé qu’il était digne de la Convention de placer dans ce commandement un vieux et brave militaire, couvert de blessures honorables dans plusieurs actions, et deux citoyens déjà employés dans la garde nationale de Paris, et qui se sont distingués par leur activité et leur dévouement à la représentation nationale dans la nuit du 9 au 10.