414 (Assemblé® nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (30 août 1790.] dernier, a eu l’honneur de vous adresser un acte contenant les expressions sincères de son respect, de son adhésion et de sa soumission à la Constitution acceptée par le roi, et aux décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par Sa Majesté. Ce régiment vous suppliait, Monsieur le Président, de vouloir bien mettre cet acte sous les yeux des représentants de la nation, comme un hommage qu’il était empressé d’offrir à l’Assemblée nationale, et comme un témoignage authentique de son patriotisme et de son respect pour les lois. Nous craignons que par une erreur de la poste, ou que parmi un grand nombre d’adhésions respectueuses qui vous parviennent, la nôtre n’ait été égarée, et nous avons l’honneur de vous en adresser un duplicata , en vous suppliant, pour notre gloire, d’en faire donner lecture à l’Assemblée nationale. « Nous avons accueilli avec transport, Monsieur le Président, les décrets du 6 août, sanctionnés par le roi, et ayant pour objet la discipline dans les corps de troupes réglées. Le régiment du commissaire général est glorieux d’y retrouver ses devoirs énoncés par les expressions de ses plus chers sentiments, le respect pour les lois, la fidélité à ses devoirs et l’obéis-saDce absolue aux ordres du roi, chef suprême de l’armée : daignez en offrir le témoignage respectueux à l’Assemblée nationale. Nous sommes avec respect, Monsieur le Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs. Les officiers, sous-of liciers, brigadiers et cavaliers du régiment du commissaire général, signé : La Liberté, premier appointé; Lafleur, premier brigadier; Romary, premier maréchal des logis; Febur, premier maréchal des logis chef; Dubuisson, brigadier fédéré; Joseph, brigadier fédéré ; Poitou, maréchal des logis fédéré ; Marés, officier député à la fédération ; Puloleau, premier adjudant ; Gaumont, premier porte-étendard ; Charbuy-Moismont, sous-lieutenant quartier-maître; Lejai, premier lieutenant; Louis de Ghamoy, capitaine ; DeÜers, commandant d’escadron ; Béru, major; de Ghamoy, colonel. » M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur les traitements à fixer pour les juges , les commissaires du roi, les greffiers , les administrateurs de département et de district et leurs secrétaires. M. Thouret, rapporteur . Je vais vous entretenir du traitement des officiers de justice et des administrateurs. 11 est bien essentiel, dans une pareille opération, de ne pas se laisser guider par un esprit de parcimonie, qui, en diminuant en peu de choses les charges de la nation, pourrait lui faire perdre tout le fruit de la bonne institution de la justice actuelle. Le comité avait pensé que le traitement des juges et celui des administrateurs ne devaient pas être égaux, parce que le juge est tenu à plus de travail, à plus d’assiduité, parce qu’entin il serait plus dangereux, pour la chose publique que le juge fût gêné dans ses moyens de subsistance; que la mesure du traitement et du juge et des administrateurs ne devait pas être la meme pour tous les cantons et toutes les villes; en conséquence, le comité avait cru devoir les diviser en quatre classes: la première, des villes et cantons au-dessous de vingt mille âmes; la seconde, de ceux depuis vingt mille âmes jusqu’à soixante mille; la troisième, de ceux au-dessus de soixante mille; enfin il avait cru devoir mettre la ville de Paris dans une classe particulière, et avait pensé qu’il était convenable qu’une partie du traitement, tant des juges quedes administrateurs, fût établie en droit d'assistance, pour forcer par ce moyen les uns et les autres à une assiduité indispensable pour le bon exercice de l’objet de leurs fonctions. Le résultat du calcul, fait par le comité, des frais de justice et de ceux d’administration portait les premiers à onze millions, et les seconds à huit millions. Le total de ces frais paraîtra peut-être considérable à quelques personnes; mais c’est une vérité d’expérience que, dans les gouvernements libres, l’administration est beaucoup plus chère que dans les gouvernements despotiques, qui n’ont besoin que de très peu d’argent. Et d’ailleurs il y aura, dans le fait, une grande économie dans la gestion qui aura lieu dans le nouvel ordre de choses, comparée avec les abus et les déprédations de l’ancien. Je vais vous faire lecture de l’article premier. Justices de paix. Art. 1”. Le traitement sera dans les cantons et dans les villes au-dessous de vingt mille âmes, savoir : Pour le juge de paix, 600 livres. Pour le greffier, indépendamment du produit des expéditions, suivant le tarif modéré qui en sera fait, 200 livres. Dans les villes, depuis vingt mille âmes jusqu’à soixante mille : Pour le juge de paix, 900 livres. Pour le greffier, indépendamment du produit des expéditions, 300 livres. Dans les villes au-dessus de soixante mille âmes : Pour le juge de paix, 1,200 livres. Pour le greffier, indépendamment du produit des expéditions, 500 livres. A Paris, pour le juge de paix, de 2,400 livres, et pour le greffier 800 livres. M. Delley d’Agier. Je demande par amendement qu'il ne soit adjugé que 300 livres aux juges de canton, et 800 livres à ceux des villes dont la population sera de plus de 10,000 âmes. M. d’André. Avant d’émettre mon opinion, je demanderai à M. le rapporteur s’il a entendu donner aux juges de paix de quoi les payer de tout leur temps, ou bien s’il ne fait que leur accorder une simple indemnité ? M. Thouret. L’augmentation des fonctions du juge de paix nous a obligés à augmenter son traitement. Le comité, chargé de l’organisation de la police, doit encore lui attribuer des fonctions dans cette partie ; et comme la plus grande difficulté de ce plan consiste dans la rareté des sujets, le comité n’a rien négligé pour écarter ce qui serait capable d’arrêter les bons citoyens. M. d’André. D’après cette réponse, je demande la question préalable sur l’amendement de M. Delley d’Agier. M. Martineau. Il faut examiner ce plan dans son ensemble, afin d’apercevoir le fardeau dont on va charger la nation. En calculant ce que rapportaient à l’Etat les anciennes charges de [Assemblé* national*.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {30 août 1790.) magistrature avec ce qu’elles vont coûter aujourd’hui, on reconnaît facilement que cela fait une surcharge de 50 millions. Je ne sais pas pourquoi on nous propose de fixer un traitement aux greffiers, ils doivent être salariés sur leur travail et non autrement. Je demande la question préalable sur la partie de décret qui les concerne. M. Thouret. Il paraît que le préopinant voudrait que tous les citoyens exerçassent gratuitement les fonctions publiques. Je lui demande pourquoi il n’a pas annoncé ce principe lors de la constitution du clergé. Il est de fait qu’on serait plus grevé de l’obligation de payer une expédition que d’un taux quelconque réparti sur chaque individu. L’amendement de M. Delley d’Agier est rejeté, et l’article 1er du comité est adopté. La disposition relative à la ville de Paris est ajournée jusqu’à l’époque où il sera pris un parti définitif sur les fonctions des commissaires de police. M. Thonret, rapporteur , passe à l’article suivant : tribunaux de districts. • Art. 2. Le traitement sera dans les villes au-dessous de vingt mille âmes : Pour chaque juge et pour le commissaire du roi, 1,800 livres. Au greffier, indépendamment du produit des expéditions, 1,000 livres. Dans les villes, depuis vingt mille jusqu’à soixante mille âmes, pour chaque juge et commissaire du roi, 2,400 livres. Pour le greffier, 1,200 livres. Dans les villes au-dessus de soixante mille âmes, pour chaque juge et pour le commissaire du roi, 3,000 livres. Pour le greffier, 1,500 livres. A Paris, pour chaque juge et pour le commissaire du roi, 4,000 livres. Et pour le greffier, 2,400 livres. M. Brostaret. Il sera indispensable que l’Assemblée s’occupe aussi du traitement ou de l’indemnité des électeurs. Les commissaires avaient envoyé à ce sujet une adresse à l’Assemblée. Ils m’ont chargé de présenter leur vœu ; quant à ce qui regarde les juges de district, je crois qu’il serait suffisant de fixer leur traitement à 1 ,200 livres. M. de Folleville. Les juges n’auront pas plus d’occupations, et ne seront pas obligés d’être plus instruits que les juges de paix. Je propose qu’ils soient réduits à 800 livres. M. Buiot. Il faut, dans cette question, comme dans toute autre, réfléchir sur les passions et sur l’intérêt dont il est difficile de se séparer. Je pense que le traitement des juges ne doit pas être fixé à moins de 1,500 livres. M. Chabroud. Dans mon opinion particulière, je ne me serais pas borné au traitement proposé par le comité. Dans toute espèce de travail, on a à très bas prix de mauvais ouvriers. Vous avez voulu donner au peuple un ordre judiciaire duquel résulte l’administration d’une justice bonne et impartiale. Pour déterminer les citoyens à l’étude des lois, il faut leur donner une perspective qui ait au moins l’effet de les attirer. En déterminant le salaire des curés, vous n’avez pas cru qu’il fût possible de leur donner moins de 1,200 livres, indépendamment du logement et du jardin. Il faut à un juge autant de moyens de subsistance qu’à un curé. Ajoutez à cela que, du moins jusqu’à présent, le curé est sans famille. Si vous n’adoptez pa3 le plan du comité, si vous ne donnez pas aux juges un traitement honnête, vous vous exposerez à n’avoir que des gens riches, d’anciens magistrats, déjà intéressés à renverser votre Constitution. M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély). Nous ne voulons point de ces juges qui ne savent qu’aller à l’audience et en sortir : il nous faut des hommes éclairés. Le nombre des juges anciens était si grand qu’il était bien difficile de corrompre un tribunal entier; mais aujourd’hui trois juges décideront l’affaire la plus importante: si on leur offrait, pour une seule affaire, le prix du travail de toute leur vie, la tentation pourrait être bien grande : ce sont de pareils inconvénients qu’il faut éviter. M. Démeunier. Trois considérations ont frappé votre comité. D’abord cette fixation réglementaire pourra être réduite par les législatures à venir. Comme la répartition des districts est inexacte et trop considérable, en les chargeant de salarier leurs juges cela pourrait amener successivement à une diminution du nombre des districts. La troisième considération est le calcul des fonctions que vous attribuez aux juges : si vous leur ôtez la connaissance des affaires criminelles, vous leur donnerez l’appel, ce qui compense bien le temps qu’elles auraient employé. M. Mouglns. Un militaire se croit bien récompensé avec 300 livres, parce qu’il est stimulé par l’amour de la patrie ; je croîs que le même motif doit animer les juges. M. Thouret. L’avis du comité est la conséquence de deux maximes constitutionnelles : par la première, vous avez restitué les droits naturels et civils des citoyens, en les appelant à toutes les fonctions; il ne faut pas laisser ce principe excellent dans les termes d’une simple théorie ; il ne faut pas qu’il ne soit qu’une vaine maxime, et qu’au lieu du mérite vous n’appeliez que la richesse. Vous avez décrété que les juges seraient amovibles ; ce principe est aussi excellent: mais vous n’avez peut-être pas médité quels obstacles il apportait à ce que les bons citoyens acceptassent les places déjugés. Le seul remède est de leur assigner une honnête aisance; voilà deux maximes dont vous devez soutenir l’effet: sans cela vous compromettriez tout l’ordre judiciaire ; on attribuerait les mauvais effets de la pratique à la mauvaise combinaison des principes. Je pense donc que l’avis du comité doit être adopté. (La discussion est fermée.) M. de Montcalm-Gozon. Je demande qu’on donne aux districts et aux départements le pouvoir de payer les juges selon les localités et leurs facultés. M. de Menou. Il n’y a que ceux qui veulent renverser la Constitution qui refusent le traitement proposé par le comité. Si l’on veut de bons juges, il faut les payer assez pour qu’ils ne paissent ni piller ni voler . Quoique le nouveau projet