264 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE N° 2. ArrÊtÉ. Les représentons du peuple d’après la loi du 5ème jour des sans-culottides et vu le le péril imminent des circonstances, n’ayant dans ce moment ni tribunal militaire ni tribunal criminel d’organisé, ont cru qu’il fallait absolument un exemple pour arrêter les progrès d’une conspiration qui menace toute la République. Ils ont en conséquence formé provisoirement une commission militaire composée de cinq membres pris dans les différens bataillons de la garnison pour juger de suite les principaux auteurs de l’attroupement, actuellement détenus au fort Nicolas. A Marseille, le cinq vendémiaire, neuf heures du soir, l’an troisième de la République française une et indivisible. Le présent procès-verbal a été clos par nous représentans du Peuple dans le département des Bouches-du-Rhône. Auguis, Serres. [Le comité révolutionnaire de Marseille aux comités de Sûreté générale et de Salut public, de Marseille, le 7 vendémiaire an II] (119) Guerre à tous les traîtres Représentants, il est de notre devoir de vous instruire des troubles qui ont agité notre commune dans la journée du 5 du courant; elle fut des plus orageuses ; mais le rassemblement des malveillants et l’émeute contre la représentation nationale ne se développèrent avec plus d’audace que dans l’après-midi ; et enfin, grâces aux mesures vigoureuse qui furent prises avec les représentants, de concert avec les autorités constituées et le commandant de la place, le bon ordre et la tranquillité furent entièrement rétablis, et le soir, à huit heures, il n’existait plus de rassemblement. Nous faisons les recherches les plus scrupuleuse pour connaître les auteurs et moteurs de cette rébellion liberticide; nous avons déjà recueilli quelques renseignements, que nous vous ferons passer quand ils seront mieux constatés. Vous recevrez aussi sous peu de jours l’extrait des procès-verbaux des délibérations que nous avons prises depuis notre installation. Vous y verrez notre soumission aux lois de la Convention nationale, notre attachement à la représentation, et notre dévouement à servir la chose publique; elle vient d’être encore à deux doigts de sa perte dans cette commune ; l’on tramait la destruction du gouvernement révolutionnaire ; mais la sagesse et la vigilance des représentants, les mesures prises par les autorités constituées de concert avec eux, l’activité du commandement de la place, qui nous a on ne peut pas mieux secondés dans toutes les précautions qu’exigeait la circonstance, ont déjoué les projets des malveillants. Nous sommes enfin parvenus à leur arracher le masque de patriotisme à la faveur duquel ils insultaient à la représentation nationale, ils égaraient le peuple sur ses véri-(119) C 321, pl. 1338, p. 8. Bull., 12 vend, (suppl.). tables principes, et l’avilissaient pour parvenir plus sûrement à la contre-révolution qu’ils tramaient, et qu’ils eussent sans doute opérée si l’oeil de la surveillance n’eût pas été ouvert sur leurs intentions perfides. Qu’ils tremblent les traîtres ! la justice nationale va les poursuivre, et le glaive de la loi nous vengera des coupables. Salut et fraternité. Signé les membres du comité de surveillance (suivent les signatures). TREILHARD : Ces pièces en disent plus que je ne pourrais faire; je n’ajoute aucune réflexion. Ce ne sont pas des discours que la nation attend de nous dans ces moments critiques, mais des mesures dont la vigueur et la sagesse garantissent les succès (120). Le rapporteur termine ainsi : ces pièces en disent plus que je ne pourrois faire. Je n’ajoute aucune réflexion : ce ne sont pas des discours que la nation attend de nous dans ces momens critiques, mais des mesures dont la vigueur et la sagesse garantissent les succès : il propose un projet de décret qui est adopté en ces termes : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités, réunis, de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, décrète ce qui suit : Article premier. - La Convention approuve les mesures prises par les représentans du peuple dans le département des Bouches-du-Rhône, la création de la commission militaire formée par leur arrêté du 5 de ce mois, et la nomination des membres qui la composent. Art. II. - Le comité de Salut public est chargé de faire porter à Marseille des forces suffisantes. Art. III. - Les gendarmes qui étoient à Marseille sont licenciés; les représentans du peuple feront arrêter, traduire à la commission militaire et juger tous ceux qui ont pris part à la rébellion : ils donneront des renseignemens sur ceux qui ont bien rempli leur devoir, afin qu’il soit pourvu à leur remplacement. Art. IV. - Les représentans du peuple sont aussi chargés de prendre toutes les mesures nécessaires contre ceux des canonniers qui n’ont pas rempli leur devoir. Art. V. - La Convention déclare qu’elle est satisfaite de la conduite du général Vil-lemalet, et que le premier bataillon des Gravilliers, le quatrième de l’Ardèche, celui d’Apt, le troisième de Vaucluse, celui de Nyons, le huitième des Bouches-du-Rhône, et le dépôt du premier régiment d’hussards ont bien mérité de la patrie. Art. VI. - Le présent décret sera inséré au bulletin; et porté à Marseille par un courrier extraordinaire (121). (120) Moniteur, XXII, 148; Débats, n° 743, 211-214. (121) P.-V., XLVI, 251-253. C 320, pl. 1330, p. 27, minute de la main de Treilhard, rapporteur. Bull., 12 vend, (suppl.); SÉANCE DU 12 VENDÉMIAIRE AN III (3 OCTOBRE 1794) - N° 49 265 [Le général divisionnaire Villemalet, commandant la seconde division de la côte et place de Marseille, en état de siège, fait passer à la Convention nationale quelques exemplaires des proclamations qu’il a cru devoir faire pour faire rentrer dans l’ordre les agitateurs qui se trouvent dans cette commune ; espère qu’avant peu le calme sera rétabli.] (122) 49 Le président annonce qu’une lettre postérieure à celle qu’on vient de lire, va être lue; elle contient des détails satisfaisans sur la situation actuelle de Marseille. Les continuateurs de Robespierre, ces dominateurs forcenés ne sont plus; Marseille est délivrée du joug odieux des aristocrates et des scélérats ; elle a encore dans son sein ces hommes du 10 août qui, en majorité, n’ont point renversé le trône pour laisser la tyrannie dans les mains impures de quelques êtres souillés de crimes. La Convention décrète l’insertion au bulletin, de cette lettre, et de l’adresse du comité de surveillance révolutionnaire qui l'accompagne (123). Le président annonce qu’une lettre postérieure à celles qu’on vient de lire est entre les mains d’un secrétaire qui va en donner lecture. [Les officiers municipaux de la commune de Marseille à la Convention nationale, du 7 vendémiaire an III] (124) Représentans, Ils ne sont plus ces dominateurs forcenés, continuateurs du système de Robespierre, grâces étemelles vous soient rendues, représentans, vous seuls pouviez abattre ce colosse effrayant jettant la terreur dans toutes les âmes ; vous seuls pouviez délivrer Marseille, la République entière de cette caste sanguinaire qui vouloit tout victimer à son ambition, qui n’abattoit la tyrannie que pour se l’approprier ; qui ne détruisoit les hommes de l’ancien régime que pour régner à leur place, couverte de leur dépouille aux dépens de la République; qui ne voyait le patriotisme que dans le trafic honteux des plus viles passions; qui anéantissait enfin Débats, n" 743, 168-169; Ann. Patr., n° 641; Ann. R. F., n°13; C. Eg., n 776-777 ; Gazette Fr., n” 1007 ; F. de la Républ., n” 13; J. Fr., n 738-739; J. Mont., n” 158; J. Paris, n 14; J. Perlet, n” 740-741; J. Univ., n ’ 1775-1776; M. U., XLIV, 188, 196-199; Rép., n” 13. (122) Bull., 17 vend. (123) P. V., XLVI, 253. (124) C 321, pl. 1338, p. 9. Bull., 12 vend, (suppl.), 26 vend, (suppl.); Moniteur, XXII, 149-150; Débats, n 743, 214- 216. la République sous le masque imposant d’un patriotisme exagéré. Et nous aussi sommes révolutionnaires, et nous aussi sommes les plus zélés partisans du gouvernement provisoire qui seul peut nous assurer la stabilité de la constitution républicaine ; mais les ennemis du crime, les amis de la justice, et de la vraie justice, seront-ils longtemps exposés aux vils sarcasmes de tant d’êtres corrupteurs et corrompus disséminés dans toutes les communes de la République? Non, représentants, ils vont rentrer dans le néant d’où ils n’auraient jamais dû sortir. Ce qu’ils ont fait à Marseille va faire tomber le masque, et partout les Cromwels modernes disparoîtront du sol de la Liberté qu’ils ont trop longtemps souillé. Marseille livrée à quelques meneurs n’avoit pu par elle même secouer leur joug détestable ; manifester la haine contre leur tyrannie, c’était un crime irrémissible et la proscription ou la mort en était le prix. Vous avez enfin connu la position de notre malheureuse cité. Vous avez voulu l’arracher à l’oppression et certes deux représentans dont les noms seront chers à nos derniers neveux y sont venus déployer et le grand caractère qui les anime et l’autorité nationale dont ils sont revêttus. La calomnie avait précédé leur venue et il n’est sorte d’atrocités que les meneurs n’aient vomies sur leur compte, pour égarer les esprits et les préparer à une insurrection contre la représentation nationale. Le moment de leur arrivée fut signalé par un acte de mépris. Le premier usage qu’ils firent de l’autorité nationale fut entravé par un acte de révolte, l’enlèvement du sanguinaire Reynier. Cet acte inique provoqua la vengeance du peuple outragé dans ses représentans; de là, l’épuration des autorités constituées, de là, nouvelles convulsions, nouveaux actes d’insurrection. Nous sommes appelés par la confiance des représentants aux fonctions municipales, les bons citoyens applaudissent à notre choix et une horde de scélérats vient troubler notre installation et des huées se font entendre de la part des affidés postés par les meneurs. Les menaces ne sont pas épargnées pour intimider l’homme faible. Une fete se fait le 5ème jour des sans-culottides et les cris de lanterne retentissent de toutes parts et semblent se diriger contre nous. Ils frapent l’oreille des représentans qui par la seule force des principes et de la vérité teras-sent avec énergie les hommes égarés et réduisent au silence les scélérats de cette émeute. La Convention indignée de l’attentat commis contre la souveraineté du peuple par l’enlèvement de Reynier rend un décret qui est reçu avec transport par tous les bons citoyens. Il est exécuté avec la plus grande sagesse. Mais le lendemain quelques scélérats courant les rues, se livrent à toutes sortes d’excès, entraînent par force tous ceux qu’ils rencontrent et se portent chez les représentans. Là, ils se livrent à tout ce que la rage et le délire peuvent leur inspirer. Les bons citoyens inquiets sur le sort de la représentation nationale veillent sur elle avec sollicitude ; le brave Villemalet commandant de la place affronte mille dangers et vole à son se-