[Convention nationale.]! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. i 15 brumaire an II 355 1 ' 5 novembre 1793 Suit l'adresse de la Sociét des amis de la li¬ berté et de V égalité séant à Broyés (1). La Société des Amis de la liberté et de l'égalité, séant à Broyés, à la Convention. « Citoyens représentants, « Une Société populaire vient de s’organiser dans la commune de Broyés, district de Suzanne. Elle s’empresse de s’acquitter de son premier devoir en vous offrant l’hommage de son res¬ pect, de son amour, de sa reconnaissance. Com¬ bien de motifs ont placé dans nos cœurs ces sen¬ timents pour vous ! De grands forfaits punis, une constitution sublime qui fera le bonheur du peuple, la remise entre ses mains des droits que l’ancienne constitution n’avait fait que lui mon¬ trer, l’agiotage terrassé, les spéculations des in¬ fâmes accapareurs anéanties par l’admirable loi de la taxe des denrées, un code civil dont les dispositions sont prises dans la nature même, une infinité d’autres lois plus sages les unes que les autres, voilà ce qui a signalé tous les jours de votre session. « Mettez le comble à vos bienfaits, dignes re¬ présentants, en demeurant à votre poste jusqu’à raffermissement de notre bonheur, jusqu’à l’en¬ tier, anéantissement de nos ennemis, jusqu’à ce que vous puissiez nous dire : « La patrie est sau¬ vée, le peuple français est libre. » Alors, alors nous dirons : « Pères de la Patrie, vous avez rempli votre tâche, terminez-en le dernier acte en dé¬ cernant des récompenses à ceux qui ont bien mérité, comme vous, et venez ensuite recevoir celles que nous vous devons à vous-mêmes, à à votre rentrée dans vos foyers. » « Hurault l’aîné, 'président ; Hurault le jeune, secrétaire. « Broyés, 9e jour du 2e mois de l’an II de la République française une et indivisible. » Les représentants du peuple Lequinio et Lai¬ gnelot envoient de Rocheîort un assignat de 10 livres endossé, au nom du roi par Thomas et Barré, se disant secrétaires du conseil supérieur, avec l’arrêté auquel cet assignat a donné lieu; c’est un nouveau moyen, écrivent les représen¬ tants, dont se sont avisés les contre-révolution¬ naires pour propager le royalisme; ils ont ins¬ crit de même 1,500,000 francs qu’ils nous avaient pris à Fontenay. Les représentants demandent l’approbation de leur arrêté, et même qu’il soit rendu commun à toute la République : en con¬ séquence, la Convention nationale rend le décret suivant (2) : « La Convention nationale instruite que les ennemis de la patrie apposent sur les assignats républicains des inscriptions anti-civiques, dé¬ crète ce qui suit : Art. 1er. « Tous assignats républicains, de quelque valeur qu’ils soient, qui porteraient, soit sur le (1) Archives nationales, carton G 280, dossier 765. (2) Ce décret a été rendu sur la proposition de Monnel, d’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 277, dossier 723. côté imprimé, soit sur le revers, ces mots : au nom du roi, bon pour ..... ou toute autre marque ayant le caractère d’incivisme, ou même des inscriptions et marques civiques apposées et signées par les ennemis de la République, sont prohibés. Art. 2. « Les distributeurs de pareils assignats seront regardés et poursuivis comme fabricateurs de faux assignats. Art. 3. « Seront poursuivis comme complices de fabri¬ cation de faux assignats, les notaires, juges ou administrateurs, qui en référeraient la valeur dans leurs actes, jugements ou arrêtés. Art. 4. « Les receveurs de deniers publics qui les rece¬ vraient dans leurs caisses encourront les mêmes peines et seront tenus en outre d’en rétablir la valeur dans leurs dites caisses (1). » Suit la lettre de Laignelot et Lequinio (2). Laignelot et Lequinio, à la Convention nationale. « Rochefort, le 9 du 2e mois de l’an II de la République française une et indivi-7 ] sible. « Nous venons, citoyens nos collègues, de ga¬ gner quelques milbons à la République ; les scé¬ lérats de la Vendée se sont avisés d’un moyen nouveau pour propager les idées du royalisme (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 323 à 325. Dans le projet de décret, figurent des considé¬ rants qui n’ont pas été reproduits dans le texte adopté. Ges considérants se trouvaient dans le projet après la formule : « La Convention... décrète ce qui suit : » Ils étaient ainsi conçus : « Considérant que ce délit est une nouvelle preuve de l’audace et de la scélératesse des malveillants; « Considérant qu’il serait dangereux de tolérer la circulation d’une monnaie qui pourrait faire croire aux hommes faciles à égarer qu’il existe encore en France quelque portion d’autorité royale, ou d’autres autorités que celles établies par la Consti¬ tution; « Considérant que tout papier-monnaie qui porte¬ rait d’autres emblèmes, d’autres inscriptions, d’autres marques que ceux consacrés par les lois est essentiellement faux. » (Ces considérants sont à peu près les mêmes que ceux qui précèdent l’arrêté pris par les représentants Lequinio et Laignelot.) (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 735; Moniteur universel [n° 46 du 16 brumaire an II (mercredi 6 novembre 1793), p. 188, col. 2]; Journal des Débals et des Décrets (brumaire an II, n° 413 p. 205); Bulletin de la Convention du 5e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II (mardi 5 novem¬ bre 1793). M. Aulard reproduit cette lettre dans son Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public (t. 7, p. 612), mais il l’emprunte au Journal des Débats qui lui donne par erreur la date du 3e jour du 2e mois. Il la reproduit de même dans son tome 8 (p. 130), conformément au texte ci-des¬ sus, avec la date du 9 du 2e mois. 356 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Quinaire an H L ' J ) 5 novembre 1793 dans le peuple, c’est de mettre sur les assignats républicains une inscription royaliste telle que celle qui est au dos de l’assignat de dix livres que nous joignons à la présente; ils ont inscrit de même quinze cent mille livres qu’ils nous avaient prises à Fontenay et d’autres sommes prises ailleurs. Nous venons, par l’arrêté ci-joint, d’annuler toute cette monnaie royalisée; comme nos pouvoirs, quoique limités en eux-mêmes, ne s’étendent, par le décret qui nous envoie ici, qu’au département de la Charente-Inférieure, nous avons balancé si nous étendrions notre ar¬ rêté aux départements voisins. Cependant le grand intérêt public nous a décidés, nous avons étendu cet arrêté aux huit départements qui en¬ tourent la Vendée, et nous l’avons envoyé aux administrateurs par des courriers extraordi¬ naires. Mais nous croyons essentiel que vous don¬ niez par un décret votre approbation à notre mesure, et peut-être feriez-vous bien de la gé¬ néraliser pour toute la République. Nous joi¬ gnons ici un exemplaire de cet arrêté, prenez-en connaissance et décidez. « Lequinio; Laignelot. N° 1209. AU NOM DU ROY. BonYpour 10 livres suivant le règlement du 2 aoust 1793. Thomas. Par le conseil supérieur, Barré secrétaire du bureau des dépêches. Comité de surveillance à la 'Rochelle N° 86. Arrêté (1). Lequinio et Laignelot, à tous les vrais républicains. Nous, représentants du peuple français, ins¬ truits que les royalistes, les-prêtres, les ci-devant nobles et tous les scélérats qui combattent dans la Vendée contre la liberté du peuple français ont établi une commission qu’ils appellent con¬ seil supérieur, chargé d’apposer sur les assignats républicains une inscription anticivique telle que celle-ci que nous avons vue inscrite sur un assignat de 10 livres : Au nom du roi, bon pour 10 livres, suivant le règlement du 2 aoust 1793, signé, Thomas, par le conseil supérieur ; Barré, secrétaire du bureau des dépêches. Considérant que ce délit est une nouvelle preuve de l’audace et de la scélératesse de ces ennemis du bien public, et combien il serait dangereux de laisser circuler une pareille mon¬ naie qui ferait croire aux hommes faciles à éga¬ rer qu’il existe encore en France quelque por¬ tion d’autorité royale; Considérant enfin que ce papier-monnaie se trouve essentiellement altéré par cette inscrip-oription odieuse, et qu’il ne peut plus circuler dans des mains républicaines, en vertu des pou¬ voirs illimités dont la Convention nous a revê¬ tus, (1) Archives nationales, carton C 278, dossier 735. Nous annulons tout assignat, de quelque va¬ leur qu’il soit qui porterait, soit sur le bon côté, soit sur le revers, l’inscription ci-dessus men¬ tionnée ou toute autre marque quelconque' por-tant le caractère de l’incivisme, ou même" une inscription ou marque civique apposée par les ennemis de la République, soit du dedans, soit du dehors, et défendons à tous receveurs de de¬ niers publics d’en recevoir, sous peine d’en ré¬ tablir la valeur dans leurs caisses et d’être pour¬ suivis comme fabricateurs de faux assignats; comme aussi à tous notaires ou autres officiers publics d’en référer la valeur dans leurs actes, jugements ou arrêtés, à peine d’être également poursuivis comme complices de fabrication de faux assignats. Le présent arrêté sera imprimé, publié et af¬ fiché sans délai dans toutes les communes des départements de la Charente-Inférieure, de la * Haute-Charente (sic), des Deux-Sèvres, de la Vendée, de la Loire-Inférieure, Mayenne-et-Loire, Indre-et-Loire et de la Vienne. Nous ren¬ dons les administrateurs de ces départements personnellement et collectivement dans chaque administration responsables du retardement qu’ils pourraient apporter à l’impression et pu¬ blication du présent, qui leur sera envoyé par des courriers extraordinaires. A Rochefort, le 8e jour du 2e mois de l’an II de la République française une et indivisible. Lequinio; L at gnelot. Les mêmes représentants annoncent aussi de Rochefort que huit ministres du culte catholique, et un du culte protestant, viennent d’abandonner le métier d’imposture en présence de tout le peuple; ils ont juré de n’enseigner désormais que la morale, et de prêcher contre toutes les tyran¬ nies politiques et religieuses; ils ont scellé leur serment en brûlant dans un vase plein d’encens leurs lettres de prêtrise. Le peuple, en applaudis¬ sant à cet acte de raison, a juré de même d’ou¬ blier toute querelle particulière, toute différence de culte et d’opinions religieuses. Cette lettre très longue, et contenant beaucoup d’autres détails consolants pour la philosophie et l’humanité, sera insérée en entier au « Bulletin » (1). Suit la lettre de Lequinio et Laignelot (2). Lequinio et Laignelot, représentants, envoyés dans la Charente-Inférieure, à la Convention natio¬ nale. Rochefort, le 2e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II. « Nous marchons de miracles en miracles, citoyens nos collègues, et bientôt il ne nous restera plus que le regret de n’en avoir plus à faire. Huit bénisseurs du culte catholique et un ministre du culte protestant viennent de se dé-prêtriser jeudi, dernier jour de la décade, en présence de tout le peuple assemblé dans le temple de la vérité, ci-devant l’église parois¬ siale de cette ville. Ils ont, aux grands applau¬ di) Procès-verbaux de la Convention , t. 24, p. 325. (2) Archives nationales, carton G 278, dossier 735; Aulard : Recueil des actes el de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p. 189.