[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790.] 6M à l’emprunt de 3,000 livres, sauf à euxà imposer le montant de ladite somme en trois ans sur les habitants dudit lieu qui payent 2 livres et au-dessus, de capitation, pour ladite somme être employée relativement aux destinations faites par ladite adresse, notamment à entretenir l’atelier de charité ; à laquelle imposition ils demeurent dès à présent autorisés, à charge de la faire approuver par le district et le département. > M. de La Rochefoucauld, évêque de Beauvais, député de Clermont , demande la permission de s’absenter pour motif de santé. M. le bailli de Flachslauden, député de Ragueneau , fait une demande semblable et pour le même motif. Ces congés sont accordés. L’Assemblée passe à son ordre du jour qui est la continuation de la discussion sur la question constitutionnelle du droit de guerre et de paix • M. le marquis d’Estourmel (1). Messieurs, chargé par mon cahier de demander que les Etats généraux s’occupent d’abord de concerter avec Sa Majesté, et d’arrêter un corps de lois constitutionnelles inscrites immuablement dans un registre national ; je regarde la faculté de faire la guerre et la paix comme un article constitutionnel. Je n’invoque point les anciens capitulaires : je ne citerai ni les Romains, ces ambitieux et farouches républicains, faisant ta guerre à tous les peuples pour les asservir à leur empire : Neç campos ubi Troja fuit. Quelques-uns des préopinants ont proposé un manifeste qui tendrait, s’il pouvait être adopté, à réaliser la séduisante chimère de la paix universelle, attribuée à l’abbé de Saint-Pierre; mais avant que cette chimère soit réalisée, ne se passera-t-il pas encore bien des années, pendant lesquelles nos rivaux naturels profiteront de notre engouement pour des rêveries philosophiques, afin d’agrandir leur empire, ou d’étendre leur commerce aux dépens du nôtre; et à l’ombre de la célérité et du secret, qui sont l’âme de la politique, et qu’un ministère toujours actif mettrait dans de telles opérations, ils déjoueraient notre bonne foi, et nous laisseraient nous bercer d’idées aussi impolitiques pour nous qu’elles leur seraient avantageuses ; car en déclarant que nous voulons être en paix avec tous, c’est-à-dire aux autres nations: faisons une coalition et opposons-nous fortement à la tyrannie des peuples conquérants. Ainsi, en voulant établir une paix perpétuelle, nous serions en guerre avec toutes les nations que nous croirions injustes, ou qui ne s’accommoderaient pas de notre système : et quelle entreprise 1... Je passe à la question. La nation doit-elle déléguer au roi l’exercice de la paix et de la guerre? Pour résoudre cette question, il ne faut qu’être conséquent : le roi est déclaré roi des Français ; il est déclaré chef suprême du pouvoir exécutif. Ces qualifications seraient illusoires, si le roi n’avait pas la faculté de faire la guerre et la paix. La guerre ne peut se soutenir sans argent, le roi ne peut disposer d’aucune somme sans le consentement de la nation. La possibilité de faire la guerre dépendant des moyens d’entretenir les armées, il (1) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du discours de M. d’Estourmel. existe une telle corrélation entre le roi et la nation, que le concours de la nation ne peut être séparé de l’acte fait par le roi. La nation assigne des fonds pour l’entretien des armées de terre et de mer en temps de paix. Ces armées ne peuvent recevoir d’augmentation sans un vœu exprimé par la nation. Je suis chargé de demander qu’il soit formé une caisse nationale de l'excédent des dépenses des départements, qui sera fixé par l’Assemblée nationale, et du produit des impositions. Que cette caisse nationale soit régie par un certain nombre d’administrateurs choisis par l’Assemblée nationale, qui lui en rendront compte directement, et qu'on ne pourra en détourner aucun denier pour être employé à tout autre service qu’aux inférêis et aux remboursements des capitaux; que si cependant les circonstances d’une guerre imprévue forçaient à recourir à des moyens extraordinaires, l’Assemblée nationale y pourvoirait suivant sa sagesse et sa prudence; qu’enfin, la dépense des départements des ministres étant fixée, ils seront comptables de la gestion de leurs fonds aux Assemblées nationales, et les comptes rendus publics. Toutes ces mesures ne peuvent être qu'adoptées par une Assemblée dont l’unique objet doit être le bonheur de la nation. Plût à Dieu, que, pour la faire jouir promptement de ce bonheur, l’unique but des vœux du roi et des nôtres, chacun des membres qui composent cette Assemblée se persuadât qu’il ne doit qu’à elle seule l’expression de son opinion, de son amour pour le bien public; qu’il ne manifestât que dans son sein les moyens que son zèle lui suggère pour assurer ce résultat; que le choc des opinions n’eût d’autre effet que celui de procurer, le plus tôt possible, et par les moyens les plus efficaces, la paix intérieure et extérieure. Le roi, comme chef suprême du pouvoir exécutif, est le conservateur des propriétés intérieures et extérieures. La défense de ces propriétés est pour lui un devoir : ainsi le roi peut et doit entreprendre une guerre défensive. La guerre offensive ne peut être déclarée par une nation juste et généreuse. Je n’en parlerai donc pas, parce que ce serait se créer un monstre pour avoir le plaisir de le combattre. On a alarmé, Messieurs, votre patriotisme, en vous rappelant l’abus des guerres entreprises sans le consentement de la nation; cet abus ne peut se renouveler. La permanence des législateurs en imposera toujours à des ministres entreprenants. Ils n’oublieront pas que la guerre ne peut se soutenir sans argent, que le roi ne peut s’en procurer sans le consentement de la nation, et qu’ainsi la faculté de faire la guerre ou la paix est restreinte par le consentement ou le refus des subsides qui en sont le nerf. J’ai dit la faculté de faire la paix, parce qu'elle est une conséquence de la première, et que d’ailleurs, dans un gouvernement monarchique, c’est le monarque qui représente, aux yeux des nations, la volonté générale, et qui juge du moment où les propriétés rentrent sans altération dans la jouissance de la nation. Ainsi, Messieurs, en conservant les précieux avantages de la célérité et du secret, dont votre intention n’est sûrement pas de faire profiter les ennemis à votre détriment (ce qui serait sbsurde en politique), vous maintiendrez les rapports du roi avec la nation. Gar en votant les subsides pour l’augmentation des fonds de l’armée, vous serez nécessairement instruits des motifs qui 652 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790.] commandent la guerre, et vous serez libres de les accorder ou refuser. Mais au moins n’aurez-vous pas à vous reprocher d’avoir nui à la célérité des opérations projetées dans le conseil, et d’où souvent dépendent les succès (comme nous l’avons malheureusement éprouvé dans ces dernières guerres.) Ainsi, en conservant les droits imprescriptibles de la nation qui délègue, vous surveillerez et dirigerez l’exécution de sa volonté. Enfin, vous ratifierez les traités d’alliance existants, parce que vous considérerez l’amitié des nations comme une des plus douces jouissances de la propriété extérieure, et un heureux acheminement de la paix universelle. Quant aux traités de commerce, je crois qu’ils intéressent trop particulièrement la fortune des citoyens et la prospérité de la France pour qu’ils ne soient pas discutés dans l’Assemblée nationale et soumis à la même ratification, mais passés au nom du roi seul ainsi que les traités d’alliance et de paix. Je me résume donc et je demande qu’il soit décrété : L’Assemblée nationale, considérant que le pouvoir exécutif suprême réside exclusivement dans la main du roi, que les ministres et autres agents du pouvoir exécutif sont responsables de l’emploi des fonds de leur département, a déclaré et déclare que le pouvoir de faire la guerre et la paix est inhérent au pouvoir exécutif suprême. Que le soin de veillera la sûreté extérieure de l’empire français, et de le maintenir dans l’état ou il existe à présent, est une des fonctions du pouvoir exécutif suprême, ainsi que l’entretien des relations de politique au dehors, et le choix des agents pour la conduite des négociations. Que les fonds nécessaires pour l’entretien de l’armée de terre et de mer, en temps de paix, seront fixées irrévocablement. Que, dans le cas où les circonstances exigeraient une augmentation dans lesdites armées, le roi fera connaître au Corps législatif, s’il est assemblé, la nécessité de voter un fonds pour lesdites augmentations. Si le Corps législatif n’est point assemblé, le roi en fera sur-le-champ la convocation. Que l'état de l'armée de terre et de mer, en temps de paix, dépendant de la situation politique de l’empire qui a pour base les traités d’alliance et de commerce, subsistants avec les différentes puissances, ces traités qui ont été conclus par les rois, lorsqu’ils étaient seuls dépositaires du vœu de la nation, seront ratifiés par le Corps législatif; et que si aucun d’eux paraissent renfermer des dispositions contraires à la prospérité de l’empire, le roi sera supplié de communiquer aux puissances intéressées les observations relatives aux articles de ces traités, qui seront proposées par le Corps législatif, et pour la rédaction desquelles il sera nommé un comité de huit personnes choisies dans l’Assemblée nationale. Que les déclarations de guerre et de paix seront intitulées : De par le roi des Français , au nom de la nation. Que tous les traités qui seront passés avec les différentes puissances, seront arrêtés et signés par le roi, et ratifiés par le Corps législatif. Que le comité de Constitution présentera incessamment un projet de décret, pour déterminer la responsabilité des ministres et autres agents du pouvoir exécutif. M. Duquesnoy (1), député de Bar-le-Duc (2). Messieurs, je commencerai par une observation, qui, certainement, a été faite par plusieurs membres de celte Assemblée, mais que je crois intéressant de vous rappeler. M. deCazalèset M. Barnave ont combattu l’opinion de M. de Mirabeau: le premier a prétendu que M. de Mirabeau donnait tout au Gorps législatif. Le second a soutenu que M. de Mirabeau donnait tout au pouvoir exécutif. Ne serait-ce pas une preuve que M. de Mirabeau a fait à chacun à peu près sa vraie part, et qu’il a pris ce juste milieu, qui est nécessaire dans toutes les institutions sociales; J’appelle votre attention, Messieurs, sur cette observation. Veuillez ne pas la perdre de vue, et daignez vous souvenir de cette vérité, dont vous avez eu plus d’une preuve dans le cours de nos séances; les deux extrêmes produisent toujours les mêmes effets. Maintenant, Messieurs, je vais prononcer très clairement mon opinion sur la question qui nous occupe. Je déclare, que'je pense que laisser au roi seul l’exercice du droit de la paix et de la guerre, c’est perdre la Constitution et compromettre la liberté. Je déclare, que je pense que laisser au Corps législatif seul le droit de déclarer la guerre et de faire la paix, c’est perdre la monarchie et la convertir, non pas comme on vous l’a dit, en démocratie, mais dans la plus terrible des aristocraties. A ce sujet je vous citerai un aveu échappé à l’un des plus zélés partisans de cette opinion. On lui objectait que la nécessité d’une célérité indispensable exigeait que le dépôt du droit de la guerre fut confié au monarque. II a répondu que le Corps législatif pourrait agir avec la même célérité, puisqu’ au moins pendant dix ans, il serait assemblé la plus grande partie de l’année, et qu’il ne prendrait qu’un, deux ou trois mois de vacances. Messieurs, après cet aveu, il ne resterait plus qu’à dire que le Gorps législatif ne se séparera jamais, qu’il sera constamment assemblé, et qu’il exercera tous les pouvoirs. (1) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du discour* de M. Duquesnoy. (2) Cotte opinion est imprimée dans les termes mêmes dans lesquels je l’ai prononcée. Ce n’est certainement pas par amour-propre que je la rends publique, puisque MM. Le Chapelier et Mirabeau ont beaucoup mieux, et plus longuement que moi, dit les mêmes choses immédiatement après. Mais je crois très important de faire connaître au public quels sont les hommes qui, avant de connaître la majorité de l’Assemblée, ont établi et soutenu pendant six jours l’opinion qui a prévalu, malgré les intrigues de toute espèce, et les clameurs des opposants. Je crois très important de lui apprendre à les distinguer de ceux qui ayant opiniâtrement soutenu pendant six jours aussi un avis contraire, voudraient persuader que leur opinion a été suivie. Il faut prémunir le public contre cette cbarlatanerie, lui faire connaître ceux qui défendent loyalement, avec honneur, et sans détour, la cause qui leur paraît bonne, et ceux qui ne s’occupent que de leur intérêt et de leur orgueil, qui feignent de ne pas croire à la probité de ceux qui ne pensent pas comme eux, et voudraient exercer, :ur l’Assemblée nationale, le plus redoutable des despotismes. Enfin, c’est comme pièce historique, et pour constater le véritable état de la question au commencement de la séance du 22, que je publie celte opinion. ( Note d» M. Duquesnoy.) [Assemblés nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790. £53 Et, Messieurs, si le Corps législatif ne se sépare que pour un intervalle très court, il ne sera bientôt plus soumis à la réélection dans un pays (pesez bien ce fait, je vous supplie) dans un pays oùle peuple se lasse déjà des élections, puisqu’il estconstant que dans plusieurs provinces le nombre des électeurs diminue sensiblement au troisième scrutin, exigé, en cas d’égalité de suffrages, pour les places municipales. Ainsi, si nous n’y prenons garde, la destruction du despotisme, tous les efforts faits par nous pour abattre toutes les aristocraties, n’auront abouti qu’à en élever une mille fois plus redoutable que toutes celles dont nousavons secoué le joug. Cer-tes2 j’avais conçu de plus hautes espérances, et je n’ai pas fait depuis un an tous les sacrifices pour me soumettre à un grand corps sans responsabilité, qui pourra entraîner la nation à la guerre, parce que quelques factieux, quelques intrigants, égareront un instant l’opinion de la très petite portion du peuple qui les entoure, et la présenteront ensuite comme le résultat de l’opinion nationale. Messieurs, il faut ici s’expliquer avec franchise; je neveux pas plus d’un roi despote que d’une législature aristocratique; je ne veux pas plus obéir à des ministres qu à une Assemblée nationale qui aura seule le droit de déclarer la guerre. Je veux la liberté, je la veux par-dessus tout, et je pense qu’elle sera perdue pour nous, je pense que nous ne la recouvrerons qu’en versant des flots de sang le jour ou vous aurez décrété la motion de M. Barnave, ou celle de M. de Cazalès. G’g$tnà-dire le jour où, de deux choses l’une, vouS)apef5;i§plé le roi de la Constitution, où vous raureifjfltéressé à la renverser, en le réduisant àn’êtreque l’instrument passif de la volonté, non pas nationale (il doit l’être) mais de la législature, qui lui ordonnera à son gré de faire la guerre. Ou bien, vous aurez ditau roi et à ses ministres : Faites la guerre à votre gré, soyez seuls dépositaires de ce terrible droit. Quel moyen donc d’éviter ce double malheur? celui de faire concourir la législature et le roi à l’exercice du droit de la guerre et de la paix; celui d’adopter un moyen terme, sans lequel les monarchies ne peuvent subsister; celui qui concilie les devoirs du roi, et les intérêls du peuple, et qui ordonne notre gouvernement en monarchie, et non pas en démocratie, ou en aristocratie. J’insiste beaucoup sur une observation qui ne vous a pas été assez faite ; si le roi est isolé de la Constitution ; s’il est réduit au simple rôle d'exécuteur de la volonté de la législature , bientôt il deviendra despote. Et puisqu’on vous a cité M. de Mably, je vous le citerai, car moi aussi je t’ai lu et médité, mais je la citerai dans ses propres termes, parce que je le cite sans esprit de parti. D’abord, je vous dirai que le gouvernement proosé par l’abbé de Mably ne ressemble en rien celui que vous avez décrété : ses Etats généraux ne s’assemblent que tous les trois ans; ils ne peuvent porter de nouvelles lois que sur la demande ou réquisition de quelques-uns des Etats provinciaux, ou des magistrats chargés de la puissance exécutrice. Ces lois avant d’être portées doivent être délibérées trois fois en laissant dix jours d’intervalle entre chacune ; enfin son gouvernement est ordonné en république; et cependant après avoir beaucoup restreint la prérogative royale, sur la guerre, il dit mot à mot : « J’ai tort cependant, et il faut recourir à d’autres expédients; si ces établissements nuisent à la subordination, à la rigidité de la discipline et aux succès de la guerre. « Non seulement un peuple doit être en état de repousser des voisins injustes, s’il veut être heureux, mais soyez persuadé que si quelque vice de sa Constitution s’oppose à ses succès militaires, il se dégoûtera bientôt de son gouvernement. Los Etats sont plus jaloux de leur honneur à la guerre que de tout le reste. Une nation humiliée par de longues disgrâces ne songe qu’à se venger, elle se donnera un maître. » ( Chap . 7. des droits et des devoirs du citoyen.) Messieurs, pensez-y bien, le roi sur la décision du Corps législatif est tenu de faire la guerre, il mettra peu de prix au succès, la nation sera souvent humiliée, et lassée de n’avoir qu'un général d’armée, elle se donnera un despote. Je me résume donc en vous priant d’accorder la priorité à la motion de M. de Mirabeau qui me paraît cependant susceptible de plusieurs amendements que je me réserve de proposer. Quant aux personnalités (1) par lesquelles M. Barnave a terminé son opinion, certainement je n’y répondrai pas; je les abandonne à la réflexion même de M. Barnave, qui rendu au calme qui suit les grandes agitations, sentira bientôt qu’on peut différer d’opinion, et aimer également la liberté I M. Goupil de Préfeln. Ce n’est pas par des distinctions métaphysiques que doit être décidée la question ; elle a été embrouillée par toutes les subtilités de l’éloquence: je la réduirai à des éléments simples et faciles. Tout pouvoir, toute autorité doit avoir pour objet l’avantage de ceux qui y sont soumis; sans cela le pouvoir social serait hostile. Vous avez décidé que le pouvoir exéculif suprême appartenait au roi, vous avez établi ce pouvoir à l’effet d’entretenir l’union indissoluble des parties et l’énergie de la force publique. Le pouvoir exéculif, chargé de veiller à la conservation des propriétés, doit avoir le droit de les défendre lorsqu’elles seront attaquées, et cela par la considération majeure de l’intérêt général. En calculant les inconvénients, j’en ai trouvé de toutes parts. La sublime idée proposée par M. l’archevêque d’Aix d’établir un comité chargé de présenter des articles constitutionnels, pour servir de bases aux décisions sur le droit de la guerre, me parut être propre à en faire disparaître la plus grande partie, et c’est surtout cette proposition que j’appuie et que je vous propose de décréter. M.lLe Chapelier. Cette question, depuis longtemps débattue, commence enfin à s’éclaircir, quoiqu’elle ne soit pas précisément posée; il est facile d’apercevoir maintenant la difficulté. L’Assemblée est divisée en deux opinions contradictoires. Le roi aura-t-il le droit de paix et de (1) Objet moi-même des injures les plus absurdes, je ne puis dire à ceux qui osent se les permettre, qu’un mot simple : qu’ils trouvent dans ma vie, une seule aclion dont j’aie à rougir, dans ma conduite publique et privée, un seul mot qui ne soit pas d’un homme de bien. Certes, je luttais dans le fond de ma province contre bien des espèces d’aristocrates, quand plusieurs de ceux qui osent aujourd’hui prononcer le nom de liberté, rampaient dans les antichambres des ministres, et se faisaient combler des faveurs de la cour auxquelles ils ne songent pas à renoncer, èt qu’ils ne restitueront pas au peuple dont ils parient sans cesse. 05 1 (Assemblés nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790.] guerre? Le Corps législatif aura-t-il ce droit? Je ne m’arrêterai pas à la première. Personne ici ne veut laisser aux ministres le droit de ruiner i’Etat, de répandre à leur gré le sang des Français. Tout le monde reconnaît l’insuffisance de la responsabilité et l’insuffisance et le danger du refus des subsides. Il est donc nécessaire de chercher un autre moyen; il faut donc que le Corps législatif délibère l'a guerre, la paix et les traités de commerce. C’est ici que la question se divise. Il y a dans cette question politique divers droits, divers devoirs, diverses circonstances à distinguer. La guerre a deux époques, les hostilités imprévues et la guerre déclarée; les attaques et les hostilités ne dépendent pas de nous, elles sont hors de nous, nous ne pouvons empêcher qu’elles existent; la déclaration appartient tout entière au Corps législatif. Il faut décréter qu’il ne peut y avoir de guerre sans un décret du Corps législatif; que si la nécessité de repousser des hostilités l’a commencée, les représentants de la nation peuvent permettre ou défendre de la continuer. Avoir la puissance de permettre et de défendre la guerre, c’est avoir le droit de la guerre ; mais déclarer la guerre sans la proposition du roi, voilà, disent beaucoup de décrets, voilà ce qui consacrerait beaucoup d’inconvénients. D’abord ce serait donner au gouvernement une forme purement républicaine; ce serait aller contre les principes de votre Constitution. Si le Corps législatif pouvait ordonner la guerre sur la motion d’un de ses membres, le monarque serait à côté de la Constitution, il n’aurait plus que les fonctions d’un général d’armée; la dignité et l’influence du chef de la nation et de la nation même, près des cours étrangères, seraient diminuées; enfin vous détruiriez un des fondements de cette Constitution que la sagesse a dictée. En donnant au roi la sanction, vous avez exigé le concours du roi pour les lois, comment lui refuseriez-vous ce concours pour la guerre? S’il n’est pas possible que le roi ait un veto suspensif, il faut du moins que le Corps législatif ne puisse déclarer la guerre sans lui. Voyons maintenant s’il est de l’intérêt du peuple que le Corps législatif seul fasse la paix ou la guerre? L’intérêt du peuple est d’avoir le moins de guerre possible. Je remets au Corps législatif le moyen d’empêcher la guerre et de dire la guerre ne sera pas faite. On veut lui donner le droit de la déclarer, c’est un moyen de plus d’attirer la guerre. Toutes les mesures du gouvernement sont rompues, il n’y a plus de gouvernement monarchique. Ne voyez-vous pas que, si la guerre était malheureuse, on attribuerait le revers au Corps législatif, qui seul l’aurait décidée? Ne voyez-vous pas qu’il perdrait tout son crédit sur un peuple courageux et jaloux de lagloire des armes ? Ne voyez-vous pas que la nation humiliée se tournerait du côté du roi, et que le Corps législatif aurait perdu son ressort sur le pouvoir exécutif. Si l’on objecte que le pouvoir de permettre ou de défendre la guerre est illusoire, parce que le ministère saura corrompre la législature de manière à s’assurer la majorité, parce qu’il ne notifiera les hostilités qu’au moment où il sera impossible de ne pas suivre la guerre, je demande à ceux qui ont proposé des projets de décrets, s’ils offrent quelques moyens de parer à ces dangers? je donne comme eux aü Corps législatif le droit d’empêcher la guerre; j’exige comme eux que la notification des hostilités et des préparatifs soit faite au Corps législatif; j’exige .comme eux que le Corps législatif soit assemblé, si les représentants de la nation n’étaient pas réunis; je veux seulement l’empêcher de décider que la guerre sera faite quand le roi ne l’aura pas proposée. Je veux ainsi diminuer les chances de la guerre. Je présente cette proposition réduite à ses moindres termes : Le Corps législatif aura le pouvoir d’empêcher la guerre; le roi aura le pouvoir d’empêcher la guerre : ni l’un ni l’autre n'auront le pouvoir de faire la guerre sans le consentement de l’un ou de l’autre. Je demande maintenant quels sont les motifs d’opposition à ce système : veut-on la limitation des pouvoirs? Ils sont ici sagement limités. Réclame-t-on pour l’intérêt du peuple? Il est là et nulle part ailleurs. Il faut être insensé ou prévaricateur, pour donner au roi un pouvoir inutile ; il faut êtrp insensé ou prévaricateur pour lui refuser les pouvoirs que lui donnent les principes de la Constitution. Décrétons donc constitutionnellement que le Corps législatif aura le pouvoir d’empêcher la guerre; que le roi aura l’initiative de la délibération du Corps législatif ; ainsi les deux pouvoirs concourront ensemble. Si l’on donnait au Corps législatif le droit de déclarer seul la guerre, la monarchie serait détruite, la Constitution sapée dansses fondements, etl’intérêt du peuple sans cesse compromis. Quant à la paix et aux traités le roi proposera, le Corps législatif ratifiera; nous sommes tous d’accord sur cet objet. Tous les décrets proposés donnent exclusivement le droit au roi de faire la guerre, ou au Corps législatif seul, à l’exception de M. de Mirabeau, qui renferme toutes les idées et tous les principes que je viens de développer. Cette rédaction, qu on a dit obscure, remplit clairement mes intentions. J’ai cependant quelques amendements à proposer. J’extrais du premier article le mot concurremment. J’efface aussi de l’article VII ces mots « et que dans le cas où le roi fera la guerre en personne, le Corps législatif aura le droit de réunir les gardes nationales en tel nombre et dans tel lieu qu’il jugera convenable. » J’avais cru d’abord que cet article renfermait une grande idée; la discussion m’a montré qu’il a de grands inconvénients. Je retranche de l’article IV le mot improbation, et je le remplace ainsi : « si le Corps législatif décide que la guerre ne doit pas être faite. » (Il se fait un moment de silence... Puis on entend quelques murmures ...... puis des applaudissements presque universels.) M. Dnport. Je vois, à l’ordre de la parole, que personne ne s’oppose à ce qu'on laisse au Corps législatif le droit de décider la guerre et la paix. M. le comte de Mirabeau. Je m’y oppose formellement. M. Duport. L’ordre de la liste était qu’on parlât pour, sur et contre. C’est parce que personne ne se présentait pour donner ce droit au roi, que je suis monté à la tribune. Tout le monde est donc dans l’intention de le donner au Corps législatif sur la proposition du roi : voilà ce que nous allons décider. Après ce fait, dont l’observation m’a paru intéressante pour l’union de cette Assemblée, j’examine l’opinion du préopinant ; celte opinion est d’autant plus faite pour accélérer la délibération, qu’elle paraît se référer à l’opinion générale de l’Assemblée. Quelle est donc cette opinion ? Vous avez décrété que la volonté générale serait exprimée par le Corps législatif; vous avez donné deux fonctions nationales au pouvoir exécutif, [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790.] @55 exécuter seul la volonté de la nation, consulter, par la suspension de la loi, la volonté vraiment nationale. On a observé que le roi ne pouvait exercer celte fonction pour le droit de paix et de guerre; et, dans cette impossibilité, il a été reconnu ue celte faculté s’exercerait par l’initiative. Vous evez donc déclarer que, sur la proposition du roi, le Corps législatif aura le droit de décider la guerre : voilà bien la réunion des pouvoirs. Vous devez vous exprimer clairement, parce que, dans cette lutte continuelle entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, il ne faut pas présenter de phrases louches qui pourraient devenir la source d’interminables débats. Il est de votre dignité de dire clairement ce que vous avez droit de décider. Le pouvoir exécutif aura la proposition, le pouvoir législatif la déclaration. Quel est l’avantage d'une obscurité d’expression? Si M. de Mirabeau veut dire que le Corps législatif doit, sur la proposition du roi, décider la guerre, pourquoi n’explique-t-il pas son idée aussi clairement qu’il la conçoit ? On a parlé de la majesté du roi ; la nation a aussi sa majesté. Eh bien, le roi n’est-ilpas toujours le seul organe de la nation auprès des nations étrangères, avant comme après la guerre? Qu’y a-t-il de changé? Aussitôt que le roi avait appris les préparatifs de guerre, il délibérait dans son conseil; il délibérera avec sa nation : voilà tout le changement. Sa dignité, loin d’être affaiblie, reçoit de l’éclat et de la force parce que jamais il ne sera supposé agir d’après l’instigation de ses ministres : parce qu'il représentera une volonté nationale. Je le dis pour la liberté, il n’existe plus qu’un seul moyen de nous susciter des difficultés, ce serait de nous présenter une rédaction assez vague, pour qu’elle pût donner lieu à des réclamations. Quel que soit le décret auquel vousaccorderezlapriorité, il doit contenir cette idée : « Sur la proposition seule du roi, le Corps législatif aura le droit de décider la guerre. * M . le comte de Mirabeau. C’est quelque chose sans doute, pour rapprocher les oppositions, que d’avouer nettement sur quoi l’on est d’accord et sur quoi l’on diffère. Les discussions amiables valent mieux pour s’entendre que les insinuations calomnieuses, les inculpations forcenées, les haines de la rivalité, les machinations de l’intrigue et de la malveillance. On répand depuis huit jours que la section de l’Assemblée nationale qui veut le concours de la volonté royale dans l’exercice du droit de la paix et de la guerre est parricide de la liberté publique : on répand les bruits de perfidie, de corruption ; on invoque les vengeances populaires pour soutenir la tyrannie des opinions. On dirait qu'on ne peut, sans crime, avoir deux avis dans une des questions les plus délicates et le3 plu 8 difficiles de l’organisation sociale. C’est une étrange manie, c’est un déplorable aveuglement que celui qui anime, ainsi les uns contre les autres, des hommes qu’un même but, un sentiment indestructible devraient, au milieu des débats les plus acharnés, toujours rapprocher, tou-’ours réunir, des hommes qui substituent ainsi 'irascibilité de l’amour-propre au culte de la patrie, et se livrent les uns les autres aux préventions populaires. Et moi aussi, on voulait, il y a peu de jours, me porter en triomphe, et maintenant on crie dans les rues : la grande trahison du comte de Mirabeau.... Je n’avais pas besoin de cette leçon pour savoir qu’il est peu de distance de Capitole à la roche Tarpéieune ; mais l’homme qui combat pour la raison, pour la patrie, ne se tient pas si aisément pour vaincu. Celui qui a la conscience d’avoir bien mérité de son pays, et surtout de lui être encore utile, celui que ne rassasie pas une vaine célébrité, et qui dédaigne les succès d*un ’our pour la véritable gloire, celui qui veut dire a vérité, qui veut faire le bien public indépendamment des mobiles mouvements de l'opinion populaire : cet homme porte avec lui la récompense de ses services, le charme de ses peines et le prix de ses dangers ; il ne doit attendre sa moisson, sa destinée, la seule qui l’intéresse, la destinée de son nom, que du temps, ce juge incorruptible qui fait justice à tous. Que ceux qui prophétisaient depuis huit jours mon opinion sanis la connaître, qui calomnient en ce moment mon discours sans l’avoir compris, m’accusent d’encenser des idoles impuissantes au moment où elles sont renversées, ou d’être le vil stipendié des hommes que je n’ai pas cessé de combattre; qu’ils dénoncent comme un ennemi de la Révolution celui qui peut-être n’y a pas été inutile, et qui, cette Révolution fût-elle étrangère à sa gloire, pourrait, là seulement, trouver sa sûreté ; qu’ils livrent aux fureurs du peuple trompé celui qui, depuis vingt ans, combat toutes les oppressions, et qui parlait aux Français de liberté, de Constitution, de insistance, lorsque ces vils calomniateurs suçaient le lait des cours et vivaient de tous les préjugés dominants. Que m’importe? Ces coups de bas en haut ne m’arrêteront pas dans ma carrière. Je leur dirai : Répondez, si vous pouvez; calomuiez ensuite tant que vçus voudrez. Je rentre donc dans la lice, armé de mes seuls principes et de la fermeté de ma conscience. Je vais poser, à mon tour, le véritable point de la difficulté avec toute la netteté dont je suis capable, et je prie tous ceux de mes adversaires qui ne m’entendront pas, de m’arrêter afin que je m’exprime plus clairement, car je suis décidé à déjouer les reproches tant répétés d’évasion, de subtilité, d’entortillage; et s’il ne tient qu’à moi, cette journée dévoilera le secret de nos loyautés respectives. M. Barnave m’a fait l’honneur de ne répondre qu’à moi ; j’aurai pour son talent le même égard, et je vais à mon tour essayer de le réfuter. Vous avez dit : Nous avons institué deux pouvoirs distincts, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif; l’un est chargé d’exprimer la volonté nationale, et l’autre de l’exécuter ; ces deux pouvoirs ne doivent jamais se confondre. Vous avez appliqué ces principes à la question sur laquelle nous délibérons, c’est-à-dire à l’exercice du droit de la paix et de la guerre. Vous avez dit : Il faut distinguer l’action et la volonté ; l’action appartiendra au roi, la volonté au Corps législatif. Ainsi, lorsqu’il s’agira de déclarer la guerre, cette déclaration, étant un acte de volonté, ce sera au Corps législatif à la faire. Après avoir exposé ce principe, vous l’avez appliqué à chaque article de mon décret. Je suivrai la même marche; je discuterai d’abord le principe général ; j’examinerai ensuite l’application que vous en avez faite à l’exercice du droit de la paix et de la guerre; enfin je vous suivrai pas à pas dans la critique de mon décret. Vous dites que nous avons deux délégués distincts, l’un pour l’action, l’autre pour la volonté; je le nie. ' Le pouvoir exécutif, dans tout ce qui tient à l’action, est certainement très distinct du pouvoir législatif; mais il n’est pas vrai que le Corps législatif soit entièrement indépendant du pou» 650 (Ai«en,Jjlée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [M mai 1790.) voir exécutif, même dans l'expression de la volonté générale. En effet, quel est l’organe de cette volonté, d’après notre Constitution? C’est tout à la fois l'Assemblée des représentants de la nation ou le Corps législatif, et les représentants du pouvoir excutif; ce qui a lieu de cette manière : le Corps législatif délibère et déclare la volonté générale; le représentant du pouvoir exécutif a le double droit ou de sanctionner la résolution du Corps législatif, et cette sanction consomme la loi; ou d’exercer le veto qui lui est accordé pour un certain espace de temps, et la Constitution a voulu que durant cette période la résolution du Corps législatif ne fût pas loi: il n’est donc pas exact de dire que notre Constitution a établi deux délégués entièrement distincts, même lorsqu’il s’agit d’exprimer la volonté générale. Nous avons au contraire deux pouvoirs qui concourent ensemble dans la formation de la loi, dont l’un fournit une espèce de vœu secondaire, exerce sur l’autre une sorte de contrôle, met dans la loi sa portion d’influence et d’autorité. Ainsi la volonté énérale ne résulte pas de la simple volonté du orps législatif. Suivons maintenant l’application de votre principe à l’exercice du droit de la paix et de la guerre. Vous avez dit : Tout ce qui n’est que volonté en ceci, comme dans tout le reste, retourne à son principe naturel, et ne peut être énoncé que par le pouvoir législatif; ici je vous arrête, et je découvre votre sophisme en.un seul mot que vous-même avez proféré ; ainsi vous ne m’échapperez pas. Dans votre discours, vous attribuez exclusivement l’énoncialion de la volonté générale... à qui ? Au pouvoir législatif ; dans votre décret, à qui l’attribuez-vous V Au Corps législatif. Sur cela, je vous rappelle à l’ordre. Vous avez forfait la Constitution. Si vous entendez que le Corps législatif est le pouvoir législatif, vous renversez par cela seul toutes les lois que nous avons faites ; si, lorsqu’il s’agit d’exprimer la volonté générale, en fait de guerre, le Corps législatif suffit... et par cela seul le roi n’ayant ni participation, ni influence, ni contrôle, ni rien de tout ce que nous avons accordé au pouvoir exécutif par notre système social, vous auriez en législation deux principes différents, l’un pour la législation ordinaire, l’autre pour la législation en fait de guerre, c’est-à-dire au milieu de la crise la plus terrible qui puisse agiter le corps politique; tantôt vous n’auriez besoin et tantôt vous n’auriez pas besoin, pour l’expression de la volonté générale, de l’adhésion du monarque... et c’est vous qui parlez d’homogénéité, d’unité, d’ensemble dans la Constitution 1 Ne dites pas que cette distinction est vaine ; elle l’est si peu, elle est tellement importante, à mes yeux et à ceux de tous le bons citoyens qui soutiennent ma doctrine, que si vous voulez substituer, dans votre décret, à ces mots : le Corps législatif , ceux-ci: le pouvoir législatif, et définir cette expression, en l’appelant un acte de l’Assemblée nrtionale, sanctionné par le roi, nous serons, par cela seul, d’accord sur les principes; mais vous reviendrez alors à mon décret, parce qu’il accorde moins au roi. Vous ne me répondez pas... Je continue. Cettecontradictiondevientencore plus frappante dans l’application que vous avez faite vous-même de votre principe au cas d’une déclaration de guerre. Vous avez dit : Une déclaration de guerre n’est qu’un acte de volonté, donc c’est au Corps législatif à l’exprimer. J’ai sur cela deux questions à vous faire, dont chacune embrasse deux cas différents : Première question. Entendez-vous que la déclaration de guerre soit tellemeut propre au Corps législatif que le roi n’ait pas l’initiative, ou entendez-vous qu’il ait l’initiative? Dans le premier cas, s’il n’a pas l’initiative, entendez-vous qu’il n’ait pas aussi le veto? Dès lors, voilà le roi sans concours dans l’acte le plus important de la volonté nationale. Comment conciliez-vous cela avec les droits que la Constitution a donnés au monarque? Comment le conciliez-vous avec l’intérêt public? Vous aurez autant de provocateurs de la guerre que d’hommes passionnés. Y a-t-il ou non de grands inconvénients à cette disposition? vous ne niez pas qu’il n’y en ait. Y en a-t-il, au contraire, à accorder l’initiative au roi? J’entends par l’initiative une notification, un message quelconque; vous ne sauriez trouver aucun inconvénient. Voyez d’ailleurs l’ordre naturel des choses. Pour délibérer il faut être instruit. Par qui le serez-vous, si ce n’est par le surveillant des relations extérieures? Ce serait une étrange Constitution que celle qui, ayant conféré au roi le pouvoir exécutif suprême, donnerait un moyen de déclarer la guerre sans que le roi en provoquât la délibération par les rapports dont il est chargés; votre Assemblée ne serait plus délibérante, mais agissante; elle gouvernerait. Vous accorderez donc l’initiative au roi. Passons au second cas. Si vous accordez au roi l’initiative, ou vous supposez que cette initiative consistera dans une simple notification ; ou vous supposez que le roi déclarera le parti qu’il veut prendre. Si l’initiative du roi doit se borner à une simple notification, le roi, par le fait, n’aura aucun concours à une déclaration de guerre. Si l’initiative du roi consiste, au contraire, dans la déclaration du parti qu’il croit devoir être pris ; voici la double hypothèse sur laquelle je vous prie de raisonner avec moi. Entendez-vous que le roi, se décidant pour la guerre, le Corps législatif puisse délibérer la paix? je ne trouve à cela aucun inconvénient. Entendez-vous, au contraire, que le roi voulant la paix, le Corps législatif puisse ordonner la guerre et la lui faire soutenir malgré lui ? je ne puis adopter votre système, parce que ici naissent des inconvénients auxquels il est impossible de remédier. De cette guerre, délibérée malgré le roi, résulterait bientôt une guerre d’opinion contre le monarque, contre tous ses agents. La surveillance la plus inquiète présiderait à toutes les opérations; le désir de les seconder, la défiance contre les ministres porterait le Corps législatif à sortir de ses propres limites. On proposerait des comités d’exécution militaire, comme on vous a proposé naguère des comités d’exécution politique; le roi ne serait plus que l’agent de ces comités; nous aurions deux pouvoirs exécutifs, ou plutôt le Corps législatif régnerait. Ainsi, par la tendance d’un pouvoir sur l’autre, notre propre Constitution se dénaturerait enliè-ment; de monarchique qu’elle doit être, elle deviendrait purement aristocratique. Vous n’avez pas répondu à cette objection et vous n’y répondrez jamais. Vous ne parlez que de réprimer les (Assemblé® nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 122 mai 1790.] 65 7 abus ministériels, et moi jevous parle des moyens de réprimer les abus d’un assemblée représentative; je vous parle d’arrêter la pente insensible de tout gouvernement vers la forme dominante qu’on lui imprime. Si, au contraires, le roi voulant la guerre, vous bornez les délibérations du Corps législatif à consentir la guerre ou à décider qu’elle ne doit pas être laite, et à forcer le pouvoir exécutif de négocier la paix, vous évitez tons les incon vénients : et remarquez bien, car c’est ici que se distingue éminemment mon système, que vous restez parfaitement dans les principes de la Constitution. Le veto du roi se trouve, par la nature des choses, presque entièrement émoussé en fait d’exécution; il peut rarement avoir lieu en matière de guerre. Vous parez à cet inconvénient; vous rétablissez la surveillance, le contrôle res-pectifqu’a voulu la Constitution, en imposant aux deux délégués de la nation, à ses représentants amovibles, et à son représentant inamovible, le devoir mutuel d’être d’accord lorsqu’il s’agit de guerre. Vous attribuez ainsi aü Corps législatif la seule faculté qui puisse le faire concourir sans inconvénients à l’exercice de ce terrible droit. Vous remplissez en même temps l’intérêt national, autant qu’il est en vous, puisque vous n’aurez besoin, pour arrêter le pouvoir exécutif, que d’exiger qu’il mette le Corps législatif continuellement à portée de délibérer sur tous les cas qui peuvent se présenter. Il me semble, Messieurs, que le point de la difficulté est enfin complètement connu, et que pour un homme à qui tant d’applaudissements étaient S réparés au dehors et au dedans de cette salle, . Barnave n’a point du tout abordé le question. Ce serait un triomphe trop facile maintenant que de le poursuivre dans les détails, où, s’il a fait voir du talent de parleur, il n’a jamais montré la moindre connaissance d’homme d’Etat, ni des afaires humaines. Il a déclamé contre ces maux que peuvent faire et qu’ont faits les rois , et il s’est bien gardé de remarquer que dans notre Constitution le monarque ne peut plus désormais être despote, ni rien faire arbitrairement; et s’il s’est bien gardé surtout de parler des mouvements populaires, quoiqu’il eût lui-même donné l’exemple de la facilité avec laquelle les amis d’une puissance étrangère pourraient influer sur l’opinion d’une Assemblée nationale en ameutant le peuple autour d’elle et eu procurant dans les promenades publiques des battements de mains à leurs agents. Il a cité Périclès faisant la guerre pour ne pas rendre ses comptes; ne semblerait-il pas à l’entendre que Périclès ait été un roi ou un ministre despotique? Périclès était un homme qui, sachant flatter les passions populaires et se faire applaudir à propos, en sortant de la tribune, par ses largesses ou celles de ses amis, a entraîné à la guerre du Pélopouèse..., qui? l’Assemblée nationale d’Athènes. J’en viens à la critique sur mon projet de décret, et je passerai rapidement en revue les diverses objections : Art 1er, « que le droit défaire la paix et la guerre appartient à la nation. » M. Barnave soutient que cet article est inutile; pourquoi donc inutile? Nous n’avons pas délégué la royauté, nous l’avons reconnue comme préexistante à notre Constitution : or, puisqu’on a soutenu dans cette Assemblée que le droit de faire la paix et la guerre est inhérent à la royauté, puisqu’on a prétendu que nous n’avions pas même la faculté de le déléguer, j’ai donc pu, j’ai dû énoncër dans mon décret que le droit de la paix i” Série. T. XV. et de la guerre appartient à lu nation. Où est-le piège ? 2. « Que l’exercice du droit de la paix et de la guerre doit être délégué coucurremment au Corps législatif et au pouvoir exécutif de la manière suivante. » Selon M. Barnave, cet article est contraire aux principes et dévoile le piège de mon décret. Telle est en effet la question, la véritable question qui nous agite. Parlez nettement : les deux délégués de la nation doivent-ils concourir ou non à l’expression de la volonté générale? S’ils doivent y concourir, peut-on donner à l’un deux une délégation exclusive dans l’exercice du droit de la paix et de la guerre? Comparez mon article avec le vôtre; vous n’y parlez ni d’initiative proprement dite, ni de proposition, ni de sanction de la part du roi. Si je ne parle pas non plus ni de proposition, ni de sanction, je remplace ce concours par un autre. La ligne qui nous sépare est donc bien connue : c’est moi qui suis dans la Constitution, c’est vous qui vous en écartez. Il faudra bien que vous y reveniez. De quel côté est le piège? Il est, dites-vous, en ce que je n’exprime pas de quelle manière le concours de ces deux délégués doit s’exercer. Quoi, je 11e l’exprime pas I Que signifient donc ces moisete lamanière suivante, et quel est l’objet des articles qui suivent? N’ai-je pas dit nettement dans plusieurs de ces articles que la notification estau roi, et la résolution, l’approbation, l’improbation àl’Assembléé nationale? Ne résulte-t-il pas évidemment de chacun de mes articles que le roi ne pourra jamais entreprendre la guerre, ni même la continuer, sans la décision du Corps législatif? Où est te piège? Je ne connais qu’un seul piège dans cette discussion, .c’est d’avoir affecté de ne domier au Corps législatif que la décision delà guerre et de la paix, et cepen-dantd’avoir, par le fait, au moyen d’une réticence, d’une déception de mots, exclu entièrement le roi de toute participation, de toute influence à l’exercice du droit de la paix et de la guerre. Je ne connais qu’un seul piège dans cette affaire; mais ici un peu de maladresse vous a dévoilé : c’est en désignant la déclaration de la guerre dans l’exercice du droit, comme un actede pure volonté, de l’avoir en conséquence attribuée au Corps législatif seul, comme si le Corps législatif, qui n’est pas le pouvoir législatif, avait, sans nul concours du monarque, l’attribution exclusive de la volonté. Troisième article. Nous sommes d’accord. Quatrième article. Vous avez prétendu que je n’avais exigé la notification que dans le cas d’hostilités, que j’avais supposé que toute hostilité était une guerre, et qu’ainsi je laissais faire la guerre sans le concours du Corps législatif. Quelle insigne mauvaise foi! J’ai exigé la notification dans le cas d'hostilités imminentes ou commencées , d'un allié d soutenir , d’un droit à conserver par la force des armes ; ai-je ou non compris tous les cas? où est le piège? J’ai dit, dans mon discours, que souvent des hostilités précéderaient toute délibération; j’ai dit que ces hostilités pourraient être telles que l’état de guerre fût commencé; qu’avez-vous répondu? Qu’il n’y avait guerre que par la déclaration de guerre. Mais disputons-nous sur les choses ou sur les mots? Vous avez dit sérieusement ce que M. de Bougain ville disaitaucombat de la Grenade, dansun moment de gaîlé héroïque : les boulets roulaient sur son bord, il cria à ses officiers ; Ce qu'il y a I d'aimable, Messieurs , c'est que nous ne sommes point 42 gg8 [Assemblée nationale�] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mai 1790. J en guerre ; et, en effet, elle n’était point déclarée. Vous vous êtes longuement étendu $ur le pas actuel de l’Espagne. Une hostilité existe; l’Assemblée nationale d’Espagne n’aurait-elle pas à délibérer? Qui, sang doute, je l’ai dit, et mon dépret a formellement prévu ce cas; ce sont des hostilités commencées, un droit à conserver, une guerre imminente, Donc, avez-vous conclu, l’hostilité ne constitue pas l’état de guerre. Mais si, au lieu de deux navires pris et relâchés dans le Nord-Gastle, il y avait eu un combat entre deux vaisseaux de guerre; si pour les soutenirdeux escadres s’étaient mêlées de la querelle, si un général entreprenant eût poursuivi le vaincu jusque dans ses ports, si une île importante avait été enlevée, n’y aurait-il pas alors état de guerre? Ce sera tout ce que vous voudrez; mais puisque ni votre décret ni le mien ne présentent le moyen de faire devancer de pareilles agressions par la délibération du Corps législatif, vous conviendrez que ce n’est pas là la question ; mais où est le piège? Cinquième article. J’ai voulu parler d’un fait que vous ne prévoyez pas dans votre décret; dans lecasd’upehostilité reçue et repoussée, il peut exister une agression coupable; la nation doit avoir le droit d’en poursuivre l’auteur, et le devoir de le punir; il ne suffit pas de ne pas faire la guerre, il faut réprimer celui qui, par une démarche imprudente ou perfide, aurait couru le risque ou tenté de nous y engager. J’en indique le moyen : est-ce là un piège ? Mai?* dites-vous, je suppose donc que le pouvoir exécutif a le droit de commencer line hpstili(é, de commettre unp agression. Non, je ne lui dtmne pas ce, droit puisque je le lui ôte formellement; je pe permets pas l’agression, puisque je proposé de la punir-Que fais-je donc? je raisonne sur un fait possible, et que ni vous ni moi ne pouvons prévenir, Je ne puis pas faire que le dépositaire suprême de toutes les forces nationales n’ajt pas de grands moyens et les occasions d’en abuser; mais çet inconvénient ne se trouve-t-il pas dans tous les systèmes? ce sera, si vous le voulez, le mal de la royauté ; mais prétendez-vous que des institutions humaines, qu’un gouvernement fait par des boum mes pour des hommes soit exempt d’inconvénients ? prétendez-vous, parce que la royauté a des dangers, nous faire renoncer aux avantages de la royauté? dite?-le nettement; alors ce sera à nous de déterminer si, parce que le feu brûle, nous devons nous priver de la chaleur, de la lumière que nous empruntons de lui. Tout peut se soutenir, excepté l’inconséquence; dites-nous qu'il ne faut pas de roi, ne nous dites pas qu’il ne faut qu’un roi impuissant, inutile. Art. 6, 7 et 8. Vous ne les avez pas attaqués, je crois ; ainsi nous sommes d’accord ; mais convenez que celui qui impose au pouvoir exécutif des limitations qu’aucun autre décret n’a présentées, n’a pas doté d’usurpation la puissance royale, comme on n’a pas rougi de le dire: convenez qu’aussi bien qu’un autre il sait munir de précautions constitutionelles les droits du peuple : Convenez que, lorsque ce peuple égaré le menace, il défend encore ce peuple mieux que vous. « Art. 9. Que dans le cas où le roi fera la guerre en personne, le Corps législatif aura le droit de réunir tel nombre de gardes nationales, et dans tel endroit qu’il le trouvera convenable. » Vous me faites un grand reproche d’avcir proposé cette me ure. Elle a des inconvénients, sans doute; quelle institution n’en a pas? Si vous l’aviez saisie, vous auriez vu que si cette mesure avait été, comme vous l’avez dit, un accessoire nécessaire à mon système, je ne me serais pas borné Appliquer au cas, très rare sans doute, où le roi ferait la guerre en personne, mais que je l’aurais indiquée pour tous les cas de guerre indéfiniment. Si dans tout cela il y a un piège, ce piège est tout entier dans votre argumentation, et non dans le système de celui qui veut écarter le roi du commandement des armées hors des frontières, parce qu’il ne pense pas que le surveillant universel de la société doive être concentré dans des fonctions aussi harsadeuses ; il n’est pas dans le système de celui qui met dans votre organisation sociale le seul moyen d’insurrection régulière qui décide des principes de votre Constitution. Il y a évidemment de la mauvaise foi à chercher la faiblesse de mon système, ou quelque intention artificieuse dans la prévoyance d’un inconvénient présenté par tous ceux qui ont parlé avant moi. et qui existe également dans toutes les théories; car il est évident qu’un roi guerrier peut être égaré par ses passions et servi par ses légions élevées à la victoire, soit que le pouvoir législatif, soit que le pouvoir exécutif ait commencé la guerre. Si dans toutes les hypothèses constitutionnelles, ce malheur terrible peut également se prévoir, il n’y a d’autre remède à lui opposer qu’un remède ; vous et moi nous reconnaissons également le devoir de l’insurrection dans des cas infiniment rares, Est-ce un moyen si coupable que celui qui rend l’insurrection plus méthodique et plus terrible ? Est-ce un piège que d'avoir assigné aux gardes nationales leur véritable destination ? Et que sont ces troupes, sinon les troupes de la liberté ? Pourquoi les avons-nous instituées, si elles no sont pas éternellement destinées à conserver ce qu’elles ont conquis?.., Au reste, c’est vous qui les premiers nous avez exagéré oe danger: il existe ou il n’existe pas ; s’il n’existe pas, pourquoi l’avez-vous fait tant valoir? s’il existe, il menace mon système comme le vôtre. Alors acceptez mon moyen ou donnez-en un autre, ou n’en prenez point du tout, cela pPest égal, à moi qui ne crois à ce danger que comme à un prodige; aussi donnai-je mon consentement à l’amendement de M. Le Chapelier qui retranche cet article. Il est plus que temps de terminer ces longs dé? bats, Désormais j’espère que l’on ne dissimulera plus le vrai point de la difficulté. Je veux le concours du pouvoir exécutif à l’expression de la volonté générale en fait de paix et de guerre, comme la Constitution le lui a attribué dans toutes les parties déjà fixées de notre système social... Mes adversaires ne le veulent pas. Je veux que la surveillance de l’un des délégués du peuple ne l’abandonne pas dans les opérations les plus impoc-tantes de la politique, et mes adversaires veulent que l’un des délégués possède exclusivement la faculté du droit de la guerre; comme si, lors même que le pouvoir exécutif serait étranger à la confection de la volonté générale, nous avions àdélibérersurleseulfaitdedéclarationdela guerre que l’exercice du droit n’eutraînât pas une série d’opérations mixtes où l’action et la volonté se pressent et se confondent. Voilà la ligne qui nous sépare. Si je me trompe, encore une fois, que mon adversaire m’arrête, ou plutôt qu’il substitue dans son décret, à ees n&uts : le Corps législatif, ceux-ci, le pouvoir législatif \ e’eat-à-dire un acte émané des réprésentants de la nation et sanctionné par le roi, et nous sommes parfaitement d’aceord sinon dans la pratique, du moins dans la théorie; et nous verrons alors si mon décret ne réalise pas mieux que tout autre cette théorie. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sft mai im] ($9 Qa vous a proposé de juger fa question par le parallèle de ceux qui soutiennent l’affirmative et la négative; on vous a dit que vous verriez d’un côté dos houppes qui espèrent s’avancer dans les armées parvenir à gérer les affaires étrangères ; des hommes qui sont liés avec les ministres et leurs agents; de l’autre, le citoyen paisible, vertueux, ignoré, sans ambition, qui trouve son bonheur et sou existence dans l'existence» dans le bonheur commun. Je ne suivrai pas cet exemple. Je ne crois pas qu’il soit plus conforme aux convenances de la politique qu’aux principes de la morale, d’affiler le poignard dont on ne saurait blesser ses rivaux sans en ressentir bientôt sur son propre sein les atteintes, Je ne crois pas que des hommes, qui doivent servir la cause publique en véritables. frères d’armes, aient bonne grâce. à se combattre en vils gladiateurs, 4 lutter d’impu.iaiions et d’intrigues, et non de lumières et de talents ; à çher"» ch�r, dans la ruine et la dépression les uns des autres, de coupables succès, des trophées d’un jour, nuisibles à tout, et même à la gloire; mais je vous dirai ; Parmi ceux qui soutiennent ma doctrine, vous compterez tous les hommes modérés qui ne croient pas que la sagesse soit dans les extrêmes, ni que le courage d.e démqlir ne doive jamais faire pla.ce à, celui de reconstruire. : vous compterez la plupart de ces énergiques citoyens qui au commencement des Etats généraux (c’est ainsi que s’appelait alors cette Convention nationale, encore garrottée dans les langes de la liberté) foulèrent aux pieds tant de préjugés, bravèrent tant de périls, déjouèrent tant de résistances pour passer au sein des communes à qui çe çtéyofl-ment donna les encouragements et la force qui ont vraiment opéré notre {t évolution glorieuse; vous y verrez ces tribuns du peuple que là nation comp* tera longtemps encore, malgré les glapissements de l’envieuse médiocrité, au nombre des libérateurs de la patrie ; vous Y verrez des hommes dont le nom désarme la calomnie, et dont (es libellâtes les plus effrénés n’ont pas essayé de ternir la réputation nui’hommes privés, ni d’hommes pubiios; des hommes, qqlin, qui, sans tache, san§' intérêt et sans crainte, s'honoreront jusqu’au tombeau de leurs amis et de leurs ennemis. Je conclus à ce que l’on mette en délibération mon projet de décret, amendé par l*e Chapelier. (Qn demande à, aller aux voix,) M. le vicomte de Jüoailles demande que M. Barnave soit entendu. L’Assemblée est consultée, et le président prononce que la discussion est fermée. M, Charles