[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 124 juillet 1791. j 592 illégalement, cassez le régiment. Or, Messieurs, il n’y a personne de nous qui veuille en venir à cette extrémité. Nous devons donc nous en tenir à rétablir la discipline par les moyens les pins doux. Je demande que l’article soit mis aux voix. M. Pétion de Villeneuve. Je ne prétends pas approuver les destitutions illégales, mais nous ne pouvons pas nous dissimuler qu’il y en a eu qui, par la nature des choses, ont été utiles au salut public. ( Murmures prolongés.) M. Martineau. Ce n’est pas vrai, à l’ordre! M. Pétion de Villeneuve. Nous ne pouvons pas nous dissimuler non plus que si les soldats se fussent livrés à l’impulsion que voulaient leur donner leurs officiers, assurément il aurait pu en résulter de très grands malheurs. (Applaudissements dans les tribunes.) La dernière partie de l’article est conçue ('ans des dispositions générales et sans aucune espèce d’exception;, or, il est des régiments où les destitutions ont pu s’opérer sans même que les sous-ofticiers y aient aucune part. Un membre : C’est impossible. Que les chefs soient entendus et rendent compte ainsi que les officiers généraux, voilà ce qui peut être admis; mais que les officiers ne puissent parvenir à aucune place sans l’assentiment des chefs, c’est comme si l’on disait qu’il n'y aura pas de sous-oliiciers admis aux places vacantes. Je demande dune que la dernière disposition de l’article soit retranchée, et qu’il ne soit pas dit que les sous-officiers ne pourront parvenir aux places vacantes, que�sur la demande expresse de leurs chefs. M. Emmery, rapporteur. J’v consens. Plusieurs membres : Non ! non I M. Boissy-d’Anglas. Je demande que l’article soit ainsi conçu : « à l’égard des régiments qui se permettront... » (Rires ironiques. — Murmures.) M. Alexandre de Eameth. Je suis persuadé que les intentions des membres qui viennent de parler et qui attaquent cet article sont extrêmement pures; mais je crois en môme temps que ces intentions ne sont pas éclairées, et que, s’il y a dans ce moment un danger pour la Constitution, ils le trouveront dans sa faiblesse qui encouragerait au mépris des lois. M. Pétion a eu raison de dire que c’était une mesure d’indulgence que proposait le comité, car les délits que l’on vous dénonce méritent une punition plus grave; ce n’est pas dans le moment de crise, ce n’est pas au commencement de la Révolution que les régiments ont renvoyé leurs officiers, c’est à une époque très rapprochée de celle-ci, c’est depuis 2 ou 3 mois. Ju remarquerai même que, pour renvoyer ces officiers, les régiments ont contrevenu de la manière la plus formelle à vos décrets; que relui des régiments qui paraît dans la position la plus excusable, le régiment de Dauphiné, nous a envoyé un procès-verbal qui était rédigé par un comité délibérant, ayant pour président l’adjudant du régiment. Je rappellerai ici que 6 comités étaient réunis lorsque cette affaire a été portée à l’Assemblée, qu’ils étaient composés de 50 ou 60 membres, et qu’il n’y a pas eu plus de 2 ou 3 voix pour s’opposer au licenciement du régiment; on alla même jusqu’à vouloir qu’il fût cassé. Un membre : N’eût-il pas fallu les décimer 1 M. Alexandre de Lameth. Je vous prie, Monsieur, de faire valoir les moyens qui peuvent être employés pour disculper un corps de sous-officiers qui, au mépris des décrets, se rassemble en comité, délibère, nomme un président, et se permet de renvoyer ensuite ses officiers. Si l’on n’adoptait pas les mesures du comité, il s’ensuivrait que les régiments qui ont renvoyé leurs ■ fliciers seraient beaucoup mieux traités que les autres, et leurs torts tourneraient à leur profit. Ainsi donc, vous récompenseriez le crime, l’infraction à vos décrets. Messieurs, le moment est arrivé, j’ai déjà eu l’honneur de vous le dire, et le sentiment que j’ai exprimé est devenu un cri de ralliement dans cette Assemblée; le moment est arrivé de faire exécuter les lois, de les faire exécuter fortement; c’est là qu’est le complément de la Révolution; c’est le salut de la nation. Etablissez la discipline, vous maintiendrez la liberté. (Vifs applaudissements.) Plusieurs membres: Aux voix! aux voix! (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Delavigne. Je demande la suppression du mot illégales. M. Enunery, rapporteur. J’adopte. Voici, en conséquence, avec les amendements de MM. Pétion et Delavigne, quelle serait la rédaction de l’article : Art. 4 (ancien art. 7). « La disposition de l’article 5 du décret du 24 juin dernier, par laquelle la moitié des emplois vacants dans les différents corps a été réservée aux sous-officiers des corps dans lesquels ils vaqueraient, n’aura pas lieu à l’égard des régiments qui se sont permis des destitutions; et, dans ces mômes régiments, la nomination aux places d’officiers, spécialement affectées aux sous-officiers par la loi du 23 septembre 1790, demeurera suspendue, jusqu’à ce qu’il en ait été au rement ordonné, d’après le compte qui pourra être rendu par les officiers généraux et supérieurs, de la bonne conduite de ces mêmes corps. » (Gel article est mis aux voix et adopté.) � (La suite de la discussion est renvoyée à demain.) M. le Président. Six grenadiers de la garde nationale , qui vont partir pour aller défendre les frontières en qualité de gardes nationales volon-t ires envoyées par la ville de Paris, demandent à être admis à prêter le serment dans le sein de l’Assemblée. (L’Assemblée décrète que ces grenadiers seront admis à la barre.,) Les 6 grenadiers sont introduits. Ce sont MM. Fleury, lieutenant de grenadiers, Penault, Louvrier, Morlet aîné, Petit et Bonneau; ils prê— lent le serment. M. le Président, an nom de l'Assemblée, leur dit : « Vous avez pris les armes pour maintenir la [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [2 > juillet 1791. 593 Constitution, et la garantir des efforts du despotisme. Vous avez offert, avec empressement, de marcher aux frontières pour la défense de la patrie. L’Assemblée nationale applaudit à votre patriotisme, et ne doute pas que l’union de tous les bons citoyens aura l 'effet de rendre nulles les tentatives des ennemis du dehors et les intrigues des ennemis du dedans. » M. Delavigne, secrétaire , donne lecture des adresses suivantes : Adresse des directoires du département du Loiret et du district d'Orléans et des officiers municipaux de la même ville, qui expriment leur adhésion aux décrets des 21 juin et 15 juillet. » Le despotisme régnait, disent-ils, vous l’avez anéanti ; l’édifice que vous avez élevé à la Constitution, les factieux et les novateurs ont voulu l’ébranler : vous venez de le consolider sur ses bases par les décrets des 21 juin et 15 juillet. Fidèles à ces principes, les administrateurs du département dû Loiret, du directoire du district d’Orléans et les officiers municipaux réunis, renouvellent entre vos mains l’engagement de se rallier toujours autour de vous, comme au centre de l’autorité légitime, et de mourir, s’il le faut, pour l’exécution de vos décrets. » Adresse de la société des amis de la Constitution séant à Orléans, gui manifeste son approbation sur le décret qui a consacré l'inviolabilité du chef du pouvoir exécutif. Adresse de la garde nationale d'Orléans, qui envoie à l’Assemblée nationale le renouvellement de ses serments dans les circonstances présentes et de sa soumission pleine et entière à tous ses décrets. Adresse des membres de la société des amis de la Constitution de Strasbourg, qui exposent l’insuffisance de la publication en français , dans leur département et les départements voisins, des décrets de l’Assemblée nationale. Ils demandent qu’il soit enfin pris des mesures pour faire faire la promulgation des lois dans un idiome entendu par ceux qui doivent les exécuter, et qui les respecteront dès qu’ils les 'connaîtront. (Cette adresse est renvoyée au comité des rapports.) Adresse des membres du directoire de district , de la municipalité, du tribunal du district, de paix, de la gendarmerie et garde nationale, et de la société des amis de la Constitution de la ville de Loudun. Adresse du conseil général de la commune d'Arras. Ces deux adresses contiennent l’engagement le plus formel de respecter et faire respecter les décrets de l’Assemblée nationale. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention honorable de ces adresses au procès-verbal.) M. le Président fait donner lecture d’une lettre de M. Tarbê, ministre des contributions publiques, qui annonce à l’Assemblée la nomination dos sieurs Le Breton, Poissant et Bosclnt, pour complémr le nombre des régisseurs nationaux de l’enregistrement, domaines et droits réunis, fixé à 12 par la loi du 27 mai 1791. Le ministre représente à l’Assemblée combien il serait lro SERIE. T. XXVIII. utile de mettre la dernière main à ce qui concerne les régies de l’enregistrement et des douanes, en décrétant le code des douanes, les hypothèques, et quelques dispositions relatives à la mise eu possession de la régie uationale de l’enregistrement, dans la perception des revenus des domaines nationaux corporels. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre au comité des contributions.) M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DEFERMON. Séance du lundi 25 juillet 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. tes secrétaires fait lecture des procès-verbaux des séances du vendredi 22 juillet et du samedi 23 juillet au matin, qui sant adoptés. M. Lanjuinais donne lecture d’une adresse des communes de Saint-Aubin-du-Cormier et Gosné, district de Fougères , département d'Ille-et-Vilaine, de concert avec la garde nationale de la première ville, qui, après avoir célébré l’anniversaire de l’époque mémorable du 14 juillet, renouvellent à l’Assemblée nationale les assurances de leur respect et de leur attachement à la Constitution : ifs lui demandent d’achever ce sublime ouvrage avec les mêmes sentiments de constance, de fermeté et de courage qu’elle a toujours montrés, et de ne pas désemparer qu’elle ne soit consolidée. Un membre donne lecture d’une adresse du directoire da département de l'Aube qui a reçu le décret du 15 de ce mois comme une récompense de sa confiance dans l’Assemblée. « Il était digne d’elle, dit-il, de prouver, le 15 juillet 1791, que la force ne la dispensait pas de la justice, lorsque 2 ans auparavant, et dans le même temps, elle montrait à l’univers que la faiblesse ne la dispensait pas du courage. » Ce directoire fait hommage à l’Assemblée de son adresse, sur le même sujet, aux citoyens du département. M. I�eleu de la Ville-aux-Bois donne lecture d’une adresse du directoire du département de l' Aisne qui envoie à l’Assemblée l’extrait de sa délibération, du 21 de ce mois, contenant la soumission de Nicolas Briset, négociant et commandant de la garde nationale de Liesse, pour i’eniretien d’un des volontaires nationaux qui marcheront pour la défense des frontières. M. lieconteulx de Canteleu donne lecture d’une lettre des membres du directoire du département de la Seine-Inférieure rendant compte à l’Assemblée clu succès des moyens employés pour assurer le rétablissement de la tranquillité dans la municipalité d’Orbec, y maintenir l’exécution (1) Celte séance est incomplète au Moniteur. 38