[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, (27 avril 1790.] �95 tant néanmoins ceux qui se rachèteront pendant les deux premières années à dater du jour de la publication du présent décret. M. lè Président lit la liste des membres qui remplacent ceux sortant du comité des recherches et ceux du comité des rapports. Comité des recherches. MM. Poulain de Corbion. L’abbé Joubert. De Pardieu. Ledéan. Voidel. Cochon de L’Apparent. Payen-Boisneuf. Verchère de Reffye. Rousselet. De Macaye. De Sillery. Babey. Comité des rapports. MM. Delacour-d’Ambezieux. Varia. Anlhoine. L’abbé Royer, curé de Chavannes. Regnauld (de Nancy), Chabroud. Armand (de Saint-Flour). Garnier, de Paris. Salle (de Nancy), médecin. Vieillard, de Coutance Giraud Duplessis (de Nantes.) Huot de Goncourt. Trébot de Clermont (de Bretagne.) Boullé. L’abbé Latyl. M. le Président lit une lettre de M. le garde dessceaux, qui annonceque le roi a sauctionné: 1° Le décret de l’Assemblée nationale du 22 de ce mois, interprétatif de celui des 8 et 9 octobre dernier, concernant la réformation provisoire de la procédure criminelle ; 2° Le décret du même jour qui liquide les dépenses arriérées du garde-meuble de la couronne des années 1788 et 1789, non compris la somme de 64,428 livres qui, ayant été employée aux dépenses de l’Assembléé nationale, sera distraite des créances suspendues; 3° Et Sa Majesté a donné des ordres pour qu’en exécution du décret du 24, M. le président de la chambre des vacations du parlement de Bordeaux, se rende à la barre de l’Assemblée, le jour et à l’heure qu’elle jugera à propos d’indiquer. Signé : l’Arch. de Bordeaux. A Paris, le 26 avril 1790. L’Assemblée fixe la séance du soir de mardi 27, pour recevoir à la barre M. le président de la chambre des vacations du parlement de Bordeaux . La séance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE COMTE DE VIRIEU. Séance du mardi 27 avril 1790 (1). M. le comte de Crilion, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier, et des deux adresses suivantes : Adresse de la commune de la Rochefoucault, qui fait don de l’imposition des privilégiés pour les six derniers mois 1789, et exprime les sentiments de dévouement et de reconnaissance dont elle est pénétrée pour l’Assemblée nationale. Adresse d’adhésion de la commune de Gompome en Roussillon, qui rend compte des raisons locales qui l’ontdéterminée à se créer une municipalité particulière, et à se séparer de la commune de Notilly, à laquelle elle avait toujours été réunie. M. le Président se dispose à annoncer le résultat du troisième scrutin pour la nomination d’un nouveau président. M . Bouche. Je demande la parole avant cette annonce. M. le Président. (2) Plus la circonstance est délicate, plus l’Assemblée doit mettre d’ordre et de calme dans ses délibérations. En ce moment, j’ai rempli ma présidence, je mj puis accorder la parole : je crois que mon devoir, celui qu’on ne peut m’empêcher de remplir, est de rendre compte du résultat du scrutin... Puisque l’Assemblée est d’une opinion contraire, je vais la consulter. (L’Assemblée décide que M. Bouche sera entendu avant la proclamation du président nommé.) M. Bouche. J’abrégerai mes réflexions : je me bornerai à dire que l’histoire d’aucun peuple civilisé ne nous présente l’exemple d’aucune société présidée par un chi f, sans que ce chef eût prêté le serment d’observer les lois de cette même société ; que depuis le trône jusqu’aux moindres associations, tout homme élevé à une fonction publique renouvelle le serment qu’il a prêté comme simple individu de cette association .. Je propose, en conséquence, le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que tout membre entrant en exercice des fonctions qui lui auront été confiées par elle, renouvellera le serment prêté le 4 février, et jurera qu’il n’a jamais pris et ne prendra jamais parta aucun acte, protestation ou déclaration contre les décrets de l’Assemblée nationale, acceptés, ousanctionnéspar le roi, ou tendant à affaiblir le respect et la confiance qui leur sont dus. » (On applaudit, et l’on demande à aller aux voix.) M. le marquis de Saint-Simon demande la discussion pendant trois jours. M. de Lafare, évêque de Nancy. Je ne suis pas, comme le préopinant, versé dans l’histoire des peuples policés; mais sans doute je n’y trouverais pas ce qpe doit faire en ce moment l’Assemblée; je le chercherai dans le règlement. Le règlement dit : qu’après quinze jours d’exer-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (2) M. le marquis de Bounay, président sortant. 296 [Assemblée nationale*] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [27 avril 1790.] cice, un président quittera ses fonctions; qu’il sera procédé à son remplacement par la voie du scrutin, et que le résultat de ce scrutin sera proclamé. On vous propose, afin (l’éviter cette proclamation, une motion incidente. Je dis que cette proposition ne peut pas être délibérée; je dis que si cette motion était admise, elle serait un véritable outrage pour le président que la majorité de l’Assemblée aurait désigné. C’est quand le nouveau président sera installé, que cette motion pourra être proposée ; alors la loi ne paraîtra pas avoir été faite pour lui ; ellepourra devenir la loi générale pour cette assemblée. M. de Blauzat. En répondant au préopinant, je proposerai un amendement. Le règlement porte précisément une clause qui réserve à la majorité de l’Assemblée le droit d’y faire des changements. Des législateurs avaient omis de prononcer des peines contre le parricide; de‘même, l’Assemblée, en faisant son règlement, n’a pas pu croire qu’un jour la patrie se trouverait en danger entre les mains de ceux qui seraient chargés de défendre ses intérêts. Je ne fais aucune application de cette réflexion... On peut être tombé dans des erreurs, on peut les avoir reconnues; je crois qu'il suffirait d’exiger, non la déclaration qu’on n’a pas protesté, mais celle qu’on ne protestera pas à l’avenir; c’est l'objet de mon amendement. M. Bœderer. Quand un conseiller d’une cour devient president, il doit prêter un nouveau serment : la motion de M. Bouche est conforme à cet usage. M. le baron de Juigné. M. le président d’hier a annoncé qu’il fallait choisir son successeur entre M. le duc d’Aiguillon et M. le comte de Yirieu : l’Assemblée s’est retirée en règle ; elle a nommé M. de Yirieu... M. le Président. L’Assemblée ne sait pas qui elle a nommé, quand le scrutin n’est pas proclamé. (On ferme la discussion.) La question préalable sur la motion de M. Bouche est invoquée et rejetée. Quelques amendements sont proposés et écartés par la question préalable. M. le Président donne une nouvelle lecture de la motioQ de M. Bouche qui est décrétée ainsi qu’il suit ; « L’Assemblée nationale décrète que désormais tout membre entrant dans l’exercice des fonctions qui lui auront été confiées par elle, renouvellera le serment prêté le 4 février dernier, et jurera qu’il n’a jamais pris et ne prendra jamais part à aucuns actes, protestations ou déclarations contre les décrets de l’Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi, ou tendant à affaiblir le respect et la confiance qui leur sont dus. # M. le Président. Le résultat du scrutin a donné à M. de Virieu 393 voix, et à M. le duc d’Aiguillon 371. M. de Virieu est donc président de l’Assemblée. M. le comte de Yirieu, placé près du fauteuil. J’ose espère que, vu la singularité de la circonstance, vous m’accorderez un peu d’attention. Je suis honoré, parla majorité des suffrages, d’une place très honorable et très difficile, que je n’avais pas ambitionnée ; mais je crois que quand cette majorité a prononcé sur mon sort, je ne suis plus moi, je suis à tous ceux qui m’ont honoré de leur choix. Yous venez de rendre un décret dont je demande la permission de relire le texte. (M. de Yirieu lit le décret.) Le serment exigé embrassant dans son étendue le passé, long et ancien, j’oserai dire que, dans une longue carrière, consacrée aux affaires publiques, il est possible d’avoir eu une opinion particulière, et de l’avoir exprimée. On peut excuser celui qui, au milieu de ces événements qui ont compromis l’honneur du nom français et le salut public, interprétant les différents actes qu'il a faits, tomberait dans l’inconvénient de ne pas entendre ce mot acte. Il est très peu de membres qui, tantôt seuls, tantôt avec d’autres députés, ne se soient permis d’écrire et de communiquer leurs pensées. Je déclare que ma mémoire ne me rappelle pas la totalité des actes auxquels j’ai participé; elle me rappelle cependant que je n’ai pris aucune part à des protestations contre des décrets acceptés ou sanctionnés; et si je me trompais moi-même, et si elle n’était point exacte cette déclaration que je fais devant l’Assemblée nationale, devant ma conscience, devant fl’Elre suprême qui m’entend et que je respecte, et que cette inexactitude me fût démontrée, le serment serait nul à l’égard des protestations que je pourrais avoir faites, et que j’aurais oubliées. Le serment n’embrasse aucun des cas que ma mémoire ne me rappelle pas. Si l’on connaît quelque protestation faite par moi, qu’on me la présente, et je me retirerai. Je n’ai jamais eu d’ambition pour moi, mais j!ai eu le désir du bien pour lui-même ; si j’avais moins respecté le décret qui me porte à la place de président, j’aurais refusé un honneur qui me confère des fonctions pour lesquelles je ne me sens pas les qualités nécessaires : j’accepte cet honneur, parce que je ne puis présumer que des considérations qui me soient personnelles aient déterminé à adopter le décret qui m’impose le serment que je vais faire. Je déclare que je renouvelle le serment du 4 février, qu’une seule fois avait suffi à mon cœur; je jure d’être fidèle à la nation, à la loi, au roi, et d’obéir aux décrets de l’Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi ; je jure de n’avoir pris, de ne prendre jamais part à aucuns actes, protestations ou déclarations contraires aux décrets de l’Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi, ou tendant à affaiblir le respect et la confiance qui leur sont dus. M. le marquis de Bonnay, avant de céder sa place à M. le comte de Yirieu, prononce le discours suivant ; Messieurs, je descends, pénétré de reconnaissance, de cette place où je ne montai qu’avec défiance et crainte ; votre indulgence m’a rendu possible une tâche que j’ai dû croire bien au-dessus de mes fdrces. Mériter les bontés de l’Assemblée nationale, et surtout, Messieurs, mériter son estime, tel est le double but que je m’étais proposé. J’emporte la satisfaction de penser que je ne l’ai jamais perdu de vue. M. le eomte de Yirieu occupe le fauteuil. L’Assemblée témoigne sa reconnaissance à M. le marquis de Bonnay, par de grands applaudissements et lui vote par acclamation des remercî-ments pour sa présidence. M. le Président annonce qu’il vient de recevoir