[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 janvier 1790.] 425 tiellement le département que le comité propose. Enfin, la Corse, coupée par de très hautes montagnes, infectée par des marais qui rendent plusieurs de ses cantons inhabitables, faible en population, puisque la sienne n’est que d’environ cent cinquante mille âmes sur une surface de plus de cinq cents lieues; la Corse ne nous a point paru susceptible de faire plus d’un département. Cependant le comité propose d’autoriser cette province à en former deux, si, dans la première. assemblée des représentants de cette île, ils jugent que cette disposition leur soit plus avantageuse. Voilà, Messieurs, à quel point en est l’opération que vous avez daigné confier à nos soins. Votre autorité devient nécessaire pour consommer ce grand travail; mais, avant que le comité vous soumette le projet d’un décret qu’il croit indispensable, souffrez qu’il dissipe l’inquiétude qu’aurait pu vous faire concevoir l’annonce d’un grand nombre de questions litigieuses qu’il faudra décider. Quatre de ces questions seulement tiennent au système général de la division de la France ; les autres, plus ou moins importantes, n’intéressent que quelques départements qui ne cesseront pas d’exister comme tels, quelle que soit votre opinion sur ces objets : la plupart même se réduisent à savoir si une petite ville, un bourg, ou quelques villages seront situés à droite ou à gauche d’une limite. Plus de soixante départements sont arrêtés dans leur circonscription, ou n’attendent, pour l’être, que la solution de quelques contestations, la plupart d’une très-faible importance. Plusieurs, dans le nombre, sont définitivement sous-divisés en districts; les autres le seraient de même, si le comité, forcé de se donner des masses avant de se livrer à des détails, avait pu s’occuper des prétentions très-nombreuses de toutes les villes qui aspirent à être chefs-lieux de district. Mais il ose assurer qu’aussitôt qu’un décret de l’Assemblée nationale aura fixé le nombre précis des départements, et mis le comité à même d’en avoir définitivement les limites, la sous-division en districts et cantons s’exécutera avec une célérité dont vous jugeriez mal par le temps employé à faire la division en départements. Bientôt, Messieurs, vous verrez terminé ce projet qui doit assurer la constitution, et préparer la régénération de l’Etat : entreprise unique, et dont le succès caractérisera, aux yeux de la postérité, le génie lier et hardi, le caractère facile et doux d’un peuple qui a osé surmonter tous ses préjugés, briser toutes ses habitudes, renverser des institutions barbares, mais consolidées par quatorze siècles d’existence, et leur substituer des lois sages, justes, humaines, qui rendront bientôt la force et l’énergie de la jeunesse à une nation qui touchait à la décrépitude. Le comité a l’honneur de proposer à l’Assemblée nationale : t° De décider si le Dauphiné, le pays d’Aunis, et celui des Basques, seront autorisés à former des départements ; l’un de 950 lieues de surface, le second de 100 et quelques lieues, et le troisième d’environ 140 ; ou si elle adopte l’opinion du comité à l’égard de ces trois provinces; 2° De décréter que d’ici à mercredi 13 janvier, inclusivement, les députés intéressés à chaque département seront tenus de produire au comité de constitution le tableau énonciatif de leurs limites respectives, arrêté et signé par tous; faute de quoi, autoriser le comité à les tracer et à vous les proposer lui -même; 3° D’arrêter encore, qu’à dater de lundi 11 du courant, il sera accordé chaque jour au comité de constitution, une heure fixe à chaque séance, soit pour faire à l’Assemblée le rapport des objets contentieux où sa décision sera nécessaire, soit pour lui présenter le tableau des départements terminés dans leurs sous-divisions, afin qu’elle puisse les décréter successivement, à mesure qu’ils lui seront offerts ; Et, 4° de décréter que les députés de chaque département seront tenus de se pourvoir de deux exemplaires de la topographie de leur département, composés des feuilles de la carte de l’Académie, collée sur toile, et d’une seule pièce, afin que de ces deux exemplaires, sur lesquels seront exprimées semblablement Les limites du département, et celles des districts et des cantons, et qui seront signés par les députés, par les membres du comité de constitution, et par les commis - saires-adj oints, Fun reste en dépôt aux archives nationales, et l’autre soit remis aux archives du département auquel il appartiendra (1). (A deux heures sonnant, M. le président consulte l'Assemblée pour savoir si le rapport sera continué ou si la chambre des vacations de Rennes sera introduite. — L’Assemblée décide que le rapport sera lu en entier]. Plusieurs membres demandent que le projet de décret présenté par M. Bureaux de Puzy soit mis en délibération. D’autres membres font remarquer que la chambre des vocations de Rennes, attend depuis trois quarts d’heures le moment d’être introduite. L’Assemblée renvoie au lendemain la délibération sur le projet de décret du comité de constitution. M. le Président fait introduire à la barre les membres composant l’ancienne chambre des vacations du parlement de Rennes, il leur dit : « Messieurs, « L’Assemblée nationale a ordonné à tous les tribunaux du royaume de transcrire sur leurs registres, sans retard et sans remontrances, toutes les lois qui leur seraient adressées. Cependant vous avez refusé l’enregistrement du décret qui prolonge les vacances de votre parlement. L’Assemblée nationale, étonnée de ce refus, vous a mandés pour en savoir les motifs. Comment les lois se trouvent-elles arrêtées dans leur exécution? Comment des magistrats ont-ils cessé de donner l’exemple de l’obéissance ? Parlez : l’Assemblée, juste dans les moindres détails, comme sur les plus grands objets, veut vous entendre; et si la présence du corps législateur vous rappelle l’inflexibilité de ses principes, n’oubliez pas que vous paraissez aussi devant les Pères delà Patrie, toujours heureux de pouvoir en excuser les enfants, et de ne trouver dans leurs torts que les égarements de leur esprit et de simples erreurs. » M. le Président de lia Houssaye, un des magistrats de la chambre des vacations, a tiré un (1) L’Assemblée nationale fit imprimer pour faire suite au rapport de M. Bureaux de Puzy, les Nouvelles réflexions sur la nouvelle division du royaume, par M. Rabaud de Saint-Etienne. Ce document est inséré dans le tome X des Archives, p. 37.