313 [Assemblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES-[18 juin 1791.] à la lanterne chez un peuple qui passe pour être très doux, a été seulement éloigné par ce penpl ■, qui a donné à tous les peuples, en insurrection, un exemple de clémence, ou, pour mieux dire, de respect pour l'humanité, qui est digne de considération. Ainsi je demande que mon amendement soit mis aux voix. M. Muguet de IVanthou, rapporteur. M. de Buttafuoco qui a paru au comité convaincu de la nécessité de mesures n’auiait pas dû faire répéter ici l’objection qu’il y a faite : le mot informations qui se trouve dans le projet de décret comprend tous les éclaircissements. Je vous dirai, Messieurs, que nous avons des preuves que le département de la Corse a montré le plus grand civisme dans tous les troubles qui ont existé, et qu’il ne faut pas le flétrir par une pareille disposition. ( Murmures à droite ; applaudissements à gauche.) M. l’abbé Peretti délia Rocca. S’il y a eu des troubles en Corse, c’est le département qui les a causés. M. SaliceUi. La plus grande preuve du civisme des administrateurs du département de ia Corse, c’est que M. deFulleville s’en plaint. (Murmures à droite; applaudissements à gauche.) Le projet de décret ne peut avoir d’aulre défaut que d’être trop modéré. Je vous avoue que, pour mon compte, je ne suis nullement alarmé de la rébellion qu ■ les moines et les prêtres, aidés d’un très petit nombre de factieux et de fanatiques, ont exci é dans la ville de Bastia. Je sais que, si le peuple des campagnes e-t obligé d’employer la force pour repousser ses attaques, il les mettra vite à la raison ( Applaudissements à gauche.) ; et je vous avoue que, s’il est réduit un jour à cette fatale nécessité, il se délivrera pour jamais d’une vermine dont il a été depuis si longtemps infecté. Je deraan le que le décret proposé par le comité soit adopté en entier. J’avoue que mon département se trouve dans une position particulière : il est éloigné de l'Assemblée nationale et il avoisine l’Italie. Le fanatisme a bimi fait quelques tentatives auprès de tous les départements du royaume, mais il a agi avec plus de force sur celui de la Corse. Il y a été allumé par des écrits envoyés de Paris mê ne, du sein de cettn Assemblée; il y a été allumé par la cour de Rome, car vous savez peut-être, Messieurs, que le Saint-Père, par une bonté paternelle toute, particulière, nous a envoyé un bref spécialement destiné au peuple de Corse dans lequel il parle constamment du < royaume de Corse », comme s’il ignorait que notre pavs n’est plus que petit département de l’Empire français. ( Murmures à droite.) Dans ces circonstances, le directoire du département a donné des preuves certaines du patriotisme le plus pur: il est certain que, sans lui, le fanatisme aurait fait d’autres progrès encore; c’est lui qui les a arrêtés; c’est encore lui qui les arrêtera. On a, dit-on, des plaintes à porter contre le département. Eh bien ! dans le projet de décret du comité, il est dit que les commissai es pourront [(rendre des informations sur toutes les causes des troubles et sur tous les faits arrivés en Corse. (Murmures à droite .) A droite : Cela n’est pas vrai. M. SaliceUi. Ça n’est pas vrai? A droite : Non! non! M. Salicettl. Si, c’est vrai! La question se trouve donc décidée. En conséquence, je demande la question préalable sur l’amendement de M. de Folie ville, et j’insiste pour que le projet de décret du comité soit mis aux voix. M. de Ruttafuoco. On veut soutenir le directoire du département de Corse; cependant il est dénoncé à l’Assemblée nationale par la ville de Bastia; toute l’île se plaint de lui... A gauche : Qui? qui? M. de Buttafuoco. Tout le monde. Nous avons à Pans des citoyens qui ont été arrachés de leur lit, mis au cachot, contraints do demander à s’embarquer et conduits à la mer, alors qu’il n’existait contre eux aucune preuve de délit. J’insiste sur l’amendement de M. de Folleviile. A gauche : La question préalable ! M. Groupil-Préfeln. Ou veut protéger les fanatiques et les rebelles. (L’Assemblée ferme la discussion et décrète u’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement e M. de Folleviile.) M. Eianjuinals. 11 y a une omission dans le décret; c’est qu’on n’y a pas indiqué le lieu où se tiendra la première assemblée électorale qui devait se réunir à Bastia. M. Muguet de ÜVanthou, rapporteur. Elle devra se réunir à Codé. 11 suflit d’ajouter au. premier paragraphe, après les mots : « sauf à la première assemblée électorale », ceux-ci: « qui se tiendra également à Codé. » (Assentiment.) Voici notre projet de décret avec l’addition proposée par M. Lunjuinais: « L’Assemblée nationale, après avoir ouï son comité des rapports, décrète : « 1° Que le directoire du département de Corse est autorisé à se transporter en la ville de Codé, pour y tenir provisoirement ses séances; que le siège de l’évêché sera également transféré dans ia même ville, sauf à la première assemblée électorale, qui se tiendra également à Corté, à présenter son vœu au Corps iégis alif, sur la ville où elle jugera qu’il soit le [dus convenable de fixer définitivement, soit le chef-lieu du département, soit le siège de J’évêché; <> 2° Que le roi sera prié d’envoyer dans le département de Corse une augmentation de force publique et deux frégates, et de donner des ordres au commandant militaire, nommé pour ce département, de s’y ren ire inces.-amment, lequel, ainsi que le trésorier militaire, fixera sa résidence en la ville de Corté ; 3° Que le roi sera également prié de nommer deux commissaires, lesquels, de concert avec le directoire du département, prendront toutes les mesures nécessaires pour rétablir la tranquillité publique et assurer l’exécution des lois; « 4° Que les commissaires prendront des informations sur ceux des troubles qui ont eu lieu en Corse, et notamment sur la conduite tenue, soit par les chefs des troupes de ligne, dans les jour- 314 [Assemblée nationale.] nées des 3, 4 et 5 juin, sauf, après le rapport qu’ils en feront, être statué par l’Assemblée nationale ce qu’elle pigera convenable; « 5° Qu’il sera informé par-devant le tribunal de Gorté, auquel l’attribution en est déférée, contre tous les auteurs et fauteurs des meurtres et attentats commis en la ville de Bastia, depuis le 29 mai jusqu’au 5 juin courant, ainsi que contre ceux qui ont provoqué la délibération du conseil général de la commune de cette ville, en date du 2 juin ; « 6° Que M. le président se retirera dans le jour par devers le roi, pour présenter le présent décret à sa sanction. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. le Président invite les membres de l’Assemblée à se retirer dans leurs bureaux respectifs pour y procéder à l’élection d’un nouveau président et de trois secrétaires. La séance est levée à deux heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DAUCHY. Séance du samedi 18 juin 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. Bouche. Messieurs, vous avez décrété, il y a un an, qu’il serait fait il inventaire des effets précieux renfermés dans le garde-meuble de la couronne : ce décret n’a point reçu dbxécution jusqu’ici. On ne connaît fias combien cet objet est important: il est extrêmement utile que la nation sache combien de richesses immenses nous allons metlre entre les mains du roi. Voici, en conséquence, le décret que je propose: « L’Assemblée nationale décrète que MM. Bioo, Ghristin etDelatre, trois de ses membres, commissaires nommés pour faire procéder à l’inventaire du garde-meuble de la couronne, conformément à l’article 6 du décret du 26 mai dernier, et au décret du 27 du même mois, vaqueront au fait de la commission dont ils sont chargés, et la suivront sans interruption jusqu’à ce qu’elle soit terminée. « Décrète que lesdits comm s aires en feront leur rapport le 8 du mois d’août prochain, sans autre délai, pour être statué par l’Assemblée nationale ce qu’il appartiendra, et que cependant le susdit inventaire sera imprimé et distribué à tous les membres de l’Assemblée nationale, au fur et à mesure qo’il y sera procédé. « Décrète, de plus, que le rapport des susdits commissaires sera également imprimé et distribué quatre jours au moins avant qu’il soit mis sous les yeux de l’Assemblée nationale. » Plusieurs membres : A l’ordre du jour ! à l’ordre du jour 1 M. Bouche. Gomment, Messieurs, vous voulez passer à l’ordre du jour lorsqu’on vous demande l’exécution de l’un de vos devoirs! Gomment, Messieurs, vous voulez laisser ignorer à la nation les richesses énormes qui sont renfermées dans ce [18 juin 1791.] dépôt 1 Vous voulez mettre ces richesses dans les mains du roi sans examen préalable! M. Voidel. Je crois qu’il est infiniment important de lixer le démi dans lequel ret inventaire doit être fait et rapporté ; en conséquence, j’appuie la motion de M. Bouche. (La motion de M. Bouche est mise aux voix et adoptée.) M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’un extrait du procès-verbal de l’assemblée primaire de la place Vendôme, tenue le 17 de ce mois : « Un membre do cette section ayant élevé la question de saY il’ si l’assemblée exprimerait un vœu sur le genre de pouvoirs qui pourraient être donnés aux députés à la prochaine législature, « L’assemblée de la section a pensé que, formant, comme assemblée primaire, une portion in'égrante de la souveraineté nationale, elle devait s’empresser de confirmer son vœu et l’assentiment que chacun de ses membres avait individuellement prononcé ; « Et quoique le sibmee de la notion à cet égard ne put êire considéré, interprété que comme une ratification expresse et formelle de tous les décrets de ses représentants, elle a cru devoir suivre l’impulsion de son patriotisme en déclarant unanimement qu’elle adhère purement et simplement à toutes les lois constitutionnelles décrétées par l’Assemblée nationale et acce nées par le roi, et qu’il n’est aucun de ses membres qui ne soit prêt à les défendre et à mourir pour la Constitu i on et la liberté. « Arrête que le présent procès-verbal est la seule instruction qu’elle entend donner à ses électeurs, et qu’il en sera envoyé copie aux 47 antres assemblées primaires, à l’Assemblée nationale, au département et à la municipalité. » (L’Assemblée entend la lecture du procès-verbal de l’assemblée primaire de la place Vendôme ; elle eu témoigne sa satisfaction, et ordonne qu’il en sera fait la mention la plus honorable dans son procès-verbal.) M. le Président fait donner leclure, par un de MM. les secrétaires, des adresses suivantes:� 1° Lettre de M. Volland , négociant , qui fait part à l’Assemblée d’un établissement de bienfaisance dont il est l’auteur. Il a fait une fabrique de taffetas agglutiuatif à l’instar et supérieur à celui de l’Augleœrre. La portion la plus considérable du produit de cette fabrique est consacrée à retirer, avant l’âge de 8 ans, de l’hôpital des Enfunts-Trouvés, les orphelins les plus sains, les mieux conformés et de la plus belle espérance, pour i« s faire élever chez des cultivateurs ou dans des ateliers, aux travaux des arts et de la campagne. — M. Volland observe que les échangions de cette fabrique ont été examinés en 1788 par la société royale de médecine, qui les a approuvés ; il communique de plus la lettre d’approbation que le comité de mendicité lui a écrite. (L’Assemblée entend la lecture de la lettre du sieur Volland avec satisfaction; elle rend hommage à son patriotisme et à son humanité, et ordonne qu’il en sera fait mention dans son procès-verbal.) 2 0 Lettre de M. Mentelle, déjà connu pour avoir offert à l’Assemblée une carte géographique de la France, ainsi qu’une nouvelle méthode pour ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur .