560 | Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 12 nivôse an II ( l,r janvier 1794 courriers extraordinaires dans les départements et aux armées de la République. » Compte rendit du Moniteur universel (1). Barère, au nom, du Comité de Scdut publie. Citoyens, le cri de la victoire a retenti des bords du Var aux bords du Rbin, etc. (Suit avec quelques légères variantes le texte du rapport que nous avons inséré ci-dessus d’après le document imprimé). Le projet de décret est adopté au milieu des applaudissements. La Convention ordonne l’impression du rap¬ port de Barère et l’envoi aux armées. Barère que les applaudissements de l’Assem¬ blée avaient conduit à la tribune, en redescend au bruit de nouvelles acclamations et des témoignages répétés de la satisfaction de lAs-semblée. Barère-Les citoyens qui ont apporté les dépêches de Landau vous demandent la parole. Un officier. Ce sont des soldats de la garnison de Landau qui, honorés de la confiance des représentants du peuple, ont été députés vers vous pour vous apporter les heureuses nou¬ velles que vous venez d’entendre. La ville de Landau est absolument délivrée, les esclaves ont fui comme des lâches aussitôt qu’ils ont été attaqués avec la vigueur qui est ordinaire aux soldats de la République; ils ont lâché pied sans tirer un seul coup de canon, ils ont abandonné leurs redoutes et leurs pièces d’artillerie. Nos braves les poursuivent, la baïonnette dans les reins, et leur prouvent que les machines des rois doivent fléchir devant les soldats de la liberté. Nos armées seront toujours victorieuses; nous marchons sur Spire, dans peu nous serons dans cette ville; nous pousserons nos conquêtes jusqu’au delà de Mayence; nous nous emparerons de tous les magasins; nous enlèverons toutes les subsis¬ tances, et nous reviendrons nous fortifier du côté de Spire. Je dis que nos armées seront toujours victorieuses car en passant à Wissem-bourg, on nous rapporta que Condé avait dit : La France n’est plus trahie, nous sommes f... (On applaudit.) Je n’ai rien à ajouter à ce qu’a dit le citoyen Barère sur Landau. Quant à ce qui est relatif à l’armée, je n’en suis pas instruit, parce que j’étais enfermé dans Landau; mais mon cama¬ rade va vous donner quelques détails. Un autre officier. Depuis la grande attaque du 6, les soldats républicains ne demandaient plus qu’à poursuivre les brigands, soutiens de la tyrannie; il n’y avait qu’un cri dans toute l’armée : Marchons, disait-on, sur des scélérats, que leurs corps fument le territoire français. L’armée n’attendait pas que les généraux eussent tracé leurs plans; elle ne voulait qu’aller à l’ennemi. Rien ne l’arrêtait, ni le mauvais temps, ni la fatigue, ni ses besoins. Tous les jours l’ennemi élevait de nouvelles redoutes; elle n’y voyait que de nouveaux lauriers à (1) Moniteur universel [n° 103 du 13 nivôse an II (jeudi 2 janvier 1794), p. 415, col. 2, et n° 104 du 14 nivôse an II (vendredi 3 janvier 1794), p. 417, col. 2]. cueillir. Les soldats n’avaient pas de souliers! les commandants leur disaient : « Nous allons en faire distribuer. — Des républicains n’ont pas besoin d’être chaussés pour se bien battre. » Barère vous a déjà dit que les soldats refu¬ sèrent du pain, lorsqu’ils marchaient sur Lan¬ dau. Ils répondirent lorsqu’on leur en offrit : « Nous sommes en chemin, marchons; nous en avons encore dans nos poches; d’ailleurs il y a des pommes de terre. » Citoyens représentants, tant que les soldats auront des sans-culottes à leur tête, ils vain¬ cront; ils observeront la discipline, on en fera tout ce qu’on voudra. En entrant dans Haguenan, les soldats ont observé le plus grand ordre. Les ennemis les accusent cependant d’être des pillards. Eh bien ! les esclaves ont eux-mêmes tout pillé, excepté les aristocrates; nous, nous avons même respecté les propriétés de ces derniers, parce que nous avons dit : « Elles appartiennent à la nation. (On applaudit.) Il faudrait tout le papier de Paris pour recueillir tous les traits d’héroïsme que je pour¬ rais vous citer. (On applaudit.) Les tirailleurs ennemis et les nôtres se bat¬ taient. Un de nos camarades blessé était tombé entre les deux feux. On en avertit un sergent du bataillon de l’Ain. Il se précipite entre les deux feux, charge le blessé sur son dos; mais, atteint lui-même d’une balle à la cuisse, il est obligé d’abandonner celui qu’il portait, et n’échappe qu’avec peine à la mort qu’il avait si courageusement bravée. On vous a parlé des redoutes de l’ennemi. L’art y avait déployé toutes les ressources. Le soldat les voyait s’élever chaque jour, et chaque jour on lui disait : « Il faut y aller, nous les délogerons; nous les f... dans le Rhin. » On attaque, et les républicains triomphent. Vingt pièces de canon restent en leur pouvoir avec 600 prisonniers. (On applaudit. ) Le président-Soldats de la République, les applaudissementc que vous a donnés la Con¬ vention ont dû vous faire connaître l’intérêt qu’elle a pris au récit que vous venez de lui faire. Les armées du Rhin et de la Moselle ont vaincu; c’est ainsi qu’elles ont prouvé qu’elles combattaient pour la liberté. Allez, soldats de la République, répétez à vos frères d’armes qu’ils ont bien mérité de la patrie. Moyse Bayle. Je demande que le président donne le baiser fraternel à ces braves gens. Cette motion est accueillie avec enthousiasme, et le baiser de la fraternité est donné au milieu des plus vifs applaudissements. Un membre [Charrier (1)] se plaint des fri¬ ponneries et des dilapidations qui se commettent dans l’habillement des troupes. Il entre à cet égard dans des détails qui donnent lieu à une assez longue discussion, à la suite de laquelle le décret suivant est rendu : « La Convention nationale décrète : « 1° Que l’adjoint du ministre de la guerre, chargé de l’administration de l’habillement des troupes, et que les administrateurs de la même (1) D'après les divers journaux de l’époque. 561 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 12 nivôse an il ( Ie® janvier 1794 administration seront envoyés au tribunal révo¬ lutionnaire pour y être jugés conformément à la loi; « 2° Que ceux qui seraient jugés coupables, subiront la peine de leur délit à la tête des armées; « 3° La Convention décrète en outre que les officiers généraux qui auront été jugés et con¬ damnés à la peine de mort par le tribunal révo¬ lutionnaire, subiront également leur supplice en présence des armées françaises; « 4° Le ministre de la guerre sera tenu de prendre sur-le-champ les mesures nécessaires pour le remplacement des administrateurs de l’habillement envoyés au tribunal révolution¬ naire par l’article 1er (1). » Compte rendu du Journal de Perlet (2). Charlier, organe du comité de l’examen des marchés, présente à la Convention nationale, des redingotes, des pantalons, des bas, destinés (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 217. D’après la minute du décret qui existe aux Archives nationales, carton C 287, dossier n° 852, les trois premiers articles sont de la main de Billaud-Varenne et le quatrième de la main de Bourdon (de l'Oise). (2) Journal de Perlel [n° 467 du 13 nivôse an II jeudi 2 janvier 1794), p. 259]. D’autre part, le Monileur universel [n° 104 du 14 nivôse an II (vendredi 3 janvier 1794), p. 419, col. 2] rend compte du rapport de Charlier et du décret rendu sur la motion de Billaud-Varenne dans les termes sui¬ vants : Charlier, au nom du comité des marchés, fait un rapport sur l’Administration de l’habillement; il expose aux regards de l’Assemblée une capote destinée à servir pour l’hiver aux défenseurs de la République; l’étoffe, non seulement très légère, est encore mauvaise, et elle est doublée d’une toile d’emballage. Il montre aussi des bas donnés aux troupes, et qui peuvent à peine servir une fois. Sur sa proposition, la Convention décrète d’accusation les fournisseurs qui se sont, rendus coupables de la dilapidation que le comité des marchés a découverte. Billaud-Varenne. Je demande, dans le cas où le tribunal trouverait ces fournisseurs coupables et les condamnerait, qu’ils soient envoyés à l’armée pour être exécutés en sa présence, et qu’ils soient traînés au supplice, couverts do leurs capotes. Bourdon (de l'Oise). Je ne m’oppose pas à la pro¬ position de Billaud, au contraire, je l’appuie; mais, citoyens, il est temps enfin que la responsabilité ministérielle ne soit plus un vain mot dont on se joue avec indécence. Je demande que l’adjoint du ministre de la guerre, chargé de surveiller l’équipement des troupes de la République, soit envoyé au tribunal révolutionnaire. Les propositions de Billaud-Varenne et de Bour¬ don (de l’Oise) sont adoptées. Billaud-Varenne. Il faut donner de l’extension .au décret que vous venez de rendre. Jusques à présent, les généraux traîtres à la patrie ont été suppliciés à Paris où le peuple est à la hauteur de la Révo¬ lution, leur punition n’atteint pas le but principal qu’elle devrait avoir, celui d’effrayer tous ceux qui auraient des desseins perfides, et de montrer à l’armée que le temps est passé où l’on livrait impu¬ nément les défenseurs de la République. Si Custine eût été supplicié à la tête de l’armée du Nord, peut-être serions-nous maintenant rentrés dans la Bel-lie série, t. lxxxii. aux défenseurs de la patrie sur les frontières. Ces fournitures sont de la plus mauvaise qua¬ lité et d’une étoffe légère. La Convention frémit d’indignation contre les fournisseurs coupables. Chaxlier conclut de là que les administrateurs de l’habillement et de l’équipement des troupes doivent être traduits au tribunal révolution¬ naire. Sa proposition est décrétée. Bourdon (de l’Oise) demande aussi la traduc¬ tion au tribunal révolutionnaire de l’adjoint du ministre dans la division duquel cette partie se trouve (Décrété.) Billaud-Varenne. Dans le cas où le tribunal révolutionnaire condamnerait quelques-uns de ces prévenus, je demande qu’ils soient exécutés en présence de l’armée. Je demande encore que les généraux soient désormais exécutés à la tête de l’armée qu’ils auront trahie. Si Cus¬ tine eût été exécuté en présence de l’armée du Nord, nous serions maintenant dans la Bel¬ gique ( Applaudissements ). Ces propositions sont décrétées. Un membre qui arrive de l’armée d’Italie [Robespierre (le jeune) (1)] rend compte du courage et du zèle de cette armée, qui, pendant cinq mois, a été continuellement victorieuse, dont 1,000 hommes ont défendu le poste si important de Gillette contre 4,000 Piémontais, qui a constamment bivouaqué sur les pointes gla¬ cées des Alpes, qui a si puissamment concouru à la prise de Toulon. L’Assemblée décrète que l’armée d’Italie, a bien mérité de la patrie, et l’impression du rap¬ port de Robespierre jeune (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Robespierre jeune. Il ne m’appartient pas, il me serait même impossible de vous donner une juste idée du grand événement qui a étonné gique, suivant le plan que nous en avions donné. Je demande que, dorénavant, tout général con¬ damné par le tribunal révolutionnaire soit exécuté à la tête de l’armée qu’il aura commandée. Cette proposition est adoptée. (1) D’après les divers journaux.de l’époque. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 218. (3) Monileur universel [n° 104 du 14 nivôse an II (vendredi 3 janvier 1794), p. 418, col. 2 et 419, col. 2] D’autre part, le Journal de la Montagne [n° 51 du 14 nivôse an II (vendredi 3 janvier 1794), p. 405, col. 2] et les Annales patriotiques et littéraires [n° 366 du 13 nivôse an II (jeudi 2 janvier 1794), p. 1650, col. 2] rendent compte du discours de Robespierre le jeune dans les termes suivants : I. Compte rendu du Journal de la Montagne. Robespierre le jeune, après avoir rendu justice à l’héroïsme de l’armée sous Toulon, rappelle les lauriers cueillis dans les mêmes journées par l’armée d’Italie, qui, partout depuis cinq mois, s’est main¬ tenue victorieuse. Campée sur des rochers, au milieu des neiges, loin des bois, sans eau, on a vu 36