[États jrén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dijon.] 123 président de nous accorder, à la clôture du procès-verbal de notre assemblée, qu’il soit imprimé aux frais de tous MM. les députés qui voudront y concourir, en y joignant les discours prononcés dans les séances, et les délibérations prises avec les deux autres ordres, et qu’il soit terminé par la liste alphabétique, sans distinction de bailliages, de rangs, ni d’états de tous MM. les députés. « Déjà, Messieurs, j’ai appris que le bailliage de Châlonsfera imprimer ses doléances et son procès-verbal : par ce moyen, nous saurons successivement les articles accordés à nos justes réclamations. « Dans nos vieux jours, Messieurs, et quand nous nous retrouverons ensemble, nous nous rappellerons avec attendrissement, avec plaisir, ces moments consacrés à l’utilité publique ; nous le dirons à nos enfants, qui, je l’espère, jouiront, aria bienfaisance de Sa Majesté et de son nouveau ully, du fruit de nos sollicitations, de nospeines : ils seront excités par un tel exemple à mériter encore mieux de la patrie : Et meminissejurabit. » CHAMBRE DU CLERGÉ DU BAILLIAGE DE DIJON (1). Avertissement. Plusieurs personnes ont désiré de connaître le cahier du clergé du bailliage de Dijon. Pour les satisfaire , on le donne ici , d’après une copie parfaitement conforme à la minute , lue, tant à l'assemblée des commissaires, où ce cahier fut adopté d'une voix unanime , qu'a l'assemblée générale de la chambre, où il fut reçu avec applaudissement. On assure que , depuis l'élection des députés, il y a été fait quelques changements, desquels ( pour des raisons connues) une partie assez nombreuse de la chambre n'a eu aucune connaissance. On ignore en quoi consistent ces changements, mais on doit présumer qu'ils sont peu considérables, et qu’ils n' altèrent pas essentiellement la substance de l’ouvrage et du mandat. CAHIER De l’ordre du clergé du bailliage principal de Dijon, et des bailliages secondaires de Beaune, Nuits, Auxonne et Saint-Jean-de-Losne, contenant les instructions et les pouvoirs que donne ledit ordre à ses députés aux Etats généraux, convoqués pour le 27 avril 1789, en la ville de Versailles (1). § I. Les députés sont chargés, et c’est le principal objet de leur commission, de demander, qu’avant toutes choses, il soit formé et promulgué une loi générale et fondamentale, laquelle énonce et déclare positivement les principaux droits des citoyens, des provinces, ae la nation, et des différents ordres qui la composent, savoir : 1 . Le droit de tout citoyen de conserver invio-lablement la liberté de sa personne, sans qu’il puisse y être porté atteinte, par emprisonnement, détention en un lieu circonscrit, ou interdiction de paraître en quelque lieu déterminé, en vertu d’ordre arbitraire, verbal ou par écrit, de la part de qui que ce puisse être, et autrement que pour les causes, et selon les formés prescrites par des lois expresses. 2. Le droit de tout citoyen de conserver de même le libre exercice de sa pensée; de sorte ÿl) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. ue, d’une part, toute correspondance par écrit emeure inviolable et sacrée sous le sceau des parties, et que nul ne puisse impunément en surprendre le secret; de sorte que, d’autre part, tout écrit puisse être librement publié par la voie de l’impression, en exceptant, néanmoins, tout ce qui pourrait troubler l’ordre public, dans tous ses rapports, et en observant les formalités qui seront jugées nécessaires pour assurer la punition du délit en pareil cas. 3. Le droit de tous les citoyens de conserver in violablement toutes leurs propriétés, mobilières et immobilières, honorifiques et utiles, individuelles et communes, de quelque nature qu’elles soient, avec entière liberté dans la manière d’en jouir, sans qu’elles puissent être attaquées autrement que par les voies ordinaires entre le demandeur et le défendeur, devant les juges naturels, suivant les formes judiciaires établies ou à établir ; et sans que la cession en puisse être exigée, autrement que pour construction d’ouvrages publics, tels que chemins, canaux, édifices, etc., auquel cas l’indemnité doit toujours être prompte, effective, et pour le moins égale en valeur à celle de l’objet. 4. Le droit de tous les citoyens de conserver de même toutes leurs possessions usufruitières, de quelque nature qu’elles soient, et semblablement avec libre jouissance pendant le temps de leur usufruit, sans qu’ils puissent y être troublés, autrement que pour les causes et en la manière spécifiée en l’article précédent, concernant les propriétés. 5. Le droit de tous les citoyens d’être égaux, relativement aux lois ; en ce sens, que tous y sont également soumis, et que nul ne peut s’en prétendre exempt ni s’y soustraire. 6. Le droit de tous les citoyens d’être égaux, relativement aux places et emplois ecclésiastiques, civils et militaires, et aux récompenses qu’ils peuvent procurer ; en ce sens, que tous en sont susceptibles et peuvent y prétendre, à raison de leurs talents, de leur mérite et de leurs services, et que nul n’en puisse être exclu, pour raison de naissance ou de condition non noble. 7. Le droit de tous les citoyens d’être égaux, relativement aux subsides nécessaires, tant pour les dépenses générales de l’Etat, que pour les dépenses particulières et locales de leurs provinces respectives ; en ce sens, que tous y doivent contribuer indistinctement et uniformément, sans aucun privilège d’ordre ou d’état, et sans aucune exemption personnelle de place ou d’emploi ou à vie. 8. Le droit de tous les citoyens d’être égaux, relativement à l’assiette et à la répartition des impôts nécessaires pour fournir ces subsides; en ce sens, que les impôts doivent être établis avec égalité proportionnelle, sur toutes les natures et espèces de revenus des contribuables, soit en terres, soit en rentes, en commerce ou en industrie, et que les cotes individuelles doivent être fixées proportionnellement aux revenus des cotisés, sans qu’il y ait abus dans la répartition, soit de la part des plus riches, par l’influence de leur crédit, soit de la part des autres, par l’influence de leur crédit, soit de la part des autres, par l’influence et l’ascendant de leur nombre. 9. Le droit des habitants de chaque province de conserver leurs lois, coutumes, usages et tribunaux particuliers, sans qu’il puisse y être fait aucun changement, que de la volonté de la province elle-même, légitimement et pleinement assemblée. 124 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dijon.] 10. Le droit des habitants de toute province, ayant une constitution d’Etats et une forme d’administration, de conserver l’une et l’autre, sans qu’elles puissent être changées, que de la volonté de la province même, assemblée légitimement et pleinement. 11. Le droit de la nation de conserver invio-lablement la forme de son gouvernement, qu’elle reconnaît et veut être une pure monarchie, réglée par les lois. 12. Le droit de la nation de conserver invio-lablement, et sans qu’il y soit rien changé, l’ordre de la succession à la couronne, lequel elle veut être toujours tel qu’il subsiste dans l’auguste maison régnante depuis Hugues Capet, sans que la monarchie puisse jamais être démembrée ni partagée. 13. Le droit de la nation, en cas de défaut d’hoirs mâles, légitimement issus par mâles, dans l’auguste maison de France (ce qu’il plaise à Dieu ne jamais permettre !) de choisir elle-même et d’établir roi, celui qu’elle aura jugé digne de régner sur elle. 14. Le droit de la nation, en cas de minorité de ses rois de nommer elle-même à la régence du royaume ; si ce n’est qu’il ait été porté une loi qui dispose d’avance de la régence, pour tous les cas. 15. Le droit de la nation d’empêcher ou de consentir, selon qu’elle le jugera plus utile, l’aliénation perpétuelle et irrévocable des domaines et droits domaniaux de la couronne. 16. Le droit de la nation, dans l’un et l’autre cas, de régler et fixer les apanages des frères et des enfants puînés des rois ; lesquels apanages, elle entend devoir être toujours à la charge de la réversion à la couronne , faute d’hoirs mâles légitimement issus par mâles. 17. Le droit de la nation de conserver in vio-lablement sa religion nationale, devant seule avoir l’exercice public de son culte ; laquelle elle reconnaît et veut être la religion chrétienne, selon la foi catholique, apostolique et romaine ; si ce n’est pour les villes qui ont des capitulations expresses à ce sujet. 18. Le droit de la nation d’accorder, autant qu’elle le jugera convenable, la tolérance civile à toute autre religion ou secte ; n’entendant néanmoins leur accorder jamais l’exercice public de leurs cultes. 19. Le droit de la nation de n’être gouvernée que par ses propres lois ; en ce sens, que rien ne puisse avoir, définitivement force et caractère de loi, dans le royaume, qui n’ait été ou proposé par le Roi et consenti par la nation, ou proposé par la nation et autorisé par le Roi; et que tout règlement qui réunit ces deux conditions est, par cela seul, une loi à laquelle tout Français doit obéir, et que tout officier public doit faire exécuter, en ce qui le concerne. 20. Le droit de la nation de n’être jugée que par ses propres juges ; en ce sens, qu’il lui appartient de concourir, de la manière expliquée en l’article précédent, à la constitution de l’ordre juridictionnel du royaume, à la formation de la hiérarchie des tribunaux, et à la fixation des attributions particulières de chacun d’eux; de sorte qu’une fois établi, cet ordre ne puisse être changé que du consentement de la nation, et qu’il ne puisse d’ailleurs être arbitrairement troublé ou interverti, soit par évocations, soit par commissions, ou par tout autre moyen qui pourrait priver le justiciable de son juge naturel. 21. Le droit de la nation de déterminer les subsides nécessaires pour les dépenses générales de l’Etat ; de sorte qu’il ne puisse être imposé et levé sur elle aucuns deniers pour lesdits sunsides, que de son exprès et libre consentement, donné, tant pour la forme et la durée, que pour les formes d’assiette, de répartition et ae perception de l'impôt. 22. Le droit de la nation de former seule des emprunts pour les besoins de l’Etat, d’où il puisse résulter des dettes nationales; de sorte qu’il ne puisse être fait aucun emprunt, direct ou indirect, en son nom, que de son libre et exprès consentement, donné, tant pour la somme que pour la forme de l’emprunt, le taux de l’intérêt, le gage des prêteurs, l’assignat et l’ordre progressif des remboursements. 23. Le droit de la nation de se faire communiquer, par les ministres du Roi, tous états, mémoires et renseignements authentiques, à l’effet de régler en connaissance de cause les subsides nécessaires à l’Etat, soit par forme d’impôt, soit. par forme d’emprunt et d’en proportionner les sommes et la durée aux besoins réels de chaque département du royaume. 24. Le droit de la nation de se faire rendre compte de l’emploi des deniers provenant des impôts et des emprunts qu’elle aura consentis, par les ministres du Roi, chacun en ce qui regarde leurs départements respectifs. ■ 25. Le droit de la nation de s’assembler pour l’exercice et la conservation de ses droits, et de se choisir librement des députés qui, réunis collectivement sous le nom d’Etats generaux , la représentent et puissent délibérer, consentir et statuer pour elle et en son nom, sur les lois, les subsides, et sur tous les autres objets concernant l’administration générale du royaume. 26. Le droit de la nation de déterminer et fixer, selon qu’elle le juge convenable à ses intérêts et à ses besoins, le retour périodique de ses Etats généraux ; lesquels elle veut être tenus désormais tous les cinq ans, sans que, sous aucun prétexte, ces assemblées puissent être omises ou différées; de sorte qu’à défaut de convocation expresse en l’année déterminée, elles soient, de droit, indiquées au 1er mai de ladite année, en la ville de ..... 27. Le droit de la nation de conserver invio-lablement l’antique et constitutionnelle distribution de tout son corps en trois ordres distincts : le clergé , comprenant tous les nationaux ecclésiastiques, séculiers ou réguliers; la noblesse , comprenant tous les nationaux d’extraction noble ou anoblis; et le tiers-état, comprenant tous ceux des nationaux qui n’appartiennent à aucun des deux autres ordres ; sans que le nombre desdits ordres puisse être augmenté ou diminué, ni leurs rangs intervertis. 28. Le droit de chacun desdits ordres assemblés périodiquement , et aux. époques fixées , dans des districts ou arrondissements communs à tous les trois, tels qu’ils sont ou seront réglés pour la suite, de choisir et nommer, librement et séparément, leurs députés respectifs, toujours et partout, dans les proportions qui seront fixées, tant entre les trois ordres, qu’entre les différentes classes et sous-divisions de chacun d’eux. 29. Le droit antique et constitutionnel de chacun des trois ordres, soit dans les assemblées préparatoires à celles des Etats généraux, soit dans les assemblées des Etats généraux eux-mêmes, de délibérer et d’opiner séparément les uns des autres, et de former, à la pluralité de leurs voix, chacun leur vœu distinct et séparé. (États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dijon J 30. Le droit de chacun des trois ordres d’être indépendant, et de ne pouvoir être lié et forcé, même par le vœu réuni des deux autres ordres ; de sorte que, pour opérer une résolution ou décret national, la réunion des trois ordres en un seul vœu soit nécessaire. 31. Le droit de la nation que, dans les intervalles entre les assemblées périodiques des États généraux, les règlements particuliers que les circonstances peuvent exiger ne puissent être exécutés qu’après avoir été enregistrés dans les cours souveraines, auxquelles la nation confie le soin de les vérifier, c’est-à-dire de reconnaître s’ils ne contiennent rien de contraire à ses droits et aux principes constitutifs de la monarchie. 32. Enfin, le droit de la nation, que tout règlement, même après avoir été ainsi enregistré par les cours souveraines, dans l’intervalle entre deux assemblées d’Etats généraux, ne puisse avoir néanmoins qu’une exécution provisoire, jusqu’à ce qu’il ait été confirmé par la nation assemblée, dont le consentement exprès peut seul, lui imprimerie caractère immuable de loi de l’Etat. Les députés insisteront fortement pour que, avant la discussion de tout autre objet, il soit formé et promulgué solennellement une loi contenant, dans les termes les plus clairs et les plus énergiques, et avec le degré de développement convenable, tous les articles ci-dessus, et autres qui pourraient avoir été omis ici et qui n’échapperont point aux lumières et à la prévoyance des Etats généraux ; afin qu’une telle loi constate à jamais les véritables droits de la nation, et que dans tous les temps elle puisse servir de base et de règle à toutes les lois particulières que pourra rendre nécessaires la variété des circonstances et des temps. Et dans le cas où, à l’assemblée des Etats généraux, on mettrait d’abord en délibération la forme d’y opiner, séparément et par ordre, ou en commun et par tête, comme, dans la disposition actuelle des esprits, ce sujet préliminaire de délibération pourrait faire naître des contestations et des débats capables de troubler l’assemblée, d’y semer la division , d’en retarder le travail, et d’empêcher peut-être tous les heureux effets que l’on doit en attendre, il est expressément recommandé aux députés du clergé de ce bailliage, d’engager, autant qu’ils le pourront, les députés des deux premiers ordres de toutes les provinces à délibérer, préalablement et à part, sur les dix premiers articles du projet de loi ci-dessus, et s’ils les adoptent, à en faire aussitôt une déclaration précise à tout ordre du tiers-état. Ensuite, les députés représenteront fortement à ce dernier ordre, et aux membres des deux autres qui pourraient penser comme lui, qu’après une telle déclaration unanime de la part du clergé et de la noblesse du royaume (déclaration devant être aussitôt consacrée par une loi solennelle et fondamentale), toute discussion sur la forme de délibérer dans les Etats devient sans objet pour les intérêts particuliers de chaque ordre pris séparément, et que, par conséquent, il ne peut rester aucun prétexte pour abandonner une forme liée à la constitution même, utile aux intérêts communs des trois ordres, nécessaire pour la conservation de la liberté nationale, et la seule qui uisse, dans tous les temps, prémunir de nom-reuses assemblées contre les rapides et dangereux effets de la surprise, de la séduction, de l’enthousiasme, du caprice et de la légèreté, d’où naîtrait une variation continuelle dans les principes, et une perpétuelle instabilité dans les lois. §H. Lorsque les députés auront obtenu la loi générale qu’ils sont chargés de solliciter, et dont les principaux articles sont ci-dessus énoncés, il3 feront observer à l’assemblée des Etats généraux que plusieurs parties principales de l’administration du royaume demandent, ou un nouvel ordre de choses, ou des réformes très-étendues et très-multipliées ; qu’il paraît difficile qu’une assemblée anssi nombreuse, et dont les différents membres n’auront pas apporté, sur ces objets, des vœux déterminés de la partde leurs commettants* puisse y pourvoir en parfaite connaissance de cause; et que le succès d’une si grande entreprise serait d’autant mieux assuré, si l’on en différait sagement l’exécution. En conséquence, ils proposeront de former, dans le sein des Etats mêmes, quatre commissions particulières, chargées de rédiger dès plans et projets, savoir : La première, pour une meilleure distribution des districts et arrondissements où devront se faire les élections et instructions des députés pour les Etats généraux à assembler périodiquement par la suite ; la fixation du nombre des députés de chaque ordre, que chaque district aura le droit d’y envoyer; semblable fixation pour les différentes classes et subdivisions de chaque ordre, et en général, la détermination de toutes les circonstances et cas relatifs à cet objet. La seconde, pour la meilleure forme d 'assiette, de répartition, et de perception des impôts qui pourraient remplacer ceux qui existent aujourd’hui, et dont le vœu général paraît demander la suppression ; laquelle forme, en ne s’éloignant jamais des principes fondamentaux exprimés par les articles 7 et 8 du projet de loi générale ci-dessus, puisse faciliter, au contraire, l’égalité proportionnelle dans la répartition, prévenir toutes les difficultés et les abus à cet égard, et supprimer tous les frais inutiles et onéreux dans la perception. La troisième, 1° pour la formation d’un meilleur code criminel, propre à défendre également la société des atteintes du crime, et l’innocence des attaques de la calomnie et de l’injustice ; 2° pour la formation d’une meilleure ordonnance concernant la procédure civile, propre à rendre cette procédure moins compliquée, moins dispendieuse et moins longue, sans priver néanmoins les parties du temps et des moyens de faire connaître leurs droits; 3° pour quelques changements utiles dans l’ordre des juridictions, et spécialement à l’effet de supprimer, s’il est possible, par des attributions claires et précises, toute difficulté de compétence et tout procès en règlement déjugés. La quatrième, enfin, pour la formation d’un plan général d’éducation publique et vraiment nationale, propre à donner à l’Etat de3 citoyens utiles dans tous les genres. Les députés demanderont qu’il soit rédigé , dans les Etats généraux mêmes, et en leur nom, des instructions détaillées, pour chacune de ces quatre commissions % concernant les objets de leurs travaux respectifs; qu’il leur soit ordonné d’entrer en fonction aussitôt après la clôture des prochains Etats généraux, de demander et recevoir tous mémoires et renseignements nécessaires ou utiles, de rédiger leurs plans et projets dans les temps et aux époques qui auront été fixés à chacune d’elles , et de les rendre aussitôt publics, par la voie de Timpressioo, 126 [États g ên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES afin qu’il puisse y être délibéré, en connaissance de cause, dans les assemblées de chaque district, poùr l’élection et instruction des députés aux Etats généraux subséquents, et que chaque district puisse faire connaître son vœu déterminé sur l’admission ou rejection du tout ou partie des plans et projets que lesdites commissions auront proposés. Enfin, les députés observeront qu’il serait à désirer qu’il fût tenu, à cet effet, une assemblée extraordinaire d’Etats généraux, en l’année 1791, après laquelle les Etats se tiendront périodiquement tous les cinq ans, ainsi qu’il est proposé par l'article 26 du projet de loi ci-dessus. §111. Aussitôt que les commissions demandées par la seconde partie de celte instruction auront été formées, il sera proposé par les députés de s'occuper : 1° de la vérification de la dette publique ; 2° de l’examen de la dépense annuelle et habituelle de l’Etat, dans ses différents dépar-temerits. En ce qui concerne la dette, les députés demanderont : 1° qu’on en retranche tous les articles dont la créance ne serait pas légitimement établie; 2° qu’on y réuniése toutes les dettes contractées sur le crédit ées provinces et autres corps ; 3° qu’on y ajoute spécialement la dette du clergé, laquelle ayant été contractée pour le -, service de l’Etat, ne doit plus être à la charge 5 des bénéficiers, soumis désormais à toutes les impositions, comme les autres citoyens; 4° enfin, qu’il soit fait un tableau complet et détaillé contenant tous les genres et espèces de créances dont se trouvera formée la masse de dette nationale, et que ce tableau soit aussitôt rendu pu-. hlic, par la voie de l’impression. I En ce qui regardé la dépense de l’Etat, les dé-j putés demanderont qu’il soit formé, de même, et 1 rendu public, un tableau comprenant en détail I toutes celles de chaque département, après en avoir fait retrancher tous les articles qui ne se trouveraient pas d’une nécessité réelle, ou d’une utilité parfaitement démontrée. La connaissance des charges étant ainsi acquise, les députés s’occuperont des moyens d’y subvenir. En conséquence, ils proposeront d’abord la suppression de tous les impôts directs, actuellement établis, et distinctifs des ordres, tels que tailles, capitation, vingtièmes, décimes ecclésiastiques et autres, accessoires ou équivalents, sous diverses dénominations. Ils proposeront ensuite de remplacer tous ce3 impôts par d’autres, dont le montant, réuni aux impositions indirectes qui sont l’objet des fermes et des régies, puisse suffire : 1° au payement des intérêts annuels de la dette, telle qu’elle aura été vérifiée ; 2� à tel fonds de remboursement annuel des capitaux que l’on aura jugé convenable ; 3° à la dépense annuelle de l’Etat, telle qu’elle aura été estimée en détail, pour chaque département. Enfin, ils auront soin que (même en attendant la meilleure forme d’assiette et de répartition des impôts, dont la recherche, pour l’avenir, doit être l’objet de la seconde commission demandée dans la seconde partie de cette instruction), les nouveaux impôts dont il s’agit, et qui ne doivent être établis que provisoirement, remplissent, le mieux qu’il sera possible pour cette fois, le vœu exprimé par les articles 7 et 8 du projet de loi générale, proposé dans la première partie. PARLEMENTAIRES. (Bailliage de Dijon.] A l'égard des impositions indirectes, c’est-à-dire de celles qui consistent en droits perçus sur certains objets de consommation, ou sur certains actes de la vie civile, tels que la gabelle, les aides, les droits de contrôle, etc., les députés observeront que, si les circonstances ne permettent pas de, supprimer, dès à présent, ceux que le vœu public semble avoir proscrits, il convient du moins que, dans le moment, ils soient concédés formellement par les Etats généraux, afin qu’il n’existe plus dans le royaume aucune imposition qui n’ait son titre légal dans le consentement libre et exprès de la nation actuellement assemblée. Et pour que les députés puissent concourir, tant à rétablissement des impôts de remplacement devenus nécessaires, qu’à la nouvelle concession de ceux qu’il est indispensable de conserver pour le moment, l’ordre du clergé de ce bailliage leur donne tout pouvoir nécessaire et requis à cet effet, mais sous les clauses et conditions suivantes, et non autrement, savoir : 1° Que la loi générale et fondamentale, demandée dans la première partie de cette instruction, aura été préalablement accordée et promulguée ; 2° Que le clergé, devant être soumis aux nouveaux impôts, comme tous les autres citoyens, aura été déchargé de l’acquittement de ses propres dettes, tant en intérêts que capitaux, lesquelles auront été déclarées réunies à la masse de la dette nationale; 3° Enfin, que tant les nouveaux impôts établis en remplacement, que les anciens impôts conservés, ne soient censés accordés, et né puissent être perçus que pour et pendant l’intervalle entre les prochains Etats et les suivants, desquels l’époque aura été fixée dans rassemblée même qui va s’ouvrir. Déclarant, le clergé de ce bailliage, à ses députés, porteurs de la présente instruction, que, faute par eux de se conformer aux trois clauses et conditions ci-dessus énoncées, il les désavoue d’avance, pleinement et hautement. Au surplus, les députés observeront qu’ils ne peuvent faire usage du pouvoir qui leur est ici donné qu’autant que les députés des deux autres ordres de ce bailliage, et les députés des trois ordres des autres bailliages de cette province seraient autorisés par leurs commettants respectifs, au même effet; et que, sans le concours desdits députés, leur consentement particulier ne pourrait obliger la province de Bourgogne, laquelle, eh matière d’impositions, ne peut être liée que de son consentement exprès* donné par ses représentants, et ne peut être forcée, même par le vœu et consentement des Etats généraux, ainsi qu’il est formellement reconnu par les lettres patentes du roi Charles VII, données à Tours, le 8 mars 1483. Et sont chargés, les députés, même en consentant aux impositions dont on vient de parler, si le cas y échet, de déclarer qu’ils réservent expressément à la province de Bourgogne le droi' reconnu par lesdites lettres patentes du 8 mar 1483, pour par elle en jouir et user toutes h r fois et ainsi que les circonstances et ses intérêt paraîtront le demander. g IV. Les objets généraux et essentiels, indiqués dans les trois premières parties de cette instruction, étant remplis, les députés formeront les différentes demandes particulières qui suivent, dont les unes concernent pins particulièrement l’ordre [États gén, 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dijon.] |$7 du clergé, et les autres regardent quelques points de l’administration et police du royaume. En ce qui regarde spécialement l’ordre du clergé, les députés demanderont : 1° Que désormais et sans interruption, les conciles provinciaux, pour la discipline ecclésiastique, soient tenus tous les dix ans, ainsi qu’ü a été souvent demandé par les assemblées du clergé ; 2° Qu’il soit fait droit sur les remontrances de la dernière assemblée du clergé, au sujet de l’édit concernant les non catholiques ; 3° Que le droit de patronage attaché aux fiefs possédés par les non catholiques soit suspendu et attribué à l’ordinaire, lequel, dans les provisions qu’il donnera, sera tenu de faire mention de cette suspension, afin d’assurer le retour du droit au fief, lorsqu’il sera possédé par un catholique; 4° Qu'il soit désormais permis de faire les vœux de la profession religieuse à l’âge de dix-huit ans, en dérogeant, pour ce regard, aux édits qui ne les permettent qu’à la vingt et unième année; 5° Que les collateurs ou présentateurs de bénéfices ne puissent être prévenus en cour de Piome, avant le cinquantième jour de la vacance, le jour du décès et celui de la date non compris; 6° Que l’on rende commune à tous les établissements ecclésiastiques la déclaration qui soustrait au dévolu les bénéfices unis depuis plus d’un siècle à quelques-uns de ces établissements; 7° Que les gens de mainmorte, séculiers et réguliers, puissent placer leurs deniers à constitution de rente, sur toute espèce de corps et même sur les particuliers; 8° Que l’on supprime les droits d’amortissement, pour les nouvelles constructions et réparations, servant à augmenter et à améliorer les bâtiments des bénéfices; 9° Que l’on combine avec l’ordre de Malte les moyens de soustraire à l’amovibilité les cures qui en dépendent. 10° Que les curés, contribuant aux charges de leurs paroisses, participent avec elles aux avantages des communautés, notamment dans la répartition des bois d’usage; 11° Et surtout, qu’il soit pourvu, par tous les moyens possibles, et les plus prompts, à l’augmentation du revenu des cures à portion congrue, et de celles où les curés, quoique décima-teurs, n’ont pas, ou n’ont que la valeur de la portion des congruistes, en sorte que le revenu desdites cures puisse être porté à 1,200 livres, et celui des vicaires , à moitié ; et ce 1° par l’union des biens qui ont appartenu à des maisons religieuses supprimées, desquels l’emploi est inconnu ; 2° par l’union de bénéfices simples, et notamment de ceux dont la nomination est tombée ou tombera dans les mains du Roi, par la suppression des abbayes dont ils dépendent ; 3° par de fortes pensions sur les évêchés, abbayes et riches prieurés, auxquels il sera nommé à l’avenir, lesquelles pensions seront distribuées, à fur et mesure, entre lesdits curés, en observant que les cures dépendantes de l’ordre de Malte doivent participer aux avantages sollicités par cet article. 12° Enfin, que, pour accélérer l’amélioration de ces cures, les nombreux et riches bénéfices, qui sont actuellement en économat, en soient tirés, et que, dans la nomination qui en sera faite, il soit établi sur chacun d’eux de fortes pensions, pour être distribuées aux curés, conformément au précédent article. En ce qui regarde l'administration et police, les députés solliciteront des règlements généraux : 1° Pour la suppression de la mendicité dans tout lé royaume ; les règlements particuliers pour les villes et même pour les provinces étant, par leur nature, insuffisants ; 2° Pour le roulage, afin de concilier les intérêts du commerce avec la conservation des routes, dont les réparations et l’entretien entraînent dés dépenses exorbitantes, qui s’accroîtront de jour en jour, si l’on n’y pourvoit par de sages mesures. Enfin, les députés sont spécialement chargés de représenter au Roi que la province de Bourgogne donna à Sa Majesté, en 1782, un don gratuit extraordinaire d’un million de livres, pour la construction d’un vaisseau du premier rang, lequel serait appelé les Etats de Bourgogne ; que Sa Majesté fut suppliée, en même temps, par les élus généraux d’accorder de préférence le commandement de ce vaisseau à un capitaine né en Bourgogne; que M. le chevalier de Bataille-Mandelot, gentilhomme bourguignon, du bailliage d’Auxois, a mérité, par une action éclatante, a. la journée du 18 juillet dernier, dans les mers du Levant» d’être promu au grade de capitaine de vaisseau ; et que Sa Majesté remplirait les vœux de la province en confiant spécialement aux ordres de cet officier le vaisseau qui doit porter le nom de ses Etats. SV. Au surplus, l’ordre du clergé de ce bailliage, en autorisant ses députés à entendre et consentir, selon leurs lumières, et en leur âme et conscience, à tout ce qui pourra être proposé dans les Etats généraux, pour l’avantage du royaume (excepté toutefois en ce qui serait contraire aux articles compris au présent cahier, en quoi il leur est expressément ordonné de se conformer aux vœux de leurs commettants), les charge de communiquer la présente instruction, dès l’ouverture de Rassemblée, aux députés de toutes les autres provinces, et de les inviter à se réunir à eux dans le môme vœu, particulièrement en ce qui concerne l’ordre des opérations des Etats, tel qu’il est indiqué dans cette instruction, comme singulièrement propre à accélérer le travail de cette première assemblée, qui peut être regardée, pour ainsi dire, comme préliminaire; à réserver, pour la suivante, ce qui ne pourrait être exécuté dans celle-ci , et à procéder, en tout, avec une sage et utile maturité, digne d’une grande nation et des grandes vues qui doivent désormais l’occuper. CAHIER Des pouvoirs et instructions remis à MM. Lemulier de Bressey et comte de Lévis , élus députés, et à MM. le comte de Bataille de Mandelot , et marquis de Courtier on, députés suppléants aux prochains Etats généraux , par l'ordre de la no-olesse du bailliage de Dijon , le 8 avril 1799 (1). La noblesse de ce bailliage s’empresse d’adopter le vœu que, la première en France, la noblesse de Bourgogne, assemblée dans cette ville, a manifesté en faveur du tiers-état, de déclarer, avec elle et comme elle, que le bonheur de tous l'intéresse vivement; que, pour l’établir en ce moment (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la MibUotiùgm du Sénat.