{États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Coutances.] Kj arrêté, on n’a pu y rien insérer sur cet article. L’assemblée, (Tune voix unanime, a chargé ses députés de prendre en considération leur état malheureux. Après quoi, monseigneur le président a proposé de commencer le premier scrutin, qui a été exécuté dans la forme prescrite par le règlement. Vérification faite par MM. les scrutateurs , les suffrages se sont réunis en faveur de maître Jacques-François Le Lubois, curé de Fontenay, diocèse de Coutances. Après quoi, l’assemblée s’est séparée. La séance prochaine est renvoyée à ce soir, trois heures et demie. Signé Jean Gautier, curé de Saint-Brice de Lan-delles; J, Levavasseur , curé de Rideauville ; d’Hauohemail ; A.-F., évêque de Coutances, président; B. Fleury, curé de Fermanville ; J.-F.-L. Le Lubois, curé de Fontenay, acceptant. Du jeudi 26 mars, l’assemblée s’étant réunie au lieu ordinaire de ses séances, monseigneur le président a proposé de passer à un second scrutin, ce quia été exécuté dans la forme prescrite par le règlement. Vérification faite par MM. les scrutateurs, les suffrages se sont réunis en faveur de maître François Bécherel, curé de Saint-Loup, au diocèse d’Avranches. Après quoi, l’assemblée s’est séparée. La séance prochaine a été renvoyée à demain, huit heures du matin. Signe J. Gautier, curé de Saint-Brice de Lan-delles ;, d’Hauchemail ; J. Levavasseur, curé de Rideauville ; accepté : Bécherel, curé de Saint-Loup. A.-F., évêque de Coutances, président; B. Fleury, curé de Fermanville, secrétaire-greffier. Du vendredi 27 mars , l’assemblée s’étant réunie au lieu ordinaire de ses séances, monseigneur le président a proposé de procéder à un troisième scrutin, ce qui a été exécuté dans la forme prescrite par le règlement. Vérification faite par MM. les scrutateurs, les suffrages se sont réunis en faveur de maître François Le Bouvillois , curé de Garantilly , diocèse de Coutances. Pendant que l’on procédait au scrutin, il est arrivé, de la part de l’assemblée du tiers-état, tenant alors ses séances dans la salle du bailliage de cette ville, une députation composée de dix de ses membres. M. Dupré, lieutenant particulier, qui portait la parole, a commencé par exprimer à monseigneur le président et à l’ordre du clergé les sentiments de respect et de vénération de son ordre, et lui a témoigné ensuite que tout son désir était de se réunir, pour concourir ensemble au bien public. Mais que, comme les cahiers n’étaient pas encore rédigés, cette réunion si désirée ne pourrait s’opérer qu’aux Etats généraux. A quoi, monseigneur le président a répondu ue le vœu du clergé n’était pas moins sincère. n suite cette députation a été reconduite par huit des membres du clergé dans le même ordre qu’elle avait été reçue. Et, sur-le-champ, monseigneur le président a proposé d’envoyer à l’ordre du tiers-état une députation composée de huit des membres de l’assemblée, pour lui témoigner le désir sincère de concourir ensemble au bien public, et de voir régner, entre les deux ordres, la concorde et l’union la plus parfaite. Après quoi, l’assemblée s’est séparée, la séance prochaine renvoyée à ce soir, quatre heures. Signé J . Levavasseur , curé de Rideauville ; d’Hauchemail ; J. Gautier, curé de Saint-Brice de Landelles ; Le Rouvillois, curé de Garantilly, acceptant ; A.-F., évêque de Coutances, président; B. Fleury, curé de Fermanville, secrétaire-greffier. Ce même jour, à quatre heures du soir, l’assemblée s’étant réunie au lieu ordinaire de ses séances, monseigneur le président a proposé de passer au quatrième et dernier scrutin , ce qui a été exécuté dans la forme prescrite par le règlement. Vérification faite par MM. les scrutateurs, les suffrages se sont réunis en faveur de monseigneur Ange-François de Talaru de Chal-mazel, évêque de Coutances. Après quoi l’assemblée s’est séparée, et la séance prochaine renvoyée à demain, neuf heures du matin. Signé J. Levavasseur, curé de Rideauville; d’Hauchemail ; J. Gauthier, curé de Saint-Brice de Landelle; A.-F., évêque de Coutances, président; Le Lubois, curé de Fontenay ; B. Fleury, curé de Fermanville, secrétaire-greffier ; Bécherel, curé de Saint-Loup ; et Le Rouvillois, curé de Carantilly. Du samedi 28 mars, l’assemblée s’étant réunie au lieu ordinaire de ses séances, il a été donné lecture d’un écrit en réponse à une imputation faite à l’assemblée du clergé du grand bailliage de Cotentin, par un autre écrit intitulé : Protestation, imprimée et signée d’environ trente-deux membres, dont quelques-uns, après avoir entendu la lecture dudit écrit en réponse, ont signé le cahier de doléances. Sur quoi, l’assemblée, ayant délibéré, a arrêté, d’une voix unanime, que cetle réponse, signée de toute l’assemblée, de monseigneur le président et du secrétaire, serait rendue publique par la voie d’impression, afin de manifester les vrais sentiments du clergé, et qu’elle serait annexée au présent. Ensuite l’assemblée a fait remise du cahier général, ainsi que de tous les cahiers particuliers à MM. les députés , auxquels elle donne pouvoir pour la représentation aux Etats généraux, y proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bonheur, tant commun que particulier, de tous les citoyens. Déclarant que, sur tous les objets exprimés et non exprimés dans son cahier de doléances, qui pourront être proposés et discutés aux Etats généraux, elle s’en rapporte à ce que ses députés estimeront, en leur âme et conscience, devoir être statué et décidé pour le plus grand bien commun. Le présent clos et arrêté en présence de l’assemblée, et signé par monseigneur le président et le secrétaire de l’assemblée, après lecture, cesdits jour et an que dessus. Signé A.-F., évêque de Coutances, président; B. Fleury, curé de Fermanville, secrétaire-greffier, et Lesplu-Dupré, curé des Pas, secrétaire adjoint. CAHIER Des pouvoirs et instructions de rassemblée de la noblesse du grand bailliage de Cotentin , réunie aux termes des lettres de convocation, données à Versailles le 24 janvier dernier, remis aux députés élus par la voie du scrutin pour la tenue des Etats généraux, en 1789 (1). Art. 1er. L’assemblée de la noblesse du grand bailliage de Cotentin donne par le présent acte , et sans autres limitations que celles qui sont contenues dans les articles suivants, pouvoir à ses députés de la représenter aux Etats généraux, (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Coutances.] y proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l'Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe dans toutes les parties du gouvernement , la prospérité générale du royaume et le bonheur, tant commun que particulier, de tous les citoyens. Art. 2. L’assemblée s’est convaincue qu’en droit public elle n’a nul pouvoir de rien changer à la constitution ; que les droits qui assurent la distinction des ordres, dans la monarchie, étant aussi sacrés que ceux de la propriété , elle ne peut, en aucune manière, y déroger ; pourquoi, en se conformant, pour cette fois seulement, au règlement annexé aux lettres de convocation , et protestant contre toute induction qu’on pourrait tirer du serment qu’elle a prêté, elle a arrêté unanimement que l’obéissance provisoire qu'elle rend dans ce moment aux ordres du Roi, ne pourra la préjudicier dans les réclamations et protestations qu’elle charge ses députés de faire aux Etats généraux, sur l’atteinte qu’on a portée au droit inaltérable d’une représentation égale et légale de chaque ordre. Art. 3. Elle pose donc pour base que la constitution française est composée du Roi, chef suprême de la nation, et des trois ordres essentiellement distincts et séparés, égaux, libres, individuels, sauf subdivision, et mutuellement indépendants. Art. 4. Conformément à la loi salique, la succession à la couronne de France est héréditaire de mâle en mâle, dans la race Tégnante , à l’extinction de laquelle la nation assemblée a le droit de se choisir un roi, de même qu’en cas de minorité ou autres événements qui nécessiteraient une régence -, elle a seule le droit de nommer le régent et de régler ses pouvoirs. Art. 5. Vu le dommage qui est résulté pour la nation de l’interruption des assemblées nationales, et la nécessité constante dont elles sont pour maintenir la constitution et les relations qui doivent exister entre le Roi et la nation, les députés feront statuer qu’à l’avenir les Etats généraux seront assemblés périodiquement, et à des époques fixes, dont l’assemblée estime que la première doit être au plus tard dans trois ans, et ensuite de cinq en cinq ans. Art. 6. A la nation seule assemblée en Etats généraux appartient le droit ancien et reconnu de consentir et octroyer tous les emprunts et tous les impôts soit directs, soit indirects, et de les voter librement ; en conséquence de ce droit certain de la nation, il sera statué qu’aucun emprunt ne pourra être fait, ni aucun impôt mis, prorogé, ni perçu, sans le consentement formel des Etats généraux, sous peine de concussion. Art. 7. L’assemblée donne mandat à ses députés de recevoir le compte qui sera rendu aux Etats généraux des dettes du trésor royal ; d’examiner quelle en est l’origine ; de discuter leur légitimité, utilité et la légitimité des dons et pensions; celle des emprunts et des intérêts auxquels ils auront été contractés; et seulement après cet xamen, d’où il résultera que les dettes illégitimes dans leur origine seront entièrement rejetées, et que les dettes illégitimes par leur quotité seront réduites à leur juste taux, comme surprises par un abus de la confiance du Roi, leur donne pouvoir de s’engager, avec les autres représentants de la nation , et en son nom , au ayement de la dette, qui, alors, de dette royale eviendra dette nationale ; de consentir les im pôts ou ïes emprunts qui seront jugés nécessaies pour en acquitter les intérêts , et pour former en même temps un fonds d’amortissement qui en assure l’extinction. Art. 8. Aucuns impôts, soit pour les besoins ordinaires de l’Etat, soit pour le payement de la dette nationale, ne seront octroyés que pour l’intervalle d’une tenue des Etats généraux à l’autre, et tout impôt cessera de droit au temps fixé. Art. 9. Les ministres des finances rendront chaque année un compte public, et seront responsables aux Etats généraux de leur administration. Art. 10. Les dépenses de chaque département, y compris celles de la maison du Roi, seront invariablement fixées, et les ministres de chacun de ces départements seront responsables à la nation assemblée de l’emploi des fonds. Art. 11. Il sera statué qu’à l’avenir aucune loi ne pourra être portée que par le concours de l’autorité du Roi, et du vœu ou du consentement libre delà nation. Art. 12. Pour assurer aux citoyens de tous les ordres la liberté personnelle et individuelle, à laquelle chacun a droit tant qu’il se conforme aux lois, l’usage des lettres de cachet sera aboli ; aucun citoyen ne pourra être détenu ailleurs que dans les prisons ordinaires, pour y être jugé par ses juges naturels, ni privé de son état qu’en vertu d’un jugement préalable. Art. 13. Aucun acte de pouvoir absolu ne pourra suspendre ni détourner le cours de la justice réglée; il ne sera établi aucune commission extraordinaire, aucune évocation ne sera admise, que dans les cas prévus par la loi qui sera consentie par les Etats généraux. Art. 14. La forfaiture des cours souveraines ne sera jugée que par le Roi et la nation assemblée. Art. 15. L’assemblée désire que dans tous les cas on maintienne et conserve l’union et la concorde entre tous les ordres, et qu’ils agissent de concert, par la communication de leurs commissaires respectifs; mais elle veut que l’on délibère toujours par ordre. Art. 16. La majorité seule des voix de chaque ordre formera le vœu unique et précis de l’ordre dont il sera émané, et la réunion du vœu de chacun des trois ordres pourra seule former le vœu général, le vœu de deux ordres ne pouvant lier le troisième. Art. 17. L’ordre de la noblesse du bailliage de Cotentin, disposé à faire aux besoins de l'Etat tous les sacrifices pécuniaires qu’ils exigeront, ne peut cependant s’assujettir à la taille, qui est un impôt contraire aux droits et franchises de la noblesse; mais il autorise ses députés à offrir, conjointement avec les deux autres ordres, comme don gratuit, un impôt qui soit également réparti sur toutes les propriétés, en réservant pour le noble l’exploitation franche d’une portion de sa propriété, équitablement bornée, et toutes les autres prérogatives distinctives de l’ordre. Art. 18. Elle charge expressément ses députés de demander la restitution des Etats provinciaux de la Normandie, suspendus par le fait, quoique toujours existants par le droit , ainsi que l’exécution entière de ses privilèges, consacrés dans tous les traités et chartes des rois. Art. 19. Elle les charge de se réunir aux députés des autres bailliages, pour concerter ensemble et présenter aux Etats généraux le plan de la formation et de l’organisation des Etats de Normandie, et immédiatement après la tenue des Etats généraux, les trois ordres de la province seront assemblés pour accepter, rejeter ou modi- (Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (Bailliage de Coutances.] 53 fier le plan proposé, et fixer définitivement sa constitution. Art. 20. L’assemblée enjoint à ses députés de demander que dorénavant la province députe directement aux Etats généraux, de manière que tout noble conserve son suffrage individuel pour la nomination des députés de son ordre, et de veiller à ce que, dans le plan qui sera arrêté pour la convocation des assemblées nationales, la province y ait à l’avenir une représentation et une influence proportionnée à sa population et à sa contribution. Art. 21. Elle charge expressément ses députés de demander : 1° que la régie, administration et perception de tous les impôts directs et indirects, gui se percevront dans la province, soient confiés à ses Etats provinciaux ; 2° Que la portion contributive de la province aux impôts du royaume soit fixée suivant ses facultés, et proportionnellement avec les autres provinces du royaume; 3° Que les subventions extraordinaires, affectées à l’extinction des dettes remboursables à époques fixes, ou au payement des rentes viagères, soient également partagées et réparties entre les provinces, à raison de leurs forces contributives ; les contrats royaux convertis en contrats sur les provinces, afin que chacune, dans son district, puisse satisfaire à l’acquittement de sa quote-part , de la manière qui lui paraîtra la plus convenable , et qu’elle profite seule des extinctions, à mesure qu’elles arriveront. Art. 22. Les députés proposeront aux Etats généraux de prendre en considération l’aliénation du domaine de la couronne, excepté des forêts du Roi ; dans le cas où elle serait adoptée, l’assemblée l’autorise à la consentir pour acquitter les dettes de l’Etat. Art. 23. L’assemblée enjoint formellement à ses députés de n’entrer dans aucun examen des dettes du trésor royal et de ne consentir à aucuns nouveaux impôts ou emprunts, ni la prorogation de ceux qui existent, qu’au préalable, il ne soit fait une loi fondamentale, sanctionnée par le Roi, les Etats séant, qui consolide à jamais les bases de la constitution du royaume de la province de Normandie. Art. 24. Enfin, l’assemblée déclare que, sur tous les objets qui ne sont point exprimés dans les présents .pouvoirs, elle s’en rapporte à la sagesse et au patriotisme de ses députés, et elle les charge expressément de se joindre aux autres représentants de son ordre aux Etats généraux, pour porter au Roi l’expression des sentiments d’amour et de fidélité de la noblesse française, dont la loyauté a mérité dans tous les temps la confiance *de ses rois. Le-présent cahier arrêté en vingt-quatre articles par l’assemblée de la noblesse du grand bailliage de Cotentin, dans sa séance du 27 mars 1789. INSTRUCTIONS De la noblesse du bailliage de Cotentin , données à ses députés pour les Etats généraux. Art. 1er. L’assemblée enjoint à ses députés de protester contre tout ce qui serait contraire aux articles des pouvoirs sur lesquels elle a prononcé affirmativement, mais de ne jamais se retirer qu’avec l’ordre entier de la noblesse, et de prendre toujours part aux délibérations sur tous les autres objets. Art. 2. Les députés protesteront formellement contre toute atteinte qui pourrait être portée à f la base de la constitution française, que Rassemblée a posée à l’article 3 du cahier de ses pouvoirs, et ils réclameront avec force contre les expressions de l’ordonnance du Roi sur la hiérarchie militaire, qui tendraient à diviser la noblesse en plusieurs classes. La noblesse française est une, et tout gentilhomme est appelé par sa naissance à tous les grades militaires. Les députés prendront, en conséquence, en considération les articles 14 et 15 du titre Ier et les articles 3 et 4 du titre VII de cette ordonnance. Art. 3. Ils demanderont 1» la réforme si désirée du Code civil et criminel, et qu’aux commissaires jurisconsultes déjà nommés pour y parvenir, il soit joint des membres des Etats, pris dans les trois ordres, lesquels feront la révision des lois qui n’ont point été consenties par la nation assemblée ; 2° La suppression des tribunaux d’exception, qui multiplient les actes judiciaires et les déclinatoires; 3° Celle des chambres d’attribution, stipendiées par la ferme ; 4o La suppression des lettres de surséance; 5° Celle des droits abusifs du contrôle des actes, pour lequel il sera fait un tarif clair et précis, qui sera affiché dans tous les greffes des communautés; 6° L’édit des hypothèques sera réformé de manière à opérer à peu de frais la sûreté des créances et propriétés ; 7° Que l’arrondissement des tribunaux sera perfectionné, ou leur compétence ou dernier ressort augmentés, mais fixés modérément, et le nombre des juges réglé en conséquence; 8° La suppression des priseurs vendeurs; 9° Ils demanderont un règlement sur la presta-tation de la dîme ecclésiastique, et que la confection et l’entretien des églises et presbytères soient à la charge des décimateurs, parce qu’on leur abandonnera le produit des fabriques, et il sera fait un règlement sur l’aumône, applicable à la destruction de la mendicité. Art. 4. Demander que, dans tous les crimes qui emportent peines afflictives ou infamantes, douze pairs de l’accusé se réunissent aux juges, pour prononcer le jugement; qu’il sera donné un défenseur à l’accusé, que l’information soit rendue publique, et que, dans tous les jugements, tant civils que criminels, les juges opinent à voix haute, et motivent leur opinion. Art. 5. L’assemblée autorise ses députés à proposer d’établir dans chaque communauté des campagnes un tribunal de conciliation, composé de la municipalité qu’elle croit utile de conserver dans la forme actuelle. Ces juges de paix seront chargés spécialement de prévenir et concilier toutes les discussions qui pourraient s’élever dans leur communauté. Art. 6. Les députés prendront en considération l’édit du Roi, concernant les non catholiques. Art. 7. Ils aviseront aux moyens d’améliorer et de conserver les forêts du Roi, et surtout de rechercher et prévenir les échanges ruineux surpris à Sa Majesté. Art. 8. Lés députés ne perdront jamais de vue ue les impositions sont forcées dans le bailliage e Cotentin, en compensation des privilèges du quart-bouillon dont il jouit; ils demanderont en conséquence de ne supporter que proportionnellement à leurs facultés l’impôt qui sera substitué à la gabelle, dont ils solliciteront la suppression. Art. 9. Ils demanderont que l’administration 54 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Coutances.] des haras soit confiée aux Etats particuliers de la province. Art. 10. Ils solliciteront la suppresssion du droit unique sur les cuirs, comme entièrement destructif de cette branche de commerce, celle des abus dans les droits de péage, l’abolition des corporations des arts et métiers, comme attentatoire a la liberté des citoyens et destructive à l’industrie, excepté cependant dans les villes principales. Art. 11. Il sera pourvu aux moyens d’arrêter les banqueroutes frauduleuses, qui se multiplient chaque jour. Art. 12. Ils demanderont une loi qui autorise et règle les partages des communes, devenues depuis quelque temps un objet de cupidité sans bornes et un sujet de trouble et d’inquiétude pour les habitants des paroisses dont elles dépendent. Art. 13- Les chemins vicinaux seront entretenus aux frais des communautés, et conservés dans une largeur convenable. Art. 14. L’assemblée, considérant que les lois les plus utiles pour le bonheur des citoyens sont celles qui ont pour objet de régler les mœurs, charge ses députés de s’occuper essentiellement de cet objet; ils chercheront en conséquence les moyens les plus propres à réformer l’instruction publique. Art. 15. Ils demanderont que, pour anéantir les contrats usuraires et l’abus des placements en viager, l’argent soit rendu commerçable au taux fixée par la loi. Art. 16. Le succès trop incertain des travaux de Cherbourg, qui coûtent déjà des sommes immenses, excite dans la province une inquiétude générale ; ils seront pris en considération. Art. 17. L’émission des vœux religieux sera fixée à trente ans pour les hommes, et vingt-cinq ans pour les filles. Art. 18. Les sommes énormes que la cour de Rome fait sortir de France seront prises en considération. Art. 19. Il est essentiel de trouver un mode d’impôt qui fasse porter aux capitalistes leur part contributive aux charges de l’Etat. Art. 20. La liberté de la presse sera autorisée avec les modifications nécessaires pour garantir l’ordre public et l’honneur des particuliers. Art. 21. Les députés demanderont qu’il soit fait des recherches exactes des usurpations de la noblesse, et qu’à l’avenir les vertus civiles et militaires puissent seules la procurer. Art. 22. Ils solliciteront la modération des grâces, pensions et appointements accumulés sur quelques familles puissantes, et une distribution plus générale sur tous les citoyens des récompenses destinées à être l’encouragement à la vertu et le prix des services. Art. 23. Il sera défendu à qui que ce soit d’usurper un titre quelconque, ou la marque distinctive d’un autre état que le sien. Art. 24. Ils demanderont l’amélioration du sort du soldat au moral et au physique ; qu’on ne leur inflige aucune punition militaire contraire au caractère national, et que les emplois supérieurs des corps soient rendus à l’ancienneté du service. Art. 25. L’ordonnance pour le tirage des canonniers auxiliaires de la marine sera prise en considération ; celle du classement des bateliers de rivière est encore plus funeste, puisqu’elle attaque directement le cultivateur en lui arrachant tous les moyens de se procurer des engrais de mer; l’un et l’autre sont également destructifs de l’agriculture et de la population. Art. 26. Ils réclameront contre la vénalité des charges de lieutenant des maréchaux de France, et demanderont qu’à l’avenir les charges soient données à l’un des trois sujets qui seront présentés par la noblesse du bailliage auquel elles seront attachées. Art. 27. Ils réclameront contre la violation du secret de la poste aux lettres. Art. 28. Ils demanderont la suppression de l’octroi destiné au remboursement du prêteur des fonds affectés à l’achat des offices municipaux dans les villes où ces charges n’ont point été levées, attendu que cette perception illégale sur tous les rapports est une vexation, puisque les sommes payées par les villes excèdent de beaucoup le principal et les intérêts ; et qu’à l’avenir les officiers municipaux soient nommés par les villes. Art. 29. Représenter les maux infinis qui résultent du mauvais état des prisons par l’évasion fréquente des criminels. Art. 30. Ils aviseront aux moyens de rétablir les différents propriétaires dans l’exercice des droits d’usage dans les forêts du Roi, dont ils sont privés depuis longtemps, quoiqu’ils soient obligés d’en payer les redevances au domaine. Le présent cahier arrêté en trente articles par l’assemblée de la noblesse du grand bailliage de Cotentin, dans la séance du 27 mars 1789. CAHIER Des demandes , remontrances, plaintes et doléances de l'assemblé e du tiers-état, tenue en la ville de Coutances, au mois de mars 1789 (1). Le vœu de l’assemblée est : Que les délibérations de l’assemblée des Etats généraux soient formées par les trois ordres réunis, et que les suffrages y soient comptés par tête, sans aucune prépondérance . Que le premier objet de ses délibérations soit d’assurer invariablement la constitution de l’Etat par des règles fondamentales qui concilient les libertés et franchises de la nation avec le respect dû à l’autorité du Roi, et qu’il ne puisse être voté pour l’impôt, avant que cette constitution soit réglée et assurée. Que, dan? cette constitution, la composition, l’organisation et la convocation des Etats généraux, soient fixées. Que, dans la composition des assemblées nationales, le tiers-état ait un nombre de représentants au moins égal à celui des deux autres ordres réunis, et que ses représentants soient pris dans son ordre. Que la manière de présenter le cahier et de haranguer aux Etats généraux soit uniforme pour les trois ordres. Que l’organisation des assemblées nationales soit simplifiée. Que le nombre des représentants de chaque territoire soit proportionné à sa population et à ses contributions, de manière à établir, sur cette double base, l’égalité de représentation entre les provinces en général et entre les districts en particulier. Qu’il soit pourvu aux moyens de faire jouir toute la nation de l’avantage de députer directement aux Etats généraux, à l’effet de quoi cha-ue district serait formé de manière à avoir une éputation. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.