[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 septembre 1791.] 679 latifs à la Révolution, et amnistie générale en faveur des hommes de guerre ; « L’extrait du procès-verbal de l’Assemblée nationale du 25, pour rectifier deux omissions dans la loi sur l’organisation de la garde nationale parisienne. « Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrels. c Signé : M.-L.-F. Duport. >> Paris, le 30 septembre 1791. L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les délits et les peines militaires (1). M. de Wimpfen, rapporteur, soumet à la délibération la suite des articles du titre II. Les articles 11. à 15 sont successivement adoptés. Plusieurs membres demandent la question préalable sur l'article 16, ainsi conçu : « Si, sur la réclamation d’un subordonné ou du commissaire-auditeur, un supérieur est convaincu d’avoir, par haine, vengeance ou autre passion, donné un ordre à son subordonné dans la vue de le faire périr, la peine est d’être dégradé et renvoyé du service ; et si le subordonné avait en effet péri en exécutant l’ordre de ce supérieur, la peine est d’être pendu. M. Emmery. J’appuie la question préalable, parce qu’il est impossible de croire qu’un officier envoie un soldat dans un poste exprès pour le faire périr. M. Prieur. Quand on fait des lois pénales, il faut prévoir toutes les ressources de la malice humaine; je demande qu’on décrète l’article. (L’Assemblée décrète qu’il n'y a pas lieu à délibérer sur l’article 16.) M. de Wimpfen, rapporteur , déclare alors retirer les articles 17 à 22. (L’article 23 est adopté.) M. de Broglie. Je demande, par amendement à l’article 24, que, dans le cas de menace d’un subordonné vis-à-vis de son supérieur, l’officier coupable encoure la peine d’emprisonnement pour une durée égale à celle de la peine des fers à laquelle sont soumis les sous-officiers coupables des mêmes faits. M. Goupilleau. Je demande, moi, que les soldats, sous-officiers et officiers subissent identiquement la même peine : cela me paraît absolument nécessaiie d’après les principes de l’égalité. (Applaudissements à V extrême gauche.) M. de Custine. J’appuie l’amendement de M. Goupilbau. Par la déclaration des droits, vous avez consacré l’égalité des hommes aux yeux de la loi : il faut donc que le soldat et l’officier subissent la même peine lorsqu’ils sont traduits devant les tribunaux pour un même délit. Plusieurs membres demandent la priorité pour l’amendement de M. Goupilleau. (Cette priorité est accordée.) (1) Voir ci-dessus, sôauce du 29 septembre 1791 , au soir, page 636. M. Bar siave. Je demande la question préalable sur rametulement de M. Goupilleau et, en conséquence, que l’article soit adopté avec l’amendement de M. de Broglie. C’est en connaissant mal le sens de la déclaration des droits qu’on l’a citée dans cette circonstance. Tout défit, suivant la déclaration des droits, tout délit identique doit être puni par les mêmes peines; mais par les résultats de la subordination militaire et de la différence des devoirs entre les différents grades, il n’est pas vrai de dire que les mêmes actes commis par des hommes de grade différent soient les mêmes délits. Vous avez déjà jugé la question par les articles précédents, en décidant que les mêmes fautes devenaient plus graves lorsqu’elles étaient commises par des militaires d’un grade plus élevé, attendu que plus le grade est élevé, plus le militaire doit connaître ses devoirs; plus le grade est élevé, plus la faute est nuisible à l’Etat et plus, par conséquent, le délit est grave. Conséquemment à ces principes, vous avez décrété déjà des proportions croissantes pour les mêmes fautes suivant qu’elles étaient commises par des soldats, des sous-officiers ou des officiers. Quel est ici le second motif qui doit vous déterminer? C’est qu’en appliquant toujours plus de peine à raison de l’élévation des grades, vous devez également conserver la considération et le respect qui doivent nécessairement exister à l’égard du grade... ( Exclamations à l'extrême gauche.) Cela n’est pas une ditféience de considération accordée à une classe première de citoyens, puisque, suivant. vos lois, tous les citoyens doivent parvenir également à tous les grades militaires; cela est une distinction essentielle, nécessaire, indispensable à la subordination des armées qui est le premier fondement de la liberté des peuples, comme le premier fondement de la puissance des Empires. 11 est impossible que, dans les armées où le nombre des soldats e.-t plus que double du nombre de ceux qui commandent, la subordination et l’obéissance existent, si la loi n’établit pas une différence de respect et de considération. Le lien moral est la base de l’obéissance ; par conséquent, la base de la sûreté publique, par conséquent, la base de la puissance de l’Etat. Il est donc vrai de dire que plus la peine est grave, relativement aux pertes que la faute produit, au mal individuel qu’elle fait, plus elle doit être en même temps combinée de telle manière qu’elle conserve néanmoins le respect et la considération qui sont dus aux grades. 11 est donc vrai de dire qu’un officier qui perd son état et son grade, qui par là est en même temps flétri dans l’opinion publique, et qui, indépendamment de ces deux peines, est privé de la liberté pendant 2 ou 4 ans suivant les cas, essuie une peine réellement plus sévère que le soldat qui est mis 2 ou 4 ans en prison et que cependant la considération est conservée au grade. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement de M. Gou-piileau et adopte l’article 24 avec l’amendement de M. de Broglie.) Les articles 25 à 30 sont adoptés. Un membre demande, par amendement à l’article 31 qui concerne les vols et enlèvements d’effets, la suppression de la disposition relative au vol de pain. (L’article 31 est adopté avec cet amendement.) Les articles 32 et 33 sont adoptés. 680 [Assemblée nationale], ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 septembre 1191.] Un membre propose de fixer à 8 jours, au lieu de 6, le délai accordé par l’article 34 au militaire qui aura déserté, pour se repentir. (L’article 34 est adopté avec cet amendement.) ' M. JEminery s’oppose à la première partie de l’article 35 portant que tout militaire condamné à être chassé sera préablement dépouillé de son uniforme. — Nous devons, dit-il, achever d’abolir ces préjugés barbares qui attachaient des distinctions particulières à l’uniforme de tel et tel corps et qui séparaient en quelque sorte ces corps du reste de l’Etat. Les uniformes ne sont qu’un signe de ralliement pour l’armée ; tous les uniformes, tous les costumes distinctifs des citoyens sont également honorables. On ne doit pas plus dépouiller de l’habit militaire que d’une distinction de noblesse. Je demande le retranchement de la première partie de l’article. (L’article 35 est adopté avec cet amendement.) L’article 36 et dernier est ensuite adopté. M. Emrnery, au nom du comité militaire , propose pour compléter ce décret, les quatre articles suivants : Art. 1er. « Le juré d’accusation s’assemblera toujours dans le lieu où le délit aura été commis, lorsqu’il n’y aura pas d’empêchement ; dans ce cas, il s’assemblera dans le chef -lieu de la cour martiale. « Le juré de jugement et la cour martiale s’assembleront toujours dans le chef-lieu de la cour martiale. » {Adopté.) Art. 2. « Dans le cas des articles 22 et 25 du décret du 22 septembre 1790, le nombre des jurés, soit d’accusation, soit de jugement, ne sera point augmenté en raison des coaccusés qui excéderont le nombre de 6. » {Adopté.) Art. 3. « Les membres de la gendarmerie nationale prévenus de délits, seront justiciables des tribunaux ordinaires ; mais si le tribunal ordinaire décide que le délit dont le jugement lui est déféré est purement militaire, l’accusé sera renvoyé devant la cour martiale. » {Adopté.) Art. 4. « Dans ce cas, les jurés seront pris sur un tableau particulier, formé des seuls officiers, sous-o&iciers et cavaliers de la gendarmerie nationale. » {Adopté.) M. de Wimpfen, rapporteur , fait en conséquence la relue de l'ensemble , du décret sur les délits et les peines militaires qui est mis aux voix dans les termes suivants : TITRE Ie'-. De la juridiction militaire. Art. 1er. « Les délits militaires consistent dans la violation définie par la loi du devoir mililaire, et la loi détermine les peines qui doivent y être appliquées. Art. 2. « Aucun fait ne peut être imputé à délit militaire, s’il n’est déclaré tel par la loi. Art. 3. « Nul n’est exempt de la loi commune et de la juridiction des tribunaux, sous prétexte du service militaire ; et tout délit qui n’attaque pas immédiatement le devoir ou la discipline ou la subordination militaire, est un délit commun, dont la connaissance appartient aux juges ordinaires, et pour raison duquel Je prévenu soldat, sous-officier ou officier, ne peut être traduit que devant eux. Art. 4. « Nul délit n’est militaire, s’il n'a été commis par un individu qui fait partie de l’armée. Tout autre individu ne peut jamais être traduit comme prévenu devant les juges délégués par la loi militaire. Art. 5. « Si parmi deux ou plusieurs prévenus du même délit, il y a un ou plusieurs militaires, et un ou plusieurs individus non militaires, la connaissance en appartient aux juges ordinaires. Art. 6. « Si dans le même fait il y a complication de délit commun et de délit militaire, c’est aux juges ordinaires d’en prendre connaissance. Art. 7. « Si pour raison de deux faits, la même personne est dans le même temps prévenue d’un délit commun et d’un délit militaire, la poursuite en est portée devant les juges ordinaires. Art. 8. « Lorsque les juges ordinaires connaissent en même temps, par la préférence qui leur est accordée, d’un délit commun et d’un délit militaire, ils appliqueront les peines de l’un et de l’autre si elles sont compatibles, et la plus grave si elles sont incompatibles. Art. 9. « Le condamné a le droit de demander la cassation du jugement, et le commissaire-auditeur a le même droit; mais la signification doit en être faite dans les trois jours qui suivent la lecture du jugement, dont on lui donnera copie s’il la demande; et dans le3 trois jours suivants la procédure et le jugement doivent être envoyés au greffe du tribunal de cassation, pour en prendre connaissance dans la forme et les délais prescrits à l’égard des jugements criminels en général . Art. 10. « En cas de prévarication de la part des juges, l’accusé a le droit de les prendre à partie et de les citer au tribunal de cassation. Art. 11. « Tout général en chef pourra, à la guerre, faire un règlement pour le maintien du bon ordre dans son armée, et ce règlement aura force de loi pendant la durée du commandement de ce général en chef.