[Etals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Alençon.] 729 qui viendra de l’étranger payera aux frontières, ainsi que toutes liqueurs et vins. Art. 34. Qu’il est de la plus grande nécessité de dégager l’agriculture des entraves fiscales qui en empêchent les progrès et qui dégoûtent les citoyens de l’exploitation des terres ; que toutes les gênes de même nature qui arrêtent l’essor du commerce et la prospérité des manufactures soient abolies, et qu’il soit pourvu surtout au désavantage du traité du commerce fait avec l’Angleterre et les colonies. Art. 35. Que les droits dehalage, péage de coutume, polange et autres de ce genre, tous nuisibles au commerce et à l’agriculture, soient anéantis, prohiber l’exportation des grains dans les années de stérilité et la permettre dans le cas d’abondance ; supplier Sa Majesté de permettre qu’il soit fait des magasins dans chaque canton, pour les besoins publics. Art. 36. Que, pour encourager davantage l’agriculture, il serait essentiel de rendre à chaque paroisse les communes et bruyères dont elles auraient joui pendant quarante ans et dont elles auraient été dépouillées par la force et l’injustice. Art. 37. Qu’il serait également intéressant et juste de rendre aux communautés voisines des forêts leurs droits d’usages et fortages dans inclus, et sera Sa Majesté suppliée de vouloir bien donner des ordres pour la conservation des bois de ces forêts, les faire rentrer et conserver dans ses mains. ' Chemins et corvées. Art. 38. Les députés représenteront que depuis uarante ans que l’on a commencé à s’occuper ans cette généralité des travaux des grandes routes, soit par corvées ou par substitution en argent, les propriétaires et habitants de ce bailliage payent annuellement 29,315 francs, ce qui, pour les quarante ans, donne un million cent soixante douze mille six cents livres; que, pour cette somme immense, il n’a été fait dans l’étendue de ce bailliage que huit lieues déroute, en sorte que la lieue revient à 146,575 francs, prix exliorbitant qui prouve l’abus et l’injustice faite aux habitants d’un canton ; que, d’ailleurs, les grandes routes sont trop larges et absorbent trop de terrain : que, de plus, les considérations particulières influent sur leur direction et sur la distribution des deniers, pourquoi on demandera que les fonds levés dans chaque canton y soient employés, que la largeur des routes soit réduite et que l’administration de ces objets, soit confiée aux États provinciaux et dans l’intérim à la chambre de correspondance. Qu’à l’égard des chemins particuliers dans les paroisses, Sa Majesté sera suppliée de faire distribuer des deniers de charité pour aider chaque communauté à les faire réparer. Etablissements publics. Art. 40. Les députés demanderont qu’il soit établi dans chaque paroisse ou district un bureau de charité pour pourvoir au soulagement des pauvres vieillards et gens infirmes; que Sa Majesté soit suppliée de donner de nouveaux ordres stricts pour arrêter tous les mendiants et les employer à des travaux publics, et en cas qu’ils refusent de travailler, les enfermer dans des dépôts ad hoc ou les envoyer dans les colonies. Art. 41. Que, pour parvenir à détruire l’usure trop commune et funeste à la société, le prêt au commerce d’argént soit autorisé au denier cinq pour cent, fixé par billet pur et simple, afin d’éviter par là l’oppression de l’agiotage et le placement de deniers à rentes viagères ruineux pour les familles en cette province. Suppressions et réductions des dons , croupes et pensions. Art. 42. Les députés demanderont et représenteront que les pensions étant un objet de dépenses considérables, il serait à propos que ceux qui en jouissent indûment ou à l’excès en fussent privés ou en souffrissent la réduction, et qu’enfin il y ait un ordre invariable établi pour celles qui concernent les grades militaires. Art. 43. Qu’il serait très-intéressant pour le bien public de supprimer les haras comme occasionnant des dépenses immenses, de�vendreces établissements et en employer le prix à l'acquit de la dette nationale ; permettre, au surplus, à tous B riétaires et marchands d’avoir chez soldes >ns sans pouvoir réclamer aucun privilège, sauf au gouvernement à acheter et distribuer de temps à autre des chevaux étrangers pour régénérer l’espèce. Art. 44. L.es députés demanderont à faire supprimer les privilèges des maîtres de postes agra-vants au public, sauf à les en indemniser par un prix plus considérable sur les courses. Art. 45. Que la liberté de la presse soit autorisée avec les modifications nécessaires pour garantir l’ordre public et l’honneur des particuliers. Art. 46. Que l’institution aussi utile que sage de la maréchaussée soit rappelée à son véritable principe; -qu’on réforme les abus résultant de l’incapacité des sujets ou de leur inactivité, et que pour les encourager au travail il leur soit accordé des gratifications en proportion du nombre et du genre de captures qu’ils auront faites. Art. 47. Qu’il soit remontré que les fréquents déplacements des régiments et leurs marches d’un bout du royaume à l’autre sans autre motif que la volonté a’un ministre, occasionnent des frais immenses ; que Sa Majesté soit très humblement suppliée d’empêcher cet abus aussi contraire à ses vues économiques que préjudiciable à la santé de ses soldats. Art. 48. Qu’il soit représenté que les prisons qui renferment souvent le crime et l’innocence, sont la plupart malsaines et funestes à la santé des malheureux qui les remplissent ; demander, au nom de l’humanité, qu’elles soient établies dans des endroits bien aérés, et qu’il soit pris un tempérament raisonnable pour diminuer les peines de ces infortunés. Art. 49. Qu’il soit établi dans chaque canton ou paroisse qui pourra le comporter des maîtres et maîtresses d’écoles pour l’instruction de la jeunesse. Fait et arrêté le treize mars mil sept cent quatre-vingt-neuf. La présente expédition délivrée conforme à l’original par nous, greffier au bailliage d’Exmes, ledit original signé du juge et de tous les députés présents à la lecture d’icelui, à Exmes, ce vingt et un mars mil sept cent quatre-vingt-neuf. CAHIER DES PLAINTES , DOLÉANCES ET REMONTRANCES , GRIEFS ET PÉTITIONS DONT LES DÉPVTÉS DU TIERS-ÉTAT DU BAILLIAGE DE VERNEUIL DEMANDENT LE REDRESSEMENT. Du 6 mars 1789. Arrêté sous la présidence de M. le lieutenant général dudit bailliage, le 6 mars 1789, à dix eures du matin, signé, coté et paraphé par 730 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [Bailliage d’Alençon.] première et dernière page, ne varietur , (1) : 1° Que les députés du tiers-état seront chargés de faire parvenir aux pieds du trône l’assurance de leurs nommages, de leurs très-humbles et très-respectueux remercîments au roi, d’avoir bien voulu accorder au Vœu de la nation la tenue des Etats généraux du royaume et à ceux du tiers un nombre égal de représentants à celui des deux autres ordres réunis ; 2° Qu’avant de consentir à aucun impôt, etc... il sera demandé une constitution nationale en vertu de laquelle les droits des trois ordres seront reconnus et constatés de manière que le tiers demeure absolument indépendant des deux autres , ordres, et que pour la sûreté et le maintien de cette constitution, ils doivent délibérer et arrêter que les représentants de la nation s’assembleront à des époques fixes et que dorénavant, dans toutes les assemblées des Etats généraux, les représentants du tiers ne pourront y être en moindre nombre que dans celle-ci; que les suffrages seront recueillis par tête et non par ordre. 3° Que la sdurce, la cause et la quotité de déficit soient éclaircies et que l’on prenne la connaissance la plus précise de l’état actuel des finances, des états de recettes et de dépenses, des contrats d’aliénation et d’échange des domaines de Sa Majesté ; 4° Que les* ministres demeurent responsables envers la nation comme envers le roi de leur gestion ; 5° Que l’usage des lettres de cachet et de tout autre pouvoir arbitraire relatif à la liberté individuelle des citoyens soit aboli. Qu’il soit suppléé par les Etats généraux un moyen plus juste de prévenir le déshonneur de toutes les familles; 6° Que les deux ordres privilégiés soient assujettis à supporter également avec le tiers-état, chacun en proportion de ses propriétés, toutes les charges et subsides de l’Etat, et que pour prévenir les abus, il ne soit fait qu’un seulet même -rôle; 7° Que les représentants aux Etats généraux, ni les députés qui doivent en faire le choix, ne puissent être pris dans la classe des nobles modernes ou anciens, ni dans celle des gens de finance, ni dans celle des juges de seigneurs, ni dans celle des subdélégués des intendants des provinces, ni dans celle des gens attachés à la régie des biens ou autrement des seigneurs ; 8° Que la liberté de la presse soit sollicitée avec telles mpdifications que les Etats généraux jugeront nécessaires; 9° Qu’il soit établi dans tout le royaume une uniformité de poids, de mesures, d’aunages et d’échéances pour lettres et billets d’échange; 10° Que défense soit faite à tous les maîtres de forge et autres fabricant les fers, de fouiller les terres que du consentement du propriétaire et en lui payant la mine suivant la vraie valeur; 1 1° Que le rétablissement des Etats généraux de la province et la confirmation de la charte aux Normands seront sollicités ; que la province soit érigée en pays d’Etat organisé à l’exemple du Dauphiné ; 12*? Que la suppression de la ferme générale, de l’administration des domaines, de la régie des aides et autres droits y réunis, sera très-instamment demandée et leur produit remplacé par un seul impôt représentatif des autres abolis, lequel impôt sera de nature à être perçu facilement, pour (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archivé t dé' Pèmpire. les fonds en être versés directement et à peu de frais au trésor public; 13° Que les pensions et gratifications exorbitantes et autres soient examinées pour être supprimées ou réduites selon le cas ; 14° Que la vénalité des charges soit supprimée ainsi que tous les tribunaux d’exception ; 15° Que la justice civile et criminelle soit réformée ainsi que les droits de contrôle qui ne devraient se percevoir que sur les sommes énoncées aux actes et non sur les qualités des parties; qu’ils ne soient point perçus sur les actes sous signature privée relatés devant notaire, et que, dans aucun cas, la forme ne puisse préjudicier au fond; 16° Que tous les droits de péages, pontages, otagers de banalités de moulins, de four soient supprimés ; 17° Que les corvées féodales soient également supprimées ; l8° Que les rentes seigneuriales puissent être affranchies sur le pied qui sera fixé par les Etats généraux ; 19° L’abolition de tous les droits d’aides, sous-aides et rachat de service et autres de même nature dont les causes qui y ont donné lieu n’existent plus depuis plusieurs siècles; 20° Qu’il sera mis en question s’il est plus utile et plus avantageux à l’Etat de conserver les domaines de Sa Majesté ou de les aliéner; 21° Que la suppression de toutes dîmes sera demandée, qu’elle sera remplacée par une prestation pécuniaire, et qu’en cas que les Etats généraux ne le décident point ainsi, les décimateurs seront tenus de se conformer à la déclaration du roi, du 21 mars 1778, rendue pour la province du Perche, pour la vente de leurs pailles, plus la suppression des menues et vertes dîmes, et insolites conformément aux dispositions de Parrêt du Par-. lement de Rouen, du 25 mai ,1784; 22° Que les abbayes en commende et autres bénéliciers simples en collation royale, soient supprimés à mesure qu’ils vaqueront, et que les fonds en provenant serviront à acquitter les dettes de l’Etat ; 23° Que les évêques soient tenus de résider dans leur diocèse ; que l’exemple de désintéressement donné par MM. les archevêque devienne et évêque de Chartres, soit imité et suivi ; 24° Que la suppression des droits de franc-fief sera sollicitée; 25° Que les membres du tiers que leur mérite distingue seront admis à la prélature et autres dignités, soit dans l’état civil ou militaire ; 26° Que les places de gouverneurs, commandants, etc., des provinces et villes autres que celles des villes frontières soient supprimées ; 27° Que les deniers destinés aux travaux de charité ne soient plus arbitrairement donnés et qu’ils soient versés dans chaque municipalité ; 28° Que les maisons religieuses rentées et non rentées soient rappelées à leur premier institut ; que celles qui ne sont pas pourvues d’un certain nombre de religieux, soientréunies ou supprimées, que les biens y attachés soient vendus et les fonds en provenant versés dans la caisse d’amortissement, ainsi que ce qui pourra revenir de la réduction des canonicats; 29° Qu’il soit établi des bureaux de charité assez multipliés pour remédier à la mendicité et pour l’entretien des infirmes et vieillards de chaqne district, dont les fonds seront pris sur l’ordre des maisons religieuses rentées; 3# Qu’il soikpris-. de nouvelles mesures pour [États g«?n. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {Bailliage d’Alençon.] 73] empêcher le charlatanisme de porter ses ravages dans les villes et dans les campagnes ; 31° Qu’en cas de suppression et remboursement des offices, il soit fait sur le pied de leur vraie valeur ; 32° Que dans toutes les villes du royaume, les marchands forains, colporteurs et autres ne puissent y rester que l’espace de vingt-quatre heures, vu le tort considérable qu’ils apportent aux marchands domiciliés dans les villes; 33° Que la suppression des garennes et colombiers soient demandée, ou au moins que les garennes soient entretenues bien doses suivant le règlement ; 34° Que le reculemeut des barrières aux frontières, tant désiré par la nation, soit effectué ; 35° Que les banqueroutiers frauduleux soient sévèrement recherchés et rigoureusement punis ; qu’il ne leur soit accordé aucun asile privilégié et qu’il leur soit défendu expressément de faire aucun commerce à moins qu’ils ne se soient réhabilités; que leurs biens soient vendus sur trois publications sans décret nf autre formalité au profit des créanciers; que la vérité et la légitimité des pertes, dettes et autres objets des dépenses soient certifiées par la municipalité du lieu dans lequel le failli sera domicilié ; 36° Que le sel et le tabac soient rendus à la liberté du commerce; 37° Que les entraves de toute espèce, de la perception des droits sur les boissons, les bou-, chéries et le papier, soient sévies ; 38° Que les voyageurs qui partent d’une ville avec des chevaux et des conducteurs, qu’ils ont loués, ne soient pas exposés à être arrêtés dans leur route par les préposés des fermiers généraux des carosses et messageries, dont on n’aurait pas obtenu à prix d’argent la permission ; 40° Qu’aucune personne, de quelque ordre qu’elle soit, ne soit exempte du logement des troupes de Sa Majesté, et que les domestiques des personnes des deux ordres qui se prétendent privilégiés, soient assujettis à tirer au sort de la milice, comme les domestiques des personnes du tiers-état; 41° Que le roi sera très-humblement supplié de supprimer les déports subsistants dans certains évêchés de la province de Normandie, et que la première année de jouissance du nouveau bénéfice soit employée aux réparations des presbytères, et qu’à l’avenir elles soient à la charge des curés comme dans l’origine ; 426 Que les tutelles soient faites par les conseils et sous la présidence des parents des mineurs, lesquels parents pourront également faire l’inventaire des meubles des mineurs, parce que lesdits tutelles et inventaires seront signés au moins par douze parents ou amis à défaut de parents ; 43° La suppression des charges de procureurs et huissiers priseurs ; 44° Qu’il soit permis de tuer les pigeons dans les saisons où l’on sème et où l’on récolte, et les bêtes fauves trouvées divaguant dans les grains. 45° Que tous les dégâts et les dommages occasionnés dans les récoltes étant sur pied ne puissent être jugés que par la municipalité de .chaque paroisse ; 46° Que les biens payent leurs impositions dans la paroisse de leur situation, et que l’impôt, une fois établi, soit permanent et durable sans être susceptible d’augmentation par le nouveau genre de culture ; 47° Que les règlements concernant la conservation des routes soient exécutés et qu’il soit pourvu à l’indemnité des propriétaires de fonds sur lesquels il aura été ouvert des carrières pour en extraire les pierres, et sur lesquels les adjudicataires enlèvent les cailloux avec des râteaux; 48° Que tous les pauvres dépourvus de secours soient reçus dans les hôpitaux des seigneurs comme dans les hôpitaux royaux; 49° Que les dispositions de règlement qui assujettissent les riverains des grandes routes à planter sur leur bord, soient rendues communes aux propriétaires de terrain sur les rivières ; en conséquence, que, pour prévenir l’éboulement des terres, ils soient tenues de planter sur le bord des rivières, des aulnes, saules ou peupliers ; 50° Que les officiers municipaux cessent d’être héréditaires et qu’ils soient rendus électifs à la pluralité des suffrages des citoyens, et la suppression des droits municipaux perçus sous la dénomination de droits réservés ; que les villes où les charges en titre ont été toutes levées continuent encore aujourd’hui de payer, dans le cas où lesdits officiers ne seraient pas rendus électifs; 51° Que défenses soient faites à tous seigneurs de retenir l’eau au préjudice de tous propriétaires et de leurs vassaux ; 52° Que le retrait seigneurial cesse d’avoir lieu, et qu’il ne subsiste que le retrait lignager.— Ce qui a été arrêté et signé par tous lesdits sieurs députés présents. •