SÉANCE DU 2 BRUMAIRE AN III (23 OCTOBRE 1794) - N° 27 375 s’étendoient jusqu’aux extrémités de la République; vous avez déjoué cette trame et sauvé encore une fois la Patrie. C’est en vain que l’hypocrisie s’agite, pour rendre suspects ceux qui invoquent la justice contre la tirannie, tous ceux qui regrettent l’empire de la loi aspirent au despotisme. Que la justice soit sévère envers les coupables, mais que la loi seule punisse, que son glaive ne soit plus dans la main du méchant, une arme meurtrière, un instrument de vengeance... Nous pouvons élever la voix contre les faux amis du peuple. Nous qui les avons vus sous le masque du patriotisme immoler nos pères, nos enfans, nos frères, nos amis, nous qui avons vu périr sur l’échafaud une foule d’ex-cellens citoyens de ce département, qui n’ont pas voulu transiger avec la tirannie, et qu’on n’a pu séduire ni tromper. Tels sont, vertueux représentans, les maux qui ont affligé cette contrée, dont les habitans sont résolus à périr, plutôt que de souffrir que des nouveaux tirans portent atteinte à la liberté. Bousquet, président, Deleuze, vice-président, Manoel, Delon, secrétaires. 27 Les administrateurs du district du Puy [Haute-Loire] réclament contre les calomnies répandues par la malveillance pour diffamer leurs concitoyens, et font passer un bordereau des adjudications prononcées pendant les trois décades de fructidor dernier. Mention honorable, insertion au bulletin (84). Les administrateurs du district du Puy annoncent à la Convention que des biens, estimés 8853 L, ont été vendus 403270 L (85). [Les administrateurs du district du Puy, département de la Haute-Loire, à la Convention nationale, du 18 vendémiaire an III] (86) Citoyens représentans, Le département de la Haute-Loire, la commune du Puy osoient se flater de jouir d’une réputation que leur civisme, leur amour pour notre sublime constitution, et un attachement inviolable à la République une et indivisible sembloient leur avoir acquise. Par quelle fatalité, la calomnie, ce monstre ennemi de toute vertu et de toute justice veut-elle leur ravir un bien si précieux! par quelle étrange bisarrerie, de vils délateurs ont eu l’audace de les peindre (84) P.V., XL VIII, 14. (85) Bull., 6 brum. (suppl. 2). (86) C 323, pl. 1384, p. 21. Bull., 5 brum. sous les couleurs les plus odieuses, et la témérité d’avancer que les aristocrates y dominent, que le fanatisme les dévore, que l’esprit public y est perverti, que les haines, les dissentions et les divisions y reignent, et que bientôt on y sera en insurrection. Représentans, des impostures si grossières doivent sans doute être méprisées, et de bons citoyens, de vrais sans-culottes bien loin d’en être affectés et d’y être sensibles, doivent les ensevelir dans l’oubli le plus profond, pour penser uniquement à la chose publique. Mais qu’il nous soit permis pour fermer la bouche à ces calomniateurs, et les couvrir de l’opprobre et de l’infamie qu’ils méritent à tant de titres; qu’il nous soit permis de vous rap-peller la conduite et les sentimens de nos concitoyens ? fermes et invariables dans leurs principes depuis le commencement de la révolution, notre garde nationale a donné des marques éclatantes d’une bravoure et d’un courage, qui soutenus par le civisme le plus pur, ont fait échouer les projets liberticides des mal-veillans? point de fatigues qui ayent arrêtés nos braves sansculotes, point de dangers, qui les ayent intimidés; quitter leurs foyers, s’arracher d’entre les bras de leurs épouses et de leurs enfants, mépriser la rigueur des saisons, franchir les colines, grâvir sur les montagnes, pour dissiper et exterminer les rebelles, les fanatiques, les aristocrates et les ennemis de la révolution, a été pour eux un devoir sacré, et dans toutes les occasions, où la voix de la Patrie, par l’organe des autorités constituées, les a appellés, ils sont rentrés dans nos murs et dans le sein de leurs familles couvert de lauriers, et ont eu la satisfaction d’apprendre qu’ils avoient mérité la mention honorable de la part de la Convention nationale. Il seroit inutile d’entrer dans le détail des sacrifices qu’ils ont fait généreusement pour le maintien de la liberté et de l’égalité, les papiers publics les ont annoncés, et si les montagnes de la Lozère, celles de l’Ardêche, si les forêts circonvoisines ont été purgées des brigands, auxquels elles servoient de repaire, c’est principalement aux braves citoyens de notre département qu’on le doit : et à la surveillance active des corps administratifs. Le fédéralisme lui même, ce monstre odieux, a succombé en partie sur leurs coups, et la rebelle Lyon a vu camper auprès de ses murs nos frères d’armes, nos gardes nationaux, pour y faire triompher l’unité et l’indivisibilité de la République. Représentans tels sont encore les sentimens de nos concitoyens, l’esprit public se fortifie de plus en plus, l’union et la concorde enchaine tous les coeurs, à un petit orage, causé par un mal entendu, a succédé le calme le plus parfait, les patriotes se rallient, se resserrent de plus fort. L’intrigue est surveillée, l’aristocratie abattue, on est élevé à la hauteur des circonstances, la probité et la vérité sont à l’ordre du jour dans les sociétés populaires, qui se font un plaisir d’accueillir dans leurs seins les patriotes reconnus. Sous de tels auspices, nous osons vous l’assurer, citoyens représentans, et en dépit des calomniateurs, l’égalité, la liberté, 376 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE la république une et indivisible, le gouvernement révolutionnaire jusqu’à la paix triompheront dans notre département de tous les efforts de nos ennemis, ou comme nous l’avons juré nous mourrons en les défendant. Vive la République, vive la Convention, périssent les traitres et les intrigans. Liogier, agent national et trois autres signatures. 28 Le président de la société populaire de Coutances [Manche] fait passer à la Convention nationale deux exemplaires d’une adresse que cette société fait à ses concitoyens, pour les prémunir contre la perfidie et les manoeuvres des partisans de la royauté et des aristocrates incorrigibles. Mention honorable, insertion au bulletin, renvoi au comité d’instruction publique (87). 29 La société populaire de Montbéliard félicite la Convention sur ses travaux, et annonce qu’elle vient de fournir un cavalier monté, armé et équipé (88). [La société régénérée des Amis de l’Egalité et de la Liberté de Montbéliard, département de la Haute-Saône, à la Convention nationale, du 13 vendémiaire an III] (89) Citoyens représentans, Que n’avez-vous point fait, que ne faites-vous pas pour le bonheur des français? Chaque jour voit éclore de nouveaux bienfaits. Les accens de la reconnoissance éclatent de toutes parts autour de vous, nous venons y mêler les nôtres. Vous avez abattu les factions et l’imoralité, vous avez terrassé l’athéisme et l’imposture : vous avez ranimé dans le coeur de l’homme toutes les affections pures, tous les sentiments généreux. Des astucieux conspirateurs couvrant d’un voile trompeur leurs projets liberticides étaient parvenus par des déclamations ardentes, à ébranler l’opinion publique et à fasciner les yeux de quelques homes crédules. Mais votre courage et votre union ont bientôt su déjouer leurs noirs complots. Les vertus ont enchainé l’ambition et le crime et à la voix de la patrie en danger, les enfants ainés de la liberté, les braves parisiens ont formé autour de vous un rempart impénétrable et ont poursuivi les ty-(87) P.-V., XLVIII, 14. (88) P.-V., XLVIII, 14. Bull., 7 brum. (suppl.). (89) C 325, pl. 1402, p. 16. rans jusques dans leur dernier repaire. Ils sont rentrés dans le néant ces monstres qui voulaient faire rétrograder la raison, ramener le vandalisme et nous plonger dans les ténèbres de l’ignorance et de la barbarie pour courber plus facilement nos têtes sous le joug de l’esclavage. L’instruction publique cette sauvegarde de la liberté a fixé votre attention et votre sollicitude paternelle : semblable à un fleuve majestueux et bienfaisant qui roule dans les campagnes ses eaux fécondantes et répand partout la vie et la fraicheur par des canaux ramifiés à l’infini, elle va se répandre sous vos auspices dans toutes les branches de la société, elle va éclairer les homes sur leurs droits et leurs devoirs, elle les leur fera chérir. Vous consolez le malheur, vous consolez et soulagez l’indigente vertu, vous vengez le mérite outragé par la tyrannie. Les honneurs du Panthéon vont venger l’homme de la nature et de la vérité de l’injustice de ses contemporains et faire cesser les aboïemens de l’envie et de la calomnie qui insultaient jusqu’à sa tombe. Vous rendez la vie aux arts, vous les encouragez par des récompenses. A votre voix, leurs chefs d’oeuvres qui avoient été entassés dans la poussière par la malveillance et le mauvais goût sont sortis pour enrichir ces brillantes collections qui féconderont l’imagination de nos jeunes artistes et les enflameront d’une noble émulation. Bientôt à votre voix, la toile et le marbre respireront pour consacrer par des monuments durables les actions des grands homes, le dévouement des héros, des martyrs de la liberté, et l’histoire les burinera. Citoyens représentans, la Convention nationale dont toutes les décisions portent l’empreinte de la sagesse et de la vertu sera toujours notre guide et notre fanal. Continuez à tenir d’une main ferme le gouvernail de l’Etat pour conduire promptement au port du bonheur ce vaisseau qui a été si longtems le jouet des flots des passions humaines et des orages politiques. Maintenez dans toute son intégrité le gouvernement révolutionnaire, non ce gouvernement de sang créé par un génie contre-révolutionnaire qui proscrivait l’innocence avec le crime, mais un gouvernement juste qui protège l’homme probe et punisse l’home pervers, un gouvernement actif qui ait cette centralité, cette énergie, cette célérité nécessaires au salut de l’Etat. Pendant que nos guerriers poursuivent et exterminent les esclaves épouvantés, poursuivez sans relâche, les vices et les tyrannies pour cimenter par leur destruction l’indépendance des français qui ne formeront qu’un Peuple d’heureux unis par la sainte égalité et la douce philantropie. Oui déjà, l’aurore du bonheur et de la paix commence à luire pour nous. Nous vous offrons, citoyens représentans, un cavalier que nous avons monté, armé et équipé. Il part animé d’une ardeur vraiment républicaine et brûle de marcher sur les traces de ses frères d’armes. Vive la Convention nationale, vivent tous ceux qui ne reconnoissent que la Convention pour ralliement. Berger, Friez fils aîné, secrétaire, et une vingtaine de signatures.