SÉANCE DU 2 FLORÉAL AN II (21 AVRIL 1794) - Nos 44 ET 45 127 écuries qu’ils ont habitées. Je viens, au nom de votre Comité d’aliénation et des domaines, vous proposer de purifier également la maison appelée les petites écuries du ci-devant tyran. Il existe dans cette maison située rue du faubourg Franciade, plusieurs voitures provenant de la ci-devant liste civile, entre autres celle dite du sacre. Cette voiture, monstrueux assemblage de l’or du peuple et de l’excès de la flatterie, est invendable, soit par sa forme colossale, soit par l’énorme réunion de tous les attributs de la féodalité et de la bassesse que des hommes libres doivent se hâter d’anéantir. En l’exposant en vente, la vue de cet indigne monument insulterait à la majesté du peuple en lui rappelant les triomphes impies des oppresseurs que sa justice vengeresse a frappés, et il serait possible que des aristocrates vinssent y mettre un prix excessif dans l’intention perfide de conserver quelques débris de la royauté. Il existe également dans cette maison beaucoup de traineaux qui servaient aux délassements d’une cour corrompue; il n’est pas présumable que ce genre d’exercice, introduit en France par le sang criminel d’Autriche, entre pour quelque chose dans la gymnastique de l’éducation nationale. Ces traineaux représentent des lions, des tigres, des léopards et des aigles; en général, ils sont l’effigie du caractère de ceux qui s’en servaient. Il en est un surtout dont l’aspect fait frémir la nature; il représente 2 nègres attelés à un char comme de vils animaux, et celui-là peut-être devrait être brûlé en présence des noirs qui se trouvent à Paris. Vous observerez sans doute que ces traineaux, dont le climat de la France rend l’usage bien rare, se vendraient à vil prix, et qu’il serait plus avantageux de les échanger contre quelques productions du Nord utiles à la République, et de renvoyer ainsi ces méprisables voitures dans les contrées où les glaces des hivers cachent pendant 6 mois à la terre qu’elles couvrent l’esclavage des peuples et les plaisirs des despotes (1) . Il propose un décret qui est amendé et adopté en ces termes : La Convention nationale, sur le rapport du comité d’aliénation et des domaines, décrète : Art. I. La voiture dite du Sacre sera dépecée; les matières d’or et d’argent qui en proviendront, seront envoyées à la trésorerie nationale. Tous les cuivres, portant les empreintes de la royauté, seront dédorés pour être versés dans la fonte des canons; les ornements, cuirs, soupentes et ressorts qui n’en retiendront aucun vestige, seront vendus. Art. II. Le comité d’instruction publique fera examiner les peintures des panneaux de ladite voiture, et constater si lesdits panneaux méritent d’être conservés comme monuments d’art: dans le cas contraire, lesdits panneaux seront brûlés. Art. III. Les mesures ci-dessus prescrites s’étendront également aux autres voitures de même genre qui ont servi au grand-père, aux sœurs et à la fille du dernier tyran. d) Mon., XX, 289. Art. IV. Le comité de salut public est autorisé à employer, dans les échanges avec les étrangers, les traîneaux existants à la maison ci-devant petites écuries (1) . 44 Le citoyen Bernard dépose trois décorations militaires et des brevets revêtus de signes de l’ancien régime. Ces objets lui ont été remis pendant le cours de sa mission (2) . 45 Un membre [RAMEL], au nom du comité des finances, fait un rapport sur des questions relatives au paiement de la taxe dans les emprunts forcés et volontaires; il propose un décret qui est adopté en ces termes : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur les questions, savoir : 1° si les particuliers taxés en emprunt forcé dans les communes dont les rôles n’ont été mis en recouvrement qu’après le premier mars, peuvent demander, pour les paiements effectués après cette époque, des récépissés recevables en paiement des biens nationaux vendus deux ans après la paix, conformément à l’article XXV de la loi du 3 septembre, ou une simple quittance opérant seulement leur décharge, conformément à l’article XXXIII; 2° Si ces particuliers peuvent exercer leur garantie contre les conseils-généraux des communes ou les commissaires-vérificateurs; 3° Si les porteurs d’un duplicata de récépissé de l’emprunt volontaire peuvent, après le premier mars, acquitter par sa remise jusqu’à due concurrence, leur taxe en emprunt forcé; « Considérant, sur les deux premières questions, que les citoyens ont pu connaître et acquitter par anticipation leur taxe en emprunt forcé, et que s’ils ont laissé passer le délai, ils ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes; et, sur la dernière, que l’intention de se conformer à la loi a été manifestée et remplie par le paiement de l’emprunt volontaire en temps utile; que dès lors la remise du duplicata du récépissé ne faisant qu’en contenir la preuve, elle peut être faite après le premier mars comme antérieurement; « Décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer. (1) P.V., XXXVI, 33. Minute de la main de Mon-mayou et Ch. Delacroix (C 301, pl. 1066, p. 12). Décret n° 8873. Reproduit dans Audit, pat., n° 576; Débats, n° 579, p. 16; M.U., XXXIX, 39; Ann. patr., n° 476; C. Univ., 3 flor.; J. Matin, n° 612; J. Mont., n° 160; J. Paris, n° 677 ; J. Lois, n° 571; C. Eg., n° 612, p. 170; J. Perlet, n° 577; Ann. Rép. Fr., n° 144; Batave, n° 431; Feuille Rép., n° 293; Rép., n° 123; Mess. Soir, n° 612. (2) P.V., XXXVI, 24 et 226. SÉANCE DU 2 FLORÉAL AN II (21 AVRIL 1794) - Nos 44 ET 45 127 écuries qu’ils ont habitées. Je viens, au nom de votre Comité d’aliénation et des domaines, vous proposer de purifier également la maison appelée les petites écuries du ci-devant tyran. Il existe dans cette maison située rue du faubourg Franciade, plusieurs voitures provenant de la ci-devant liste civile, entre autres celle dite du sacre. Cette voiture, monstrueux assemblage de l’or du peuple et de l’excès de la flatterie, est invendable, soit par sa forme colossale, soit par l’énorme réunion de tous les attributs de la féodalité et de la bassesse que des hommes libres doivent se hâter d’anéantir. En l’exposant en vente, la vue de cet indigne monument insulterait à la majesté du peuple en lui rappelant les triomphes impies des oppresseurs que sa justice vengeresse a frappés, et il serait possible que des aristocrates vinssent y mettre un prix excessif dans l’intention perfide de conserver quelques débris de la royauté. Il existe également dans cette maison beaucoup de traineaux qui servaient aux délassements d’une cour corrompue; il n’est pas présumable que ce genre d’exercice, introduit en France par le sang criminel d’Autriche, entre pour quelque chose dans la gymnastique de l’éducation nationale. Ces traineaux représentent des lions, des tigres, des léopards et des aigles; en général, ils sont l’effigie du caractère de ceux qui s’en servaient. Il en est un surtout dont l’aspect fait frémir la nature; il représente 2 nègres attelés à un char comme de vils animaux, et celui-là peut-être devrait être brûlé en présence des noirs qui se trouvent à Paris. Vous observerez sans doute que ces traineaux, dont le climat de la France rend l’usage bien rare, se vendraient à vil prix, et qu’il serait plus avantageux de les échanger contre quelques productions du Nord utiles à la République, et de renvoyer ainsi ces méprisables voitures dans les contrées où les glaces des hivers cachent pendant 6 mois à la terre qu’elles couvrent l’esclavage des peuples et les plaisirs des despotes (1) . Il propose un décret qui est amendé et adopté en ces termes : La Convention nationale, sur le rapport du comité d’aliénation et des domaines, décrète : Art. I. La voiture dite du Sacre sera dépecée; les matières d’or et d’argent qui en proviendront, seront envoyées à la trésorerie nationale. Tous les cuivres, portant les empreintes de la royauté, seront dédorés pour être versés dans la fonte des canons; les ornements, cuirs, soupentes et ressorts qui n’en retiendront aucun vestige, seront vendus. Art. II. Le comité d’instruction publique fera examiner les peintures des panneaux de ladite voiture, et constater si lesdits panneaux méritent d’être conservés comme monuments d’art: dans le cas contraire, lesdits panneaux seront brûlés. Art. III. Les mesures ci-dessus prescrites s’étendront également aux autres voitures de même genre qui ont servi au grand-père, aux sœurs et à la fille du dernier tyran. d) Mon., XX, 289. Art. IV. Le comité de salut public est autorisé à employer, dans les échanges avec les étrangers, les traîneaux existants à la maison ci-devant petites écuries (1) . 44 Le citoyen Bernard dépose trois décorations militaires et des brevets revêtus de signes de l’ancien régime. Ces objets lui ont été remis pendant le cours de sa mission (2) . 45 Un membre [RAMEL], au nom du comité des finances, fait un rapport sur des questions relatives au paiement de la taxe dans les emprunts forcés et volontaires; il propose un décret qui est adopté en ces termes : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur les questions, savoir : 1° si les particuliers taxés en emprunt forcé dans les communes dont les rôles n’ont été mis en recouvrement qu’après le premier mars, peuvent demander, pour les paiements effectués après cette époque, des récépissés recevables en paiement des biens nationaux vendus deux ans après la paix, conformément à l’article XXV de la loi du 3 septembre, ou une simple quittance opérant seulement leur décharge, conformément à l’article XXXIII; 2° Si ces particuliers peuvent exercer leur garantie contre les conseils-généraux des communes ou les commissaires-vérificateurs; 3° Si les porteurs d’un duplicata de récépissé de l’emprunt volontaire peuvent, après le premier mars, acquitter par sa remise jusqu’à due concurrence, leur taxe en emprunt forcé; « Considérant, sur les deux premières questions, que les citoyens ont pu connaître et acquitter par anticipation leur taxe en emprunt forcé, et que s’ils ont laissé passer le délai, ils ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes; et, sur la dernière, que l’intention de se conformer à la loi a été manifestée et remplie par le paiement de l’emprunt volontaire en temps utile; que dès lors la remise du duplicata du récépissé ne faisant qu’en contenir la preuve, elle peut être faite après le premier mars comme antérieurement; « Décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer. (1) P.V., XXXVI, 33. Minute de la main de Mon-mayou et Ch. Delacroix (C 301, pl. 1066, p. 12). Décret n° 8873. Reproduit dans Audit, pat., n° 576; Débats, n° 579, p. 16; M.U., XXXIX, 39; Ann. patr., n° 476; C. Univ., 3 flor.; J. Matin, n° 612; J. Mont., n° 160; J. Paris, n° 677 ; J. Lois, n° 571; C. Eg., n° 612, p. 170; J. Perlet, n° 577; Ann. Rép. Fr., n° 144; Batave, n° 431; Feuille Rép., n° 293; Rép., n° 123; Mess. Soir, n° 612. (2) P.V., XXXVI, 24 et 226.