1 Convention nationale] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! J dé’embrn t793 297 Un membre du comité de Salut public [Ba-kère (1)] fait part à l’Assemblée de la conti¬ nuation de nos victoires, soit à Toulon, soit contre les brigands de la Vendée (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Barère, au nom, du comité de Salut publie. Je viens vous communiquer de nouveaux détails sur 1a, prise de Toulon ; ils nous ont été envoyés par le général en chef Dugommier. Copie de la lettre adressée au ministre de la guerre par le général en chef de l’armée d’Italie. « Du quartier général d’OUioules. le 29 fri¬ maire. l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. « Citoyen ministre, « Toulon est rendu à la �République et le succès de nos armes est complet. Le promontoire de l’Eguillette devant décider le sort de la ville infâme, comme je te l’avais mandé, les vaisseaux n’ont jamais attendu les bombes et une position (sic) d’où ils peuvent les craindre devait nous assurer de leur retraite. Le 26 fri¬ maire, tous les moyens furent réunis pour la conquête de cette position; le temps nous contraria et nous persécuta jusqu’à près d’une heure du matin; mais rien ne peut éteindre l’ardeur d’un homme libre qui combat des tyrans; ainsi malgré tous les obstacles du temps, nos frères s’élancent dans le chemin de la gloire aussitôt l’ordre donné. Les représentants du peuple Bobespierre, Saliceti, Kicord et Fréron étaient avec nous, ils donnaient à nos frères l’exemple du dévouement le plus signalé. Cet ensemble fraternel et héroïque était bien fait pour mériter la victoire, aussi ne tarda-t-elle point à se déclarer pour nous, et nous livra bien¬ tôt, par un prodige à citer dans l’histoire, la redoute anglaise, défendue par une double enceinte, un camp retranché, des buissons composés des chevaux de frise, des abattis, des puits, 13 pièces de canon du calibre de 36, 24, etc., 5 mortiers et 2,000 hommes de troupes choisies. Elle était soutenue en outre par les feux croisés de trois autres redoutes qui renfermaient 3,000 hommes. L’impétuosité des républicains et l’enlèvement subit de cette ter¬ rible redoute qui paraissait, à ces hauteurs, un volcan inaccessible, épouvantèrent tellement l’ennemi, qu’il nous abandonna bientôt le reste du promontoire et répandit dans Toulon une terreur panique qui acquit son dernier degré lorsqu’on apprit que les escadres avaient résolu d’évacuer les rades. Je fis continuer dans la (1) D’après les divers journaux de l’époque. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 99. (3) Moniteur universel [n° 96 du 6 nivôse an II (jeudi 26 décembre 1793), p. 388, col. 1 et n° 97 du 7 nivôse an II (vendredi 27 décembre 1793), p. 389, col. 3]. Nous avons eu soin de collationner le texte de la lettre de Dugommier sur l’original qui existe aux Archives du ministère de la guerre ( Armée devant Toulon). La lettre de Dugommier a d’ailleurs été relue à la séance du lendemain 6 nivôse. Vov. ci-après p. 328. même journée les attaques de Malbosquet et autres postes, alors Toulon perdit tout espoir, et les redoutes rouges, celle des Pommets, du Farron et plusieurs autres furent abandonnées dans la nuit suivante. Enfin Toulon fut aussi évacué à son tour, mais l’ennemi, en se retirant, eut l’adresse de couvrir sa fuite et nous ne pûmes le poursuivre. Il était garanti par les remparts de la ville dont les portes, fermées avec le plus grand soin, rendaient impossible le moindre avis. Le feu qui parut à la tête du port fut le seul indice de son départ; nous nous approchâmes aussitôt de Toulon et ce ne fut qu’après minuit que nous fûmes assurés qu’il était abandonné par ses vils habitants et l’infâme coalition qui prétendait faiblement (sic) nous soumettre à son révoltant régime. 1 « La précipitation avec laquelle l’évacuation générale a été faite nous a sauvé presque toutes nos propriétés; la plus grande partie des vais¬ seaux a été préservée des flammes; l’arsenal, le magasin, la corderie, les provisions de toute espèce, le trésor de l’ennemi enfin, à la réserve de quelques vaisseaux enlevés et brûlés. Toulon nous rend par la force tout ce que la trahison nous avait ravi. Je vous enverrai incessamment l’état que je fais dresser de tous les objets qui méritent attention. « Tandis que la division de l’Ouest dé notre armée préparait ce grand événement, celle de l’Est, commandée par le général Lapoype s’était portée, avec le citoyen Barras, représentant du peuple, sur la montagne de Pharaon (sic) et avait enlevé sa première redoute; toutes les autres, ainsi que le fort Pharaon, furent évacués par l’ennemi comme celles de l’Ouest. « Nous avons perdu 75 à 80 de nos frères, et le nombre des blessés est d’environ 250; il n’est guère possible de connaître la perte de l’ennemi que par leurs blessés arrivés dans une ambu¬ lance, mais on peut assurer qu’en y ajoutant les morts et les prisonniers, nous lui avons enlevé dans cette journée plus de 1,200 com¬ battants. « Ainsi se termine, citoyen ministre, la contre-révolution du Midi; nous le devons aux braves républicains formant cette armée qui, tout entière, a bien mérité de la patrie, et dont quelques individus doivent être distingués par la reconnaissance nationale. « Je vous en envoie la liste et vous prie de bien accueillir mes demandes; elle vous fera connaître tous ceux qui ont été les plus vail¬ lants dans l’action, et j’attends avec confiance l’avancement que je sollicite pour eux. « Salut et fraternité, « Dugommier. » La lecture de cette lettre a été interrompue par les plus vifs applaudissements et les cris plusieurs fois répétés de vive la République ! Barère. Les nouvelles de l’armée de la Mo¬ selle vous ont été lues. Voici celles que le comité a reçues d’Angers (1). Les représentants du peuple écrivent du 3 nivôse : (1) Il s’agit d’une lettre de Francastel dont nous reproduisons l’extrait donné par le Moniteur [n° 97 du 7 nivôse an II (vendredi 27 décembre 1793), p. 289, col. 3]. D’autre part M. Aulard, dans son Recueil des 298 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. " « Les brigands n’ont pu passer an delà •d’Arlon (sic ). Ils font des tentatives pour retour¬ ner dans leurs anciens repaires; mais ils vont se trouver entre deux feux. La colonne du Nord marche contre eux; le général en chef est à leur tête. Ceux des brigands qui étaient dans Noir-moutier ont dû être attaqués hier par mer et par terre. » H [Barère (1)] propose ensuite divers décrets, qui sont adoptés ainsi qu’il suit : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport du comité de Salut public, nomme les citoyens Chaube, Bernard Dumont et Granville membres de la Commission de l’envoi des lois, en conformité du décret du gouverne¬ ment révolutionnaire du 14 frimaire (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Barère. Le décret sur le gouvernement révo¬ lutionnaire provisoire porte qu’il sera nommé •quatre commissaires pour rédiger le Bulletin de renvoi des lois. Voici les citoyens que le comité de Salut public vous propose : Actes ei la correspondance du comité de Salut public (t. 9, p. 611), donne de la lettre de Francastel un extrait plus étendu que nous reproduirons ci-des¬ sous : « Angers, 3 nivôse an II (23 décembre 1793). « Francastel expose que les brigands n’ayant pu passer à Redon, longent la Vilaine et semblent vou¬ loir reprendre leur ancienne route. La marche actuelle de l’ancien corps d’armée et des troupes du Nord tend à mettre entre deux feux ce dernier rassemblement de brigands. Ceux de l’intérieur de la Vendée remuent toujours et prennent quelque accroissement du côté de Châtillon et de Bressuire, mais on a renforcé tous les postes et envoyé quelques officiers intelligents et connaissant bien le pays. Noirmoutier a dû êtres attaqué hier par mer et par terre ; on ne doute pas du succès. Il recommande surtout l’envoi de souliers; plus de la moitié de l’armée se bat sans souliers. Il invite aussi le comité à porter toute son attention sur la navigation de la Loire, de Tours à Saumur. C’est par cette voie que parviennent les subsistances de l’armée de l’Ouest. Il ne peut différer sans danger de modifier ou retirer son arrêté sur ce point. Étant attaqué d’une sorte de fièvre lente, Francastel pense que l’intérêt public veut qu’il soit remplacé. Il invite le comité à s’en •occuper. » (Archives nationales, Dm, n° 347 : _4na-iijse.) (1) D’après les divers journaux de l’époque. (2) Procès-verbaux de la Convention, t, 28, p. 99. (3) Moniteur universel Fn° 97 du 7 nivôse an II (vendredi 27 décembre 1793) p. 389, col. 3). D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (nivôse an II, n° 463, p. 76) et le Mercure universel (6 nivôse an II (jeudi 26 décembre 1793), p. 95, col. 1) rendent compte de la motion de Barère dans les termes sui¬ vants : 1. Compte rendu du Journal des Débals el des Décrets. Barère. Vous avez décrété que le Bulletin des Lois serait envoyé par 4 commissaires. Le comité devait les choisir; je viens vous; les proposer. Le comité ne s’est déterminé qu’ après un examen sévère. Les commissaires qu’il a choisis sont Chaube, Chaube, secrétaire du district de Montpellier î Bernard, procureur général syndic du ...... ; Du* moût, chef des bureaux du ministre de la justice» et Grandville, rédacteur du Moniteur. Le comité a cru devoir donner cette marque de confiance à celui qui s’est le plus distingué parmi les rédacteurs des journaux patriotiques. Bourdon (de l’Oise). Je demande qu’on nous dise depuis quand Grandville est dans l’entre-Bernard, Dumont et Grandville. Ce dernier est rédacteur en chef du Moniteur. C’est ainsi que l’on récompense celui qui, de tous les journalistes, s’est montré le meilleur rédacteur. Bourdon (de l'Oise) demande depuis quand Grandville est dans l’entreprise du Moniteur, parce qu’il a observé qu’il avait eu, durant l’Assemblée législative et dans les premiers temps de la Conven¬ tion, une mauvaise direction. Robespierre. Je ne parle point pour appuyer la nomination, mais pour relever un fait qui concerne l’honneur de Grandville. Ce fait est que, lorsque, sous la direction de Rabaud, le Moniteur était non seulement un papier mensonger, mais encore faus¬ saire, Grandville dénonça lui-même Rabaud. Dès qu’il a eu plus d’influence sur la rédaction, le journal est devenu plus exact et a fini par devenir bon. Le choix fait par le comité de Salut public est approuvé. (Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-des¬ sous d'après le procès-verbal.) On fait de nouvelles réclamations sur la nomina¬ tion de Grandville. Cambon demande que le comité d’instruction publique soit chargé de présenter un plan pour la rédaction d’un journal qui retracerait fidèlement tout ce qui se passe dans le sein de la Convention. Barère. Chacun est pénétré de l’idée que vient d’énoncer Cambon. Nous délibérions encore ce matin, au comité de Salut public, sur la forme à donner à un journal national qui serait fidèle et rédigé par des patriotes éclairés. Cela est d’autant plus important que, tous les jours, les opinions que nous énonçons ici sont transmises par des canaux corrompus aux citoyens des départements. Sons deux jours, on vous présentera un projet de décret à cet égard. II. Compte rendu du Mercure universel. Barère présente la liste des commissaires pour l’envoi des lois révolutionnaires, desquels est le citoyen Grandville, rédacteur du Moniteur. « C’est une récompense, dit-il, que la nation lui doit pour avoir le mieux rédigé un journal. » Un membre fait observer que le Moniteur n’a pas toujours été dans les principes de la Montagne. Il demande depuis quel temps le citoyen Grandville est rédaeteur du Moniteur, « car, ajoute-t-il, ce jour¬ nal était brissotin sous l’Assemblée législative, et même depuis ce temps. ■> Robespierre rappelle qu’alors c’était Rabaud-Saint-Étienne qui rédigeait le Moniteur. Barère. C’est Grandville qui nous a dénoncé Rabau -Saint-Étienne. L’Assemblée adopte la liste des commissaires. Cambon propose qu’il soit institué un journal national qui apprenne à la France et à l’Europe tout ce qui se dit et se passe à la Convention, et qui soit rédigé dans les principes qui doivent diriger l’opi¬ nion publique. Barère réplique que le comité de Saint publié, attentif à tout ce qui peut intéresser le patriotisme, est occupé d’un plan de journal vraiment national qu’il présentera sous deux jours.